TI RENNES, 7 juin 2001
CERCLAB - DOCUMENT N° 1758
TI RENNES, 7 juin 2001 : RG n° 01/000217
TRIBUNAL D’INSTANCE DE RENNES
JUGEMENT DU 7 JUIN 2001
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-01-000217. A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 7 juin 2001 ; Sous la Présidence de FRANCOISE ROQUES, Juge d'Instance, assisté de MICHELLE BANCTEL, faisant fonction de Greffier ; Après débats à l'audience du 19 avril 2001, le jugement suivant a été rendu ;
ENTRE :
DEMANDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse] comparant en personne
ET :
DEFENDEUR(S) :
SOCIETE FRANÇAISE DU RADIOTELEPHONE (SFR)
[adresse], représenté(e) par Maître RYCHTER, avocat du barreau de PARIS
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] JUGEMENT
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par contrat en date du 27 novembre 1999, Monsieur X. a souscrit auprès de la Société SFR un abonnement de téléphonie mobile pouvant être résilié par lettre recommandée avec accusé de réception avec effet à la date d'émission de la facture suivant la réception de l'envoi recommandé.
De nouvelles conditions générales d'abonnement applicables à compter du 25 janvier 2000 ont été adressées à Monsieur X., prévoyant une résiliation soumise à un délai de préavis de 60 jours pouvant être refusé dans un délai d'un mois à compter de la réception de la dernière facture, par les clients bénéficiant des conditions générales anciennes. Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 14 novembre 2000, Monsieur X. a fait connaître à SFR son intention de résilier son abonnement à compter du 27 décembre 2000.
Néanmoins, par courrier du 24 janvier 2000, SFR a fait savoir à Monsieur X. que le préavis applicable était de 60 jours et que la résiliation ne prendrait effet que le 26 janvier 2001.
Alléguant le caractère abusif de la modification unilatérale des termes du contrat et [l'illicéité] au regard de l'article 1134 du Code Civil de la clause lui imposant un délai pour refuser cette modification, Monsieur X., par acte du 6 février 2001, a assigné devant ce tribunal la Société SFR afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 209,99 francs en réparation de son préjudice matériel et de celle de 3000,00 francs en dédommagement de son préjudice moral.
Monsieur X. sollicite également le versement d'une indemnité de 2000,00 francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
Monsieur X. invoque les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation dont l'annexe 1-J répute abusive à titre indicatif toute clause autorisant le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable.
Il estime à cet égard infondé le délai de préavis de 60 jours stipulé dans les nouvelles conditions générales d'abonnement et soutient que l'allongement du délai ne peut être valablement justifié, comme le fait la Société SFR, par une volonté de répondre aux insatisfactions éventuelles des clients.
[minute page 3] Par ailleurs, Monsieur X. rappelle que selon l'article 1134 alinéa 2 du Code Civil les conventions ne peuvent être révoquées que du consentement mutuel des parties et que selon une jurisprudence constante, le silence de celui qu'on veut obliger ne peut suffire à établir son consentement à l'obligation alléguée.
Il en déduit que la Société SFR devait obtenir son consentement pour mettre à sa charge les nouvelles conditions générales d'abonnement et que son silence laisse subsister les conditions générales initiales.
Il caractérise ainsi son préjudice matériel par le mois supplémentaire d'abonnement qu'il a dû payer en raison de l'allongement du délai de préavis.
La Société SFR conclut au débouté et demande paiement d'une indemnité de 6000,00 francs en application des dispositions de l'article 700 du NCPC.
La Société SFR souligne qu'en application des anciennes conditions générales d'abonnement invoquées par Monsieur X., ce dernier ne pouvait obtenir la résiliation au 27 décembre 2000, mais dès le 30 novembre 2000. Qu'en conséquence, Monsieur X. ne peut se prévaloir d'une situation qu'il a créée, déséquilibrée au regard des règles du contrat.
La Société SFR fait valoir qu'en tout état de cause, les nouvelles conditions générales d'abonnement sont opposables à Monsieur X. dès lors qu'il ne conteste pas les avoir reçues début 2000 et qu'il ne les a pas refusées dans le délai d'un mois qui lui était imparti ; qu'il ne saurait dans ces conditions être admis à les discuter quelques mois plus tard. La Société SFR ajoute que la clause prévoyant un délai de préavis de 60 jours ne saurait être réputé abusive puisqu'elle avait pour objet de remplacer une clause initiale qui plongeait le consommateur dans une incertitude de durée de son préavis et qu'elle a eu pour effet de lui permettre un meilleur calcul prévisionnel de la fin de son contrat.
La Société SFR relève encore que la somme litigieuse de 209,99 francs concerne l'abonnement pour la période du 27 décembre 2000 au 26 janvier 2001 que Monsieur X. ne peut refuser de régler dès lors qu'il a utilisé son téléphone mobile le 27 décembre 2000.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Aux termes de l'annexe 15 de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, peuvent être regardées comme abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet d'autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat.
[minute page 4] La recommandation de la Commission des clauses abusives n ° 94-01 en date du 19 juin 1994 concernant les clauses dites du consentement implicite estime que lorsque les professionnels adressent aux consommateurs un simple écrit, note ou document par lequel ils s'autorisent à modifier une ou plusieurs clauses du contrat d'origine, sauf avis contraire exprimé dans un délai donné, le silence ne saurait dans un tel cas valoir consentement et que le consommateur ne se trouve aucunement lié par ces nouvelles clauses.
Enfin le dixième considérant de la recommandation n° 99-02 en date du 28 mai 1999 relative aux contrats de radiotéléphone portable a conduit la Commission des Clauses Abusives à recommander que soient éliminées des contrats les clauses ayant pour effet de déduire du silence du consommateur après un délai déterminé, son consentement implicite à de nouvelles conditions contractuelles.
Au regard de ces textes, il s'impose de considérer que les clauses des nouvelles conditions générales d'abonnement communiquées par SFR à Monsieur X. en lui précisant qu'il ne disposait que d'un délai d'un mois à compter de la réception de sa dernière facture en date pour refuser ce nouveau contrat doivent être regardées comme abusives et que le silence gardé par Monsieur X. n'implique pas son consentement à ces nouvelles stipulations.
Monsieur X. est donc fondé à se prévaloir des anciennes Conditions Générales d'abonnement stipulées lors de la conclusion de son contrat initial et lui permettant de résilier le contrat par lettre recommandée avec accusé de réception à tout moment après une période minimum de douze mois, avec effet de la résiliation à la date d'émission de la facture suivant la réception de la lettre recommandée.
L'application de cette stipulation contractuelle interdit à la société SFR de justifier du bien fondé de la facturation de l'abonnement pour la période du 27 décembre 2000 au 26 janvier 2001 dès lors que Monsieur X. avait résilié son contrat par lettre recommandée reçue le 14 novembre 2000 et qu'il apparaît que les communications de très courte durée passées le 27 décembre 2000 avaient uniquement pour objectif de permettre au demandeur de vérifier que la résiliation était bien effective.
La Société SFR devra donc rembourser à Monsieur X. la somme de 209,99 francs, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
En revanche, Monsieur X. ne caractérise pas le préjudice moral qu'il aurait subi dans la mesure où, compte tenu du faible montant du litige, il apparaît que l'action dont il a pris l'initiative était exclusivement dictée par des questions de principe qu'il entendait faire valoir.
[minute page 5] Tenue aux dépens, la Société SFR doit également être condamnée au paiement de la somme de 400,00 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
CONDAMNE la Société SFR à payer à Monsieur X. la somme de DEUX CENT NEUF FRANCS QUATRE VINGT DIX NEUF (209,99 francs), avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
CONDAMNE la Société SFR à payer à Monsieur X. la somme de QUATRE CENTS FRANCS (400,00 francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire.
CONDAMNE la Société SFR aux dépens de l'instance.