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CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 28 février 2024

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 28 février 2024
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 23/10758
Date : 28/02/2024
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 16/06/2023
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10806

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 28 février 2024 : RG n° 23/10758 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « S'agissant du caractère abusif de clauses du contrat, il doit être observé : - d'abord, que le CCAS, dans le dispositif de son assignation, n'a sollicité que soit réputée non écrite que la seule clause d'indemnité d'immobilisation et non celle fixant l'intérêt pour la période d'amortissement,

- et ensuite, qu'il fonde ses demandes de rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription sur une jurisprudence de la CJUE traitant de la clause abusive en matière de contrat de consommation mais fonde également ses demandes au fond en reconnaissance du caractère abusif de la clause sur l'article L. 442-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable compte tenu de la date du contrat,

- qu'alors qu'il résulte de l'ordonnance entreprise que le Crédit foncier de France ne poursuivait devant le juge de la mise en état que le prononcé de l'irrecevabilité de toutes les demandes pour cause de prescription, il fait désormais valoir devant la cour que « la clause de remboursement anticipé ne saurait être requalifiée en clause abusive et la demande du CCAS sera jugée recevable (lire « irrecevable »), au motif que le contrat de prêt n'entre pas dans le champ d'application de la protection des consommateurs à l'égard des clauses abusives dès lors qu'il n'a pas été souscrit par un non professionnel mais par l'association en lien direct avec son activité professionnelle puisque de nature à améliorer les conditions d'exercice de celle-ci, le prêt étant destiné à financer la restructuration et l'extension d'un logement-foyer que l'association emprunteuse, « Les Métiers » administrait.

Or la cour ne statue, par la présente décision, que sur l'appel d'une ordonnance du juge de la mise en état ayant tranché les fins de non-recevoir tirées de la prescription alors que la question de l'application au contrat litigieux des lois sur les clauses abusives issues soit du code de la consommation soit du code de commerce, relève d'une question de fond relevant du tribunal saisi.

En conséquence, la cour d'appel statuant dans la limite de ses pouvoirs de juge d'appel du juge de la mise en état, rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action dès lors que la CJUE a dit pour droit que l'article 6, paragraphe premier, et l'article 7, paragraphe premier, de la directive n 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription, ce qui vaut pour un non professionnel au sens du droit interne.

Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de rejeter les fins de non-recevoir tirées de la prescription opposées par la société Crédit foncier de France, de la condamner aux entiers dépens de l'incident ainsi qu'à payer au CCAS la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/10758 (7 pages). N° Portalis 35L7-V-B7H-CHZ2T. Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 mai 2023 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 2ème section - RG n° 22/00557.

 

APPELANTE :

Commune CENTRE COMMUNAL D'ACTION SOCIAL DE [Localité 3]

[Adresse 6], [Localité 3], agissant poursuites de son Président domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Sophie ECHEGU-SANCHEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : E1130, Ayant pour avocat plaidant Maître Boris MARIE de la SCP MARIE & SOULARD, avocat au barreau du MANS

 

INTIMÉES :

SA CRÉDIT FONCIER

[Adresse 1], [Localité 4], N° SIRET : XXX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Thierry SERRA de la SELARL SERRA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0280

CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE LA SARTHE

[Adresse 5], [Localité 2], N°SIRET : YYY, pris en la personne de son président, Monsieur Y., domicilié en cette qualité audit siège, non constitué (signification de la déclaration d'appel en date du 11 juillet 2023 - procès-verbal de remise à personne morale en date du 11 juillet 2023)

COMMUNE DE [Localité 3]

[Adresse 6], [Localité 3], N°SIRET : ZZZ, représentée par son Maire en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, non constituée (signification de la déclaration d'appel en date du 11 juillet 2023 - procès-verbal de remise à personne morale en date du 11 juillet 2023)

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 13 février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de : M. Marc BAILLY, président de chambre, M. Vincent BRAUD, président, Madame Laurence CHAINTRON, conseillère, qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. Marc BAILLY dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRÊT : - Réputé Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte en date des 14 et 16 et 25 octobre 2013, la société Crédit foncier de France a consenti à l'association Les Métiers un prêt d'un montant de 3.155.200 euros aux fins de financer la restructuration et l'extension d'un logement-foyer sis à [Localité 3].

La commune de [Localité 3] et le Conseil départemental de la Sarthe se sont portés cautions solidaires des obligations de l'association emprunteuse à concurrence respectives de 20 et 80 % de son montant.

Le prêt d'une durée de 30 ans, comporte deux périodes, l'une de 24 mois dite de mobilisation au cours de laquelle un taux révisable est stipulé et l'autre, d'une période de 28 ans, d'amortissement avec modalités de fixation d'un taux d'intérêt fixe à son article 4.2 et d'une indemnité de remboursement anticipé à son article 8.2.

Le 18 novembre 2015, le taux fixe de la période d'amortissement proposé par le Crédit foncier de France a été accepté par l'emprunteur à hauteur de 3,28 % l'an.

Le 11 janvier 2019, le Crédit foncier de France a notifié au maire de [Localité 3], à sa demande, un décompte des sommes encore dues au titre du prêt à la date du 10 février 2019 ainsi que le montant de l'indemnité de remboursement anticipé qui s'élève à la somme de 795 726,28 euros.

Le centre communal d'action sociale de [Localité 3] est venu aux droits de l'association Les Métiers à la suite d'un acte administratif du 30 avril 2019, l'universalité du patrimoine lui revenant.

Par avenant en date des 19 juin, 3 et 17 juillet 2019 entre le Crédit foncier de France, le CCAS et la commune, le prêt a été transmis, sans novation, au CCAS.

Par acte en date du 17 novembre 2020, le Centre communal d'action sociale de [Localité 3] a assigné le Crédit foncier de France devant le tribunal judiciaire du Mans qui s'est déclaré incompétent par une ordonnance du juge de la mise en état du 7 octobre 2021 au profit du tribunal judiciaire de Paris auquel étaient demandés, d'une part, l'annulation de la stipulation d'intérêts du 18 novembre 2015 à hauteur de 3,28 % et la substitution du taux légal et, d'autre part, l'annulation de la clause de remboursement anticipé ou la reconnaissance de son caractère non écrit.

Saisi par des conclusions d'incident du Crédit foncier de France du 6 décembre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris, par ordonnance en date du 16 mai 2023, a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes du CCAS et l'a condamné à payer la somme de 1 500 euros de frai irrecevable au Crédit foncier de France aux motifs essentiels :

- que la prescription quinquennale de la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts de la période d'amortissement dont la fixation est intervenue le 18 novembre 2015 avait pour point de départ non cette date mais celle du contrat de prêt puisque la détermination du taux d'intérêts n'est que l'application des dispositions claires et précises des stipulations 4 et 4.2 du contrat prévoyant la proposition du prêteur et l'acceptation de l'emprunteur, réputée irrévocable,

- que la prescription quinquennale de la demande d'annulation de la stipulation prévoyant le montant de l'indemnité de remboursement anticipé était également la date de la convention de prêt et non la date de sa notification par le prêteur dès lors que son article 8.2 la définit et que si cette définition est d'ordre technique rien n'empêchait l'emprunteur, disposant de tous les éléments de sa définition dès la souscription du prêt de tous les éléments lui permettant sa critique.

Le Centre communal d'action sociale de [Localité 3] a interjeté appel par déclaration au greffe en date du 16 juin 2023.

[*]

Par ses dernières conclusions en date du 18 juillet 2023, le Centre communal d'action sociale de [Localité 3] poursuit l'infirmation de l'ordonnance, le rejet des fins de non-recevoir du Crédit foncier de France et sa condamnation à lui payer la somme de 3.000 euros de frais irrépétibles en faisant valoir :

- que le CCAS a tenté vainement de renégocier le taux d'intérêt élevé, se heurtant à un refus de la banque qui lui a fait connaître, le 10 février 2019, les sommes restant dues y compris au titre de l'indemnité de remboursement anticipé,

- que, s'agissant de la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts à hauteur de 3,28 % du 18 novembre 2015, le point de départ de la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil doit être fixé à cette date et non à celle de la convention dès lors qu'il est stipulé dans le prêt que la détermination du taux d'intérêts fixe de la période d'amortissement résulte d'un accord entre le prêteur et l'emprunteur, lequel a résulté d'une confirmation de cotation de marché du 18 novembre 2015 qui ne résulte pas de la seule mise en œuvre des stipulations initiales mais de la proposition du prêteur et de son acceptation, que c'est à cette date que la nullité invoquée peut être constatée puisqu'elle est fondée sur la circonstance que la proposition a été acceptée par la seule présidente de l'association sans accord de son conseil d'administration, l'opposabilité de ce moyen tenant au défaut de pouvoir de la dirigeante au Crédit foncier de France relevant d'un examen au fond de l'affaire, étant observé que la banque avait une entière connaissance des statuts de l'association,

