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TJ PARIS (9e ch. 2e sect.), 24 janvier 2024

Nature : Décision
Titre : TJ PARIS (9e ch. 2e sect.), 24 janvier 2024
Pays : France
Juridiction : T.jud. Paris
Demande : 21/15519
Décision : 24/3
Date : 24/01/2024
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 2/11/2021
Numéro de la décision : 3
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10815

TJ PARIS (9e ch. 2e sect.), 24 janvier 2024 : RG n° 21/15519 ; jugt n° 3

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « En application de l’article 768 du code de procédure civile, le tribunal n’est tenu de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l’espèce, il est relevé que si aux termes du dispositif de ses écritures, M. X. sollicite de voir déclarer le caractère abusif de l’article 11 de la notice, les moyens développés au soutien de cette prétention dans les motifs de ses écritures ne visent que la « garantie invalidité permanente totale » stipulée au point 2 de cet article et non la « garantie incapacité temporaire totale de travail » énoncée au point 1. Dès lors, seul le caractère abusif de la garantie stipulée au point 2 de l’article 11 sera examiné par la juridiction. »

2/ « Il en résulte que lorsqu’une clause définit l’objet principal du contrat, elle échappe au mécanisme des clauses abusives, à condition de répondre à une exigence de transparence et d’être ainsi rédigée de façon claire et compréhensible. Définissent l’objet principal du contrat les clauses qui fixent les prestations essentielles de ce contrat et qui, comme telles, caractérisent celui-ci.

L’exigence de transparence doit être comprise comme imposant non seulement que la clause concernée soit intelligible pour le consommateur sur les plans formel et grammatical, mais également qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret de cette clause et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières, ce qui implique notamment que le contrat doit exposer de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel la clause concernée fait référence, ainsi que, le cas échéant, la relation entre ce mécanisme et celui prescrit par d’autres clauses.

La charge de la preuve du caractère clair et compréhensible des clauses concernées incombe au professionnel. »

3/ « En l’espèce, le demandeur discute l’intelligibilité de la clause 11.2 du contrat qui selon lui ne définit pas la notion d’invalidité permanente totale ni la forme de l’indemnisation par l’assureur. En toute hypothèse, il soutient ne pas avoir été informé du fonctionnement concret du mécanisme des garanties, la notice d’information ne lui ayant pas été remise.

Il est acquis aux débats que la clause 11.2 définit l’objet principal du contrat puisqu’elle décrit l’une des obligations principales de l’assureur, à savoir couvrir le risque lié à une invalidité permanente totale de l’emprunteur.

S’agissant de l’appréciation du caractère clair et compréhensible de cette clause, la société Allianz vie verse aux débats en pièce n°2 deux demandes d’admission au contrat n°5298 en date des 26 juin 2013 et 10 octobre 2013 établies au nom de M. X. et portant une signature que ce dernier ne conteste pas être la sienne. Ces documents portent la mention « Je reconnais avoir reçu ce jour la notice d’information du contrat n°5298 et en avoir pris connaissance, notamment de l’objet du contrat, des conditions et exclusions des garanties, et des limitations d’indemnisation, et en accepter tous les termes ». Il s’en déduit que le demandeur a, contrairement à ce qu’il soutient, bien eu connaissance des stipulations contractuelles litigieuses.

De plus, l’article 11.2 de la notice du contrat d’assurance collective n°5298 définit l’invalidité permanente totale comme suit : […] Il résulte de façon claire et compréhensible de ce tableau bichrome que pour être garanti au titre de l’invalidité permanente totale, il est nécessaire que le taux d’invalidité soit supérieur ou égal à 66 %, cas facilement identifiable en ce que les cases concernées sont de couleur foncée, et que ce taux d’invalidité est déterminé en fonction du taux d’incapacité fonctionnelle et professionnelle figurant dans le tableau inclus au contrat.

Enfin, le système d’indemnisation est également défini de manière transparente en ce qu‘il est indiqué que lorsque le degré d’invalidité est inférieur à 66 %, « aucune prestation n’est due par l’assureur » et que dans le cas où ce degré est égal ou supérieur à 66 %, « les prestations versées au titre de la garantie « Incapacité Temporaire Totale de Travail sont maintenues intégralement », celles-ci étant définies à l’article 11.1 comme « les échéances du prêt figurant sur le dernier tableau d’amortissement » sous réserves de particularités énumérées dans le même article.

Il ressort de ces éléments que la clause 11.2 du contrat d’assurance collective n°5298, qui participe de la définition de l’objet principal du contrat, est rédigée de façon claire et compréhensible et ne constitue dès lors pas une clause abusive. En conséquence, le moyen est rejeté. »

4/ « Par ailleurs, l’obligation d’informer l’adhérent sur les garanties souscrites et les conditions de leur mise en œuvre et d’éclairer ce dernier sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur ou à celle de celui qui cautionne ses engagements, incombe au seul établissement de crédit souscripteur du contrat d’assurance.

En l’espèce, les demandes d’adhésion aux assurances des 26 juin 2013 et 10 octobre 2013 portent toutes deux la signature de M. X., qu’il ne conteste d’ailleurs pas être la sienne, sous la mention « Je reconnais avoir reçu ce jour la notice d’information du contrat n°5298 et en avoir pris connaissance, notamment de l’objet du contrat, des conditions et exclusions des garanties, et de la limitation d’indemnisation, et en accepter tous les termes ». Au cas particulier, cette mention ne constitue pas une clause édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions au sens de l’article L.112-4 du code des assurances dernier alinéa, et ne saurait voir sa validité remise en cause en raison de sa police de caractère qui est lisible.

