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CA AMIENS (ch. écon.), 9 janvier 2024

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (ch. écon.), 9 janvier 2024
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), ch. econom
Demande : 21/05127
Date : 9/01/2024
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 25/10/2021
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10664

CA AMIENS (ch. écon.), 9 janvier 2024 : RG n° 21/05127

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « M et Mme X. qui se prétendent profanes ne donnent aucune explication sur leur situation professionnelle au jour de l'acceptation de l'offre et il ressort des termes de cette dernière qu'une simple lecture permettait d'avoir connaissance que les intérêts seraient calculés sur 360 jours et non 365 jours, de sorte que l'erreur était décelable aisément et qu'ils pouvaient s'interroger ou interroger la SA Banque populaire du Nord voir un professionnel extérieur sur cette disposition et son incidence sur le coût du crédit voir engager une action à compter de leur acceptation et dans le délai de 5 ans de cette dernière.

L'analyse financière dont ils se prévalent pour faire reporter le point de départ du délai pour agir n'était pas utile à la prise de connaissance de cette disposition de sorte que le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite la demande tendant à engager la responsabilité contractuelle de la banque pour manquement à son devoir d'information et de loyauté. »

2/ « Il est admis que la demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation n'est pas soumise à la prescription quinquennale. Cette règle est la conséquence de l'application par la CJCE du principe d'effectivité, cette dernière considérant que soumettre une telle demande à une règle de prescription est contraire aux articles 6 paragraphe 1 et 7 de la directive 93/13 du 5 avril 1993 sur les clauses abusives.

Dans ces conditions c'est par de justes motifs que les premiers juges, faisant application de la règle sus-mentionnée ont déclaré recevable la demande de M et Mme X. tendant à ce qu'une clause litigieuse qu'ils qualifient d'abusive soit réputée non écrite. »

3/ « Les époux X. affirment que le recours à la clause lombarde procure au prêteur un avantage indû sans en faire la démonstration alors qu'une telle clause n'est abusive qu'en considération de ses effets sur le coût du crédit si elle entraine un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Ils ne démontrent pas plus que ladite clause figure sur la liste des clauses présumées abusives mentionnées à l'article L. 534-1 du code de la consommation.

Ils ne remettent pas plus en cause la démonstration mathématique faite par le juge de l'exécution et aboutissant à sa conclusion aux termes de laquelle il n'est pas établi que la différence de méthode de calcul aurait renchéri le coût total du crédit et modifié le TEG déclaré dans l'offre.

M et Mme X. qui se contentent d'une pétition de principe sans faire la démonstration que l'application de cette clause a généré un indû et partant un préjudice, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à déclarer non écrite la clause ainsi rédigée : « il est stipulé que les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû, au taux fixé aux conditions particulières sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre 280 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours ».

M et Mme X. sont également déboutés de leurs demandes subséquentes tirées du constat du caractère réputé non écrit de la clause. »

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRÊT DU 9 JANVIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/05127. N° Portalis DBV4-V-B7F-IIED. JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS EN DATE DU 29 JUIN 2021.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS :

Monsieur X.

[Adresse 1], [Localité 3]

Madame Y. épouse X.

[Adresse 1], [Localité 3]

Représentés par Maître Marc DECRAMER, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 99

 

ET :

INTIMÉE :

SA BANQUE POPULAIRE DU NORD

agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 4], [Localité 2], Représentée par Maître Olympe TURPIN substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101, Ayant pour avocat plaidant, Maître Philippe VYNCKIER, avocat au barreau de LILLE

 

DÉBATS : A l'audience publique du 24 octobre 2023 devant Mme Françoise LEROY-RICHARD, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 9 janvier 2024.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Françoise LEROY-RICHARD en a rendu compte à la Cour composée de : Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre, Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère, et Mme Valérie DUBAELE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCÉ : Le 9 janvier 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

Suivant offre préalable émise le 19 octobre 2011, réceptionnée le 3 novembre 2011 et acceptée le 18 novembre 2011, la SA Banque populaire du Nord a consenti sous forme authentique, à M. X. et Mme Y. épouse X., un prêt immobilier dénommé « logifix » d'un montant de 85.040 € remboursable en 168 mensualités au taux nominal fixe de 4,15 % l'an et au taux effectif global de 5,55 %, destiné à financer l'acquisition d'un bien immobilier à rénover comprenant différents bâtiments situés à [Localité 3] (80) [Adresse 5].