- que, s'agissant de la demande d'annulation de la clause de remboursement anticipé, il résulte de l'article 1144 du code civil que le point de départ de la prescription court à compter de la découverte de l'erreur c'est à dire du courrier du 11 janvier 2019 qui révèle le montant au 10 février 2019 de ladite indemnité actuarielle représentant 28,5 % du capital dès lors qu'en sa qualité de profane, l'association n'a pu, en prenant connaissance du courriel décrivant les éléments essentiels du prêt préalablement à sa souscription, se rendre compte de son caractère exorbitant,

- que, s'agissant du caractère abusif et déséquilibré de la clause à titre infiniment subsidiaire, l'action tendant à sa reconnaissance est imprescriptible et que l'action fondée sur le déséquilibre contractuel a pour point de départ la révélation du caractère exorbitant de la clause.

[*]

Par ses dernières conclusions en date du 1er août 2023, la société Crédit foncier de France demande que l'appel soit jugé mal fondé et que le CCAS soit condamné à lui payer la somme de 5.000 euros de frais irrépétibles en exposant :

- que la demande liée à l'annulation de la stipulation d'intérêts est prescrite dès lors que c'est dès la souscription du contrat de prêt que les modalités de détermination du taux d'intérêt ont été prévues,

- que la demande d'annulation de l'indemnité de remboursement anticipé l'est également sur le fondement de l'article 2224 du code civil dès lors que l'emprunteur avait tous les moyens de faire examiner la technicité de la clause 8.2 et des suivantes au jour du contrat et que les modalités de détermination de l'indemnité actuarielle y ont été fixées d'autant que la commune et le département ont participé à l'acte en qualités de cautions en disposant des moyens de l'apprécier,

- que la demande fondée sur le caractère abusif de la clause est irrecevable puisque le cocontractant qui finançait, au moyen du prêt, des travaux de restructuration de logements de commerçant à la retraite - ce qui est en lien direct avec son activité professionnelle -ne saurait être qualifié de consommateur ou de non professionnel puisque le prêt a été souscrit dans le cadre de son activité, qu'il n'existe pas de déséquilibre contractuel dès lors que l'indemnité de résiliation anticipée à caractère actuariel compense les risques liés au taux fixe stipulé pour la longue période d'amortissement.

[*]

La déclaration d'appel et les conclusions des parties ont été signifiées à la commune de [Localité 3] et au Conseil départemental de la Sarthe, intimés, par acte en date des 19 et 21 juillet et 9 et 10 août et ils n'ont pas constitué avocat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Par l'assignation, produite aux débats, délivrée au Crédit foncier de France, le CCAS poursuivait :

- le prononcé de la nullité de la stipulation d'intérêts du 18 novembre 2015 et la substitution du taux d'intérêts légal sur le fondement de l'article 1108 du code civil au motif que l'article 17 des statuts de l'association ne conférait à son président que des pouvoirs limités, de sorte qu'en sus de la délibération du 16 mai 2013 autorisant le recours au prêt, la fixation du taux d'intérêt à l'issue de la période de mobilisation par 'un commun accord' entre l'association et la banque exigeait une seconde délibération du conseil d'administration,

- l'annulation de l'indemnité de remboursement anticipé stipulée dans l'acte du 25 octobre 2013 pour erreur sur le fondement de l'article 1109 du code civil dès lors qu'à la formule mathématique complexe qui a abouti à sa fixation n'ont correspondu dans le contrat que des références à des sommes laissant croire à son évidente modicité, seul le courrier du 11 janvier 2019 révélant qu'il n'en était rien,

- le caractère abusif de la clause de fixation de l'indemnité de résiliation, laissée au bon vouloir du prêteur, auquel l'importance de l'indemnité de résiliation anticipée ne permet pas de se soustraire alors qu'au contraire le prêteur peut revaloriser le taux d'intérêts en cas de survenance de circonstances nouvelles, et ce, sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce.

