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CA PARIS (pôle 4 ch. 9-B), 18 janvier 2024

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 9-B), 18 janvier 2024
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 9
Demande : 21/00373
Décision : 24/5
Date : 18/01/2024
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 22/11/2021
Numéro de la décision : 5
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10804

CA PARIS (pôle 4 ch. 9-B), 18 janvier 2024 : RG n° 21/00373 ; arrêt n° 5

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Il résulte de l'article L. 711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

Pour dire que Mme X. était de mauvaise foi, le premier juge a relevé qu'elle avait procédé à la vente du véhicule Renault Talisman d'une valeur de 20.400 euros acquis au moyen d'un crédit souscrit auprès de la société [19] le 24 septembre 2018, alors que ce véhicule était grevé d'une clause de réserve de propriété et alors qu'elle avait été condamnée suivant jugement du 8 octobre 2020 à rembourser les sommes dues au titre du crédit et à restituer ce véhicule. Il a noté que la preuve de la date de la vente n'était pas rapportée ni celle de l'affectation des fonds.

Mme X. soutient que la clause de réserve de propriété est abusive et doit être réputée non écrite de sorte qu'elle ne peut être considérée de mauvaise foi au seul motif de ce qu'elle aurait revendu ce véhicule.

Le grief est voué à l'échec dans la mesure où la créance de la société [19] a été établie par un titre dont le caractère définitif n'est pas contesté (jugement du 8 octobre 2020 du tribunal judiciaire de Paris) et la restitution du véhicule ordonnée à cette occasion. Cette décision n'a pas été contestée, la créance ayant ensuite été admise à l'état des créances, sans contestation non plus de la part de Mme X. dans les délais impartis de sorte qu'elle est mal venue aujourd'hui à émettre une contestation liée à la validité des clauses du contrat de crédit

Mme X. ne conteste pas avoir dans un premier temps loué le véhicule afin de se procurer des fonds, puis vendu le véhicule qui avait été accidenté par son locataire. Elle prétend que la vente est intervenue avant dépôt du dossier de surendettement.

A hauteur d'appel, elle communique aux débats le certificat de situation administrative du véhicule au 17 janvier 2019 ne mentionnant aucun gage, et le certificat de cession établi le 7 janvier 2019. La cour constate que l'acte ne mentionne pas Mme X. mais un certain Y. en qualité de cédant alors que le contrat de crédit affecté a bien été établi au seul nom de Mme X. Pour autant, il est établi que cette personne était alors le compagnon de Mme X. et que cette dernière justifie avoir déposé plainte à l'encontre de M. Y. pour des faits d'abus de confiance liés à un virement frauduleux. Ces éléments permettent de fixer la date de cession au mois de janvier 2019 soit bien avant dépôt du dossier de surendettement le 2 novembre 2020, sachant que l'établissement de crédit affecté par la non-restitution du véhicule était déjà, à cette date, titulaire d'un titre exécutoire à l'encontre de Mme X. relativement à la question de la restitution.

Le prix de vente du véhicule n'est pas établi, Mme X. évoque 10.000 euros ou plus et alors que l'affectation des fonds n'est pas non plus établie puisqu'elle ne produit aux débats aucune pièce suffisamment probante en ce sens. Son compte bancaire [17] présentait un solde créditeur de 14 861,08 euros au 31 janvier 2019 pouvant en effet laisser supposer l'encaissement d'une somme importante liée à la vente du véhicule.

Partant, il n'est pas établi que Mme X. a procédé à la vente du véhicule en cours de procédure de surendettement au mépris du droit de ses créanciers.

L'ensemble de ces éléments est insuffisant pour renverser la présomption de bonne foi, de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement et de dire que Mme X. est recevable au bénéfice de la procédure de surendettement. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9-B

ARRÊT DU 18 JANVIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° S 21/00373. Arrêt n° 5 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWE6. Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris RG n° 11-21-005158.

 

APPELANTE :

Madame X.

née le [date] à [Localité 27], [Adresse 4], [Adresse 4], [Localité 11], Comparante en personne, assistée de Maître Marie-pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295, (Bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro XXX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

 

INTIMÉES :

CA CONSUMER FINANCE

[16], [Adresse 18], [Localité 14], Non comparante

[Localité 26] HABITAT OPH

[Adresse 5], [Localité 12], Non comparante

[17] Service recouvrement Successions et patrimoine

[Adresse 2], [Localité 10], Non comparante

[17]

Chez [22], [Adresse 1], [Localité 8], Non comparante

ENGIE CHEZ [24]

[Adresse 3], [Localité 7], Non comparante

MENAFINANCE CHEZ [19]

[16], [Adresse 15], Non comparante

[25], Monsieur Y.

[Adresse 6], [Localité 13], Non comparante

[23] CHEZ [20]

Services Surendettement, [Adresse 21], [Adresse 9], Non comparante

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 novembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Muriel DURAND, présidente, Mme Laurence ARBELLOT, conseillère, Mme Sophie COULIBEUF, conseillère.

Greffières : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA, lors des débats et Mme Alexandra AUBERT, lors de la mise à disposition

ARRÊT : - Réputé contradictoire - Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévu au 04 janvier 2024, prorogé au 11 janvier 2024, prorogé au 18 janvier 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - Signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme X. a saisi la commission de surendettement des particuliers de [Localité 26] d'une demande de traitement de sa situation de surendettement le 2 novembre 2020, laquelle a déclaré sa demande recevable le 21 janvier 2021.

Le 18 mars 2021, la commission a recommandé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Cette décision a été notifiée le 19 mars 2021 à la société [19] qui l'a contestée par courrier recommandé du 16 avril 2021.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 28 octobre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré la contestation de la société [19] recevable en la forme ;

- dit Mme X. irrecevable au bénéfice des dispositions de surendettement des particuliers.

Après avoir vérifié la recevabilité du recours au regard du délai de 30 jours, le juge a considéré que Mme X. était de mauvaise foi pour avoir vendu un véhicule grevé d'une clause de réserve de propriété sans affecter le montant du prix à son vendeur. Il a également relevé qu'aucune des explications fournies par Mme X. n'était justifiée.

Le jugement a été notifié à Mme X. le 4 novembre 2021, qui en a relevé appel par courrier recommandé reçu au greffe de la cour d'appel le 22 novembre 2021.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 7 novembre 2023.

[*]

Mme X. comparait et est assistée d'un avocat qui aux termes d'écritures développées à l'audience demande à la cour :

- d'infirmer le jugement,

- de déclarer le recours de la société [19] par M. K. devant le juge des contentieux de la protection irrecevable,

- de le déclarer nul, faute de justifier d'un pouvoir de représentation en justice,

- dès lors, de déclarer la décision de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 26] du 18 mars 2021 définitive, faute de recours régulier du créancier,

- à titre subsidiaire, de déclarer qu'elle est présumée de bonne foi et que la preuve de la mauvaise foi n'est pas rapportée,

- d'ordonner une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire,

- à titre infiniment subsidiaire, de renvoyer le dossier devant la commission de surendettement pour l'établissement d'un plan conforme à sa situation,

- de statuer ce que de droit sur les dépens.

Elle fait valoir que le recours contre la décision de rétablissement personnel a été fait par courrier à en-tête de l'enseigne Viaxel et portant le nom de M. K., que le recours n'est pas signé, que la société Viaxel n'est pas une personne morale mais une enseigne et se présente comme le département de la société [19]. Dans la mesure où la contestation s'analyse en une demande en justice, elle prétend qu'il appartenait à la société [19] de justifier que M. K. disposait d'un pouvoir de représentation en justice car il n'est pas avocat comme le prévoit l'article 762 du code de procédure civile. Il en est de même du courrier adressé le 26 juillet 2021 valant conclusions. Elle estime le recours irrecevable et nul sur le fondement de l'article 117 du code de procédure civile.

Elle rappelle que la recevabilité de son dossier a été admise le 21 janvier 2021, qu'aucun créancier ne l'a contestée, que si un créancier a ensuite contesté le rétablissement personnel, il ne pouvait plus contester la recevabilité du dossier. Elle estime que la société [19] n'a en fait jamais contesté la recevabilité, mais la mesure elle-même et demandé la restitution du véhicule de sorte que qu'aucun créancier n'a allégué ni prouvé sa mauvaise foi alors que sa bonne foi est présumée. Elle estime que la restitution du véhicule avait déjà été ordonnée et que le juge ne pouvait le faire à nouveau. Elle s'engage à communiquer sous quinzaine le jugement ayant ordonné la restitution du véhicule.