Considérant que les intérêts conventionnels avaient été calculés de façon erronée par la banque, M. et Mme X. ont mis en demeure cette dernière par courrier recommandé du 26 juin 2018, de renégocier leur contrat de prêt au taux légal de 0,38 % et de leur restituer les intérêts en trop-perçu, puis l'ont assignée par acte du 1er avril 2019 devant le tribunal de grande instance d'Amiens devenu le tribunal judiciaire afin de voir prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts et être indemnisés d'un préjudice.

Par jugement contradictoire du 29 juin 2021 le tribunal judiciaire d'Amiens a sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- déclaré M. et Mme X. irrecevables en leur demande d'annulation de la stipulation des intérêts au taux conventionnel et de la stipulation du taux annuel effectif global, en leur demande de substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel et en leur demande de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle au titre du prêt logifix ;

- déclaré M. et Mme X. recevables en leur demande tendant à voir réputées non écrites les clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et du taux annuel effectif global au titre du prêt logifix ;

- débouté M. et Mme X. de leurs demandes tendant à voir réputées non écrites les clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et du taux annuel effectif global au titre du prêt logifix ;

 -débouté M. et Mme X. de leur demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral ;

- débouté la SA Banque populaire du Nord de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts ;

- débouté M. et Mme X. de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

 -condamné in solidum M. et Mme X. à payer à la SA Banque populaire du Nord la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Par déclaration en date du 25 octobre 2021 M. et Mme X. ont interjeté appel de ce jugement.

[*]

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 12 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, M. et Mme X. demandent à la cour d'infirmer le jugement et de :

- juger recevables leurs demandes tendant à voir retenir que la stipulation des intérêts du prêt conclu le 18 novembre 2011 avec la SA Banque populaire du Nord est nulle et réputée non écrite.

Subsidiairement ils demandent de :

- dire que la clause est abusive ;

- constater que le taux légal de 0,38 % doit être substitué au taux d'intérêt contractuel ;

- condamner la SA Banque populaire du Nord à remettre un nouveau tableau d'amortissement sur la base de ce taux dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt et que passé ce délai la remise du tableau serait assortie d'une astreinte de 100 € par semaine ;

- condamner la SA Banque populaire du Nord à leur restituer les intérêts conventionnels perçus à hauteur de 25 557,42 € au jour de l'assignation à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la SA Banque populaire du Nord à leur payer la somme de 10.000 € de dommages-intérêts ;

- débouter la SA Banque populaire du Nord de son appel incident et de ses demandes reconventionnelles ;

- condamner la SA Banque populaire du Nord à leur payer la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

Par conclusions remises par voie électronique le 25 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la SA Banque populaire du Nord demande à la cour de débouter purement et simplement M. et Mme X. de l'ensemble de leurs demandes et de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a déclaré recevables les époux X. en leurs demandes tendant à voir déclarer non écrites les clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et le taux annuel effectif global ;

le réformer de ce chef :

- déclarer en raison de l'autorité de la chose jugée, M. et Mme X. irrecevables en leur demande d'annulation de la stipulation des intérêts au taux conventionnel et de la stipulation du taux annuel effectif global, en leur demande de substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel et en leur demande de dommages et intérêts présentés sur le fondement de la responsabilité contractuelle formée à l'encontre de la SA Banque populaire du Nord au titre du prêt immobilier logifix ;

- déclarer comme prescrites les actions diligentées par M. et Mme X. à l'encontre de la SA Banque populaire du Nord ;

- déclarer par conséquent irrecevable la demande de M. et Mme X. tendant à voir réputées non écrites les clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et du taux effectif global formé à l'encontre de la SA Banque populaire du Nord au titre du prêt Logifix ;

Subsidiairement :

- confirmer le jugement en ce qu'il déboute M. et Mme X. de leur demande tendant à voir réputées non écrites des clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et du taux effectif global formée à l'encontre de la SA Banque populaire du Nord au titre du prêt Logifix ;

-condamner M. et Mme X. aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel et les condamner au paiement d'une somme de 4.000 € de dommages-intérêts pour procédure d'appel abusive et vexatoire et 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Pour déclarer irrecevables M. et Mme X. de leurs demandes d'annulation de la stipulation des intérêts au taux conventionnel et de la stipulation du taux annuel effectif global, de leur demande de substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel dirigées à l'encontre de la SA Banque populaire du Nord le tribunal judiciaire a considéré que ces demandes avaient déjà été tranchées par le juge de l'exécution par décision ayant autorité de la chose jugée telle que prévue par l'article 1355 du code civil.