En application de l'article 1304 ancien du code civil, applicable compte tenu de la date du contrat de prêt, dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans. Ce délai court dans les cas de la violence du jour où elle a cessé et dans le cas de l'erreur ou du dol du jour où ils ont été découverts.

C'est à la victime du vice du consentement de prouver à quelle date l'erreur ou le vice ont été découverts par lui faute de quoi la prescription court à compter du jour de l'acte.

La délibération du 16 mai 2013 prévoit que :

« Les caractéristiques du prêt à contracter auprès du Crédit foncier de France sont les suivantes

Montant total : 3.155.200 €

Durée totale : 30 ans dont 24 mois de phase de mobilisation et 28 ans d'amortissement constant du capital.

Périodicité des échéances : Trimestrielles et dégressives (amortissement du capital constant)

Taux d'intérêt annuel :

Phase de mobilisation à Taux Révisable : 24 mois à Euribor 3 mois arrondi au centième supérieur + partie fixe de 2 %.

Phase d'amortissement à Taux Fixe : sur 28 ans : Taux de swap Taux Fixe du Crédit Foncier au centième supérieur + partie fixe de 1.80%.

Le taux Fixe de la phase d'amortissement sera applicable à l'issue de la phase de mobilisation d'un commun accord entre l'Association et le CRÉDIT FONCIER DE FRANCE au regard d'un taux de swap CRÉDIT FONCIER DE FRANCE publié aux environs de 11 heures (heure de [Localité 7]) au plus tôt 2 jours ouvrés avant l'envoi du contrat de prêt pour signature et au plus tard à la fin de la période de mobilisation.

Faculté de remboursement anticipé :

Une clause d'indemnité actuarielle avec un minimum de 6 mois d'intérêts sera incluse dans le contrat avec perception de frais de gestion correspondant à 1 % du CRD avant remboursement (minimum : 800€, maximum : 3.000 €) dans l'hypothèse d'un remboursement anticipé. »

En l'espèce, le CCAS se plaint, d'abord, de ce que le président a conseil d'administration a ratifié seul la fixation du taux d'intérêt de la période d'amortissement sans autorisation préalable du conseil d'administration, ce qui n'est survenu qu'à la date de cette ratification du 18 novembre 2015 et qui ne pouvait être connu de l'association auparavant puisque son autorisation du prêt par sa délibération du 16 mai 2013 reproduite ci-dessus est muette sur ce point.

En conséquence, l'action introduite par l'assignation du 17 novembre 2020 n'est pas prescrite.

Les clauses 8.2 de la convention de prêt sur l'indemnité de remboursement anticipé stipulent notamment que :

« 8.2 Tout remboursement anticipé, total ou partiel, donnera lieu à la perception par le prêteur d'une indemnité actuarielle dans le cas où le taux de réemploi du capital remboursé est inférieur au taux du présent prêt.

Cette indemnité sera égale à la différence entre : d'une part, la somme des charges prévues sur la période restant à courir prise en compte au prorata du remboursement anticipé et actualisées, à la date du remboursement, au taux de réemploi tel qu'il est déterminé à ladite date (si le remboursement intervient entre deux échéances, la première charge est diminuée du montant des intérêts courus, et, d'autre part, le capital remboursé par anticipation.

Le taux de réemploi applicable sera le taux de rendement du titre de référence retenu.

Le titre de référence est l'OAT (Obligation Assimilable du Trésor) si la durée de vie moyenne résiduelle du prêt calculée comme ci-dessous est supérieure à 5 ans, sinon, le BTAN (Bon du Trésor à Taux Fixe et à Intérêts Annuels).

En cas de non-existence de la référence normalement retenue (OAT ou BTAN), il s'agira de tout emprunt d'État ou, à défaut, de toute dette émise par l'État.

Est retenu le titre de référence dont la durée résiduelle est la plus proche de la durée de vie moyenne résiduelle du prêt exprimée par troncature en nombre entier d'années.

Le taux de rendement du titre de référence retenu est celui connu 5 jours ouvrés (sur la place de [Localité 7]) suivant la réception par le prêteur de la lettre de demande de remboursement par anticipation.

En l'absence de cotation au jour-dit, le taux retenu pour le titre de référence considéré sera le dernier taux de rendement actuariel connu.

La durée de vie moyenne résiduelle du prêt est égale à la somme des charges initialement prévues sur la durée restant à courir, pondérées par le nombre de périodes les séparant de la date de remboursement anticipé, divisée par la somme des charges initialement prévues sur la durée restant à courir. On entend par « période » la durée séparant deux échéances annuelles consécutives.

Le montant de l'indemnité de remboursement anticipé perçue par le prêteur sera, en tout état de cause, au minimum égale à un semestre d'intérêts calculés sur les sommes remboursées par anticipation au taux de prêt en vigueur.

8.3. Tout remboursement anticipé, total ou partiel, donnera lieu à la perception de frais de gestion correspondant à 1% du capital restant dû avant remboursement, avec un minimum de 800 € et un maximum de 3.000 €.

8.4. L'indemnité de remboursement anticipé ainsi que les intérêts dus sur la période courue et les frais de gestion correspondants, devront être versés au prêteur au jour dudit remboursement ».

Or c'est seulement en prenant connaissance de la lettre du 11 janvier 2019 par laquelle, le Crédit foncier de France a notifié au maire de [Localité 3] la montant de la dite indemnité de 795.726,28 euros que l'erreur alléguée a pu être découverte, la lecture des clauses ci-dessus rapportées ne le permettant pas, de sorte que l'action n'est pas non plus prescrite de ce chef.

S'agissant du caractère abusif de clauses du contrat, il doit être observé :

- d'abord, que le CCAS, dans le dispositif de son assignation, n'a sollicité que soit réputée non écrite que la seule clause d'indemnité d'immobilisation et non celle fixant l'intérêt pour la période d'amortissement,

- et ensuite, qu'il fonde ses demandes de rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription sur une jurisprudence de la CJUE traitant de la clause abusive en matière de contrat de consommation mais fonde également ses demandes au fond en reconnaissance du caractère abusif de la clause sur l'article L. 442-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable compte tenu de la date du contrat,

- qu'alors qu'il résulte de l'ordonnance entreprise que le Crédit foncier de France ne poursuivait devant le juge de la mise en état que le prononcé de l'irrecevabilité de toutes les demandes pour cause de prescription, il fait désormais valoir devant la cour que « la clause de remboursement anticipé ne saurait être requalifiée en clause abusive et la demande du CCAS sera jugée recevable (lire « irrecevable »), au motif que le contrat de prêt n'entre pas dans le champ d'application de la protection des consommateurs à l'égard des clauses abusives dès lors qu'il n'a pas été souscrit par un non professionnel mais par l'association en lien direct avec son activité professionnelle puisque de nature à améliorer les conditions d'exercice de celle-ci, le prêt étant destiné à financer la restructuration et l'extension d'un logement-foyer que l'association emprunteuse, « Les Métiers » administrait.

Or la cour ne statue, par la présente décision, que sur l'appel d'une ordonnance du juge de la mise en état ayant tranché les fins de non-recevoir tirées de la prescription alors que la question de l'application au contrat litigieux des lois sur les clauses abusives issues soit du code de la consommation soit du code de commerce, relève d'une question de fond relevant du tribunal saisi.

En conséquence, la cour d'appel statuant dans la limite de ses pouvoirs de juge d'appel du juge de la mise en état, rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action dès lors que la CJUE a dit pour droit que l'article 6, paragraphe premier, et l'article 7, paragraphe premier, de la directive n 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription, ce qui vaut pour un non professionnel au sens du droit interne.

Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de rejeter les fins de non-recevoir tirées de la prescription opposées par la société Crédit foncier de France, de la condamner aux entiers dépens de l'incident ainsi qu'à payer au CCAS la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

INFIRME l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Et, statuant à nouveau,

REJETTE les fins de non-recevoir tirées de la prescription opposées par la société Crédit foncier de France aux actions en nullité du Centre communal d'action sociale de [Localité 3] ;

Y ajoutant,

REJETTE la fin de non-recevoir tirées de la prescription opposées par la société Crédit foncier de France à l'action en reconnaissance du caractère abusif de la clause fixant l'indemnité de résiliation anticipée du Centre communal d'action sociale de [Localité 3] ;

RENVOIE l'examen de l'affaire au tribunal judiciaire de Paris ;

CONDAMNE la société Crédit foncier de France à payer au Centre communal d'action sociale de [Localité 3] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Crédit foncier de France aux entiers dépens de la procédure incidente.

LE GREFFIER                                                       LE PRÉSIDENT