CA PAU (2e ch. sect. 1), 27 février 2024
CERCLAB - DOCUMENT N° 10719
CA PAU (2e ch. sect. 1), 27 février 2024 : RG n° 21/01841 ; arrêt n° 24/714
Publication : Judilibre
Extrait : « L'intimée n'a pas conclu sur la demande de réputer non-écrite la clause d'indemnité de résiliation sur le fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation.
L'article 5 du contrat liant les parties, prévoyant le versement d'une indemnité de résiliation en cas de défaillance du locataire calculée selon certains paramètres dont la « valeur actualisée du bien à la date de la résiliation du contrat », stipule que « la valeur vénale est celle obtenue par le bailleur s'il vend le bien restitué ou repris. La restitution du véhicule, dans les conditions de l'article 13, interviendra dès que la résiliation aura été prononcée ».
Mais, ces stipulations qui imposent au locataire de restituer le véhicule loué dès que la résiliation aura été prononcée, et l'empêche ainsi de mettre en œuvre la faculté de présentation d'un acquéreur impérativement ouverte par les articles L. 311-31 et D. 311-13 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Par conséquent, il y a lieu de réputer non-écrite la clause du contrat relative à l'indemnité de résiliation, ce dont il résulte que la bailleresse doit être déboutée de sa demande de paiement de celle-ci. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PAU
DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/01841. Arrêt n° 24/714. N° Portalis DBVV-V-B7F-H4L5. Nature affaire : Crédit-bail ou leasing - Demande en paiement des loyers et/ou en résiliation du crédit-bail.
ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 février 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
APRÈS DÉBATS à l'audience publique tenue le 9 janvier 2024, devant : Monsieur Philippe DARRRACQ, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l'appel des causes.
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Jeanne PELLEFIGUES et en a rendu compte à la Cour composée de : Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller, Madame Joëlle GUIROY, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur X.
né le [Date naissance 1] à [Localité 5], de nationalité française, [Adresse 3], [Localité 2], Représenté par Maître Béatrice BLAZY-ANDRIEU, avocat au barreau de Bayonne
INTIMÉE :
SARL VOLKSWAGEN BANK GMBH
immatriculée au RCS de Pontoise sous le n° XXX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social sis en Allemagne [Adresse 6], et en France, [Adresse 4], Représentée par Maître Christophe DUALE de la SELARL DUALE-LIGNEY-BOURDALLE, avocat au barreau de Pau, Assistée de Maître Stéphanie BORDIEC (SAS Maxwell Maillet Bordiec), avocat au barreau de Bordeaux
sur appel de la décision en date du 13 NOVEMBRE 2019 rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE BAYONNE
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS et MOYENS DES PARTIES :
Suivant offre préalable acceptée le 4 novembre 2016, la société Volkswagen bank GMBH (la bailleresse) a conclu avec M. X. (locataire) un contrat de location avec option d'achat portant sur un véhicule de marque Volkswagen modèle Golf d'une valeur de 35.235 euros, d'une durée de 36 mois, prévoyant le versement d'un premier loyer de 10.011 euros, suivi de 35 loyers de 358,48 euros, avec faculté de lever l'option d'achat en fin de contrat moyennant le paiement de la somme de 15.657,90 euros.
Des loyers demeurant impayés, et après une vaine mise en demeure du 20 février 2018, et par une seconde lettre recommandée avec accusé de réception du 2 mars 2018, la bailleresse a résilié le contrat.
Le 27 septembre 2018, le véhicule a été vendu aux enchères publiques au prix de 16.000 euros.
Suivant exploit du 5 septembre 2019, la bailleresse a fait assigner M. X. par devant le tribunal d'instance de Bayonne en paiement des causes du contrat de location avec option d'achat.
Par jugement réputé contradictoire du 13 novembre 2019, le tribunal a condamné M. X. à payer à la société Volkswagen bank GMBH la somme de 12.995,05 euros avec intérêts au taux de 18 % à compter du décompte actualisé du 16 août 2019 sur la somme de 9.977,79 euros, outre les dépens et une indemnité de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement a été signifié le 11 septembre 2019 dans les formes de l'article 656 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 6 mai 2021, le premier président a relevé M. X. de la forclusion encourue et l'a autorisé à former appel de ce jugement.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 3 juin 2021, M. X. a relevé appel du jugement.
Par ordonnance du 9 novembre 2022, confirmé par un arrêt de la cour de céans du 15 juin 2023, le magistrat de la mise en état a déclaré irrecevable l'appel incident du 2 décembre 2021 formé par l'intimée et déclaré recevables les conclusions de l'appelant du 7 mars 2022.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 13 décembre 2023.
* * *
Vu les dernières conclusions notifiées le 7 mars 2022 par M. X. qui a demandé à la cour de réformer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de :
A titre principal :
- juger abusive et réputée non écrite la clause du contrat relative à l'indemnité de résiliation figurant au paragraphe 5.1
- juger qu'il n'est redevable d'aucun intérêt de retard conventionnel
- juger qu'il n'est redevable d'aucune indemnité sur impayés
- en conséquence, juger qu'il n'est redevable que des seuls loyers échus du 20 septembre 2017 au 20 février 2018 à hauteur de 2.150,88 euros.