 

La SA Banque populaire du Nord demande la confirmation du jugement ayant fait droit à cette fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, opposée à M. et Mme X. Elle rappelle que M. et Mme X. ont été défaillants dans le remboursement du prêt litigieux, qu'elle a été amenée à engager une procédure de saisie immobilière, que dans ce cadre le juge de l'exécution exclusivement compétent pour connaître des difficultés relatives au titre exécutoire a statué par décision définitive sur l'exception de nullité de la clause de stipulation du mode de calcul des intérêts conventionnels, sur la demande de substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels, sur le calcul du taux annuel effectif global et qu'il a notamment prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts conventionnels pour les intérêts de retard avant et après déchéance du terme et rappelé que la sanction dans ce cas consiste non pas en l'annulation de la clause mais en la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge.

Elle précise que lorsque le juge de l'exécution statue dans ce cadre il le fait comme juge du principal en application de l'article R.121-14 du code des procédures civiles d'exécution.

M. et Mme X. prétendent à l'infirmation du jugement ayant fait droit à cette fin de non-recevoir.

Ils soutiennent que le juge de l'exécution n'a pas statué au fond mais sur un incident de procédure de sorte que le jugement qu'il a rendu n'a pas autorité de la chose jugée au sens de l'article 1355 du Code civil.

 

Aux termes de l'article 1355 du Code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elle et contres et contre elles en la même qualité.

En application de l'article R.121-4 du code des procédures civiles d'exécution, sauf dispositions contraires, le juge de l'exécution statue comme juge du principal.

En l'espèce il ressort des actes de procédure qu'alors que la SA Banque populaire du Nord mettait en œuvre la procédure de saisie immobilière sur la base du prêt authentique qu'elle a consenti à M. et Mme X., le juge de l'exécution a été amené à trancher différentes exceptions opposées par les emprunteurs afin notamment de fixer la créance de la banque.

En effet par jugement du 19 janvier 2017 le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Amiens statuant comme juge du principal, a :

- débouté M. et Mme X. de leur exception de nullité de la clause de stipulation du mode de calcul des intérêts conventionnels, de leur demande de substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels, de leur exception de nullité du commandement aux fins de saisie immobilière et du surplus de leur contestation ;

- prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts conventionnels pour les intérêts de retard avant et après la déchéance du terme.

L'appel de ce jugement a été déclaré irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 juin 2017.

Par assignation en date du 1er avril 2019 M. et Mme X. ont attrait la SA Banque populaire du Nord devant le tribunal de grande instance d'Amiens devenu le tribunal judiciaire aux fins de voir déclarer nulle la stipulation du taux d'intérêt conventionnel et la stipulation du taux effectif global figurant dans le contrat de prêt litigieux et de voir substituer le taux d'intérêt légal à l'intérêt conventionnel.

De ce qui précède il ressort que la comparaison des demandes présentées par M. et Mme X. à l'égard de la SA Banque populaire du Nord, dans leur assignation du 1er avril 2019 objet de la présente instance, avec celles opposées à cette dernière dans le cas de la procédure de saisie immobilière, sont identiques, et ont été tranchées par le juge de l'exécution le 19 janvier 2019 dans une décision à ce jour définitive.

En conséquence c'est à juste titre que faisant application des dispositions combinées de l'article 1355 du code civil (qui définit les cas dans lesquels il y a lieu à autorité de la chose jugée), des dispositions du code des procédures civiles d'exécution relatives aux conditions dans lesquelles le juge de l'exécution se prononce dans les procédures de saisie immobilière et de la jurisprudence aux termes de laquelle lorsque la créance d'une banque a été fixée de manière irrévocable à l'occasion d'une procédure de saisie immobilière, la demande de l'emprunteur tendant à contester la validité de la clause d'intérêts se heurtent à l'autorité de la chose jugée attachée au jugement d'orientation rendue par le juge de l'exécution, que le tribunal judiciaire d'Amiens a déclaré M. et Mme X. irrecevables en leurs demandes d'annulation de la stipulation des intérêts au taux conventionnel et de la stipulation du taux annuel effectif global et de substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel.

Pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande de dommages et intérêts présentée sur le fondement de la responsabilité contractuelle par M et Mme X. pour manquement de la banque à son devoir d'information et de loyauté pour avoir calculé les intérêts au taux conventionnel selon le mécanisme de l'année lombarde, le tribunal, rappelant que le litige est soumis à la règle de la prescription quinquennale, a considéré que le point de départ du délai pour agir devait se situer à la date de l'acceptation de l'offre de prêt litigieuse du 18 novembre 2011 dans la mesure où au paragraphe intitulé « les conditions financières » le mode de calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours était clairement expliqué, de sorte qu'au jour de la délivrance de leur assignation le 1er avril 2019, ils n'étaient plus recevables à agir.

Les époux X., considèrent que le point de départ du délai pour agir doit être fixé à la date du 10 mars 2016, jour de la réception par eux d'une analyse financière leur permettant de comprendre que la banque a calculé le taux effectif global assortissant le prêt en faisant l'usage de l'année lombarde, de sorte qu'en assignant le 1er avril 2019 ils étaient recevables à engager la responsabilité contractuelle de la banque. Ils ajoutent que particulièrement ignorants ils n'ont pas pu déceler par une simple lecture de l'offre cette anomalie.

La SA Banque populaire du Nord prétend à la confirmation du jugement ayant déclaré irrecevable la demande tendant à engager sa responsabilité contractuelle à défaut pour M. et Mme X. d'avoir agi dans le délai de cinq ans de l'acceptation de l'offre dont la teneur permettait à un lecteur même profane de déceler aisément que les intérêts seraient calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours.

Elle souligne la récurrence des motivations des Cours d'appel sur la question du point de départ du délai pour agir en présence d'une offre contenant des modalités de calcul des intérêts, claires, lisibles et compréhensibles par un profane.

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il est admis que pour fixer au jour de la convention le point de départ du délai pour agir, il convient d'évaluer si l'emprunteur non-professionnel, pouvait être en mesure de déceler l'erreur à cette date.

En outre le point de départ du délai de prescription ne peut résulter de la seule volonté des emprunteurs de faire vérifier leur offre de prêt par un analyste financier sous peine de rendre imprescriptible ce type d'action.

Le point de départ du délai de prescription est donc susceptible de varier selon les éléments sur lesquels porte l'erreur et notamment selon qu'ils étaient facilement contrôlables par tout profane ou qu'ils impliquaient un calcul complexe et une expertise renforcée.

En page 10 du contrat comprenant les conditions générales, au paragraphe intitulé « conditions financières », il est stipulé que les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû, au taux fixé aux conditions particulières sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre 280 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours.

Aux conditions particulières en page 3 du contrat il est stipulé que le taux effectif global annuel s'élève à 5,55 % soit un taux de 0,462 % période mensuelle.

M et Mme X. qui se prétendent profanes ne donnent aucune explication sur leur situation professionnelle au jour de l'acceptation de l'offre et il ressort des termes de cette dernière qu'une simple lecture permettait d'avoir connaissance que les intérêts seraient calculés sur 360 jours et non 365 jours, de sorte que l'erreur était décelable aisément et qu'ils pouvaient s'interroger ou interroger la SA Banque populaire du Nord voir un professionnel extérieur sur cette disposition et son incidence sur le coût du crédit voir engager une action à compter de leur acceptation et dans le délai de 5 ans de cette dernière.

L'analyse financière dont ils se prévalent pour faire reporter le point de départ du délai pour agir n'était pas utile à la prise de connaissance de cette disposition de sorte que le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite la demande tendant à engager la responsabilité contractuelle de la banque pour manquement à son devoir d'information et de loyauté.