La signature de la notice d’information elle-même n’étant pas exigée pour rapporter la preuve de sa remise, il résulte de cette mention que M. X. a bien été destinataire dudit document. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS

NEUVIÈME CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

JUGEMENT DU 24 JANVIER 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/15519. Jugement n° 3. N° Portalis 352J-W-B7F-CVYIR. Assignation du : 2 novembre 2021.

 

DEMANDEUR :

Monsieur X.

[Adresse 3], [Localité 5], représenté par Maître Florence BOUCHET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0152

 

DÉFENDERESSES :

SA CAISSE D’ÉPARGNE ILE-DE-FRANCE

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 2], [Localité 4], ,représentée par Maître Dominique PENIN du LLP KRAMER LEVIN NAFTALIS & FRANKEL LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0008

SA ALLIANZ VIE

[Adresse 1], [Adresse 1], [Localité 6], représentée par Maître Olivia RISPAL CHATELLE de la SCP SCP LDGR, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0516

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Monsieur Gilles MALFRE, 1er Vice-président adjoint, Monsieur Alexandre PARASTATIDIS, Juge, Monsieur Augustin BOUJEKA, Vice-Président, assistés de Chloé GAUDIN, greffier lors des débats et de Clarisse GUILLAUME, greffier lors de la mise à disposition,

DÉBATS : A l’audience du 8 novembre 2023 tenue en audience publique devant Monsieur PARASTATIDIS, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2024.

JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition, contradictoire, en premier ressort

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Courant 2013, dans le cadre de l’acquisition d’un bien immobilier, M. X., ingénieur de son état, a souscrit auprès de la Caisse d’Epargne Île-de-France (ci-après la Caisse d’épargne) les deux crédits suivants :

- Le premier d’un montant de 318.500 euros remboursable initialement en 300 mensualités, ramenées à 219 mensualités par voie d’avenant au contrat initial en date du 30 mai 2016 ;

- Le second d’un montant de 84.721,74 euros remboursable en 144 mensualités.

Il a adhéré les 26 juin 2013 et 10 octobre 2013 à un contrat d’assurance collective (n°5298) auprès de la compagnie Allianz vie aux fins de garantie du remboursement des deux prêts.

Le 7 juillet 2016, M. X. a été victime d’un accident de travail, à savoir un traumatisme du coccyx avec fracture en chutant de sa hauteur sur un trottoir, entraînant la cessation de son activité professionnelle et la prise en charge par la société Allianz vie, à compter du 5 octobre 2016 à l’issue d’une période de franchise de trois mois, du remboursement des mensualités des prêts au titre de l’incapacité temporaire totale de travail.

Après examen, le médecin expert de l’assureur a retenu un taux d’incapacité fonctionnelle de 5 % et un taux d’incapacité professionnelle de 20 % au 17 janvier 2018, date de consolidation de l’état de M. X.

Par lettre du 31 janvier 2018, la société Allianz vie a informé l’assuré de la cessation de l’indemnisation à compter du 16 janvier 2018, la conjugaison des taux précités aboutissant à un degré d’invalidité inférieur à 66 % excluant tout droit à indemnisation au titre d’une invalidité permanente totale.

Suite aux contestations émises par M. X., les premières conclusions ont été confirmées par un médecin expert, le docteur Y., désigné d’un commun accord par les parties en qualité d’arbitre, ainsi que par un médecin psychiatre, le docteur Z., aux termes d’une expertise complémentaire.

Le juge des référés de Paris, saisi par M. X., a désigné le docteur W. en qualité d’expert avec une mission de droit commun de type Dintilhac par ordonnance du 10 mai 2019 dont la société Allianz vie a interjeté appel.

Par arrêt du 25 juin 2020, la cour d’appel de Paris a modifié la mission d’expertise afin qu’elle tienne compte des définitions contractuelles.

Aux termes d’un rapport en date du 10 mars 2021, déposé le 29 avril 2021, le docteur W. a retenu une période d’incapacité temporaire totale de travail du 7 juillet 2016 jusqu’à la consolidation de l’état de M. X. fixée au 28 septembre 2020 sur le plan somatique, et au 21 janvier 2021 sur le plan psychiatrique.

Par courriel officiel de son conseil du 16 avril 2021, la société Allianz vie a informé M. X. de ce qu’elle acceptait de poursuivre l’indemnisation au titre de la garantie « incapacité temporaire totale de travail » dans la limite contractuelle de 36 mois et lui a versé la somme de 51.045,25 euros par virement du 27 juillet 2021 correspondant à la période du 17 janvier 2018 au 5 octobre 2019.

Par lettres de son conseil du 1er septembre 2021, M. X. a adressé à la société Allianz vie et à la Caisse d’épargne deux demandes indemnitaires non suivies d’effet.

C'est dans ces conditions que par exploits d’huissier de justice des 13 octobre et 2 novembre 2021, M. X. a fait assigner la Caisse d’épargne et la société Allianz vie devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir principalement, avant dire droit, prononcée une expertise judiciaire complémentaire et, en tout état de cause, condamnées les deux sociétés in solidum à prendre en charge les capitaux restant dus au titre des deux prêts et à l’indemniser de son entier préjudice corporel à hauteur de 3.284.609,55 euros.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 29 mars 2023, aux visas de « la législation sur les clauses abusives » et des articles 1217 à 1231-7 du code civil, il est demandé au tribunal de :

« Avant dire droit

- Ordonner une prise en charge immédiate des échéances des prêts par Allianz, au vu de la rechute de Monsieur X. le 15 avril 2019 ;

A titre principal,

- Constater le caractère abusif des Garanties « Arrêt de travail » ;

- Juger l’article 11 de la notice du contrat d’assurance comme non écrit ;

- Condamner in solidum ALLIANZ et la Caisse d’Epargne à rembourser à Monsieur X. le capital des prêts restant dû, soit la somme de 266.066,23 € pour le prêt de 318.500 € et la somme de 46.682,79 € pour le prêt de 84.721,74 € ;

- Condamner in solidum ALLIANZ et la Caisse d’Epargne à payer à Monsieur X. la somme de 3.284.609,55 euros à titre de dommages-et-intérêts pour manquement à son obligation d’éclairer Monsieur X. sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur, correspondant à son préjudice corporel ;

A titre subsidiaire,

- Ordonner une expertise judiciaire complémentaire, compte tenu de l’aggravation importante de l’état de santé de Monsieur X. depuis le dépôt du rapport d’expertise judiciaire du Dr. W. le 15 avril 2019, au vu des pièces médicales versées aux débats ;

En tout état de cause,

- Condamner in solidum ALLIANZ et la Caisse d’Epargne à la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner in solidum ALLIANZ et la Caisse d’Epargne aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise d’un montant de 10.500 € ;

- Dire et juger que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire ;

- Intérêts au taux légal »

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 26 juillet 2023, la Caisse d’épargne demande au tribunal de :

« Débouter Monsieur X. de l’intégralité de ses demandes à toutes fins qu’elles comportent.

Le condamner à payer à la CEIDF une somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre aux entiers dépens. »

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 30 novembre 2022, aux visas de l’article 1103 du code civil, du contrat d’assurance collective n°5298 et des conclusions de l’expert judiciaire, le docteur W., la société Allianz vie demande au tribunal de :

« Débouter Monsieur X. de l’intégralité de ses demandes

Rejeter toutes demandes dirigées contre la SA ALLIANZ VIE

Le condamner à verser à la SA ALLIANZ VIE la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens. »

[*]

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes.

L’ordonnance de clôture de l’instruction de l’affaire a été rendue le 25 octobre 2023 et l’affaire a été fixée pour être plaidée à l’audience tenue en juge rapporteur du 8 novembre 2023 à laquelle elle a été évoquée et mise en délibéré au 24 janvier 2024.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur la demande avant dire droit de prise en charge pour une durée de 36 mois supplémentaires :

M. X. fait valoir une rechute à compter du 15 avril 2019 et une aggravation de son état de santé depuis le rapport déposé par le docteur W.

Il expose ainsi :

Sur le plan somatique : souffrir de douleurs neurologiques, ressentir des décharges électriques, se déplacer exclusivement en fauteuil roulant et être suivi par un centre spécialisé pour la douleur ;Sur le plan psychiatrique : souffrir d’un trouble anxieux invalidant et d’un état dépressif majeur réactionnel et imputable directement à sa rechute qui concerne des troubles urinaires apparus postérieurement et des troubles psychologiques ; Avoir été hospitalisé le 10 juin 2021 pour apprentissage de l’irrigation colique par voie rétrograde.

Il ajoute que par décision du 22 avril 2021, la Maison départementale des personnes handicapées (ci-après MDPH) lui a accordé le bénéfice de l’allocation adulte handicapé, lui reconnaissant un taux d’incapacité supérieur ou égal à 80 %.

Il soutient dès lors démontrer au moyen de documents médicaux récents avoir été victime d’une rechute ouvrant droit à 36 mois supplémentaires d’indemnisation jusqu’au 15 avril 2022, ou à tout le moins jusqu’au 21 janvier 2021, date de consolidation retenue par le docteur W., la franchise de trois mois ne trouvant pas à s’appliquer pour la rechute.

La société Allianz vie n’a pas répliqué à cette demande, ses dernières écritures étant antérieures à celles du demandeur aux termes desquelles il formule pour la première fois cette prétention.

Sur ce,

En application de l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

En l’espèce, il résulte du rapport d’expertise du docteur W. déposé le 29 avril 2021 que l’état de M. X. était consolidé au 28 septembre 2020 sur un plan somatique et au 21 janvier 2021 sur un plan psychiatrique.

Il n’est pas contesté que la société Allianz a tiré les conséquences de ce rapport puisqu’elle a procédé à une indemnisation complémentaire au titre de la garantie « incapacité temporaire totale de travail » en réglant par virement du 27 juillet 2021, la somme de 51.045,25 euros correspondant à la période du 17 janvier 2018 au 5 octobre 2019.

Il en résulte que M. X. a perçu une indemnisation pour la période du 5 octobre 2016 au 5 octobre 2019, soit 36 mois conformément aux stipulations contractuelles de la clause 11.1 de la notice d’information du contrat d’assurance collective n° 5298 qui prévoit que « Les prestations en cas d’Incapacité temporaire Totale de travail sont versées par l’Assureur pendant au maximum 36 mois ».

Il ressort de ces éléments que la société Allianz vie a rempli ses obligations contractuelles au titre de la garantie précitée.

En conséquence, la demande est rejetée.

 

2 – Sur le caractère abusif de l’article 11 intitulé « Garanties Arrêt de travail » :

M. X. expose que le contrat d’assurance collective n°5298, adossé aux contrats de prêt et s’inscrivant dans un ensemble contractuel, avait pour finalité de le protéger des conséquences qui résulteraient de son impossibilité de faire face aux mensualités des prêts, ce qui caractérise l’obligation essentielle du contrat.

Il soutient qu’au cas particulier, il n’a pas été mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui découlaient pour lui des mécanismes des garanties qui lui étaient proposés.

Ainsi, il entend voir déclarée abusive au sens notamment des dispositions des articles 3 à 5 de la directive européenne 93/13 et des articles L. 211-1, L. 212-1 du code de la consommation et 1170 et 1171 du code civil, la clause 11.2 intitulée « Garantie invalidité permanente totale », quand bien même celle-ci ferait partie de l’objet principal de l’ensemble contractuel auquel participe le contrat d’assurance litigieux adossé aux deux contrats de prêts, en ce qu’elle n’est pas rédigée de manière claire et compréhensible dès lors que ni la notion d’invalidité permanente totale ni la forme de l’indemnisation par l’assureur ne sont définies, précisant qu’aucune notice d’information ne lui a été remise lors de la conclusion des contrats de prêt.

Il ajoute que cette clause crée un déséquilibre significatif entre l’assuré et l’assureur, dont il relève que ce dernier est souscripteur et attributaire des garanties, dans la mesure où elle est incluse dans un contrat d’adhésion et qu’elle a pour effet de vider la garantie de sa substance puisqu’aucune prestation n’est due en dessous d’un taux d’invalidité de 66 %.

En réplique, la société Allianz vie fait valoir que les dispositions des articles L. 212-1 et suivants du code de la consommation ne trouvent pas à s’appliquer à la stipulation contractuelle discutée, celle-ci définissant de manière claire et compréhensible l’objet principal du contrat et échappant dès lors à la qualification de clause abusive.

Elle ajoute qu’en tout état de cause, le tableau présenté dans la notice permettant de déterminer le taux global d’incapacité est de lecture simple et ne suscite aucune difficulté d’interprétation, solution retenue par de nombreuses juridictions.

Sur ce,

En application de l’article 768 du code de procédure civile, le tribunal n’est tenu de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l’espèce, il est relevé que si aux termes du dispositif de ses écritures, M. X. sollicite de voir déclarer le caractère abusif de l’article 11 de la notice, les moyens développés au soutien de cette prétention dans les motifs de ses écritures ne visent que la « garantie invalidité permanente totale » stipulée au point 2 de cet article et non la « garantie incapacité temporaire totale de travail » énoncée au point 1.

Dès lors, seul le caractère abusif de la garantie stipulée au point 2 de l’article 11 sera examiné par la juridiction.

En vertu de l’article L. 132-1 du code de la consommation, issu de la transposition de la directive n°93/13/CE du 5 avril 1993, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le caractère abusif d’une clause s’apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat. L’appréciation du caractère abusif de ces clauses ne concerne pas celles qui portent sur l’objet principal du contrat, pour autant qu’elles soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Il en résulte que lorsqu’une clause définit l’objet principal du contrat, elle échappe au mécanisme des clauses abusives, à condition de répondre à une exigence de transparence et d’être ainsi rédigée de façon claire et compréhensible.

Définissent l’objet principal du contrat les clauses qui fixent les prestations essentielles de ce contrat et qui, comme telles, caractérisent celui-ci.

L’exigence de transparence doit être comprise comme imposant non seulement que la clause concernée soit intelligible pour le consommateur sur les plans formel et grammatical, mais également qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret de cette clause et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières, ce qui implique notamment que le contrat doit exposer de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel la clause concernée fait référence, ainsi que, le cas échéant, la relation entre ce mécanisme et celui prescrit par d’autres clauses.

La charge de la preuve du caractère clair et compréhensible des clauses concernées incombe au professionnel.

En l’espèce, le demandeur discute l’intelligibilité de la clause 11.2 du contrat qui selon lui ne définit pas la notion d’invalidité permanente totale ni la forme de l’indemnisation par l’assureur. En toute hypothèse, il soutient ne pas avoir été informé du fonctionnement concret du mécanisme des garanties, la notice d’information ne lui ayant pas été remise.

Il est acquis aux débats que la clause 11.2 définit l’objet principal du contrat puisqu’elle décrit l’une des obligations principales de l’assureur, à savoir couvrir le risque lié à une invalidité permanente totale de l’emprunteur.

S’agissant de l’appréciation du caractère clair et compréhensible de cette clause, la société Allianz vie verse aux débats en pièce n°2 deux demandes d’admission au contrat n°5298 en date des 26 juin 2013 et 10 octobre 2013 établies au nom de M. X. et portant une signature que ce dernier ne conteste pas être la sienne. Ces documents portent la mention « Je reconnais avoir reçu ce jour la notice d’information du contrat n°5298 et en avoir pris connaissance, notamment de l’objet du contrat, des conditions et exclusions des garanties, et des limitations d’indemnisation, et en accepter tous les termes ». Il s’en déduit que le demandeur a, contrairement à ce qu’il soutient, bien eu connaissance des stipulations contractuelles litigieuses.

De plus, l’article 11.2 de la notice du contrat d’assurance collective n° 5298 définit l’invalidité permanente totale comme suit :

« A consolidation (…) et au plus tard trois ans après le début de l’incapacité, le médecin désigné par l’assureur détermine un taux d’incapacité fonctionnelle ainsi qu’un taux d’incapacité professionnelle afin d’apprécier le taux d’invalidité en résultant au sens du contrat »

« L’incapacité fonctionnelle sera établie de 0 à 100% en dehors de toute considération professionnelle en se basant uniquement sur la diminution de la capacité physique ou mentale consécutive à la maladie ou l’accident par référence au barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun (édition du Concours médical la plus récente au jour de l’expertise) »

« L’incapacité professionnelle sera appréciée de 0 à 100% en tenant compte de l’incident du taux et de la nature de l’incapacité fonctionnelle par rapport à la profession exercée. Le taux d’incapacité professionnelle fixé tient compte de la façon dont la profession était exercée antérieurement à la maladie ou l’accident, des conditions normales d’exercice de la profession et des possibilités restantes, abstraction faite des possibilités de reclassement dans une profession différente »

Figure ensuite un tableau à double entrée dans lequel pour connaître le taux retenu, il suffit de prendre le chiffre mentionné dans la case à l’intersection de la ligne « taux d’incapacité fonctionnelle » et de la colonne « taux d’incapacité professionnelle ».

Il résulte de façon claire et compréhensible de ce tableau bichrome que pour être garanti au titre de l’invalidité permanente totale, il est nécessaire que le taux d’invalidité soit supérieur ou égal à 66%, cas facilement identifiable en ce que les cases concernées sont de couleur foncée, et que ce taux d’invalidité est déterminé en fonction du taux d’incapacité fonctionnelle et professionnelle figurant dans le tableau inclus au contrat.

Enfin, le système d’indemnisation est également défini de manière transparente en ce qu‘il est indiqué que lorsque le degré d’invalidité est inférieur à 66%, « aucune prestation n’est due par l’assureur » et que dans le cas où ce degré est égal ou supérieur à 66%, « les prestations versées au titre de la garantie « Incapacité Temporaire Totale de Travail sont maintenues intégralement », celles-ci étant définies à l’article 11.1 comme « les échéances du prêt figurant sur le dernier tableau d’amortissement » sous réserves de particularités énumérées dans le même article.

Il ressort de ces éléments que la clause 11.2 du contrat d’assurance collective n°5298, qui participe de la définition de l’objet principal du contrat, est rédigée de façon claire et compréhensible et ne constitue dès lors pas une clause abusive.

En conséquence, le moyen est rejeté.

 

3 - Sur la responsabilité contractuelle de la Caisse d’épargne :

M. X. fait valoir que pèse sur le banquier souscripteur du contrat d’adhésion un devoir d’information et de conseil en matière d’assurance emprunteur ainsi qu’une obligation de mise en garde qui l’obligent en toute bonne foi à éclairer son client sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur notamment par la fourniture de conseils personnalisé par rapport à cette situation, outre la remise d’informations précontractuelles, principalement sous la forme d’une notice d’information conformément à l’article L.141-4 du code des assurances, dont il lui incombe de rapporter la preuve.

Il expose qu’en l’espèce, il a souscrit à l’ensemble des garanties (décès, PTIA, Incapacité (ITT, ITD)) mais que la dernière ne figure ni dans la fiche standardisée ni dans l’offre de prêt et qu’il n’a jamais eu communication du document « Attestation d’assurance » ni de la « Notice Allianz 5298 » qui d’ailleurs ne sont pas signées par lui-même. Il ajoute que la « Fiche standardisée » et la demande d’admission au contrat n°5298 ont été signées sans délai de réflexion et en méconnaissance de la loi Scrivener.

Plus particulièrement, il fait valoir que pour chaque prêt :

Il n’a pas paraphé la fiche standardisée dont il n’a pas pris connaissance car présentée comme un simple document interne sans valeur contractuelle qu’il a signé sans délai de réflexion ;Il existe une incohérence entre les divers documents en ce que la garantie ITD ne figure ni dans la fiche standardisée ni dans l’offre de prêt ;L’utilisation d’une police d’écriture inférieure à 8 lui rend inopposable le paragraphe « Déclarations » de la demande d’admission aux termes duquel il reconnait avoir eu connaissance de la notice d’information et qui ne lui a pas été remise alors qu’il s’agit du seul document comportant des précisions sur la limitation de garantie.

Il conclut à un manquement de la Caisse d’épargne à son devoir de mise en garde sur la possibilité d’assurer les prêts avec une meilleure couverture des risques en contractant une autre assurance ou une garantie optionnelle dans l’hypothèse d’un taux d’invalidité inférieur à 66%.

Il sollicite en conséquence la condamnation in solidum des défenderesses à l’indemniser du préjudice financier correspondant aux soldes du capital restant dû pour chaque crédit ainsi que de son entier préjudice corporel qu’il évalue à la somme de 3.284.609,55 euros.

Pour sa défense, la Caisse d’épargne fait valoir qu’elle est allée au-delà de ses obligations, les deux prêts, préalablement à leur conclusion, ayant chacun donné lieu à une information complète de sa part ainsi qu’à la remise de la notice d’information de la police d’assurance emprunteur Allianz vie au cours d’un entretien à l’occasion duquel M. X. a signé la fiche d’information standardisée résumant l’entretien et comprenant les informations prévues par l’article L.520-1 du code des assurances dans sa version alors en vigueur, dont la description de la garantie « invalidité permanente totale », le taux de son déclenchement et un renvoi pour plus de détails à la notice du contrat d’assurance qui lui a été remise lors de sa demande d’admission comme en atteste sa signature. Elle ajoute que M. X. a confirmé être en possession de la notice lors de l’acceptation des offres de prêts auxquelles elle était annexée conformément aux dispositions de l’article L.312-9 du code de la consommation.

