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CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 1er février 2024

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 1er février 2024
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 4e ch. civ.
Demande : 21/03880
Date : 1/02/2024
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 16/06/2021
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10713

CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 1er février 2024 : RG n° 21/03880

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Sur le fondement de ces dispositions, il est jugé, par exemple, que les clauses du contrat qui « excluent de la garantie du conducteur et de la garantie des dommages subis par le véhicule assuré les sinistres survenus lorsque le conducteur se trouvait sous l'empire d'un état alcoolique, en ce qu'elles délimitent le risque assuré et l'engagement de l'assureur, définissent l'objet principal du contrat. Rédigées de façon claire et compréhensible, elles échappent en conséquence à l'appréciation du caractère abusif des clauses contractuelles, au sens de l'article L. 132-1, alinéa 7, devenu L. 212-1, alinéa 3, du code de la consommation » (Cour de cassation, 2e civ., 8 juillet 2021, pourvoi n° 19-25552).

En l'espèce, M. X. prétend que les clauses litigieuses des deux contrats d'adhésion sont abusives puisque, selon lui, elles ne sont pas rédigées en termes clairs et précis.

Il est évident, ce qu'aucune des parties ne conteste, que les clauses litigieuses définissant la notion d'incapacité temporaire totale de travail portent sur « l'objet principal du contrat », c'est-à-dire sur la garantie du paiement des échéances des crédits souscrits en cas de survenance du risque d'incapacité temporaire de travail. Elles ne peuvent donc entrer dans le champ d'application du texte précité relatif aux clauses abusives que sous réserve qu'elles soient formulées de manière « claire et compréhensible ». »

2/ « Dans le contrat « Guizeh 2 », la garantie « incapacité temporaire totale de travail » est définie comme suit : « Lorsque, suite à un accident ou une maladie, l'assuré se trouve temporairement dans l'incapacité physique, constatée médicalement, d'exercer toute activité professionnelle lui procurant gain et profit, l'assurance INCAPACITE TEMPORAIRE TOTALE de travail garantit (...) le paiement à l'organisme de crédit, de tout ou partie des annuités (...) qui arrivent normalement à échéance, selon le tableau d'amortissement du prêt. (...) ». M. X. soutient que les termes d'« activité professionnelle » et de « gain et profit » sont trop larges et créent un déséquilibre significatif entre la compagnie d'assurance et l'assuré puisqu'au final cette clause n'est pas clairement définie et dépendra uniquement de l'interprétation qu'en fera la compagnie. Toutefois, la clause est exprimée en des termes suffisamment clairs et compréhensibles, accessibles au consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Elle est dépourvue de toute ambiguïté et ne revêt pas de caractère abusif au sens de l'article L 132-1 du code de la consommation. »

3/ « Dans le contrat « emprunteur privilège », la clause litigieuse est rédigée comme suit à l'article 5.21 : « L'Assuré est considéré en état d'Incapacité Temporaire Totale si, à la suite d'un Accident ou d'une Maladie garantis, il se trouve temporairement dans l'impossibilité physique complète, continue et médicalement reconnue, de se livrer à l'exercice de la profession qu'il exerçait lors de la survenance du Sinistre (...) ». M. X. soutient que les termes de « profession qu'il exerçait lors de la survenance du Sinistre » sont trop larges et créent un déséquilibre significatif entre la compagnie d'assurance et l'assuré puisqu'au final cette clause n'est pas clairement définie et dépendra uniquement de l'interprétation qu'en fera la compagnie. Toutefois, une nouvelle fois, ces termes apparaissent suffisamment clairs et compréhensibles pour le consommateur moyen. Ils ne revêtent donc pas de caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. »

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/03880. N° Portalis DBVK-V-B7F-PBLJ. Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 avril 2021, Tribunal judiciaire de Béziers – R.G. n°19/00572.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [Date naissance 1] à [Localité 6], de nationalité Française, [Adresse 5], [Localité 3], Représenté par Maître Cécilia LASNE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

 

INTIMÉE :

SA Acte Vie Acte Vie - Groupe Camacte

[Adresse 2], [Localité 4], Représentée par Maître Fabrice DI FRENNA de la SARL SANGUINEDE - DI FRENNA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Maître Christophe DEMARCQ, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, avocat plaidant

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 DECEMBRE 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de : M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, M. Philippe BRUEY, Conseiller, Mme Marie-José FRANCO, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRÊT : - contradictoire ; - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; - signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

M. X. est cuisinier et gérant majoritaire de la SARL Auberge de [Adresse 5] qui exerce une activité de restauration traditionnelle. Il est, par ailleurs, associé de la SCI Domaine de Besilles avec sa mère, Mme W. X. et son père, M. X. X.