Pour déclarer recevable la demande de M et Mme X. tendant à voir réputée non écrites les clauses de stipulation de l'intérêt conventionnel et du taux annuel effectif global, le tribunal judiciaire a considéré qu'il ne s'agissait pas d'une action en nullité soumise à la règle de prescription quinquennale.

La SA Banque populaire du Nord demande l'infirmation de cette disposition du jugement considérant qu'elle revient à rendre imprescriptibles les demandes tendant à réputer non écrites les clauses abusives et se fonde sur un arrêt de la cour d'appel de Paris du 9 mars 2018.

M et Mme X. prétendent à la confirmation du jugement ayant déclaré recevable leur demande au motif que le point de départ du délai pour agir est celui de la remise de l'analyse financière par un professionnel.

Il est admis que la demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation n'est pas soumise à la prescription quinquennale. Cette règle est la conséquence de l'application par la CJCE du principe d'effectivité, cette dernière considérant que soumettre une telle demande à une règle de prescription est contraire aux articles 6 paragraphe 1 et 7 de la directive 93/13 du 5 avril 1993 sur les clauses abusives.

Dans ces conditions c'est par de justes motifs que les premiers juges, faisant application de la règle sus-mentionnée ont déclaré recevable la demande de M et Mme X. tendant à ce qu'une clause litigieuse qu'ils qualifient d'abusive soit réputée non écrite.

M et Mme X. soutiennent que la clause de stipulation d'intérêts est abusive et qu'elle doit être réputée non écrite.

Pour en faire la démonstration ils affirment qu'il est constant que le recours à la clause lombarde procure au prêteur un avantage indû, que la banque ne conteste pas en avoir fait application et qu'ils n'étaient pas en mesure de déceler l'irrégularité de cette clause.

Ils tirent comme conséquence de cette sanction, à supposer qu'elle soit prononcée, que la SA Banque populaire du Nord doit leur rembourser les intérêts en trop versés et que le taux légal doit se substituer au taux conventionnel et qu'il doit leur être alloué des dommages et intérêts.

La SA Banque populaire du Nord soutient que pour le cas où la clause serait réputée non écrite comme irrégulière la sanction à appliquer n'ouvre pas droit aux demandes de M et Mme X. rappelant la jurisprudence de la cour de cassation aux termes de laquelle, la seule sanction civile de l'inobservation des dispositions de l'article L.312-8 du code de la consommation est la perte en totalité ou partie du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge.

Les époux X. affirment que le recours à la clause lombarde procure au prêteur un avantage indû sans en faire la démonstration alors qu'une telle clause n'est abusive qu'en considération de ses effets sur le coût du crédit si elle entraine un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Ils ne démontrent pas plus que ladite clause figure sur la liste des clauses présumées abusives mentionnées à l'article L. 534-1 du code de la consommation.

Ils ne remettent pas plus en cause la démonstration mathématique faite par le juge de l'exécution et aboutissant à sa conclusion aux termes de laquelle il n'est pas établi que la différence de méthode de calcul aurait renchéri le coût total du crédit et modifié le TEG déclaré dans l'offre.

M et Mme X. qui se contentent d'une pétition de principe sans faire la démonstration que l'application de cette clause a généré un indû et partant un préjudice, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à déclarer non écrite la clause ainsi rédigée : « il est stipulé que les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû, au taux fixé aux conditions particulières sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre 280 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours ».

M et Mme X. sont également déboutés de leurs demandes subséquentes tirées du constat du caractère réputé non écrit de la clause.

La SA Banque populaire du Nord prétend à l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive au motif qu'elle démontre que M et Mme X. ont agi avec une légèreté blâmable en faisant fi du jugement du juge de l'exécution et en méconnaissance de la jurisprudence connue en la matière.

La jurisprudence pouvant évoluer et certaines prétentions autres que celles soutenues devant le juge de l'exécution étant développées, la SA Banque populaire du Nord échoue à démontrer que M et Mme X. ont agi avec une légèreté de nature à dégénérer en abus de droit de sorte qu'il convient de la débouter de sa demande.

M et Mme X. qui succombent supportent les dépens d'appel et sont condamnés à payer à la SA Banque populaire du Nord la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déboute la SA Banque populaire du Nord de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne M. X. et Mme Y. épouse X. aux dépens d'appel et à payer à la SA Banque populaire du Nord la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier,                                       La Présidente,