Elle réfute également tout manquement à son devoir de mise en garde, exposant que la garantie « invalidité permanente partielle de travail » a fait l’objet d’une discussion avec son conseiller, ce qu’atteste la fiche standardisée d’information, et que le demandeur, alors âgé de 35 ans, exerçant la profession d’ingénieur, souhaitait disposer d’une offre d’assurance présentant le meilleur rapport qualité/prix et a opté pour la police aujourd’hui contestée en toute connaissance de cause comme l’illustre son choix par exemple de ne pas couvrir le risque de perte d’emploi qu’il estimait négligeable par rapport à sa situation professionnelle.

La société Allianz vie quant à elle fait valoir qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le devoir d’information incombe, en assurance de groupe, sur le souscripteur et non à l’assureur.

Elle ajoute qu’en toute hypothèse, la preuve de la remise de la notice d’information à M. X. est rapportée en ce que ce dernier, lors de sa demande d’adhésion à l’assurance, a apposé sa signature sous la mention aux termes de laquelle il reconnaissait en avoir eu connaissance, peu importe que ladite notice n’ait pas été signée par l’emprunteur.

Les défenderesses concluent ainsi au rejet des demandes indemnitaires et font valoir en tout état de cause que M. X. ne peut solliciter qu’un préjudice consistant en une perte de chance de ne pas contracter une assurance présentant une meilleure garantie et non l’indemnisation de son préjudice corporel qui est hors champ contractuel et sans lien de causalité avec une éventuelle faute tirée du devoir d’information.

Sur ce,

L’article L.311-19 du code de la consommation, dans sa version antérieure applicable, dispose que « Lorsque l'offre de contrat de crédit est assortie d'une proposition d'assurance, une notice doit être remise à l'emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l'assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l'assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l'assurance est exigée par le prêteur pour obtenir le financement, la fiche d'informations mentionnée à l’article L.311-6 et l'offre de contrat de crédit rappellent que l'emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l'assureur de son choix. Si l'assurance est facultative, l'offre de contrat de crédit rappelle les modalités suivant lesquelles l'emprunteur peut ne pas y adhérer. »

L’article L.312-9 du même code, dans sa rédaction antérieure applicable, ajoute que ladite notice énumérant les risques garantis et précisant toutes les modalités de la mise en jeu de l'assurance est annexée au contrat de prêt.

Par ailleurs, l’obligation d’informer l’adhérent sur les garanties souscrites et les conditions de leur mise en œuvre et d’éclairer ce dernier sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur ou à celle de celui qui cautionne ses engagements, incombe au seul établissement de crédit souscripteur du contrat d’assurance.

En l’espèce, les demandes d’adhésion aux assurances des 26 juin 2013 et 10 octobre 2013 portent toutes deux la signature de M. X., qu’il ne conteste d’ailleurs pas être la sienne, sous la mention « Je reconnais avoir reçu ce jour la notice d’information du contrat n°5298 et en avoir pris connaissance, notamment de l’objet du contrat, des conditions et exclusions des garanties, et de la limitation d’indemnisation, et en accepter tous les termes ».

Au cas particulier, cette mention ne constitue pas une clause édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions au sens de l’article L.112-4 du code des assurances dernier alinéa, et ne saurait voir sa validité remise en cause en raison de sa police de caractère qui est lisible.

La signature de la notice d’information elle-même n’étant pas exigée pour rapporter la preuve de sa remise, il résulte de cette mention que M. X. a bien été destinataire dudit document.

Par ailleurs, le délai de réflexion posée par la loi Scrivener s’applique à la seule offre de crédit et non à la « Fiche standardisée » et la demande d’admission au contrat n°5298.

S’agissant des « attestations d’assurance 5298 » en date des 23 juillet 2013 et 10 octobre 2013 produites par la banque, celle-ci ne portent pas la signature de M. X. et il n’est pas démontré qu’elles ont été remises au demandeur qui ne peut donc se voir opposer la mention qu’elles contiennent selon laquelle il est en possession de la notice.

En revanche, les deux fiches d’information standardisées, signées par M. X., portent la mention sous la rubrique « REMARQUES IMPORTANTES » :

« Aussi complète et précises que soient les informations données par votre conseiller, il est très important que vous lisiez attentivement la notice d’information de votre contrat d’assurance des emprunteurs remise au moment de votre adhésion.

Cette notice constitue le document juridique contractuel exprimant les droits et obligations de l’assuré et de l’assureur.

Nous attirons notamment votre attention sur les paragraphes consacrés aux risques exclus, à la durée d’adhésion de votre contrat, au délai de franchise (période pendant laquelle le sinistre reste à la charge de l’assuré), aux définitions des garanties ainsi qu’à leur motif et date de cessation (…) ».

Malgré les mentions précitées dans deux documents portant sa signature, M. X. n’a jamais réclamé la notice litigieuse ni contesté sa remise avant le présent litige, ce dont il se déduit qu’il était bien en possession de ce document.

Il résulte de ces éléments que la banque a porté à la connaissance de M. X. la documentation contractuelle, conformément aux textes alors en vigueur.

Sur la portée du devoir de conseil sur les garanties souscrites et les conditions de leur mise en œuvre qui incombait à la Caisse d’épargne, comme indiqué précédemment, les deux fiches standardisées ont été signées par l’emprunteur.

Il y est notamment spécifié que l’assurance proposée ne comporte pas la « garantie perte d’emploi », choix que M. X. ne conteste pas avoir fait.

Il s’en déduit que ce dernier a donc bien évoqué aux cours des échanges avec son conseiller sa situation personnelle et qu’il a été informé et éclairé sur l’adéquation des risques couverts à celle-ci.

Il a également été informé des risques liés au non-remboursement total ou partiel des prêts notamment en cas de problème de santé le privant de l’exercice de son activité, ce qui résulte notamment du descriptif clair et compréhensible en page deux de ces documents des diverses garanties susceptibles de s’appliquer dans un tel cas.

Ainsi, la « Garantie Incapacité Temporaire Totale de Travail » est décrite de la manière suivante :

« (Elle) correspond à l’état de santé qui, par suite de maladie ou d’accident, vous met dans l’incapacité totale et continue, médicalement constatée et reconnue par le médecin conseil de l’assureur, d’exercer votre activité professionnelle. La prestation est forfaitaire et correspond au remboursement, au prorata de la quotité assurée, de vos échéances de prêt dans la limite de 270 euros par jour et par assuré. Les prestations sont dues à l’issue d’un délai de franchise de 90 jours d’arrêt total de travail. Elles cessent à la première des dates suivantes : le jour de votre mise en préretraite ou retraite, sauf pour inaptitude au travail, ou à la fin de votre prêt au plus tard ».

La « Garantie Invalidité Permanente Totale de Travail (IPT) », est également décrite ainsi :

« (Elle) correspond à l’état de santé qui, après consolidation et au plus tard dans un délai de 3 ans à compter de la date d’incapacité de travail, conduit à un degré d’invalidité déterminé par le médecin conseil désigné par l’assureur supérieur ou égal à 66%. La prestation est forfaitaire et correspond au remboursement, au prorata de la quotité assurée, de vos échéances de prêt dans la limite de 270 euros par jour et par assuré. Les prestations cessent à la première des dates suivantes : le jour de votre mise en préretraite ou retraite, sauf pour inaptitude au travail, ou à la fin de votre prêt au plus tard ».

En conséquence, aucun manquement de la banque à son obligation d’information n’est caractérisé.

Les demandes d’indemnisation formées par M. X. de ce chef sont donc rejetées.

 

4 - Sur la demande d’expertise :

A titre subsidiaire, au regard des éléments développés au soutien de sa demande avant-dire droit de prise en charge, M. X. affirme démontrer que son degré d’invalidité est supérieur à 66% et donc pouvoir prétendre à la garantie « invalidité permanente totale » souscrite.

Il sollicite en conséquence, dans l’hypothèse où le tribunal ne jugerait pas la clause litigieuse abusive, une expertise complémentaire aux fins d’évaluation de l’aggravation de son état de santé et de fixation de son degré d’invalidité.

En réplique, la société Allianz vie fait valoir que le demandeur n’a pas fait état d’une telle aggravation dans la demande indemnitaire du 1er septembre 2021 qu’il lui a adressée alors qu’il se fonde sur des éléments pourtant antérieurs, relevant par ailleurs que nombre des pièces médicales invoquées préexistaient au rapport définitif de l’expert judiciaire déposé le 29 avril 2021 et que les décisions prises dans le cadre du contentieux avec la Sécurité sociale dont notamment celle lui reconnaissant le statut d’adulte handicapé qui est antérieure au dépôt du rapport, ne la lient pas. Elle soutient que le demandeur ne peut donc se prévaloir que d’une aggravation intervenue à compter du dépôt du rapport précité qu’en l’espèce il ne démontre pas, l’intervention chirurgicale qu’il a subie le 10 juin 2021 pour apprentissage du geste de l’irrigation colique et les troubles sphinctériens ayant déjà été pris en compte par l’expert judiciaire et le sapiteur lors de la fixation des taux d’incapacité. Elle ajoute qu’en réalité, M. X. critique au moyen de rapports d’expertise non contradictoires la date de consolidation et les conclusions du rapport du 29 avril 2021 et entend obtenir ainsi une contre-expertise. Elle rappelle enfin qu’une contre-expertise vise à déterminer de nouveaux taux sans remise en cause de la date de consolidation et demande que la mission de l’expert soit complétée par référence aux contrats d’assurance et que le coût soit aux frais avancés du demandeur.

Sur ce,

Il est constant qu’aux termes de son rapport d’expertise en date du 10 mars 2021, déposé le 29 avril 2021, le docteur W. a conclu à une consolidation de l’état de M. X. au 28 septembre 2020 sur un plan somatique et au 21 janvier 2021 sur un plan psychiatrique, et a fixé le taux d’incapacité professionnelle définitive à 100% et le déficit fonctionnel permanent à 41,5%, sur la base d’un déficit fonctionnel permanent de 35% sur le plan somatique et de 10% sur le psychiatrique.

Il est rappelé que l’expert et son sapiteur en psychiatrie, conformément à la mission qui leur a été confiée, ont déterminé ces taux au regard des stipulations de la police d’assurance discutée et plus particulièrement de la définition contractuelle de la garantie « invalidité permanente totale » qui définit le cadre des obligations de l’assureur dans le présent litige.

Il est également relevé que M. X. produit un rapport d’expertise médicale en date du 9 avril 2021 du docteur [A] [T] à l’attention du médecin conseil de la société Cardiff aux termes duquel il est retenu un taux d’incapacité professionnelle de 100% et un taux d’incapacité fonctionnelle de 55%, dont la conjugaison appliquée au tableau de la notice d’assurance n°5298 fait ressortir un taux d’invalidité totale permanent inférieur à 66%.

En l’espèce, M. X. ne saurait se prévaloir de pièces médicales antérieures aux conclusions des experts, et donc connues de ceux-ci, pour justifier d’une aggravation postérieure de son état qu’il n’a d’ailleurs jamais évoquée, comme le relève la société Allianz vie, avant l’introduction de la présente action en octobre 2021.

De même, les taux d’invalidité retenus au regard des définitions contractuelles ne sauraient être remis en cause par la décision de la maison MDPH des Hauts-de-Seine du 22 avril 2021 retenant un taux d’incapacité égal ou supérieur à 80% dont il n’est pas démontré que sa détermination reposerait sur des critères identiques à ceux convenus entre les parties au contrat, et ce d’autant plus que l’article 14 de la notice d’assurance stipule expressément que « L’attention de l’assuré est attirée sur l’absence de lien entre les décisions de la Sécurité sociale ou tout autre organisme assimilé, relatives à l’incapacité et à l’invalidité, et celles de l’assureur dans les mêmes domaines ».

De plus, il ne résulte pas du rapport d’expertise du Dr [C] en date du 23 mai 2021, rendu dans le cadre de l’instance introduite par M. X. devant le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre, à laquelle la société Allianz vie n’était pas partie, une aggravation de l’état de santé du demandeur. En effet, l’expert, après avoir rappelé que « en droit, la consolidation s’entend de la stabilité de l’état de la victime, c’est-à-dire du moment où tous les soins lui ayant été donnés et toutes les ressources de la technique médicale ayant été utilisées en sa faveur, il n’est plus possible d’envisager aucune évolution des lésions qui présentent donc un caractère stable et permanent », conclut à une absence de consolidation de l’état de M. X. au 7 mai 2021 en ce que celui-ci n’avait « pas encore bénéficié de l’apprentissage de la réalisation de l’irrigation colique transanale ».

Il résulte de cette expertise que l’état de santé de M. X. n’a pas été considéré comme consolidé car il était susceptible d’une amélioration par le traitement thérapeutique énoncé ci-dessus qui a été mis en œuvre lors de son hospitalisation au cours du mois de juin 2021.

Les mêmes conclusions ressortent du compte-rendu d’examen du docteur [U] en date du 3 mars 2021, soit antérieurement au rapport d’expertise judiciaire du docteur W., qui conclut à une « consolidation non acquise » et à une « ITT toujours actuellement justifiée dans l’attente d’un nouveau tt susceptible éventuellement d’améliorer ses troubles fonctionnels ».

Enfin, l’aggravation de l’état de santé ne peut être retenue sur la base du certificat du docteur [M], médecin généraliste, en date du 5 juillet 2021 qui indique une aggravation de l’état psychiatrique de M. X. et la nécessité de « revoir son taux d’IPP pour le psycho-traumatisme » au motif que « celui-ci est évalué à au moins 17% par l’expert en psychiatrie dr. [H] [X] » sans précision du cadre thérapeutique dans lequel il est intervenu à cette époque alors que le demandeur était suivi par des spécialistes et ce d’autant plus que la seule pièce émanant du docteur [X] est un document établi sur une ordonnance de ce dernier en date du 7 mai 2021 rédigé en ces termes :

«  Dire,

Monsieur le docteur [C]

Expert nommé par le TJ

Il me parait important vu l’état actuel de Monsieur X. de ne pas pouvoir le consolider ».

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. X. ne démontre pas la réalité d’une aggravation de son état de santé justifiant la nomination d’un expert afin de réévaluer le taux d’invalidité totale permanente retenu par le docteur W., médecin expert.

De plus, comme exposé précédemment, l’assureur a rempli l’intégralité de ses obligations au titre de la garantie « incapacité temporaire totale de travail » et la fixation d’une nouvelle date de consolidation non liée à une aggravation de l’état de santé du demandeur, mais au contraire à une amélioration de celui-ci, ne serait donc pas de nature à obliger l’assureur au titre du contrat litigieux en l’absence de réévaluation à la hausse du taux d’invalidité.

En conséquence, la demande d’expertise formée par M. X. est rejetée.

 

5 - Sur les demandes accessoires :

5.1 - Sur les frais du procès :

M. X. qui succombe supportera les dépens et est condamné au paiement à la caisse d’épargne et à la société Allianz vie d’une somme de 2.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

5.2 - Sur l’exécution provisoire :

La présente décision est revêtue de droit de l'exécution provisoire conformément aux dispositions de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable en l’espèce, l’instance ayant été introduite postérieurement au 31 décembre 2019.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

DEBOUTE M. X. de ses demandes ;

CONDAMNE M. X. aux dépens ;

CONDAMNE M. X. à payer à la SA Caisse d’Epargne Île-de-France et à la SA Allianz vie chacune la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 24 Janvier 2024

Le Greffier                                                   Le Président