Deux contrats ont été conclus entre la SCI Domaine de [Adresse 5] et la société d'assurance SA Acte vie - Groupe Camacte:

- 1er : Le 24 juillet 2001, un contrat d'assurance au bénéfice des trois associés, dit contrat « Guizeh 2 », aux fins d'assurer le prêt souscrit par la SCI Domaine de [Adresse 5] auprès de la banque Crédit agricole pour un montant de 3.099.000 francs. M. X. est donc assuré à hauteur de 1.033.000 francs correspondant à 1/3 du capital emprunté puisque les deux autres associés de la SCI ont également souscrit le même contrat ;

- 2ème : Le 16 décembre 2008, une assurance « emprunteur privilège » aux fins d'assurer le prêt souscrit auprès de la banque Dupuy de Parseval pour un montant initial de 149.431,75 €.

Ces deux contrats garantissent à hauteur de 100 % du capital emprunté les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie, incapacité temporaire totale et invalidité permanente totale.

M. X. a cessé son activité professionnelle le 20 novembre 2012 pour cause de maladie, en l'espèce des lombalgies et des cervico-brachialgies à prédominance droite. Il a alors sollicité la prise en charge de ses échéances par la SA Acte vie - Groupe Camacte sur le fondement de la garantie ITT, ce qui a été accepté.

Compte tenu de la persistance de l'état de santé de M.X., la société SA Acte vie - Groupe Camacte a sollicité une expertise amiable qui a été diligentée par le Dr Y.

Le 22 août 2013, le Dr Y. a conclu dans son rapport que l'état de santé de M. X. ne répondait pas aux conditions de prise en chagre de la garantie ITT ni dans le contrat « Guizeh 2 », ni dans le contrat « emprunteur privilège ».

Par courrier du 29 août 2013, la société SA Acte vie - Groupe Camacte a mis fin à la garantie.

Par ordonnance du 3 juin 2014, le juge des référés de Béziers a ordonné une expertise médicale, à la demande de M. X.

L'expert judiciaire, le Dr Z., a déposé son rapport le 4 novembre 2014.

A la suite de son hospitalisation en 2015, M. X. a sollicité une expertise amiable complémentaire, laquelle a été diligentée le 27 mai 2015 par le Dr Y. qui a estimé qu'il n'y avait aucun fait nouveau justifiant une contre-expertise.

C'est dans ce contexte que par acte du 26 août 2016, M.X. a assigné la SA Acte vie - Groupe Camacte devant le tribunal de grande instance de Béziers aux fins d'indemnisation.

Par jugement du 12 avril 2021, le tribunal judiciaire de Béziers a :

- débouté M. X. de ses demandes,

- condamné M. X. aux dépens en ce compris les frais de l'expertise du Dr Z.,

- condamné M. X. à payer à la SA Acte vie - Groupe Camacte la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire.

Le 16 juin 2021, M. X. a relevé appel de ce jugement.

[*]

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 9 février 2022, M. X. demande à la cour, sur le fondement des articles anciens 1134 et 1135 du code civil, de l'ancien article L. 131-1 du code de la consommation et des articles L. 113-5 et suivants du code des assurances, de :

- juger recevable son appel ;

- réformer le jugement dans son intégralité et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- Déclarer abusives et non écrites les clauses définissant les garanties mises en œuvre dans le cadre d'une interruption temporaire de travail des contrats « emprunteur privilège » et «Guizeh 2 ».

En conséquence,

- Condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à prendre en charge l'arrêt de travail de Monsieur X. du 22 août 2013 au 16 mai 2016 date de la fin du contrat de prêt relevant de l'assurance « Guizeh 2 » et du 22 août 2013 au 28 janvier 2015 date du remboursement anticipé du prêt suivant le décès de Madame W. X. ;

- Condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à lui payer :

- 39.567,89 € au titre des échéances du prêt « Guizeh2 » ;

- 11.522,65 € au titre des échéances du prêt « privilège emprunteur », avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 août 2016 ;

A titre subsidiaire,

- dire que l'état de santé de M. X. et sa situation professionnelle sont couverts par les deux contrats,

En conséquence,

- Condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à prendre en charge l'arrêt de travail de Monsieur X. du 22 août 2013 au 16 mai 2016 date de la fin du contrat de prêt relevant de l'assurance « Guizeh 2 » et du 22 août 2013 au 28 janvier 2015 date du remboursement anticipé du prêt suivant le décès de Madame W. X. ;

- Condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à lui payer :

- 39.567,89 € au titre des échéances du prêt « Guizeh2 »;

- 11.522,65 € au titre des échéances du prêt « privilège emprunteur », avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 août 2016.

- Dans tous les cas, condamner la société Acte vie aux dépens et à lui payer la somme de de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 janvier 2022, la SA Acte vie - Groupe Camacte demande à la cour, sur le fondement des articles 74 du code de procédure civile, 1458 du code de procédure civile (version antérieure au 1er mai 2011), 1134 et de 2061 de l'ancienne version du code civil, L. 132-1 de l'ancienne version du code de la consommation, de :

- confirmer le jugement,

A titre principal,

- rejeter la demande de M. X. de voir les clauses des contrats réputées abusives et non écrites, mais aussi sa demande de condamnation à prendre en charge les échéances des prêts,

à titre subsidiaire,

- limiter sa prise en charge à la période du 22 août 2013 au 21 juillet 2014,

- dans tous les cas, condamner M. X. aux dépens et à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

Vu l'ordonnance de clôture du 15 novembre 2023.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur le caractère abusif des clauses contractuelles :

Aux termes de l'article L. 132-1, alinéa 1er, devenu L. 212-1, alinéa 1er, du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont « abusives » les clauses qui ont « pour objet ou pour effet » de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un « déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Selon l'alinéa 7 du même article, devenu l'alinéa 3 de l'article L. 212-1, l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens du premier alinéa, ne porte pas sur la « définition de l'objet principal du contrat » pour autant que les clauses soient rédigées « de façon claire et compréhensible ».

Sur le fondement de ces dispositions, il est jugé, par exemple, que les clauses du contrat qui « excluent de la garantie du conducteur et de la garantie des dommages subis par le véhicule assuré les sinistres survenus lorsque le conducteur se trouvait sous l'empire d'un état alcoolique, en ce qu'elles délimitent le risque assuré et l'engagement de l'assureur, définissent l'objet principal du contrat. Rédigées de façon claire et compréhensible, elles échappent en conséquence à l'appréciation du caractère abusif des clauses contractuelles, au sens de l'article L. 132-1, alinéa 7, devenu L. 212-1, alinéa 3, du code de la consommation » (Cour de cassation, 2e civ., 8 juillet 2021, pourvoi n° 19-25552).

En l'espèce, M. X. prétend que les clauses litigieuses des deux contrats d'adhésion sont abusives puisque, selon lui, elles ne sont pas rédigées en termes clairs et précis.

Il est évident, ce qu'aucune des parties ne conteste, que les clauses litigieuses définissant la notion d'incapacité temporaire totale de travail portent sur « l'objet principal du contrat », c'est-à-dire sur la garantie du paiement des échéances des crédits souscrits en cas de survenance du risque d'incapacité temporaire de travail. Elles ne peuvent donc entrer dans le champ d'application du texte précité relatif aux clauses abusives que sous réserve qu'elles soient formulées de manière « claire et compréhensible ».