A titre subsidiaire :
- juger que le cumul des clauses présente un caractère disproportionné
- en conséquence, ramener le montant de la clause pénale à de plus justes proportions.
En tout état de cause, condamner l'intimée au paiement d'une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
* * *
Vu les dernières conclusions notifiées le 2 décembre 2021, sauf en ce qu'elle porte appel incident, de la société Volkswagen bank GMBH qui a demandé à la cour de :
- lui donner acte qu'elle renonce à ses demandes au titre des intérêts au taux contractuel de 18 %
- débouter M. X. du surplus de ses demandes
- confirmer le jugement entrepris, sauf sur le montant de la condamnation et condamner M. X. à lui payer la somme de 9.977,79 euros assortie des intérêts calculés au taux légal à compter de la mise en demeure, et y ajoutant, de condamner M. X. au paiement d'une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
L'intimée, qui a déclaré renoncé aux intérêts de retard au taux conventionnel, demande le paiement de la somme de 9.977,79 euros ainsi décomposée :
- 8 loyers impayés : 2.150,88 euros
- indemnité sur impayés : 1.284,90 euros
- indemnité de résiliation :
- loyers restant dus : 6.884,11 euros
- valeur résiduelle : 15.657,90 euros
- prix de vente du véhicule : - 16.000 euros
Au soutien de son appel, M. X. fait valoir que :
- sur l'indemnité de résiliation, la clause doit être réputée non-écrite en ce qu'elle impose au locataire la restitution immédiate du véhicule en cas de résiliation du contrat, la bailleresse ayant manqué à son obligation d'avertir le locataire de la possibilité de trouver lui-même un acquéreur.
L'appelant en déduit que la bailleresse a commis une faute dans l'exécution de son obligation qui lui a fait perdre une chance de vendre lui-même le véhicule pour en tirer un meilleur prix.
Il ajoute que le véhicule a été restitué par son épouse, dont il était séparé, de sorte qu'en acceptant la restitution du véhicule par une tierce personne, la bailleresse a commis une faute supplémentaire dans l'exécution de ses obligations lui ayant fait perdre une chance de vendre lui-même le véhicule pour en tirer le meilleur prix
- sur « l'indemnité sur impayés », son principe et son exigibilité ne sont pas démontrés
- à titre subsidiaire, si l'indemnité de résiliation était due, le cumul de cette clause pénale avec les autres indemnités présente un caractère disproportionné et il y a lieu de réduire la clause pénale à de plus justes proportions.
L'intimée, qui conteste les fautes qui lui sont imputées, objecte que l'appelant ne caractérise pas la perte de chance alléguée alors qu'il s'est désintéressé du véhicule laissé à son épouse et qu'il n'avait pas fait connaître sa nouvelle adresse.
Elle s'oppose à toute réduction de l'indemnité de résiliation qui répare son préjudice économique important subi du fait de la défaillance précoce du locataire.
Sur l'indemnité de résiliation :
L'intimée n'a pas conclu sur la demande de réputer non-écrite la clause d'indemnité de résiliation sur le fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation.
L'article 5 du contrat liant les parties, prévoyant le versement d'une indemnité de résiliation en cas de défaillance du locataire calculée selon certains paramètres dont la « valeur actualisée du bien à la date de la résiliation du contrat », stipule que « la valeur vénale est celle obtenue par le bailleur s'il vend le bien restitué ou repris. La restitution du véhicule, dans les conditions de l'article 13, interviendra dès que la résiliation aura été prononcée ».
Mais, ces stipulations qui imposent au locataire de restituer le véhicule loué dès que la résiliation aura été prononcée, et l'empêche ainsi de mettre en œuvre la faculté de présentation d'un acquéreur impérativement ouverte par les articles L. 311-31 et D. 311-13 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Par conséquent, il y a lieu de réputer non-écrite la clause du contrat relative à l'indemnité de résiliation, ce dont il résulte que la bailleresse doit être déboutée de sa demande de paiement de celle-ci.
Sur « l'indemnité sur impayés » :
L'intimée n'a pas conclu sur le fondement de cette indemnité, ni sur ses modalités de calcul, le décompte versé aux débats ne visant aucune clause contractuelle et faisant référence à un pourcentage mais sans en préciser le taux ni l'assiette.
La demande de paiement de cette indemnité n'étant pas fondée en droit, l'intimée sera déboutée de ce chef de demande.
En définitive, M. X. sera condamné à payer, au titre des loyers échus impayés, la somme de 2.150,88 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 février 2018, régulièrement notifiée à l'adresse déclarée par le locataire.
M. X. sera condamné aux dépens de première instance et d'appel et les parties déboutées de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
DECLARE réputée non-écrite la clause du contrat liant les parties relative à l'indemnité de résiliation en cas de défaillance du locataire,
DEBOUTE la société Volkswagen bank GMBH de sa demande de paiement de l'indemnité de résiliation ainsi que de l'indemnité sur impayés,
CONDAMNE M. X. à payer à la société Volkswagen bank GMBH la somme de 2.150,88 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 février 2018,
CONDAMNE M. X. aux dépens de première instance et d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente