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CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 21 février 2024

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 21 février 2024
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 1re ch. civ. sect. A
Demande : 22/01255
Décision : 98/24
Date : 21/02/2024
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 25/03/2022
Numéro de la décision : 98
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10745

CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 21 février 2024 : RG n° 22/01255 ; arrêt n° 98/24 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « La caution est libre de choisir le recours qu'elle souhaite exercer. Contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, elle peut même choisir d'exercer les deux recours, soit successivement, soit simultanément, ou encore changer de recours en cours d'instance (Com. 30 nov. 1948, Bull. civ. II, n° 264). La seule limite est qu'elle ne peut cumuler le produit des deux actions. En conséquence et en l'espèce, la demande d'irrecevabilité présentée par Mme X., liée à l'absence de choix du fondement du recours, ne peut aboutir. En outre, la SA CEGC exerce son recours personnel fondé sur l'article 2305 du code civil.

Cet article, dans sa version applicable au litige, dispose que la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur. Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais ; néanmoins la caution n'a de recours que pour les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle. Elle a aussi recours pour les dommages et intérêts, s'il y a lieu. »

2/ « Il en est découlé une jurisprudence bien établie, selon laquelle l'emprunteur ne peut opposer à la caution qui a payé la dette et qui exerce son recours personnel, les contestations qu'il aurait pu faire valoir contre le créancier d'origine, à savoir le prêteur de deniers.

Mme X. soutient que cette disposition viole son droit au procès équitable garanti par l'article 6-1 de la CESDHLF, en créant un déséquilibre entre la banque et le consommateur, puisqu'il suffit au prêteur d'une simple demande à la caution pour être remboursé, en neutralisant la défense du consommateur.

Ce faisant, Mme X. omet qu'un prêt oblige celui à qui il est consenti à le rembourser, et se méprend sur la nature du cautionnement qui est une garantie contre la défaillance de l'emprunteur, alternative à une prise d'inscription d'hypothèque sur le bien financé, et destinée à favoriser l'accès au crédit.

Quoi qu'il en soit, l'article 2305 du code civil n'a pas pour effet de créer un déséquilibre entre les parties, en privant le consommateur du droit à un procès équitable, puisque l'article 2308 du code civil met à la charge de la caution une obligation d'avertissement de l'emprunteur préalable à son paiement, sous peine d'être déchue de son recours au cas où l'emprunteur aurait eu des moyens de faire déclarer la dette éteinte ou, permettant de mettre en cause sa responsabilité, dans l'hypothèse où bien qu'informée par l'emprunteur d'une difficulté relative à l'existence, à l'exigibilité ou au quantum de la créance de la banque, la caution réglerait néanmoins les sommes réclamées par la banque.

Par ailleurs, l'emprunteur n'est pas privé de son action en responsabilité contre la banque qui aurait, le cas échéant, obtenu le remboursement total et anticipé de sa créance en fraude de ses droits. Il suffisait ainsi à Mme X. d'appeler la Caisse d'Epargne d'Alsace à la cause pour lui opposer la désolidarisation, l'exception d'inexécution, la nullité du contrat de prêt ou l'existence de clauses abusives étant rappelé que, concernant le dol, le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date de la découverte du vice et que l'action fondée sur les clauses abusives est imprescriptible.

Enfin, c'est à tort que Mme X. indique dans ses conclusions que la SA CEGC vient aux droits de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace.

Le fondement de l'action récursoire exercée par une caution qui a désintéressé le créancier contre le débiteur principal, même tiré du recours personnel prévu par l'article 2305 du code civil n'entrave donc pas l'exercice du droit du débiteur à un procès équitable, la propriété de Mme X. qui s'était engagée à rembourser le prêt souscrit en contrepartie de la somme perçue. »

3/ « L'action engagée sur le fondement de l'article 2305 du code civil, ne permet pas au débiteur d'opposer à la caution les exceptions personnelles ou arguments tirés du contrat principal qu'il pouvait opposer au créancier.

Ainsi, les demandes de nullité du contrat de prêt et consécutivement du contrat de cautionnement, de constatation de clauses abusives, d'exception d'inexécution, de compensation et de désolidarisation seront rejetées. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A

ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 1 A 22/01255. Arrêt n° 98/24. N° Portalis DBVW-V-B7G-HZUY. Décisions déférées à la Cour : 29 mai 2020 et 11 Février 2022 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE - 1ère chambre civile.

 

APPELANTE :

Madame X. divorcée Y.

[Adresse 3], [Localité 4], Représentée par Maître Guillaume HARTER, avocat à la Cour

 

INTIMÉS :

Monsieur Y.

[Adresse 1], [Localité 8] (pays), non représenté, assigné par voie d'huissier à l'étranger le 22.07.2022

SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS (CEGC)

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 2], [Adresse 2], [Localité 6], Représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 11 décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de : M. WALGENWITZ, Président de chambre, M. ROUBLOT, Conseiller, Mme RHODE, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRÊT : - Réputé contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par M. Franck WALGENWITZ, président et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon offre de prêt acceptée le 22 septembre 2009, la CAISSE D'ÉPARGNE ALSACE a consenti à Monsieur Y. et Madame Y. un prêt d'un montant de 277.000 CHF amortissable sur 240 mois au taux de 2,34 % indexé sur le LIBOR 3 mois, plafonné à 3,34 %.

Se prévalant d'un engagement de caution, la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions (ci-après CEGC) s'est acquittée de la somme de 150.773 € auprès de la CAISSE D’ÉPARGNE D'ALSACE, selon quittance subrogative en date du 30 mai 2018.

Par assignations respectivement délivrées à étude le 27 décembre 2018 et remise à Mme le Procureure de la République de Mulhouse le 24 janvier 2019 pour signification, selon les formes applicables aux notifications internationales, la CEGC a attrait Mme X. divorcée Y. et M. Y. (demeurant en Thaïlande) devant le tribunal judiciaire de Mulhouse.

Par ordonnance du 29 mai 2020, le juge de la mise en état de la première chambre civile du tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- Déclaré irrecevable la demande de production du justificatif de la signification, ainsi que du - placement de l'assignation délivrée à Mr Y. et de la date de placement présentée par X. ;

Rejeté les demandes de production de pièces présentées par Mme X. ;

- Débouté X. de sa demande tendant à ce que soit constatée l'extinction de l'instance ;

- Condamné X. à payer à la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Dit que les dépens suivront le sort de l'instance au fond.

Par jugement rendu le 11 février 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- Déclaré irrecevable la demande de Madame X. tendant à ce que soit constatée la caducité de l'assignation qui lui a été délivrée ;

- Rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir de la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS soulevée par Madame X. ;

- Rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de recours de la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS soulevée par Madame X. ;

- Déclaré recevables les demandes formées par la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à prononcer la nullité du prêt consenti par la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à prononcer la nullité du cautionnement du prêt ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à déclarer abusives et réputées non écrites les clauses de paiement en monnaie étrangère et d'indexation figurant au contrat de prêt ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à la condamnation de la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS venant aux droits de la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE à lui restituer ainsi qu'à Monsieur Y. l'intégralité des sommes payées par celle-ci ou par Monsieur Y. et notamment le montant du principal déjà remboursé, des intérêts versés ainsi que de toutes les commissions qui ont été perçues, à la date de la décision à intervenir au titre du prêt du 22 septembre 2009 en échange d'une restitution par ces derniers à la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS des prestations reçues ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à la compensation des sommes que chacune des parties doit restituer à l'autre et dire que cette compensation prendra effet au jour de la décision à intervenir ;

- Rejeté la demande de Madame X. tendant à juger qu'elle n'est tenue que de restituer la somme prêtée en euros à sa valeur à la date des prêts, et les intérêts conventionnels étant remplacés par le taux légal suivant ses modifications successives ;

- Condamné solidairement Madame X. et Monsieur Y. à payer à la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS la somme de 150.773,00 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2018 et jusqu'à parfait paiement ;

- Ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

- Rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Madame X. à l'encontre de la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS ;

- Déclaré irrecevables les demandes formées par Madame X. à l'encontre de Monsieur Y. ;

- Condamné Madame X. et Monsieur Y. in solidum à payer à la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS la somme de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejeté la demande de Madame X. sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné Madame X. et Monsieur Y. in solidum aux dépens de l'instance ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la décision en toutes ses dispositions.

Mme X. a interjeté appel de ces décisions par déclaration déposée le 25 mars 2022.

La SA Compagnie Européenne de Garanties et Cautions - CEGC s'est constituée intimée le 29 avril 2022.

[*]

Dans ses dernières conclusions datées du 12 septembre 2023 et transmises par voie électronique le même jour, auxquelles est joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, Mme X. demande à la cour de :

REFORMER et subsidiairement INFIRMER l'ordonnance rendue par le Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de Mulhouse le 29 mai 2020 en toutes ses dispositions.

Et statuant à nouveau :

* ENJOINDRE à la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS de lui communiquer au plus tard dans les 15 jours de l'ordonnance à intervenir :

- Le justificatif du placement de l'assignation délivrée le 27 décembre 2018 à Mme X. et de la date de placement,

- Le justificatif du placement de l'assignation délivrée le 14 janvier 2019 à Mme X. et de la date de placement,

- Le justificatif de la signification, ainsi que du placement de l'assignation délivrée à Mr Y. et de la date de placement,

* JUGER que la délivrance de deux assignations successives identiques doit être analysée comme un acte de renonciation à la 1ère assignation, et si cette assignation a été placée comme un désistement d'instance,

* JUGER qu'il n'est pas justifié du placement de l'assignation du 21 décembre 2018 dans le délai de quatre mois ;

* JUGER que l'assignation délivrée le 14 janvier 2019 à Mme X. est caduque si elle n'a pas été placée dans un délai de 4 mois,

* JUGER dans ce cas que l'instance est éteinte à l'encontre de Mme X.,

* JUGER que la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS doit justifier de la délivrance d'une assignation délivrée conformément à l'article 688 du Code de Procédure Civile à Mr Y. pour que le juge saisi de l'affaire puisse statuer au fond,

REFORMER et subsidiairement INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Mulhouse le 11 février 2022 en toutes ses dispositions

Et statuant à nouveau :

1. A TITRE PRINCIPAL

- CONSTATER la caducité de l'assignation signifiée à Mme X.

- CONSTATER la caducité de l'assignation signifiée à Mme X. dont il n'est pas justifié par le greffe du placement dans un délai de 4 mois.

2. A TITRE SUBSIDIAIRE

- JUGER et à défaut DECLARER que la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS irrecevable en ses demandes à l'encontre de Mme X., faute de qualité à agir, et à défaut d'intérêt à agir.

3. A TITRE TRES SUBSIDIAIRE

- JUGER la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS mal fondée en ses demandes et l'en DEBOUTER.

- JUGER que la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS n'a point de recours contre Mme X. et l'en DEBOUTER.

A DEFAUT

- JUGER Mme X. recevable et bien fondée en son exception d'inconventionnalité de l'article 2305 du Code civil (anciennement 2028 du Code civil) et en écarter l'application,

- RECEVOIR Mme X. en ses moyens et exceptions,

ET

JUGER nul le prêt consenti par la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE à Mme X. pour dol et à défaut comme obligeant l'emprunteur à rembourser le prêt en francs suisses, et par voie de conséquence le cautionnement du prêt, ces contrats étant interdépendants ; subsidiairement, JUGER abusives et REPUTER non écrites les clauses de paiement en monnaie étrangère et d'indexation figurant au contrat de prêt, à savoir les clauses de l'article 'b) Précisions sur certaines caractéristiques' des conditions particulières et des articles 13,5,8 des conditions générales,

JUGER que les prestations reçues par Mme X. et Mr Y. au titre du prêt du 22 septembre 2009, devront être restituées à la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS venant aux droits de la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE, notamment le montant du capital reçu à sa contrevaleur en euros à la date de mise à disposition des fonds ou du contrat de prêt, et que la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS devra concomitamment restituer à Mme X. l'intégralité des sommes payées par celle-ci ou par Mr Y. et notamment le montant du principal déjà remboursé, des intérêts versés ainsi que de toutes les commissions qui ont été perçues, à sa contrevaleur en euros à la date du paiement effectué,

ORDONNER la compensation des sommes que chacune des parties doit restituer à l'autre et dire que cette compensation prendra effet au jour de la décision à intervenir,

JUGER dans tous les cas que Mme X. n'est pas solidaire de Mr Y. au titre du prêt conclu avec la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'ALSACE,

JUGER que Mme X. est bien fondée à opposer à la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS l'exception d'inexécution faute de communication des tableaux d'amortissement du prêt tenant compte des révisions trimestrielles du taux d'intérêt conventionnel,

JUGER que la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS ne rapporte aucune preuve que les sommes qu'elle a payées sont dues,

JUGER que l'indemnité sollicitée en cas de défaillance de l'emprunteur doit être réduite à 1 euro,

DEBOUTER la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS de sa demande d'intérêts excédant le taux conventionnel au jour de la déchéance du terme et de sa demande de capitalisation des intérêts,

DEBOUTER la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS de sa demande de voir condamner Mme X. solidairement avec Mr Y.

CONDAMNER la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS à payer à titre de dommages et intérêts à Mme X. une somme équivalente à celle à laquelle Mme X. sera condamnée au profit de la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS et ORDONNER la compensation des créances réciproques, et ce pour le paiement hâtif qui l'a empêchée d'opposer au prêteur les exceptions tirées des rapports entre ce dernier et elle-même,

CONDAMNER Mr Y. à garantir Mme X. du montant des condamnations prononcées à son encontre et le CONDAMNER à lui payer en sus 15 000 € pour le préjudice moral et les soucis que ses manquements contractuels ont causé à Mme X..

Dans tous les cas

CONDAMNER la société COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS à payer à Mme X., la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du CPC.

La CONDAMNER au paiement des dépens de première instance et d'appel.

[*]

Dans ses dernières écritures datées du 10 octobre 2023 et transmises par voie électronique le même jour, auxquelles est joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, la SA CEGC demande à la cour de :

RECEVOIR la Compagnie Européenne de Garanties et Cautions en ses présentes écritures,

Y faisant droit,

DECLARER Madame X. mal fondée en son appel ;

CONFIRMER l'ordonnance rendue le 29 mai 2020 par le Juge de la mise en état de la Première Chambre Civile du Tribunal Judiciaire de Mulhouse (RG n° 19/00099) en toutes ses dispositions ;

CONFIRMER le jugement rendu le 11 février 2022 par la Première Chambre Civile du Tribunal Judiciaire de Mulhouse (RG n°19/00099) en toutes ses dispositions ;

DEBOUTER Madame X. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

CONDAMNER Madame X. au paiement de la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel par application de l'article 696 du Code de procédure civile.

[*]

Monsieur Y. n'a pas constitué avocat.

Par acte d'huissier du 22 juillet 2022, Mme X. a fait signifier, pour signification selon les formes applicables aux notifications internationales, à Mme la Procureure de la République près le tribunal judiciaire de Colmar :

- DEUX COPIES D'UN ACTE DE SIGNIFICATION de déclaration d'appel et de conclusions avec assignation devant la Cour d'Appel de COLMAR, accompagné d'une traduction en langue Thai, ainsi que du formulaire F3.

Par acte d'huissier du 23 septembre 2022, la SA CEGC a fait signifier, pour signification selon les formes applicables aux notifications internationales, à M. le Procureur Général de la Cour d'appel de Colmar :

1° Deux expéditions d'une signification de conclusions de réplique et bordereau de communication de pièces en date du 14 septembre 2022 de Maître Patricia CHEVALLIER-GASCHY avocat à la cour d'appel de Colmar dans une procédure pendante devant la première chambre civile de la cour d'appel de Colmar sous référence 1A 22/01255 destinées à Monsieur Y. demeurant [Adresse 1] THAILANDE

2° Le formulaire F2 dûment complété.

Par acte d'huissier du 13 juillet 2023, la SA CEGC a fait signifier, pour signification selon les formes applicables aux notifications internationales, à M. le Procureur Général de la Cour d'appel de Colmar :

1° Deux expéditions d'une signification de conclusions récapitulatives et bordereau de communication de pièces en date du 16 juin 2023 de Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY avocat à la cour d'appel de Colmar dans une procédure pendante devant la première chambre civile de la cour d'appel de Colmar sous référence 1A 22/01255 destinées à Monsieur Y. demeurant [Adresse 1] THAILANDE

2° Le formulaire F2 dûment complété.

Par acte d'huissier du 25 septembre 2023, Mme X. a fait signifier, pour signification selon les formes applicables aux notifications internationales, à M. le Procureur général de la cour d'appel de Colmar :

- Un formulaire F3 de transmission d'acte, en langue française,

- Un projet d'acte de signification de Conclusions Récapitulatives, en langue française,

- Ses Conclusions Récapitulatives devant la Cour d'Appel de COLMAR, rédigées pour la partie requérante par Maître Guillaume HARTER, Avocat à la Cour, sur 53 pages comprenant rappel des faits et de la procédure, discussion, conclusions et bordereau de pièces communiquées, en langue française.

Par acte d'huissier du 19 octobre 2023, la SA CEGC a fait signifier, pour signification selon les formes applicables aux notifications internationales, à M. le Procureur général de la cour d'appel de Colmar :

1° Deux expéditions d'une signification de conclusions récapitulatives et bordereau de communication de pièces en date du 10 octobre 2023 de Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, Avocat à la Cour d'Appel de Colmar dans une procédure pendante devant la première chambre civile de la Cour d'Appel de Colmar sous la référence 1A 22/01255 destinées à Monsieur Y. demeurant [Adresse 1] THAILANDE

2° Le formulaire F3 dûment complété.

[*]

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de chacune des parties, il conviendra de se référer à leurs dernières conclusions respectives.

La clôture de la procédure a été prononcée le 8 novembre 2023 et l'affaire renvoyée à l'audience de plaidoirie du 11 décembre 2023.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur l'ordonnance du 29 mai 2020 :

Sur la caducité de l'assignation :

L'article 757 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige, dispose que le tribunal est saisi, à la diligence de l'une ou l'autre partie, par la remise au greffe d'une copie de l'assignation. Cette remise doit être faite dans les quatre mois de l'assignation, faute de quoi celle-ci sera caduque, à moins qu'une convention de procédure participative ne soit conclue avant l'expiration de ce délai. Dans ce cas, le délai de quatre mois est suspendu jusqu'à l'extinction de la procédure conventionnelle. La caducité est constatée d'office par ordonnance du président ou du juge saisi de l'affaire. A défaut de remise, requête peut être présentée au président en vue de faire constater la caducité.

En l'espèce, si deux assignations ont été délivrées à Mme X. en date des 27 décembre 2018 et 14 janvier 2019, seule la première a été placée auprès du tribunal judiciaire de Mulhouse selon courrier de Maître T. du 19 février 2019.

Il en résulte que le tribunal n'a pas été saisi par l'assignation du 14 janvier 2019 qui n'a jamais été placée, mais par l'assignation délivrée à Mme X. le 27 décembre 2018, ainsi que le rappellent les décisions déférées.

En conséquence, aucune caducité de l'assignation délivrée le 27 décembre 2018 n'est encourue et il ne peut être jugé que la seconde assignation, jamais placée, vaut désistement de la première en l'absence d'élément démontrant une volonté non équivoque de la CEGC de renoncer au procès.

C'est à juste titre que le premier juge a débouté Mme X. de sa demande, tendant à ce que soit constatée l'extinction de l'instance et a rejeté sa demande tendant à entendre condamner la CEGC à produire le justificatif du placement de l'assignation du 27 décembre 2018, ce justificatif étant déjà produit, ainsi que celui concernant l'assignation du 19 février 2019, le placement n'étant jamais intervenu et le tribunal n'ayant en conséquence jamais été saisi sur la base de cet acte.

 

Sur la signification à M. Y. :

Nul ne plaidant par procureur, c'est à juste titre que le premier juge a rappelé, sans porter atteinte au principe du contradictoire, que Mme X. n'avait pas qualité pour se prévaloir d'une éventuelle nullité de l'assignation délivrée à une autre partie.

En conséquence, la demande de production du justificatif et du placement de l'assignation délivrée à M. Y. sera rejetée.

 

Sur le jugement du 11 février 2020 :

Sur la caducité de l'assignation :

C'est à juste titre que le tribunal a déclaré la demande de Mme X. irrecevable, en rappelant qu'aux termes de l'article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état était seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l'instance.

 

Sur l'intérêt et la qualité à agir de la CEGC :

L'article 122 du code de procédure civile dispose que, constitue une fin de non-recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l'espèce, sur l'acte de prêt du 22 septembre 2009, la SACCEF apparaît en qualité de caution personne morale.

Or, par procès-verbal d'assemblée générale de la SACCEF du 7 novembre 2008, la fusion avec CEGI, devenue CEGC en date du 25 novembre 2008, a été approuvée et a fait l'objet d'une publication dans un journal d'annonces légales en décembre 2008. L'extrait K bis de la SACCEF porte mention de sa radiation à compter du 9 décembre 2008.

Ainsi, lors de la souscription du prêt par M. Y. et Mme X. en date du 22 septembre 2009, la SACCEF ne pouvait s'engager en qualité de caution.

En revanche, est produit un engagement de caution contracté par la CEGC auprès de la Caisse d'Epargne d'Alsace en date du 2 septembre 2009, relatif au prêt litigieux. Aucun élément ne permet de conclure que ce document est un faux.

La CEGC produit également une quittance subrogative établie par le prêteur en date du 30 mai 2018.

Elle justifie ainsi de son intérêt à agir et la cour rappelle, avec les premiers juges, que l'article 2291 du code civil autorise une personne à se rendre caution sans ordre de celui pour lequel elle s'oblige et même à son insu.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré la SA CEGC recevable en ses prétentions.

 

Sur le recours de la caution :

La caution est libre de choisir le recours qu'elle souhaite exercer. Contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, elle peut même choisir d'exercer les deux recours, soit successivement, soit simultanément, ou encore changer de recours en cours d'instance (Com. 30 nov. 1948, Bull. civ. II, n° 264). La seule limite est qu'elle ne peut cumuler le produit des deux actions.

En conséquence et en l'espèce, la demande d'irrecevabilité présentée par Mme X., liée à l'absence de choix du fondement du recours, ne peut aboutir.

En outre, la SA CEGC exerce son recours personnel fondé sur l'article 2305 du code civil.

Cet article, dans sa version applicable au litige, dispose que la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur. Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais ; néanmoins la caution n'a de recours que pour les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle. Elle a aussi recours pour les dommages et intérêts, s'il y a lieu.

 

Sur la déchéance du recours de la caution qui a payé la dette :

L'article 2308 alinéa 2 du code civil dispose que lorsque la caution aura payé, sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier.

Les trois conditions posées par ce texte doivent être cumulativement réunies pour que la caution soit déchue de recours. C'est à la caution qu'il appartient de justifier qu'elle a payé sur demande de la banque et de démontrer qu'elle a averti l'emprunteur qu'elle risquait de payer les sommes restant dues en ses lieu et place dans des conditions lui permettant le cas échéant de s'y opposer.

S'agissant de la nécessité d'une poursuite préalable du créancier, une demande en paiement ou une réclamation du créancier à l'égard de la caution ayant payé, est suffisante pour écarter les dispositions du second alinéa de l'article 2308 du code civil.

En l'espèce, la SA CEGC produit un document intitulé « formulaire de demande de prise en charge » daté du 10 avril 2018, concernant le prêt consenti à « Y. Y. et Z. », faisant état de la première échéance impayée en date du 5 janvier 2018, de la date de la déchéance du terme, soit le 23 mars 2018, du nombre de mensualités impayées à la date de la déchéance du terme, ainsi que des coordonnées des débiteurs. Le formulaire comporte également le nom et numéro de téléphone du gestionnaire du dossier au sein de la Caisse d'Epargne d'Alsace.

Ce formulaire est suffisant pour valoir demande de paiement du créancier auprès de la caution, l'article 2308 du code civil n'exigeant pas, contrairement aux affirmations de Mme X., que des poursuites judiciaires aient été mises en œuvre.

Au surplus, par courrier du 18 avril 2018, la SA CEGC a informé Mme X. de sa saisine en qualité de caution par le prêteur. Dans ce courrier, la CEGC indique : « Nous intervenons auprès de vous en qualité de caution solidaire dans le cadre du prêt qui a été consenti par CE ALSACE à Monsieur Y.. Le CE ALSACE nous a saisi de votre dossier suite à la déchéance du terme qui a été prononcée. Afin de déterminer la solution la plus appropriée au règlement de la dette, nous vous invitons à prendre contact avec nous le plus rapidement possible et à nous retourner le questionnaire ci-joint qui servira de support à cet entretien ».

Certes, le justificatif de remise de ce courrier à Mme X. n'est pas produit. Toutefois, cette dernière n'en conteste pas la réception, se contentant d'en critiquer les termes en estimant que le courrier laissait entendre que la CEGC avait déjà payé les sommes sollicitées par le créancier et qu'il ne l'invitait pas à faire valoir des moyens pour s'opposer au paiement de la dette.

Or, d'une part, aucun élément du courrier ci-dessus rappelé ne permet de conclure que le paiement était déjà intervenu. D'autre part, l'article 2308 du code civil impose à la caution de prévenir le débiteur de son intention de payer, mais non de l'inviter à lui présenter des moyens pour faire déclarer la dette éteinte.

En sus, la SA CEGC n'a payé la dette de Mme X. et M. Y. qu'en date du 30 mai 2018, soit plus d'un mois après l'envoi du courrier d'avertissement permettant à ces derniers, le cas échéant, de s'opposer au paiement.

Dans ces conditions, sans qu'il y ait lieu de vérifier si la troisième condition est remplie, la SA CEGC ne saurait être déchue de son droit d'exercer ses recours.

 

Sur le fondement de l'action en paiement :

En cause d'appel, Mme X. oppose l'inconventionnalité de l'article 2305 du code civil, au regard de l'article 6 alinéa 1 de la CESDHLF et l'article 1er alinéa 1 du protocole additionnel, comme portant atteinte au droit à un procès équitable, en ce que cette disposition a pour effet de la priver du droit d'opposer à la caution les exceptions opposables au prêteur de deniers.

En fondant son action sur l'article 2305 du code civil, la SA CEGC n'exerce pas un recours subrogatoire, mais son recours personnel ayant pour cause le paiement de la dette d'autrui auquel elle s'était engagée, selon les prévisions de l'article 2288, ces dispositions étant envisagées dans leur rédaction applicable à la date des engagements litigieux.

Il en est découlé une jurisprudence bien établie, selon laquelle l'emprunteur ne peut opposer à la caution qui a payé la dette et qui exerce son recours personnel, les contestations qu'il aurait pu faire valoir contre le créancier d'origine, à savoir le prêteur de deniers.

Mme X. soutient que cette disposition viole son droit au procès équitable garanti par l'article 6-1 de la CESDHLF, en créant un déséquilibre entre la banque et le consommateur, puisqu'il suffit au prêteur d'une simple demande à la caution pour être remboursé, en neutralisant la défense du consommateur.

Ce faisant, Mme X. omet qu'un prêt oblige celui à qui il est consenti à le rembourser, et se méprend sur la nature du cautionnement qui est une garantie contre la défaillance de l'emprunteur, alternative à une prise d'inscription d'hypothèque sur le bien financé, et destinée à favoriser l'accès au crédit.

Quoi qu'il en soit, l'article 2305 du code civil n'a pas pour effet de créer un déséquilibre entre les parties, en privant le consommateur du droit à un procès équitable, puisque l'article 2308 du code civil met à la charge de la caution une obligation d'avertissement de l'emprunteur préalable à son paiement, sous peine d'être déchue de son recours au cas où l'emprunteur aurait eu des moyens de faire déclarer la dette éteinte ou, permettant de mettre en cause sa responsabilité, dans l'hypothèse où bien qu'informée par l'emprunteur d'une difficulté relative à l'existence, à l'exigibilité ou au quantum de la créance de la banque, la caution réglerait néanmoins les sommes réclamées par la banque.

Par ailleurs, l'emprunteur n'est pas privé de son action en responsabilité contre la banque qui aurait, le cas échéant, obtenu le remboursement total et anticipé de sa créance en fraude de ses droits. Il suffisait ainsi à Mme X. d'appeler la Caisse d'Epargne d'Alsace à la cause pour lui opposer la désolidarisation, l'exception d'inexécution, la nullité du contrat de prêt ou l'existence de clauses abusives étant rappelé que, concernant le dol, le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date de la découverte du vice et que l'action fondée sur les clauses abusives est imprescriptible.

Enfin, c'est à tort que Mme X. indique dans ses conclusions que la SA CEGC vient aux droits de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Alsace.

Le fondement de l'action récursoire exercée par une caution qui a désintéressé le créancier contre le débiteur principal, même tiré du recours personnel prévu par l'article 2305 du code civil n'entrave donc pas l'exercice du droit du débiteur à un procès équitable, la propriété de Mme X. qui s'était engagée à rembourser le prêt souscrit en contrepartie de la somme perçue.

 

Sur les exceptions opposées par Mme X. :

L'action engagée sur le fondement de l'article 2305 du code civil, ne permet pas au débiteur d'opposer à la caution les exceptions personnelles ou arguments tirés du contrat principal qu'il pouvait opposer au créancier.

Ainsi, les demandes de nullité du contrat de prêt et consécutivement du contrat de cautionnement, de constatation de clauses abusives, d'exception d'inexécution, de compensation et de désolidarisation seront rejetées.

 

Sur les sommes réclamées :

Dans le cadre de l'action personnelle, le débiteur doit à la caution seulement la somme qu'elle a payée au créancier, mais aussi les intérêts de cette somme, qui courent de plein droit, les frais qu'elle aura exposés à l'occasion des poursuites exercées contre elle par le créancier et tous dommages et intérêts pour des préjudices distincts de l'avance de fonds à laquelle elle aura été contrainte.

En conséquence, dans le cadre d'un recours personnel :

- La somme due peut-être supérieure à celle prévue au contrat de prêt,

- La caution n'a pas à justifier de l'exigibilité de la créance ni du montant restant dû mais seulement du paiement fait entre les mains du créancier principal ce qui est attesté en l'espèce par la production de la quittance subrogative,

- La caution n'est pas fondée à solliciter l'application du taux conventionnel,

- Le débiteur ne peut solliciter la réduction de la clause pénale dont la caution s'est acquittée.

En outre, il résulte de l'article 2307 du code civil, dans sa version applicable au litige, que, lorsqu'il y a plusieurs débiteurs principaux solidaires d'une même dette, la caution qui les a tous cautionnés, a, contre chacun d'eux, le recours pour la répétition du total de ce qu'elle a payé.

Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné solidairement Madame X. et Monsieur Y., à payer à la SA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET DE CAUTIONS la somme de 150.773 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2018 et jusqu'à parfait paiement.

La règle édictée par l'article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l'espèce, selon lequel aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 du même code ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles, fait toutefois obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1343-2 précité. Cette interdiction concerne tant l'action du prêteur contre l'emprunteur que les recours personnel et subrogatoire exercés contre celui-ci par la caution (1ère Civ., 20 avr. 2022, n° 20-23.617). Le jugement querellé sera infirmé en conséquence.

 

Sur les demandes reconventionnelles de Mme X. :

Sur la faute de la SA CEGC :

Il a été démontré que la SA CEGC a procédé au paiement suite à une demande de la Caisse d'Epargne Alsace et en a avisé, au préalable, les cautions, leur laissant un délai suffisant pour s'opposer à tout paiement.

Aucune faute ne lui est en conséquence imputable, de sorte que c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par Mme X. à l'encontre de la SA CEGC.

 

Sur la demande dirigée à l'encontre de M. Y. :

Le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Mulhouse le 4 novembre 2011 a prononcé le divorce de M. Y. et Mme X. et a homologué la convention signée par les époux le 12 juin 2011, portant règlement des effets du divorce en lui conférant force exécutoire.

Il résulte de ladite convention que : « Les époux ont acquis dans le cadre des dispositions sur la défiscalisation un appartement sis [Adresse 5]. Cet appartement est évalué à la somme de 175 000 euros et est actuellement loué moyennant le versement d'un loyer de 881,38 euros à Madame [D] (.). Monsieur Y. : Il est attribué d'un commun accord entre les parties, ce qu'il accepte pour ses biens propres : L'appartement de [Localité 7] avec la reprise du prêt immobilier actuellement encore ouvert dans les livres de la CAISSE D’ÉPARGNE. En conséquence, à compter du prononcé du divorce, Monsieur Y. assurera seul le remboursement dudit prêt de manière à ce que son épouse ne soit jamais ni recherchée ni inquiétée ».

Les conclusions de Mme X. ont été régulièrement signifiées à M. Y.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé et M. Y. sera condamné à garantir Mme X. de l'ensemble des condamnations prononcées au profit de la SA CEGC.

M. Y., aux termes de la convention homologuée par le juge aux affaires familiales, s'est vu attribuer le bien objet du prêt litigieux. Il a pu bénéficier des loyers perçus et avait la charge, en contrepartie, de payer les échéances du crédit. Il a cédé le bien selon acte du 21 novembre 2014 au prix de 175.000 € sans se soucier de solder le prêt qui avait été souscrit pour son acquisition provoquant ainsi la déchéance de son terme. Son comportement fautif est à l'origine d'un préjudice moral pour Mme X. qui, alors qu'elle n'était plus propriétaire de l'appartement sis à [Localité 7], a été contraire de se défendre dans le cadre d'une procédure judiciaire et de payer une dette qui, aux termes de la convention signée par les parties, est celle de M. Y. En outre, malgré la condamnation de M. Y. à garantir Mme X. des condamnations prononcées au profit de la CEGC, cette dernière demeure soumise à l'incertitude du recouvrement de sa créance. En effet, M. Y. a choisi de ne pas rembourser un prêt dont la charge lui incombait, vit à l'étranger et ne s'est jamais fait représenter au cours de la présente procédure.

En conséquence, le préjudice moral subi par Mme X. sera évalué à la somme de 15.000 €, somme au paiement de laquelle M. Y. sera condamné.

 

Sur les demandes accessoires :

L'issue du litige commande la confirmation de la première décision, quant aux condamnations prononcées au titre des dépens et frais irrépétibles.

Succombant, Mme X. sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel et à payer à la SA CEGC la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les demandes présentées au titre des dépens et frais irrépétibles par Mme X. seront rejetées.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS ;

LA COUR,

Sur l'ordonnance du 29 mai 2020 :

CONFIRME l'ordonnance rendue le 29 mai 2020 par le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MULHOUSE, sauf en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de production du justificatif de la signification, ainsi que du placement de l'assignation délivrée à M. Y.,

L'INFIRME de ce chef et statuant à nouveau,

REJETTE la demande présentée par Mme X., tendant à la production du justificatif de la signification ainsi que du placement de l'assignation délivrée à M. Y.,

Sur le jugement du 11 février 2022 :

CONFIRME le jugement rendu le 11 février 2022 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE, sauf en ce qu'il a :

Déclaré irrecevables les demandes formées par Madame X. à l'encontre de Monsieur Y.

- Ordonné la capitalisation des intérêts,

L'INFIRME de ces chefs, statuant à nouveau et y ajoutant :

REJETTE la demande de Mme X. tendant à faire déclarer les dispositions de l'article 2305 ancien du code civil contraires à l'article 6 alinéa 1 de la CESDHLF et l'article 1er alinéa 1 du protocole additionnel,

REJETTE la demande de réduction de la clause pénale présentée par Mme X.,

REJETTE la demande de capitalisation des intérêts présentée par la SA CEGC,

DECLARE recevables les demandes présentées par Mme X. à l'encontre de M. Y.,

CONDAMNE M. Y. à garantir Mme X. de l'ensemble des condamnations prononcées au profit de la SA CEGC,

CONDAMNE M. Y. à payer à Mme X. la somme de 15.000 € au titre de son préjudice moral,

CONDAMNE Mme X. aux dépens de la procédure d'appel,

CONDAMNE Mme X. à payer à la SA CEGC la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE Mme X. de ses demandes au titre des dépens et frais irrépétibles.

LA GREFFIÈRE :                                       LE PRÉSIDENT :