 

- s'agissant du contrat « Guizeh 2 »

Dans le contrat « Guizeh 2 », la garantie « incapacité temporaire totale de travail » est définie comme suit : « Lorsque, suite à un accident ou une maladie, l'assuré se trouve temporairement dans l'incapacité physique, constatée médicalement, d'exercer toute activité professionnelle lui procurant gain et profit, l'assurance INCAPACITE TEMPORAIRE TOTALE de travail garantit (...) le paiement à l'organisme de crédit, de tout ou partie des annuités (...) qui arrivent normalement à échéance, selon le tableau d'amortissement du prêt. (...) ».

M. X. soutient que les termes d'« activité professionnelle » et de « gain et profit » sont trop larges et créent un déséquilibre significatif entre la compagnie d'assurance et l'assuré puisqu'au final cette clause n'est pas clairement définie et dépendra uniquement de l'interprétation qu'en fera la compagnie.

Toutefois, la clause est exprimée en des termes suffisamment clairs et compréhensibles, accessibles au consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Elle est dépourvue de toute ambiguïté et ne revêt pas de caractère abusif au sens de l'article L 132-1 du code de la consommation.

 

- S'agissant du contrat « emprunteur privilège »

Dans le contrat « emprunteur privilège », la clause litigieuse est rédigée comme suit à l'article 5.21 : « L'Assuré est considéré en état d'Incapacité Temporaire Totale si, à la suite d'un Accident ou d'une Maladie garantis, il se trouve temporairement dans l'impossibilité physique complète, continue et médicalement reconnue, de se livrer à l'exercice de la profession qu'il exerçait lors de la survenance du Sinistre (...) ».

M. X. soutient que les termes de « profession qu'il exerçait lors de la survenance du Sinistre » sont trop larges et créent un déséquilibre significatif entre la compagnie d'assurance et l'assuré puisqu'au final cette clause n'est pas clairement définie et dépendra uniquement de l'interprétation qu'en fera la compagnie.

Toutefois, une nouvelle fois, ces termes apparaissent suffisamment clairs et compréhensibles pour le consommateur moyen. Ils ne revêtent donc pas de caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

Il y a donc lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu'elle a rejeté la demande de M. X. de voir les clauses des contrats réputées abusives non écrites.

 

Sur la mise en œuvre des garanties incapacité temporaire totale de travail :

- s'agissant du contrat « Guizeh 2 »

L'expert judiciaire, le Dr Z., a constaté, dans un rapport clair et dépourvu d'ambiguïté dont il convient d'adopter les conclusions et avis techniques, que :

- « La victime ne peut exercer des activités manuelles, mais il est apte à exercer un travail administratif de gérance et de surveillance de son entreprise.

- Son état n'entraîne pas d'incapacité temporaire totale telle que définie au contrat.

- Dans le cadre du contrat Guizeh 2, l'état de santé de Monsieur X. ne le mettait pas dans l'incapacité physique d'exercer toute activité professionnelle lui procurant gains ou profits ».

M. X. prétend qu'à la suite de ses problèmes de santé, il s'est trouvé temporairement dans l'incapacité physique d'exercer toute activité professionnelle lui procurant gain et profit, au sens du contrat « Guizeh 2 ».

Toutefois, s'il démontre avoir fait l'objet d'arrêts de travail continus du 20 novembre 2012 au 25 août 2017, date à laquelle il a été déclaré en invalidité, il échoue à rapporter la preuve qu'il ne pouvait pas exercer d'activité professionnelle lui procurant gain et profit.

Contrairement à ce qu'affirme M. X., il n'existe aucune « incohérence » entre les rapports des experts Z. (expert judiciaire) et Y. (expert désigné par la SA Acte vie - Groupe Camacte), puisqu'au contraire leurs conclusions sont rigoureusement identiques :

- L'expert judiciaire Z. expose que Monsieur X. est apte à exercer un travail administratif de gérance et de surveillance de son entreprise ;

- Quant à l'expert Y., il expose que la pathologie présentée par l'assuré peut limiter certaines activités manuelles de force ou de port de charges très lourdes, mais que cet état est compatible avec une activité de gestion de chef d'entreprise et permettant la surveillance, la direction et la gestion de l'entreprise ainsi que les travaux de manutention légère.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que l'état de santé de Monsieur X. n'a pas entraîné une incapacité temporaire totale telle que définie dans la clause ITT du contrat « Guizeh 2 ».

