CA DOUAI (ch. 2 sect. 1), 22 février 2024
CERCLAB - DOCUMENT N° 10700
CA DOUAI (ch. 2 sect. 1), 22 février 2024 : RG n° 21/03499
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Aux termes de l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
En l'espèce, dès ses premières conclusions d'appelante, la société Matmatech sollicitait sur le fondement des dispositions du code de la consommation, qu'il soit dit qu'elle avait à bon droit exercé sa faculté de rétractation. En conséquence, même si elle a ultérieurement modifié cette demande en y ajoutant que soit en conséquence prononcée la résolution de contrat, il n'y a pas d'irrecevabilité de cette demande, qui existait dès ses premières conclusions en appel. Cette demande sera déclarée recevable. »
2/ « L'activité principale de la société Matmatech est la conception de produits, solutions et traitements médicaux pour les problèmes intimes féminins. Le contrat dont il s'agit a été conclu en vue d'obtenir un accompagnement de la société Matmatech par la société Efor Lille dans le cadre de la mise en conformité de son système de management de la qualité au regard de la norme ISO 13485 : 2016 et pour le montage du dossier technique de marquage CE de ses produits.
Les premiers juges ont sur ce point parfaitement retenu que si ces prestations font appel à des compétences très techniques et une expertise pointue en la matière, le contrat a néanmoins pour but de permettre à la société Matmatech de commercialiser ses produits et entre ainsi dans le champ de son activité principale, et que la prestation de support et d'accompagnement proposée la société Efor Lille est étroitement liée au produit commercialisé par la société Matmatech. L'objet du contrat entre donc dans le champ de l'activité principale de la société Matmatech, celle-ci ne pouvant valablement soutenir que la souscription d'un contrat pour obtenir du support et de l'assistance pour la mise en conformité de son système de management de la qualité au regard d'un norme et le montage d'un dossier technique en vue d'obtenir le marquage CE des produits qu'elle vend n'entre pas dans le champ de son activité principale, au motif que bien qu'informée des normes applicables à ses matériels médicaux, elle est totalement démunie pour procéder à la présentation idoine de ses biens et services auprès des organismes de certification.
L'objet du contrat entrant dans le champ de l'activité principale de la société Matmatech, les dispositions sus-visées du code de la consommation ne sont pas applicables au contrat conclu en l'espèce, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Matmatech formées sur ce fondement. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/03499. N° Portalis DBVT-V-B7F-TWTL. Jugement n° 2020003161 rendu le 3 juin 2021 par le tribunal de commerce de Lille Métropole.
APPELANTE :
SA Matmatech
ayant son siège social - [Adresse 2], représentée par Maître Laurent Guilmain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assistée de Maître Franck Lavail, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
INTIMÉE :
SAS EFOR Lille
prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège, ayant son siège social [Adresse 1], [Localité 3], représentée par Maître Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Maître Stéphane Andreo, avocat au barreau de Lyon, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Dominique Gilles, président de chambre, Pauline Mimiague, conseiller, Clotilde Vanhove, conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs
DÉBATS à l'audience publique du 23 novembre 2023 après rapport oral de l'affaire par Clotilde Vanhove, conseiller.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 février 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président, et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 25 janvier 2023
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
La société Matmatech, société créée en 2018 par MM. X. et Y., conçoit des produits, solutions et traitements médicaux pour les problèmes intimes féminins.
La société Efor Lille a pour activité la fourniture de prestations d'ingénierie et de conseil dans le domaine de la santé, notamment aux industriels des produits pharmaceutiques et des dispositifs médicaux. Elle accompagne ses clients dans leur environnement normatif sur des enjeux qualitatifs, réglementaires et techniques.
La société Matmatech a sollicité la société Efor Lille afin de l'accompagner dans le cadre de la mise en conformité de son système de management de la qualité au regard de la norme ISO 13485 : 2016 et pour le montage du dossier technique de marquage CE de ses produits.
Le 10 mai 2019, la société Efor Lille a établi une proposition technique et financière, acceptée par la société Matmatech le 28 juillet 2019. Le 12 septembre 2019, la société Efor Lille adressait une nouvelle proposition technique et financière, acceptée par la société Matmatech le 16 septembre 2019.
En l'absence de paiement des factures qu'elle avait émises pour un montant total de 34 380 euros TTC, la société Efor Lille a, par lettre recommandée avec avis de réception du 3 février 2020, mis en demeure la société Matmatech de procéder au règlement des factures.
Par acte d'huissier de justice du 20 février 2020, la société Efor Lille a ensuite fait assigner la société Matmatech devant le tribunal de commerce de Lille Métropole afin d'obtenir sa condamnation au paiement de ces factures.
Par jugement contradictoire du 3 juin 2021, cette juridiction a :
- débouté la société Matmatech de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 34 380 euros, outre intérêts au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de financement la plus récente majoré de 10 points, conformément aux dispositions de l'article L.441-10-1 du code de commerce, à compter du 3 avril 2020, date de la mise en demeure,
- condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 160 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,
- ordonné la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil ;
- condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Matmatech aux dépens, en incluant le droit de recouvrement et d'encaissement qui serait perçu par l'huissier de justice en cas de recouvrement forcé des sommes mises à la charge de cette société, tel que prévu à l'article A. 444-10 du code de commerce, résultant de l'arrêté du 26 février 2016 fiant le tarif des huissiers de justice.
Par déclaration reçue au greffe le 29 juin 2021, la société Matmatech a relevé appel du jugement en sollicitant sa réformation en toutes ses dispositions.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 27 septembre 2022, la société Matmatech demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures,
- infirmer la décision en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
à titre principal :A
- dire qu'aucun contrat n'est intervenu entre elle et la société Efor Lille,
- en conséquence, dire qu'elle n'est redevable d'aucune somme à l'égard de la société Efor Lille,
- en conséquence, ordonner à la société Efor Lille de restituer toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement,
à titre subsidiaire :
- prononcer la résolution aux torts de la société Efor Lille des accords contractuels passés les 10 mai 2019 et 12 septembre 2019,
- en conséquence, ordonner à la société Efor Lille de restituer toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement,
à titre encore plus subsidiaire :
- dire qu'elle a, à bon droit, exercé sa faculté de rétractation,
- en conséquence, prononcer la résolution aux torts de la société Efor Lille des accords contractuels passés les 10 mai 2019 et 12 septembre 2019,
- en conséquence, ordonner à la société Efor Lille de restituer toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement,
à titre infiniment subsidiaire :
- dire qu'elles ont révoqué d'un commun accord la proposition technique et financière du 12 septembre 2019 par l'émission d'une nouvelle proposition technique et financière le 19 septembre 2019,
- en conséquence, ordonner à la société Efor Lille de restituer toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement,
en toute hypothèse :
- dire que les factures de la société Efor Lille sont nulles et en tout état de cause inopposables à son égard,
- en conséquence, ordonner à la société Efor Lille de restituer toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement,
- condamner la société Efor Lille à lui payer les sommes de 30.000 euros à titre d'indemnité pour procédure abusive, 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens que Maître D. pourra recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :
- à titre principal, aucun contrat n'a pu être valablement formé entre les parties puisque ni la consistance de la prestation ni son prix n'étaient clairement déterminés dans les documents ; les devis des 10 mai et 12 septembre 2019 ne précisent ni le prix ni la consistance véritable de la prestation de la société Efor Lille ;
- à titre subsidiaire, sa demande de résolution judiciaire sur le fondement de l'article 1165 du code civil est recevable puisque, s'il s'agit d'un moyen nouveau, l'anéantissement rétroactif du contrat que représente la demande de résolution judiciaire a déjà été sollicité devant les premiers juges, puisqu'elle sollicitait la nullité du contrat sur le fondement du code de la consommation constituant, au même titre que la résolution, un anéantissement rétroactif du contrat ; en outre, l'effet dévolutif oblige le juge à prendre connaissance des faits survenus depuis le jugement (article 564 du code de procédure civile) ; l'article 1165 précité s'applique, ayant vocation à sanctionner l'abus du prestataire dans la définition du prix ;
- à titre encore plus subsidiaire, aux termes de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions protectrices afférentes à l'information contractuelle et au droit de rétractation sont susceptibles d'être applicables entre professionnels sous diverses conditions parmi lesquelles celle qui exige que le contrat ne soit pas relatif à l'activité principale du professionnel sollicité, ce qui est le cas en l'espèce, puisque si elle est parfaitement informée des normes applicables à ses matériels médicaux, elle est totalement démunie pour procéder à la présentation idoine de ses biens et services auprès des organismes de certification, et c'est bien là qu'est censée intervenir la plus-value d'une société de conseil comme la société Efor Lille, à savoir la réalisation d'un support permettant de présenter les matériels vendus par elle dans les conditions de traitement et de présentation attendues par l'organisme de certification ; elle n'a bénéficié d'aucune des dispositions protectrices du code de la consommation au titre des informations pré-contractuelles et a exercé son droit de rétractation dans les conditions prévues par l'article L.221-20 du code de la consommation ;
- à titre infiniment subsidiaire, conformément aux dispositions de l'article 1193 du code civil, dès lors que la société Efor Lille a réagi à sa contestation du contrat par l'émission d'une nouvelle offre d'intervention, il s'en déduit que d'un commun accord, les parties ont considéré que l'offre du 12 septembre précédent était devenue caduque et la révocation de cette proposition n'a d'effet que pour l'avenir, s'agissant d'un contrat à exécution successive ; en conséquence, si un contrat a été conclu, il l'a été le 16 septembre 2019 au plus tôt pour être révoqué par accord des parties le 19 septembre 2019 au plus tard ;
en tout état de cause, les sommes réclamées par la société Efor Lille sont sans fondement, le tribunal ayant avalisé sans contrôle la facturation de la société Efor Lille alors que le travail allégué par cette société est contesté sur les périodes prétendues et dans son volume et qu'aux termes des dispositions de l'article 1353 du code civil, il appartient à cette société de rapporter la preuve du travail effectué.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 5 janvier 2023, la société Efor Lille demande à la cour de :
- déclarer infondé l'appel interjeté par la société Matmatech,
- en conséquence, l'en débouter,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
- déclarer irrecevable et à tout le moins infondée la demande nouvelle de résolution du contrat formée pour la première fois en cause d'appel et à titre subsidiaire par la société Matmatech sur le fondement de l'article 1165 du code civil, inapplicable aux faits litigieux,
- déclarer irrecevable et à tout le moins infondée la demande formée pour la première fois par la société Matmatech dans ses conclusions d'appelante n°2 du 27 septembre 2022 sollicitant la résolution du contrat sur le fondement des dispositions du code de la consommation, qui ne figurait pas dans ses premières conclusions d'appelante, notifiées le 29 septembre 2021,
- écarter des débats les pièces n°35 à 37 visées par la société Matmatech dans ses conclusions d'appelante n°2 ainsi que tout développement, moyen et/ou prétention s'y rapportant, à défaut d'avoir été régulièrement communiquées,
- débouter la société Matmatech de l'intégralité de ses conclusions, prétentions, fins et moyens,
- condamner la société Matmatech à lui payer la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, incluant le droit de recouvrement et d'encaissement qui serait perçu par l'huissier de justice en cas de recouvrement forcé des sommes mises à la charge de cette société, tel que prévu à l'article A.444-10 du code de commerce résultant de l'arrêté du 26 février 2016 fixant le tarif des huissiers de justice, distraits au profit de la SELARL Lexavoué Amiens Douai, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :
- sur le fondement des articles 1103, 1113 et 1121 du code civil, les sommes réclamées au titre des quatre factures sont dues, les factures ayant été émises suite à la première proposition technique et financière du 10 mai 2019, acceptée le 28 juillet 2019 et à la seconde proposition technique et financière du 12 septembre 2019, acceptée le 13 septembre 2019, qui venait compléter la précédente,
- la proposition technique et financière du 10 mai 2019 a été acceptée et signée par la société Matmatech le 28 juillet 2019, date à laquelle le contrat a donc incontestablement été formé entre les parties, l'objet du contrat et de la prestation proposée par elle étaient clairement définis, tout comme le prix forfaitaire convenu ;
- la facture correspondant à la première phase n'est pas sérieusement contestée par la société Efor Lille, qui ne conteste pas réellement que cette mission ait été exécutée et a d'ailleurs indiqué à plusieurs reprises qu'elle allait procéder au règlement de cette facture, s'en reconnaissant ainsi expressément débitrice ;
- après la phase préalable de diagnostic, elle a adressé à la société Efor Lille une seconde proposition technique et financière le 12 septembre 2019, portant spécifiquement sur la mise en œuvre de la seconde phase de l'intervention, dont elle précisait la durée d'intervention en nombre de jours/homme qui restait à définir dans la proposition antérieure, les tarifs journaliers applicables demeurant inchangés, soit sur la base d'un coût quotidien et d'un nombre de jours qui étaient donc facilement vérifiables et calculables ; cette proposition a été signée le 13 septembre 2019 par la société Efor Lille et un contrat s'est donc incontestablement formé à cette date sur la durée et le tarif applicable à la seconde phase de la mission ;
- les factures émises sont strictement conformes au nombre de jours passés par elle sur le projet et les éléments réalisés ont bien été adressés à la société Matmatech, qui a refusé de les télécharger ; lorsque la société Matmatech a notifié son refus unilatéral de poursuivre les relations, elle a alors finalisé les livrables en cours, qu'elle a transmis à la société Matmatech le 4 octobre 2019 et il était donc normal qu'elle facture son intervention jusqu'à cette date ;
- elle conteste toute révocation de l'accord par les parties, aucun nouvel accord n'étant venu révoquer ou remplacer le précédent et aucune consentement mutuel pour une quelconque révocation ne pouvant être sérieusement invoqué ;
- les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables dès lors que la société Matmatech ne justifie pas que le contrat ne rentrait pas dans le champ de son activité principale, la prestation portant sur les normes mêmes que la société Matmatech est censée parfaitement connaître et déjà mettre en œuvre, s'agissant de produits relatifs à la santé des personnes qu'elle commercialisait avant même d'entrer en relation avec elle ; outre le fait que le courriel de la société Matmatech du 18 septembre 2019 ne constitue pas une rétractation de sa part mais uniquement une demande d'éclaircissement sur le montant du budget accepté, pas plus que son courriel du 27 septembre 2019, sollicitant la suspension du contrat ;
- la demande de résolution du contrat sur le fondement de l'article 1165 du code civil constitue une demande nouvelle en cause d'appel, comme telle irrecevable sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, qui ne tend pas aux mêmes fins que la demande de résiliation du contrat qu'elle avait formée en première instance ;
- la demande de résolution sur le fondement des dispositions du code de la consommation est irrecevable sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile, puisqu'elle ne figurait pas dans les premières conclusions d'appel de la société Matmatech mais a pour seul but de faire croire que ses prétentions fondées sur l'application du code de la consommation ont le même objet que sa demande nouvelle en appel sur le fondement de l'article 1165 du code civil ;
- en outre sur le fond, les dispositions de l'article 1165 du code civil sont inapplicables en l'espèce puisqu'il s'applique lorsque les parties n'ont pas fixé le prix de la prestation fournie, ce qui n'est aucunement le cas dans le contrat liant les parties.
[*]
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 janvier 2023. Plaidée à l'audience du 23 novembre 2023, l'affaire a été mise en délibéré au 22 février 2024.
Par note en délibéré transmise par la voie électronique le 29 novembre 2023, la société Matmatech a indiqué que son bordereau de communication de pièces a été notifié par RPVA le 27 septembre 2022, que les conclusions ont été transmises quelques minutes avant par le même biais, que le contrat de procédure liant la cour aux barreaux prévoit expressément que les pièces sont communiquées en marge de la notification du bordereau de communication de pièces et sont réputées être transmises et reçues, sauf à ce que le destinataire signale une erreur ou une omission. Elle précise qu'il n'y a dans le dossier aucun message ou courrier officiel précisant que les pièces ont été mal communiquées et qu'il n'y a donc aucune difficulté et la cour, qui n'a été saisie d'aucun incident, doit tenir compte de l'ensemble des pièces figurant dans le bordereau et citées dans les conclusions.
Par note en délibéré transmise par la voie électronique le 1er décembre 2023, la société Efor Lille a indiqué que dans sa note en délibéré, la société Matmatech tente d'inverser la charge de la preuve de la communication de ses pièces, qui lui incombe alors qu'il lui appartient de rapporter la preuve, dès lors que cette communication a été dûment et formellement contestée, qu'elle a bien transmis les pièces invoquées dans ses conclusions à la partie adverse en temps utile, ce dont elle ne justifie nullement. Elle ajoute que la transmission du bordereau ne peut valoir communication. Elle précise qu'elle a expressément signalé dans ses conclusions notifiées bien avant la clôture cette difficulté et que la société Matmatech ne pouvait l'ignorer, ayant choisi manifestement de ne pas y donner suite.
Par note en délibéré transmise par la voie électronique le 4 décembre 2023, la société Efor Lille a indiqué s'opposer à la demande de la société Matmatech de réouverture des débats pour communication des pièces.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
Sur la demande tendant à écarter des débats les pièces n°35 à 37 de la société Matmatech :
Aux termes des dispositions de l'article 445 du code de procédure civile, après clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.
En l'espèce, les notes en délibérés des parties n'ont aucunement été autorisées et elles ne contiennent aucun élément de nature à obliger la cour à rouvrir les débats. Il n'en sera en conséquence pas tenu compte.
En l'espèce, la cour constate que la société Efor Lille a sollicité dans ses dernières conclusions que les pièces 35 à 37 de l'appelante soient écartées des débats à défaut d'avoir été communiquées, que la société Matmatech ne démontre pas les avoir régulièrement communiquées, la seule communication du bordereau sur lequel figurent ces pièces avant la clôture des débats étant insuffisante à rapporter la preuve de la communication des pièces.
En conséquence, ces pièces doivent être écartées des débats.
Sur l'existence d'un contrat conclu entre la société Matmatech et la société Efor Lille :
Aux termes de l'article 1113 du code civil, le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager. Cette volonté peut résulter d'une déclaration ou d'un comportement non équivoque de son auteur. L'article 1114 du même code prévoit que l'offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation. A défaut, il y a seulement invitation à entrer en négociation. L'article 1118 du même code précise que l'acceptation est la manifestation de volonté de son auteur d'être lié dans les termes de l'offre. Tant que l'acceptation n'est pas parvenue à l'offrant, elle peut être librement rétractée, pourvu que la rétractation parvienne à l'offrant avant l'acceptation. L'acceptation non conforme à l'offre est dépourvue d'effet, sauf à constituer une offre nouvelle. Enfin, l'article 1121 ajoute que le contrat est conclu dès que l'acceptation parvient à l'offrant. Il est réputé l'être au lieu où l'acceptation est parvenue.
En l'espèce, le 10 mai 2019, la société Efor Lille a transmis à la société Matmatech une « proposition technique et financière » qui rappelait que la société Matmatech l'avait sollicitée dans le cadre de son activité pour un accompagnement pour la mise en conformité du système de management de la qualité au regard de la norme ISO 13485 : 2016 et pour le montage du dossier technique de marquage CE et proposait un accompagnement ainsi décrit :
« 1. Phase 1 : Analyse des éléments actuels et évaluation de la mise à niveau pour le montage du dossier technique de marquage CE (2 jours d'évaluation + 1 jour de rapport)
Livrables de la Phase 1 : plan de mise en conformité et évaluation chiffrée
2. Phase 2 : Mise en conformité ».
La proposition financière était ensuite détaillée en ces termes et sous cette présentation :
Type d'intervention
Nb d'Unités d''uvres
Coût total (euros H.T.)
#1 Réalisation du diagnostic et plan d'action
3 (expert technique)
2400
#2 Support opérationnel
A définir (consultant)
450 euros HT / jour
A définir (expert technique)
800 euros HT / jour
Cette proposition a été acceptée le 28 juillet 2019 par la société Matmatech dont le directeur technique a apposé la mention « Bon pour accord » et sa signature.
Il résulte de la formulation tant de l'accompagnement proposé que de la proposition financière que l'acceptation de la société Matmatech ne pouvait porter que sur la phase 1, à savoir la réalisation d'un plan de mise en conformité et l'évaluation chiffrée de la phase de mise en conformité puisque pour cette seconde phase aucune précision des éléments essentiels du contrat n'y figurait, étant seul mentionné le prix HT par jour de travail d'un consultant et le prix HT par jour de travail d'un expert technique, sans que la prestation ne soit détaillée et évaluée, celle-ci ayant vocation à être déterminée à l'issue de la phase 1.
Les parties ont donc conclu un contrat portant sur la phase 1 de la proposition le 28 juillet 2019.
Le 12 septembre 2019, la société Efor Lille a transmis à la société Matmatech une nouvelle « proposition technique et financière » qui reprenait les besoins de la même façon que dans la précédente proposition et détaillait cette fois la proposition financière en ces termes et sous cette présentation :
Type d'intervention
Nb d'Unités d''uvres
Coût total (euros H.T.)
#1 Réalisation du diagnostic et plan d'action
3 (expert technique)
2400
#2 Support opérationnel
57 jours (consultant)
450 euros HT / jour
34 jours (expert technique)
800 euros HT / jour
Cette proposition a été acceptée le 13 septembre 2019 par la société Matmatech dont le directeur général a apposé sa signature ainsi que la mention « Bon pour accord » et retournée à la société Efor Lille par un courriel du 26 septembre 2019 adressé par M. X., directeur général.
Cette proposition vient ainsi compléter la précédente, qui ne concernait que la phase 1 et porte cette fois sur la phase 2. Elle constitue une offre puisqu'elle précise les éléments essentiels du futur contrat, contrairement à ce que soutient la société Matmatech. Il en résulte en effet que le prix est déterminable et que la prestation est définie puisqu'elle prévoit un accompagnement pour la mise en conformité du système de management de la qualité au regard de la norme ISO 13485 : 2016 et pour le montage du dossier technique de marquage CE, qu'elle détaille les jours de travail pour la phase 2, avec une distinction entre le travail d'un consultant et le travail d'un expert technique.
La société Matmatech ne peut valablement soutenir que le prix est indéterminé alors qu'il est facilement obtenu par la multiplication du nombre de jours de travail par le coût d'une journée de travail indiqué, pas plus qu'elle ne peut soutenir que l'objet de la prestation est indéterminé. En effet, l'offre ne doit préciser que les éléments essentiels du futur contrat, ce qui est le cas en l'espèce, une offre ne nécessitant pas le détail de toutes les modalités du contrat.
En conséquence, l'offre de la société Efor Lille du 12 septembre 2019 a été acceptée par la société Matmatech le 13 septembre 2019 et adressée à la société Efor Lille le 16 septembre 2019, formant ainsi un contrat entre elles portant sur la phase 2 pour laquelle elles n'avaient pas encore contracté par le contrat du 28 juillet 2019.
La cour constate que si la société Matmatech soutient dans ses conclusions le moyen selon lequel son consentement aurait été extorqué par la société Efor Lille par des manœuvres déloyales et mensongères et évoque un dol de celle-ci, elle n'en tire pas de conséquences juridiques dans les prétentions qu'elle liste dans le dispositif de ses conclusions, ne sollicitant ni l'annulation du contrat, ni la réparation du préjudice causé par de telles manœuvres, seules sanctions du dol. Elle sollicite en effet seulement que la cour dise qu'aucun contrat n'est intervenu entre elle et la société Efor Lille. Le moyen du dol ne sera en conséquence pas examiné par la cour, conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a débouté la société Matmatech de sa demande tendant à ce qu'il soit dit qu'aucun contrat n'est intervenu entre elle et la société Efor Lille.
Sur la demande de résolution du contrat aux torts de la société Efor Lille sur le fondement de l'article 1165 du code civil :
a) Sur la recevabilité de la demande :
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
L'article 565 du même code ajoute que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Il ressort du jugement de première instance que la société Matmatech avait sollicité devant le tribunal de commerce qu'il soit jugé que le contrat du 16 septembre 2019 a été résilié le 18 septembre 2019 lorsqu'elle a exercé son droit de rétractation, en se fondant sur les dispositions du code de la consommation.
La demande de résolution et celle de résiliation du contrat tendent toutes deux à l'anéantissement du contrat, même si cet anéantissement n'est rétroactif que dans le premier cas. En conséquence, la demande de résolution du contrat sur le fondement de l'article 1165 du code civil présentée en appel par la société Matmatech n'est pas nouvelle, tendant à la même fin que la demande de résiliation présentée en première instance.
Cette demande est en conséquence recevable.
b) Sur le fond :
Aux termes de l'article 1165 du code civil, dans les contrats de prestation de service, à défaut d'accord des parties avant leur exécution, le prix peut être fixé par le créancier, à charge pour lui d'en motiver le montant en cas de contestation. En cas d'abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d'une demande tendant à obtenir des dommage et intérêts et, le cas échéant, la résolution du contrat.
Ce texte ne s'applique pas en l'espèce au contrat de prestation de services entre les parties dès lors que le prix était fixé dans le contrat et qu'il n'est en conséquence aucunement fixé unilatéralement par la société Efor Lille après exécution de la prestation.
La société Matmatech sera en conséquence déboutée de sa demande de résolution du contrat sur le fondement de l'article 1165 du code civil.
Sur la demande de prononcé de la résolution du contrat sur le fondement du code de la consommation :
a) Sur la recevabilité de la demande :
Aux termes de l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
En l'espèce, dès ses premières conclusions d'appelante, la société Matmatech sollicitait sur le fondement des dispositions du code de la consommation, qu'il soit dit qu'elle avait à bon droit exercé sa faculté de rétractation.
En conséquence, même si elle a ultérieurement modifié cette demande en y ajoutant que soit en conséquence prononcée la résolution de contrat, il n'y a pas d'irrecevabilité de cette demande, qui existait dès ses premières conclusions en appel.
Cette demande sera déclarée recevable.
b) Sur le fond :
Aux termes de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés est inférieur ou égal à cinq.
En l'espèce, pour déterminer si les dispositions du code de la consommation applicables pour les contrats conclus hors établissement s'appliquent, seul est discuté entre les parties le point de savoir si l'objet du contrat entre dans le champ de l'activité principale de la société Matmatech.
Il n'est en effet pas contesté que le contrat conclu entre les parties est un contrat conclu hors établissement, ni que le nombre de salariés employés par la société Matmatech est inférieur à cinq.
L'activité principale de la société Matmatech est la conception de produits, solutions et traitements médicaux pour les problèmes intimes féminins. Le contrat dont il s'agit a été conclu en vue d'obtenir un accompagnement de la société Matmatech par la société Efor Lille dans le cadre de la mise en conformité de son système de management de la qualité au regard de la norme ISO 13485 : 2016 et pour le montage du dossier technique de marquage CE de ses produits.
Les premiers juges ont sur ce point parfaitement retenu que si ces prestations font appel à des compétences très techniques et une expertise pointue en la matière, le contrat a néanmoins pour but de permettre à la société Matmatech de commercialiser ses produits et entre ainsi dans le champ de son activité principale, et que la prestation de support et d'accompagnement proposée la société Efor Lille est étroitement liée au produit commercialisé par la société Matmatech. L'objet du contrat entre donc dans le champ de l'activité principale de la société Matmatech, celle-ci ne pouvant valablement soutenir que la souscription d'un contrat pour obtenir du support et de l'assistance pour la mise en conformité de son système de management de la qualité au regard d'un norme et le montage d'un dossier technique en vue d'obtenir le marquage CE des produits qu'elle vend n'entre pas dans le champ de son activité principale, au motif que bien qu'informée des normes applicables à ses matériels médicaux, elle est totalement démunie pour procéder à la présentation idoine de ses biens et services auprès des organismes de certification.
L'objet du contrat entrant dans le champ de l'activité principale de la société Matmatech, les dispositions sus-visées du code de la consommation ne sont pas applicables au contrat conclu en l'espèce, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Matmatech formées sur ce fondement.
Sur la demande de constat d'une révocation d'un commun accord du contrat du 12 septembre 2019 par les parties :
Aux termes de l'article 1193 du code civil, les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Si l'accord de toutes les parties est exigé pour révoquer la convention, celui-ci peut être exprès ou tacite, un tel accord n'étant soumis à aucune forme particulière et peut résulter des circonstances laissées à l'appréciation des juges du fond.
En l'espèce, suite à l'acceptation par la société Matmatech de l'offre faite par la société Efor Lille le 12 septembre 2019, M. Y., pour la société Matmatech adressait le 18 septembre 2019 à la société Efor Lille un courriel dans lequel il évoquait que l'offre présentait un décalage avec ce qui avait été auparavant évoqué avec Mme X. de la société Efor Lille qui pour la phase 2 lui avait parlé d'une fourchette de 15.000 à 30.000 euros alors que la proposition est finalement de 55.000 euros.
En réponse, dès le lendemain 19 septembre 2019, M. [R] pour la société Efor Lille adresse un courriel ainsi rédigé « vous trouverez en attachement notre proposition révisée, reprenant plus précisément les livrables attendus, ainsi qu'une fourchette de chiffrage qui vous permettra de piloter votre budget de manière optimisée. A noter bien entendu que nous faisons en sorte de minimiser ce budget autant qu'il sera possible de le faire, tout en conservant l'exigence qualité attendue pour un marquage CE. Et tout en conservant l'exigence qualité attendue pour un marquage CE. En tout état de cause nous ne dépasserons pas la fourchette haute. [M] travaille à vous fournir demain (vendredi) après-midi la liste détaillée des livrables en question ainsi que le planning de livraison associé. A noter que nous avons bien reçu entre-temps les certificats de biocompatibilité ».
La proposition technique et financière du 19 septembre 2019 jointe à ce courriel se présente comme les précédentes mais dans la première partie consacrée aux besoins et objectifs de la société Matmatech, il y est précisé que « cette proposition concerne le chiffrage de la mise en conformité du dossier technique et du système de management de la qualité après l'analyse d'écart qui a été menée en phase 1 » et détaille précisément les missions comprises dans tant le dossier technique que dans le système de management de la qualité, en détaillant pour chaque poste le nombre de jours estimés.
La proposition financière est ensuite ainsi rédigée :
Type d'intervention
Nb d'unités d'œuvres
Taux journalier d'unité d'œuvre
Coût total (euros H.T.)
#1 Dossier technique
27,5 à 60,5 (Consultant)
450
12 375 à 27 225
20 à 25 (Responsable Technique)
800 750
15.000 à 18 750
#2 SMQ
15 à 23 (Consultant)
450
6 750 à 10 350
3 à 4 (Responsable Technique)
800 750
2 250 à 3.000
TOTAL Consultant
19 125 à 37 575
TOTAL Responsable Technique
17 250 à 21 250
La société Efor Lille ne peut soutenir que cette nouvelle proposition est un simple avenant à celle du 12 septembre 2019, émis dans une démarche purement commerciale, et qu'elle n'a jamais renoncé au précédent accord mais tout au plus envisagé d'en modifier les termes pour satisfaire son client. En effet, le fait que la société Efor Lille ait référencé cette proposition comme un avenant est sans incidence sur sa nature juridique.
L'analyse de ce document permet de constater qu'en réalité c'est une nouvelle proposition qui est faite par la société Efor Lille à la société Matmatech pour la phase 2 qui diffère de celle qui avait été faite le 12 septembre 2019 à plusieurs égards. Si d'un côté le tarif journalier pour le responsable technique est revu à la baisse, le nombre de jours de travail à consacrer au projet diffère également entre les deux propositions, alors même qu'elles visent la même prestation de services de la phase 2. Là où la proposition du 12 septembre prévoyait pour cette phase 57 jours de consultant et 34 jours d'expert technique, la proposition du 19 septembre prévoit désormais 42,5 à 83,5 jours de travail de consultant et 23 à 29 jours de travail d'expert technique.
Ces éléments démontrent que la société Efor Lille n'a pas seulement entendu en émettant cette nouvelle proposition proposer un tarif plus avantageux à son client dans un démarche commerciale, mais a revu complètement l'organisation du travail et le temps requis pour exécuter la prestation que souhaitait lui confier la société Matmatech. La différence entre les deux propositions n'est aucunement un simple ajustement ou une simple modification dès lors qu'elle conduit, pour la fourchette haute de la deuxième proposition, à une augmentation du coût de la prestation de 5 975 euros HT. Le fait que le 19 septembre 2019 la société Matmatech ait adressé à la société Efor Lille des certificats de biocompatibilité n'est aucunement de nature à contredire cette analyse de la nouvelle proposition émise.
Cette analyse de cette proposition comme une nouvelle offre est confortée par les échanges par courriels qui ont suivi entre les parties :
- le 19 septembre 2019, M. Y. pour la société Matmatech répond à M. [R] pour la société Efor Lille « Je suis à nouveau perplexe car en diminuant le taux horaire nous avons maintenant au maximum un devis plus cher qu'avant ! Est-ce normal ' »,
- message auquel M. [R] répond le lendemain, 20 septembre 2019 « l'étude précise de l'existant et du reste à produire, effectuée toute l'après-midi d'hier par [M] et [F], nous a effectivement amenés à augmenter la charge parce qu'elle est réellement importante au regard des données d'entrée. L'élaboration d'un dossier technique et d'un SMQ implique beaucoup d'investissement, que l'on optimise pour aller dans votre sens en nous impliquant au maximum. On a pris le parti de baisser effectivement le tarif journalier de la direction technique afin que la fourchette haute reste proche de celle annoncée avant cette étude plus fine. A nouveau : il s'agit d'un maximum et [M] et [X] sont 100% impliquées pour qu'on en l'atteigne pas ».
Il résulte de ces éléments qu'ainsi que le soutient la société Matmatech, en émettant une nouvelle proposition financière « révisée » face aux contestations de la société Matmatech sur celle convenue entre les parties le 12 septembre 2019, les parties ont nécessairement révoqué tacitement ce contrat conclu entre elles, puisqu'elles ont toutes deux convenu qu'il n'était en réalité pas adapté à la prestation de service que la société Matmatech souhaitait confier à la société Efor Lille, la première en considérant que le prix ne correspondait pas à ce qui lui avait été indiqué au départ, ce qu'elle indiquait dès le courriel de M. Y. du 18 septembre 2019, et la seconde en reconnaissant avoir mal évalué le travail à fournir, qui a été évalué à nouveau le 19 septembre 2019 pour aboutir à une nouvelle proposition.
L'absence de nouvel accord entre les parties, en l'absence de signature de cette nouvelle proposition, n'est pas, contrairement à ce que soutient la société Efor Lille, de nature à exclure l'existence d'une révocation de l'accord intervenu sur la précédente proposition, qui résulte du seul fait que les parties par l'émission et la discussion sur une nouvelle proposition, ont admis que la précédente n'était pas adaptée à la prestation souhaitée et ne pouvait être exécutée.
En conséquence, le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté la société Matmatech de sa demande tendant à ce qu'il soit constaté que les parties ont révoqué le contrat conclu entre elles le 12 septembre 2019 par leur consentement mutuel et il sera fait droit à cette demande.
Sur la demande en paiement de factures formée par la société Efor Lille :
La société Efor Lille sollicite le paiement par la société Matmatech de quatre factures :
- une facture du 31 juillet 2019 pour un montant de 2 400 euros HT et 2 880 euros TTC relative à une « prestation juillet 2019 »,
- une facture du 16 septembre 2019 pour un montant de 6.000 euros HT et 7 200 euros TTC relative à des prestations « août 2019 »,
- une facture du 30 septembre 2019 pour un montant de 16 950 euros HT et 20 340 euros TTC relative à des prestations « septembre 2019 »,
- une facture du 31 octobre 2019 pour un montant de 3 300 euros HT et 3 960 euros TTC relative à des prestations « octobre 2019 ».
La première facture est relative à l'exécution de la prestation convenue entre les parties suite à la proposition du 10 mai 2019, acceptée le 28 juillet 2019 et portant sur la phase 1 « Réalisation du diagnostic et plan d'action ». Cet accord des parties n'a pas été révoqué et la prestation prévue a été exécutée par la société Matmatech puisque l'exécution de cette prestation était nécessaire au chiffrage de la phase 2.
Cette facture est donc due par la société Matmatech.
Les autres factures en revanche se rapportent à la proposition du 12 septembre 2019 pour laquelle l'accord des parties a été révoqué d'un commun accord ainsi qu'il l'a été précédemment retenu. La société Matmatech ne saurait donc être condamnée à leur paiement.
Le jugement sera en conséquence réformé en ce qu'il a condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 34 380 euros, celle-ci devant seulement être condamnée à payer la somme de 2 880 euros, avec intérêts au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, conformément aux dispositions de l'article L.441-10-1 du code de commerce, à compter du 3 avril 2020, date de la mise en demeure. Il y a lieu également d'ordonner la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
Le jugement sera également réformé en ce qu'il a condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 160 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, cette somme devant être fixée à 40 euros, en présence d'une seule facture impayée.
7) Sur la demande de dommages et intérêts formées par la société Matmatech pour procédure abusive :
La procédure intentée par la société Efor Lille qui d'une part a obtenu gain de cause en première instance et d'autre part obtient partiellement satisfaction en appel, ne peut être qualifiée d'abusive. Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la société Matmatech de cette demande.
8) Sur la demande de restitution des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire :
Le présent arrêt constitue un titre exécutoire permettant le recouvrement d'éventuelles sommes versées en exécution de la décision de première instance qui ne seraient plus dues. Il n'y a en conséquence pas lieu d'ordonner la restitution des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire.
9) Sur les prétentions annexes :
Le jugement sera réformé en ce qu'il a statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
La société Efor Lille, qui succombe en une large part de ses prétentions, sera condamnée aux dépens, avec faculté de recouvrement direct par Me [D] pour les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, et, en équité, à payer à la société Matmatech la somme de 8.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Réforme le jugement en ce qu'il a débouté la société Matmatech de sa demande tendant à ce qu'il soit constaté que les parties ont révoqué d'un commun accord le contrat du 12 septembre 2019, en ce qu'il a condamné la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 34 380 euros en paiement des factures et la somme de 160 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement et en ce qu'il a statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Écarte des débats les pièces n°35 à 37 de la société Matmatech ;
Déclare recevable la demande de la société Matmatech tendant au prononcé de la résolution du contrat sur le fondement des dispositions de l'article 1165 du code civil ;
Déboute la société Matmatech de sa demande de prononcé de la résolution du contrat sur le fondement des dispositions de l'article 1165 du code civil ;
Déclare recevable la demande de la société Matmatech sur le fondement des dispositions du code de la consommation ;
Constate que les parties ont révoqué le 19 septembre 2019 le contrat conclu entre elles le 12 septembre 2019 par leur consentement mutuel ;
Condamne la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 2 880 euros TTC en paiement de la facture du 31 juillet 2019 avec intérêts au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, conformément aux dispositions de l'article L.441-10-1 du code de commerce, à compter du 3 avril 2020 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière ;
Condamne la société Matmatech à payer à la société Efor Lille la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement pour cette facture ;
Déboute la société Efor Lille du surplus de ses demandes en paiement ;
Dit n'y avoir lieu à ordonner la restitution des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire ;
Condamne la société Efor Lille aux dépens, avec faculté de recouvrement direct par Maître D. pour les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision ;
Condamne la société Efor Lille à payer la société Matmatech la somme de 8.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président
Valérie Roelofs Dominique Gilles