Elle soutient que la Cour de cassation a rappelé que les clauses de réserve de propriété figurant à un contrat de crédit affecté constituent des clauses abusives, réputées non écrites (avis du 28 novembre 2016) et estime qu'elle ne pouvait être considérée de mauvaise foi au seul motif qu'elle aurait vendu le véhicule assorti d'une réserve de propriété laquelle constitue une clause abusive. Elle explique avoir levé le certificat de situation administrative en vérifiant bien que le véhicule n'était pas gagé de sorte qu'elle pouvait le vendre, que le produit de la vente a permis de payer ses créanciers, les échéances du crédit et des charges courantes par exemple 5.000 euros pour des frais de scolarité de son fils en BTS. Elle conteste avoir utilisé le produit de la vente pour des dépenses somptuaires.

Elle indique être aide-soignante, avoir connu des périodes d'arrêt de travail, avoir été pendant plusieurs mois au RSA en reconversion professionnelle. Elle exerce désormais en qualité d'aide-ménagère pour un salaire moyen de 766,92 euros outre 701,03 euros d'allocations familiales. Elle précise avoir fait face à une baisse de revenus depuis septembre 2023 car certains particuliers ont mis fin à ses contrats puis en raison d'un arrêt de travail. Elle indique percevoir 270,14 euros d'aide au logement et évalue ses charges à la somme de 1 477 euros par mois étant précisé qu'elle a à sa charge son fils de 24 ans actuellement sans emploi. Elle estime être dans une situation irrémédiablement compromise.

Sur interrogation de la cour, Mme X. indique avoir utilisé le prix de vente du véhicule de 14 500 euros pour payer des créanciers hors plan, pour payer le crédit du véhicule, pour régler les factures de réparation. Elle reconnaît avoir loué le véhicule à quelqu'un car elle espérait pouvoir rembourser les échéances du crédit, mais indique que la personne a été de mauvaise foi, n'a pas payé et a même eu un accident générant des frais de réparation. Elle prétend que la vente est intervenue en 2019 bien avant qu'elle ne dépose un dossier de surendettement. Elle indique payer son loyer et certains créanciers. Elle précise être âgée de 51 ans, que si elle rencontre des problèmes de santé, elle n'est pas reconnue invalide.

[*]

Par courrier du 26 septembre 2023, la société [23] indique s'en remettre à la décision de la cour.

[*]

Par courrier du 10 octobre 2023, la société [Localité 26] Habitat informe la cour que Mme X. est à jour de ses loyers.

[*]

Aucun créancier n'a comparu.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.

 

Sur la recevabilité du recours :

Aux termes des articles L. 741-4 et R. 741-1 du code de la consommation, une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection les mesures de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire imposées par la commission dans les trente jours de la notification par déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au secrétariat de la commission qui transmet le dossier au greffe du tribunal. La contestation doit mentionner les nom, prénoms et adresse de leur auteur, les mesures contestées ainsi que les motifs de la contestation, et sont signées par ce dernier.

Le recours a été formé par courrier recommandé avec avis de réception du 13 avril 2021 adressé à la Commission de surendettement, alors que la notification a eu lieu le 18 mars 2021. Il a donc bien été formé dans le délai de 30 jours requis.

Le courrier est à en-tête de « Viaxel » et une mention figurant en bas du courrier précise bien que Viaxel est un département de [19]. Il n'est pas signé manuscritement mais porte le nom et cachet de M. [X] K., en sa qualité de responsable de l'agence relation surendettement.

La société [19] n'était pas comparante à l'audience du 6 septembre 2021 mais avait pris soin de faire parvenir au juge un courrier recommandé le 26 juillet 2021 signé pour le compte de [19], en s'excusant de son absence et en faisant parvenir ses observations tout en sollicitant l'infirmation de la mesure et de voir ordonner la restitution du véhicule Talisman financé par le contrat de crédit.

Il résulte de ce qui précède, qu'il est manifeste que le recours adressé à la commission de surendettement émanait bien de la société [19], créancière de Mme X. représentée par son département Viaxel et que les dispositions de l'article 762 du code de procédure civile qui prévoient la nécessité pour une partie désirant se faire représenter en justice en dehors d'un avocat de disposer d'un pouvoir spécial sont inapplicables en l'espèce dans la mesure où la société [19] n'était pas comparante à l'audience ni représentée et que les règles régissant la procédure de surendettement l'autorisait à communiquer ses observations par écrit en amont de la tenue de l'audience.

Le grief n'est donc pas fondé et c'est donc à bon droit que le premier juge a reçu la société [19] en son recours.

 

Sur l'absence de contestation par le créancier de la recevabilité du dossier et sur la bonne foi :

Mme X. soutient que le créancier n'a pas lors de son recours, remis en question sa bonne foi et qu'il ne pouvait de toutes façons pas le faire de sorte que le juge ne pouvait la déclarer irrecevable en sa demande.

Il résulte des énonciations mêmes du jugement que le premier juge a d'office examiné les conditions de recevabilité du dossier dont le critère de bonne foi comme l'y autorisent les dispositions de l'article L. 741-5 du code de la consommation, qui précisent qu'au gré de l'examen de la contestation, le juge peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées et s'assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation mentionnée à l'article L. 711-1.

Il résulte de l'article L. 711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

Pour dire que Mme X. était de mauvaise foi, le premier juge a relevé qu'elle avait procédé à la vente du véhicule Renault Talisman d'une valeur de 20.400 euros acquis au moyen d'un crédit souscrit auprès de la société [19] le 24 septembre 2018, alors que ce véhicule était grevé d'une clause de réserve de propriété et alors qu'elle avait été condamnée suivant jugement du 8 octobre 2020 à rembourser les sommes dues au titre du crédit et à restituer ce véhicule. Il a noté que la preuve de la date de la vente n'était pas rapportée ni celle de l'affectation des fonds.

Mme X. soutient que la clause de réserve de propriété est abusive et doit être réputée non écrite de sorte qu'elle ne peut être considérée de mauvaise foi au seul motif de ce qu'elle aurait revendu ce véhicule.

Le grief est voué à l'échec dans la mesure où la créance de la société [19] a été établie par un titre dont le caractère définitif n'est pas contesté (jugement du 8 octobre 2020 du tribunal judiciaire de Paris) et la restitution du véhicule ordonnée à cette occasion. Cette décision n'a pas été contestée, la créance ayant ensuite été admise à l'état des créances, sans contestation non plus de la part de Mme X. dans les délais impartis de sorte qu'elle est mal venue aujourd'hui à émettre une contestation liée à la validité des clauses du contrat de crédit.

Mme X. ne conteste pas avoir dans un premier temps loué le véhicule afin de se procurer des fonds, puis vendu le véhicule qui avait été accidenté par son locataire. Elle prétend que la vente est intervenue avant dépôt du dossier de surendettement.

A hauteur d'appel, elle communique aux débats le certificat de situation administrative du véhicule au 17 janvier 2019 ne mentionnant aucun gage, et le certificat de cession établi le 7 janvier 2019. La cour constate que l'acte ne mentionne pas Mme X. mais un certain Y. en qualité de cédant alors que le contrat de crédit affecté a bien été établi au seul nom de Mme X. Pour autant, il est établi que cette personne était alors le compagnon de Mme X. et que cette dernière justifie avoir déposé plainte à l'encontre de M. Y. pour des faits d'abus de confiance liés à un virement frauduleux. Ces éléments permettent de fixer la date de cession au mois de janvier 2019 soit bien avant dépôt du dossier de surendettement le 2 novembre 2020, sachant que l'établissement de crédit affecté par la non-restitution du véhicule était déjà, à cette date, titulaire d'un titre exécutoire à l'encontre de Mme X. relativement à la question de la restitution.

Le prix de vente du véhicule n'est pas établi, Mme X. évoque 10.000 euros ou plus et alors que l'affectation des fonds n'est pas non plus établie puisqu'elle ne produit aux débats aucune pièce suffisamment probante en ce sens. Son compte bancaire [17] présentait un solde créditeur de 14 861,08 euros au 31 janvier 2019 pouvant en effet laisser supposer l'encaissement d'une somme importante liée à la vente du véhicule.

Partant, il n'est pas établi que Mme X. a procédé à la vente du véhicule en cours de procédure de surendettement au mépris du droit de ses créanciers.

L'ensemble de ces éléments est insuffisant pour renverser la présomption de bonne foi, de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement et de dire que Mme X. est recevable au bénéfice de la procédure de surendettement.

 

Sur la mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire :

Aux termes de l'article L. 733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :

1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;

2° Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;

3° Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;

4° Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.

Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L. 731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».

 L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».

 Enfin selon l'article R. 731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».

En vertu des dispositions de l'article L. 724-1 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en œuvre les mesures de traitement prévues par les articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-7 et L. 733-8 du même code, est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté qu'il ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.

En application de ces textes, il incombe au juge de se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles et de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au regard des éléments dont il dispose, en prenant en compte l'évolution prévisible des revenus du débiteur.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la situation n'est pas irrémédiablement compromise dès lors qu'elle est susceptible d'évoluer, du fait de l'âge du débiteur, de sa qualification et de sa situation personnelle.

La cour constate que le passif non contesté s'établit à la somme de 53.848,34 euros

Mme X. est âgée de 51 ans, elle est séparée, avec deux enfants majeurs dont un à charge, et travaille en qualité d'aide-ménagère pour un salaire moyen de 766,92 euros outre 701,03 euros d'allocations familiales et d'aide au logement soit 1.467,95 euros de ressources mensuelles. Les charges au titre des forfaits en vigueur avec une personne à charge peuvent être établies de la manière suivante :

- forfait de base : 816 euros

- forfait habitation : 156 euros

- forfait chauffage : 155 euros

- loyer : 323 euros

soit une somme totale de 1/450 euros.

La capacité de remboursement est donc inexistante. Mme X. démontre en outre être atteinte d'un kyste arthrosynovial au niveau de la gouttière du pouls radial du poignet gauche avec probable syndrome du canal carpien associés à une tendinose obérant sa capacité de travailler d'abord en qualité d'aide-soignante puis d'aide-ménagère et avoir dû subir une intervention chirurgicale au mois d'octobre 2023 de sorte que le montant de ses revenus se trouve également affecté par les périodes d'arrêts de travail.

Au regard de son âge, de sa situation de santé, de l'absence de tout patrimoine immobilier susceptible de désintéresser les créanciers, la situation de Mme X. apparaît comme irrémédiablement compromise, sans possibilité d'évolution à court ou moyen terme.

Il s'ensuit qu'il convient de constater que la situation est irrémédiablement compromise et d'ordonner une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire dans les termes du dispositif.

Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a reçu le recours,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare Mme X. recevable au bénéfice de la procédure de surendettement,

Constate que la situation de X. est irrémédiablement compromise,

Ordonne l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au profit de Mme X.

Clôture immédiatement cette procédure,

Dit que cette procédure entraîne l'effacement total des dettes de Mme X. mentionnées dans l'état des créances et le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny du 23 août 2022,

Dit qu'il ne peut donc plus légalement être demandé à Mme X. le paiement des dettes figurant dans ce tableau, qui n'ont plus d'existence juridique à son égard,

Rappelle que ne sont pas effacées les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes et les amendes prononcées dans le cadre d'une condamnation pénale et les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale énumérés à l'article L.114-12 du code de la sécurité sociale,

Ordonne la publication du présent arrêt au BODACC pour permettre aux éventuels créanciers qui n'auraient pas été convoqués dans le cadre de la présente procédure de pouvoir le cas échéant former 'tierce opposition', à peine d'extinction de leurs créances, à l'issue de l'expiration du délai de 2 mois qui suivra la date de cette publication,

Dit que cette procédure entraîne l'inscription de Mme X. au fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels (F.I.C.P) pour une période de 5 ans,

Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et par lettre recommandée avec accusé de réception à la débitrice et à ses créanciers connus,

Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,

Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.

La greffière                                                              La présidente