Monsieur X. devra donc être débouté de sa demande à ce titre.

 

- s'agissant du contrat « emprunteur privilège »

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire du Docteur Z. du 4 novembre 2014 que dans le contrat « emprunteur privilège », l'état de santé de Monsieur X. « n'entraînait pas une impossibilité physique complète à l'exercice de la profession de chef d'entreprise dans la restauration, cet état de santé était compatible avec une activité de direction et de gestion de son entreprise ».

Suivant ces conclusions, le premier juge a estimé que l'état de santé de Monsieur X. n'entraînait pas l'impossibilité physique complète d'exercer sa profession de chef d'entreprise dans la restauration.

Toutefois, Monsieur X. rétorque qu'il est avant tout cuisinier. Il produit, à cet effet :

- son diplôme de baccalauréat professionnel spécialité « restauration » ;

- un article de presse du Midi libre le présentant comme « chef propriétaire » de l'Auberge de [Adresse 5] ;

- les statuts de la SARL Auberge de [Adresse 5] du 3 mai 2001 le définissant comme « gérant / cuisinier » ;

- une attestation de M. [E], son expert-comptable, qui indique que la SARL fonctionnait avec Monsieur X. comme cuisinier jusqu'à son arrêt de travail et que, par la suite, le chiffre d'affaires de cette société s'est effondré.

Ces différents documents permettent de conclure que Monsieur X. s'est trouvé dans l'impossibilité physique complète et continue de se livrer à l'exercice de la profession qu'il exerçait lors de la survenance du sinistre, à savoir certes celle d'un « chef d'entreprise dans la restauration » mais dont l'activité principale consistait à être « cuisinier ».

C'est donc à tort que le premier juge a estimé que Monsieur X. échouait à démontrer qu'il ne faisait pas appel à un cuisinier salarié extérieur. Au contraire, les éléments de preuve rapportés par M. X. établissent qu'il était cuisinier au sein de son restaurant.

Il y a donc lieu de condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à prendre en charge les échéances de remboursement du prêt assuré à partir du 22 août 2013 (arrêt de la prise en charge de la SA Acte vie - Groupe Camacte) et jusqu'à la date de la consolidation.

Or, les parties s'opposent sur la date de fixation de la consolidation : l'assureur s'en tient à la date retenue dans l'expertise judiciaire du Dr Z. du 4 novembre 2014, soit le 21 juillet 2014, date de la consultation du professeur [H].

Toutefois, Monsieur X. produit un rapport d'expertise amiable du Docteur [R] [T] [U] du 26 septembre 2016 faisant état de son hospitalisation durant la période du 8 au 21 avril 2015 pour « rééducation spécialisée et prise en charge psychologique » devant conduire à une date de consolidation « non acquise avant 3 mois ».

Au regard de cette hospitalisation postérieure au rapport d'expertise judiciaire (dont la réalité n'est pas contestée), il y a lieu de faire droit à la demande de prise en charge de Monsieur X. pour la période du 22 août 2013 au 28 janvier 2015, date du remboursement anticipé du prêt à la suite du décès de Madame W. X.

Il y a donc lieu de condamner la SA Acte vie - Groupe Camacte à payer à M. X. la somme de 11 522,65 € au titre des échéances du prêt « privilège emprunteur », avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 août 2016.

 

Sur les demandes accessoires :

Succombant pour l'essentiel dans ses prétentions, la SA Acte vie - Groupe Camacte supportera les dépens de première instance et d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté M. X. de ses demandes au titre du prêt « privilège emprunteur »,

- condamné M. X. aux dépens en ce compris les frais de l'expertise du Dr Z.,

- condamné M. X. à payer à la SA Acte vie - Groupe Camacte la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la SA Acte vie - Groupe Camacte à payer à M. X. la somme de 11.522,65 € au titre des échéances du prêt « privilège emprunteur », avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 août 2016,

Déboute la SA Acte vie - Groupe Camacte de ses demandes,

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la SA Acte vie - Groupe Camacte aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;

Condamne la la SA Acte vie - Groupe Camacte à payer à M.X. une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT