TI RENNES, 22 février 2001
CERCLAB - DOCUMENT N° 1759
TI RENNES, 22 février 2001 : RG n° 99/001239
TRIBUNAL D’INSTANCE DE RENNES
JUGEMENT DU 22 FÉVRIER 2001
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-99-001239. A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 22 février 2001 ;
Sous la Présidence de GERALDINE BERHAULT, Juge d’instance, assisté de MARIE THERESE DESBOIS, faisant fonction de Greffier ;
Après débats à l'audience du 20 novembre 2000, le jugement suivant a été rendu ;
ENTRE :
DEMANDEUR (S) :
Mademoiselle X.,
[adresse] représenté(e) par Maître DESAUNAY, avocat du barreau de RENNES
ET :
DEFENDEUR(S) :
- SOCIETE FIDEM,
[adresse] représenté(e) par Maître GAUTIER Stéphane, avocat du barreau de PARIS
- SOCIETE NOUVELLE DE LA MAISON DU MEUBLE (enseigne BUT)
[adresse] représenté(e) par Maître MENAGE, avocat du barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par actes du 24 septembre 1999, Mlle X. a assigné devant le présent tribunal la SA FIDEM et la SA Société Nouvelle de la Maison du Meuble, d'une part, et la SA FIDEM seule, d'autre part.
Dans le souci d'une bonne administration de la justice, les deux procédures ont été jointes par décision du 9 mars 2000 dans le cadre de la mise en état des dossiers.
* * * * *
Mlle X. expose dans se demande à l'encontre de la SA FIDEM, seule, que le 26 octobre 1998, elle a signé une offre préalable de crédit accessoire ou non à des contrats de vente utilisable par fraction et assortie d'une carte de crédit et d'avis de débit auprès de la SA FIDEM.
Elle estime que l'offre préalable est affectée de deux vices :
1) Au recto de l'offre, il est indiqué que, de convention expresse, pour limiter les coûts du crédit, la délivrance de l'information légale obligatoire de l'article L. 311-9 alinéa 2, sera établie par la production de l'enregistrement informatique de son envoi et que faute de manifestation formelle de sa volonté de ne pas renouveler le contrat, un mois avant l'échéance, le contrat sera reconduit.
Elle estime que celle clause viole les dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation en ce qu'elle aggrave la situation de l'emprunteur et doit entraîner la déchéance du droit aux intérêts.
2) L'article II-13.d « résiliation du contrat et clôture du compte » des conditions générales de crédit énonce que le contrat pourra notamment être résilié en cas d'impayés sur les crédits de l'emprunteur auprès du prêteur et que ces impayés sur d'autres crédits que celui concerné par la présente offre préalable entraînera l'application « de l'article 1-4 ci-dessus » soit les conséquences pénalisantes d'une défaillance de l'emprunteur dans les remboursements.
Elle estime que cette clause crée une interdépendance entre des contrats différents, laquelle est préjudiciable à l'emprunteur alors que rien ne justifie qu'un impayé sur un contrat entraîne de droit la résiliation d'un autre contrat dans le cadre duquel l'emprunteur respecte parfaitement ses obligations.
Elle considère cette clause illicite au regard du modèle type n°6 renvoyant au modèle type n° 1 lequel ne prévoit de sanctions financières contre l'emprunteur qu'en cas de défaillance dans les remboursements du crédit qu'il a signé et non d'autres sans lien avec le premier.
[minute page 3] Elle en conclut que l'offre préalable ne respecte pas le modèle type applicable de l'annexe à l'article R. 311-6 et partant l'article L. 311-13 dont la violation est pénalement sanctionnée par l'article L. 311-34 du Code de la consommation et qu'en conséquence la présence de cette clause doit entraîner la déchéance du droit aux intérêts.
Dans sa demande présentée à l'encontre de la SA NMM et la SA FIDEM, Mlle X. expose que le 26 décembre 1998 et suivant bon de commande n° 030978, elle a fait l'acquisition de meubles auprès de la société Nouvelle du Meuble moyennant la somme globale de 8.790 Francs. En ce qui concerne une partie de la somme (8.000 Francs) le bon de commande porte la mention de la souscription par Mlle X. d'un crédit à la consommation auprès de la SA FIDEM
Elle estime être fondée à solliciter la nullité des contrats de vente et de crédit.
1) sur la nullité du contrat de vente, elle fait valoir qu'aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, le professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien. Elle a acquis un ensemble mobilier de chambre à coucher et le bon de commande portait la mention « à monter soi même ». Or, elle indique qu'elle a dû faire appel au service après vente du vendeur compte tenu de la difficulté de montage et un employé est parvenu à monter le meuble à l'aide d'outils spécialisés.
Elle reproche au vendeur, alors qu'elle s'était préalablement renseignée sur les modalités de montage, de lui avoir assuré que le montage était extrêmement simple et que le meuble était livré avec un plan précis, détaillé et clair.
Or, elle considère que l'obligation de renseignements et de conseils incombant au vendeur n'a pas été respectée au simple examen du plan de montage des meubles.
Par ailleurs, elle constate que les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande sont parfaitement illisibles, imprimées en petits caractères de couleur marron sur fond rose.
Elle ajoute que l'article 6 laisse croire que seule la garantie des vices cachés est recevable, ce qui est trompeur pour le consommateur et que l'article 7 subordonne la mise en oeuvre de la garantie des vices cachés à l'information immédiate du vendeur dès le constat du vice alors qu'aux termes de l'article 1648 du Code Civil et de la jurisprudence, il existe un délai d'environ 6 mois pour la mise en oeuvre de la garantie.
Elle en conclut que te comportement de la société NMM est contraire à l'esprit de l'article L. 111-1 du Code de la consommation et est au surplus constitutif d'un dol.
2) Sur la nullité du contrat de crédit, elle fait valoir qu'en application de l'article L. 311-21 du Code de la consommation le prononcé de la nullité du contrat de vente entraîne celui de la nullité du contrat de crédit qui lui est accessoire. Au surplus, Mlle X. n'a signé aucune offre préalable de crédit accessoire à une [minute page 4] vente bien que le bon de commande en porte la mention.
Enfin, elle a été mise en possession d'un document de la SA FIDEM lequel ne répond pas aux exigences des dispositions des articles L. 311-2 et suivants du Code de la consommation. Le document comprend l'intitulé de plusieurs des modèles types définis et une telle présentation ne met pas le consommateur en mesure de savoir à quelle offre il souscrit précisément et quelles sont les conditions de cette offre notamment parce que sur chacune ces pages, des conditions relatives à l'une et à l'autre figurent et, d'autre part, parce que les mentions sont présentées sans aucune clarté tant en raison de la typographie des caractères que du mode de présentation adopté.
Subsidiairement, elle estime que la déchéance du droit aux intérêts est encourue par la SA FIDEM pour les motifs qu'elle a développés dans la première partie de sa demande et qu'elle reprend.
En conclusion, Mlle X. sollicite du tribunal de :
- dire la SA FIDEM déchue du droit aux intérêts de l'emprunt du 26 octobre 1998 ;
- dire que les sommes perçues au titre des intérêts, qui seront productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par la SA FIDEM à Mlle X.
- prononcer la nullité du contrat de vente du 26 décembre 1998 avec toutes ses conséquences de droit ;
- condamner la SA S. à rembourser à Mlle X. la somme de 740 Francs versée à titre d'acompte ;
- prononcer la nullité du contrat de crédit ;
A titre subsidiaire,
- condamner la SA NMM lui verser la somme de 4.000 Francs à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles L. 111-1 du Code de la consommation et 1116 du Code civil ;
- dire la SA FIDEM déchue du droit aux intérêts de l'emprunt du 26 décembre 1998 ;
- dire que les sommes perçues au titre des intérêts qui seront productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par la SA FIDEM à Mlle X.
- condamner solidairement la SA Nouvelle de la Maison du Meuble et la SA FIDEM à verser à Mlle X. la somme de 5000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
En réponse, la SA FIDEM expose les éléments suivants :
Le 26 octobre 1998, Mlle X. a accepté une offre préalable de « crédit accessoire ou non à des contrats de vente utilisable par fraction et assortie d'une carte de crédit et d'avis de débit » avec un montant de découvert autorisé de 50.000 Francs au TEG annuel de 15,48%.
[minute page 5] Deux mois après, elle a profité d'une opération de vente promotionnelle spéciale, réservée aux porteurs de la carte Aurore et laissant le choix au porteur entre, un règlement en un seul versement dans les trois mois suivant son achat, et un paiement à crédit par débit du compte Aurore à l'issue des trois mois, faute de règlement dans ce délai.
La SA FIDEM précise que ces informations ont été portées sur une offre préalable de crédit le 26 décembre 1998 mais un simple ticket de caisse aurait suffit.
Le 20 mars 1999, Mlle X. n'ayant pas payé les 8.000 Francs en cause, la dette du 26 décembre 1998 a été soldée par une écriture en crédit de 8.000 Francs et le compte correspondant au contrat du 26 octobre 1998 a été débité de 8.000 Francs conformément aux prévisions contractuelles.
Par ailleurs, sur le relevé de juin 1999 a figuré un message informant l'emprunteuse que son contrat serait reconduit pour une période de un an à compter de sa date d'anniversaire, selon les mêmes termes et conditions, sauf opposition de sa part à cette reconduction.
Enfin, le contrat est actuellement exécuté de façon normale.
Aux termes de ses conclusions, la SA FIDEM soulève les arguments en réponse suivants :
1) Sur l'application de l'article L. 311-22 du Code de la consommation :
L'opération du 26 décembre 1998 n'est pas une opération de crédit indépendante mais une application particulière du contrat de crédit permanent du 26 octobre 1998. Elle en déduit qu'aucun lien ne peut être fait entre la vente et le crédit ; le contrat du 26 octobre 1998 n'est accessoire à aucune vente et son régime ne peut dépendre de l'utilisation qui en est faite postérieurement à sa conclusion par le client.
Au demeurant, même si l'on reconnaissait à l'opération du 26 décembre 1998 la nature d'un contrat de crédit, le bien financé n'est pas déterminé de façon précise et il ne peut donc s'agir d'un crédit accessoire à une vente.
2) Aucun contrat de crédit n'a été signé le 26 décembre 1998, il a simplement été fait application du contrat du 26 octobre 1998 en son article II-11 et l'opération financière visée ne correspond pas à un contrat de crédit autonome et ne peut être l'objet d'aucune critique.
3) Sur la validité de l'acceptation de l'offre préalable :
La SA FIDEM estime qu'il est évident à la lecture du contrat du 26 octobre 1998 que Mlle X. a accepté la « première offre exclusivement » et qu'il n'y a rien d'illégal à porter sur un même instrumentum deux offres préalables distinctes.
Elle note que l'intitulé du support est clair, fait la distinction précise encre les deux offres.
[minute page 6] Par ailleurs, aucune disposition de la loi du 10 janvier 1978, ni de son décret d'application n'interdit aux établissements de crédit de faire parvenir à un candidat au crédit deux offres préalables sur le même document. De plus, les conditions figurant sur les formulaires sont clairement séparés selon le type de crédit.
Enfin, pour des raisons pratiques et économiques, la plupart des établissements de crédit spécialisés qui pratiquent l'inscription télématique ont recours au bi-contrat sans que cette pratique n'ait été critiquée par la DGCCRF et la commission des clauses abusives.
4) Sur la reconduction du contrat :
Au recto de l'offre, il est indiqué que, « de convention expresse, pour limiter les coûts du crédit, la délivrance de l'information légale obligatoire de l'article L. 311-9 alinéa 2 sera établie par la production de l'enregistrement informatique de son envoi et que faute de manifestation formelle de sa volonté de ne pas renouveler le contrat, un mois avant l'échéance, le contrat sera reconduit. »
La SA FIDEM estime que les dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation sont respectées.
* Elle ne voit pas en quoi la stipulation pourrait créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
- la précision selon laquelle « l'indication » souhaitée par le législateur se fera par « lettre Simple » correspond aux prévisions de l'article 667 du nouveau code de procédure civile en matière de notification.
- la stipulation selon laquelle « s'il propose le renouvellement du contrat le prêteur indiquera trois mois (...) » n'est qu'une application particulière au cas d'espèce du principe général du droit bancaire selon lequel il n'existe pas de droit au crédit.
- la mention « de convention expresse, pour limiter les coûts du crédit, la délivrance de cette information sera établie par la production de l'enregistrement informatique de l'envoi » relève d'un souci économique. Cette clause n'inverse pas la charge de la preuve, l'établissement devant rapporter la preuve de l'envoi par ses relevés informatiques, ce que fait la SA FIDEM.
Elle demande d'ordonner à Mlle X. de produire le relevé en cause, et de son côté elle verse aux débats une attestation d'huissier, de son service informatique et un spécimen de relevé portant mention des conditions de reconduction.
* Le prêteur de deniers a toute liberté au delà des prescriptions légales de convenir avec les emprunteurs de dispositions particulières aménageant l'exécution du contrat.
La clause du contrat de Madame X. aux termes de laquelle celle-ci aurait pu s'opposer à la reconduction du contrat en notifiant sa décision à la banque au moins trente jours avant la date d'échéance, ne se heurte pas aux limites prévues par les dispositions impératives résultant de l'application du Code de la consommation, aux recommandations de la commission des clauses abusives et aux interdictions prévues par le même Code.
* [minute page 7] Par ailleurs, le Code de la consommation ne comporte aucune interdiction directe concernant la réservation d'un délai de prévenance dans lequel peut intervenir le refus de la reconduction par l'emprunteur.
* La SA FIDEM insiste sur le fait que l'information annuelle ne concerne que les conditions de reconduction de l'ancien contrat et non la conclusion d'un nouveau contrat dont les modalités devraient être fixées par écrit. Le législateur n'a jamais souhaité qu'à l'occasion d'une simple reconduction, une sous offre préalable soit émise qui ne comporterait que les conditions essentielles.
5) Sur la question de la résiliation du contrat de crédit du fait d'un impayé sur un autre contrat:
La SA FIDEM explique que la clause litigieuse de l'article II-13.D du contrat a pour objet d'éviter les opérations de cavalerie.
Il n'y a pas de caractère pénalisant puisqu'en cas de résiliation d'un tel contrat, aucune pénalité n'est requise et dans les faits, en tout état de cause, aucune pénalité n'est jamais demandée. L'article II-13.d renvoie à l'article 1-4 uniquement en cas d'impayé et non en cas de résiliation du fait d'une défaillance dans l'exécution d'un autre contrat.
Elle estime que Melle X. dénature dès lors le contrat lorsqu'elle fait une relation du fait d'un impayé sur un autre contrat et les conséquences de la résiliation du contrat en cause pour un impayé. Cette clause au demeurant ne lui fait pas grief puisqu'elle n'a qu'un seul contrat avec la SA FIDEM.
6) La SA FIDEM considère qu'à supposer fondés les griefs développés à l'encontre du contrat, ceux ci ne pourraient pas entraîner la déchéance du droit au intérêts mais, tout au plus, le tribunal ne pourrait que réputer non écrites lesdites clauses.
Aux termes de son argumentation, la SA FIDEM sollicite du tribunal de :
- dire qu'il n'existe qu'un seul contrat de crédit entre la société FIDEM et Madame X., accepté le 26 octobre 1998 ;
- ordonner à Madame X. de produire le relevé de son compte de juin 1999 sur le fondement de l'article 11 du nouveau code de procédure civile ;
- rejeter l'ensemble des prétentions de la demanderesse ;
- condamner Madame X. au paiement d'une amende civile de 5.000 Francs ainsi qu'une somme de 5.000 Francs à titre de dommages et intérêts pour abus du droit d'ester en justice et, enfin une somme de 12.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SA Société NOUVELLE DE LA MAISON DU MEUBLE à l'enseigne BUT expose que Madame X. après avoir pris possession du produit livré en kit est venue se plaindre du manque de lisibilité et de compréhension de la notice de montage jointe à l'envoi. A sa demande, un ouvrier a été dépêché et a procédé au montage moyennant un coût de 250 Francs :
1) [minute page 8] En réponse à l'argumentation concernant l'application des dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, elle indique que la notice de montage, produite aux débats, n'apparaît nullement absconse et se présente de façon classique pour ce type de produit. Il y a un inventaire des pièces et l'indication étape par étape à l'aide de schéma des différentes procédures de montage. Le fait que Madame X. ait demandé qu'un ouvrier lui soit dépêché pour monter chez elle le pont-lit ne prouve pas de façon irréfragable que la notice de montage était incompréhensible ou que le lit comportait un défaut de conception.
2) En réponse à l'argumentation sur le dol, elle note que Madame X. assimile à des manœuvres les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande. Il semble s'en déduire que si les conditions générales de vente avaient été rédigées différemment, elle n'aurait pas procédé à l'achat du bien.
La SA NMM estime l'argumentation non sérieuse et sollicite du tribunal de :
- débouter Madame X. de ses demandes ;
Reconventionnellement,
- condamner Madame X. à lui payer la somme de 250 Francs et celle de 3.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
I - Sur la demande présentée à l'encontre de la SA société Nouvelle de la Maison du Meuble et la SA FIDEM :
A - Sur la nullité du contrat de vente :
1) - Sur le moyen tiré des dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation :
Aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
En l'espèce, Madame X. a acquis un meuble « pont-lit » livré en kit pour un coût de 8.790 Francs.
Elle reconnaît avoir été informée que ce meuble était à « monter soi même » mais ne justifie pas de ses affirmations relatives au fait que :
1) un vendeur l'aurait informée que le montage était simple et sans outil spécifique ;
2) l'ouvrier qui a monté le meuble a utilisé des outils spécialisés.
[minute page 9] Il convient en outre de retenir que l'examen attentif du plan de montage fourni avec le meuble permet de comprendre les modalités de montage.
Ce plan présente les différentes pièces numérotées, les liens et attaches selon les parties du meuble puis le montage en lui même par étapes.
Aussi, le fait que Madame X. ait sollicité le service après vente de la SA NMM pour monter le meuble n'est pas en lui même un élément probatoire du défaut d'information de la cliente.
Dans ces conditions, les arguments présentés par Madame X. sont insuffisants pour justifier du non respect des dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation par le vendeur de la société.
2) Sur le dol :
Aux termes de l'article 1116 du Code civil le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
La preuve incombe donc à Madame X.
En l'espèce, au regard de l'argumentation soulevée, Madame X. tend à démontrer que les manœuvres frauduleuses sont constituées par l'illisibilité des clauses des conditions générales de vente insérées au verso du bon de commande et par la clause relative à la garantie.
Il y a lieu d'observer que contrairement aux affirmations de Madame L., les conditions générales de vente sont lisibles.
Concernant les articles 6 et 7 de ces conditions, il convient de constater que ces dispositions sont réductrices par rapport aux dispositions légales prescrites par l'article 1648 du Code civil.
Cependant et en tout état de cause, Madame X. se positionnant sur le terrain du dol, il lui appartient de démontrer - ce qu'elle ne fait pas - d'une part que ces dispositions contractuelles relèvent de manœuvres dans le but de tromper le client et, d'autre part que sans ces manœuvres elle n'aurait pas contracté.
Madame X. ne procède que par affirmation et sa démonstration est donc insuffisante pour caractériser un dol.
En conséquence, elle sera déboutée de sa demande tendant à l'annulation du contrat de vente.
[minute page 10]
3) Sur la demande reconventionnelle de la SA NMM :
La SA NMM sollicite la condamnation de Madame X. à lui payer les frais d'intervention liés au montage du meuble à hauteur de 250 Francs suivant facture émise le 29 décembre 1998.
Madame X. n'a fait valoir aucune observation sur cette demande et il n'est pas indiqué au présent tribunal si cette facture est demeurée impayée.
En conséquence, elle sera condamnée au paiement de cette somme en deniers ou quittance.
B - Sur la nullité du contrat de crédit :
Compte tenu du rejet de la demande d'annulation du contrat de vente, les dispositions prévues par l'article L. 311-21 du Code de la consommation ne sont pas applicables à l'espèce.
Cependant, il convient néanmoins d'examiner les autres moyens soulevés par Madame L. en vue d'obtenir l'annulation du contrat de crédit à savoir :
- l'absence de signature d'une offre préalable de crédit le 26 décembre 1998.
- la validité de l'acceptation de l'offre.
1) Sur l'absence de signature d'une offre préalable le 26 décembre 1998 :
Madame X. produit aux débats :
- un document signé le 26 octobre 1998 correspondant à une offre préalable de crédit accessoire ou non à des contrats de vente utilisable par fractions, et assortie d'une carte de crédit et d'avis de débit (Première offre) OU offre préalable de crédit accessoire à une vente (deuxième offre);
- un document de facture identique non signé sur lequel est indiqué dans un encart « conditions particulières » les termes suivants : « opération promotionnelle spéciale - montant du crédit : 8.000 Francs au TEG de 2,25% : 45 Francs - remboursement en une échéance le 20 mars 1999(...) Elle est faite le 26-12-98 par le titulaire de la carte n° 43343544979100. »
- des relevés de comptes émanant de la SA FIDEM de novembre 1998 à mai 1999 relatifs au numéro de compte 43343544979100 ;
- un courrier de la SA FIDEM en date du 9 février 1999 adressé à Madame X. relatif aux options de remboursement de la somme de 8 000 Francs.
Il résulte de l'examen de l'ensemble de ces pièces que l'opération du 26 décembre 1998 n'est pas constitutif d'un contrat de crédit indépendant du contrat de crédit signé le 26 octobre 1998
[minute page 11] En effet, bien que le support du document soit le même que celui utilisé dans le cadre de la conclusion d'un contrat de crédit, il apparaît qu'aucune date et aucune signature ne sont apposées par Madame X., que surtout l'encart réserve normalement aux conditions particulières fait spécialement référence à une opération promotionnelle spéciale dont peut bénéficier le titulaire de la carte Aurore dont le numéro est celui attribué à Madame X. dans le cadre du contrat de crédit qu'elle a souscrit le 26 octobre 1998.
En outre, les relevés de compte permettent d'établir (numéro, mouvements financiers laissant apparaître les opérations à compter du 26 octobre et celle à compter du 26 décembre) qu'un seul lien contractuel existe entre la SA FIDEM et Madame X.
Enfin, ces observations sont confortées par les dispositions contractuelles figurant au contrat du 26 octobre 1998 qui prévoient aux termes de l'article II-11 intitulé « utilisation de la carte lors d'opérations promotionnelles spéciales et remboursements » que « sur proposition des vendeurs et prestataires de services acceptant la carte, l'emprunteur pourra bénéficier d'utilisations spéciales lors d'opérations promotionnelles. Ces opérations sont remboursables indépendamment et en plus du remboursement mensuel indiqué par l'article II-10 et ne bénéficient pas des assurances facultatives éventuellement souscrites au titre du présent contrat. Les modalités de chacune de ces opérations seront indiquées à l'emprunteur au moment de leur réalisation. En cas d'impayé, le solde restant dû s'imputera au débit du compte courant et portera intérêts au taux du présent contrat. »
Il convient donc de déduire de l'ensemble de ces éléments que l'opération financière du 26 décembre 1998 ne peut être qualifiée de contrat de crédit indépendant du premier contrat en date du 26 octobre 1998 et qu'il ne s'agit que de la mise en oeuvre des dispositions contractuelles précitées (art II-11) que Madame X. a accepté en signant ledit contrat.
2) Sur la validité de l'offre préalable liée a la proposition de deux opérations de crédit différentes sur la même offre :
Les critiques de Madame X. à l'encontre de la validité de l'offre préalable de crédit au regard des dispositions de l'article L. 311-2 du Code de la consommation ne peuvent, compte tenu des développements précédents, être examinées qu'au regard de l'offre signée le 26 octobre 1998.
Madame X. reproche au document édité par la SA FIDEM de lui proposer deux opérations de crédit sur le même support, ce qui rend l'offre confuse et ne lui permet pas d'exercer clairement son choix tant au moment de la signature de l'offre que lors de l'exercice de son droit de rétractation.
[minute page 12] Cependant, l'offre litigieuse mentionne en en-tête qu'est proposé de manière alternative soit un crédit accessoire ou non à des contrats de vente utilisables par fractions et assorti d'une carte de crédit et d'avis de débit, soit un crédit accessoire à une vente.
De plus, un encart blanc suffisamment spacieux est réservé sur le recto du document afin d'établir les conditions particulières du contrat, et l'en-tête du document précise que « l'offre de crédit faite par FIDEM est celle dont les modalités sont précisées aux conditions particulières ci-dessous ».
Dès lors, lorsque l'offre a été remise à Madame X., le type d'opération qui lui était proposé était parfaitement défini par les conditions particulières de l'offre et nulle ambiguïté n'a pu subsister lorsque son consentement a été matérialisé par sa signature apposée au recto.
Une seule opération clairement définie étant conclu, le bordereau de rétractation ne pouvait souffrir dans ces conditions d'ambiguïté.
En conséquence, l'ensemble des moyens soulevés par Madame X. sont rejetés et il convient de la débouter da sa demande en annulation du contrat de crédit.
II - Sur la demande présentée à l'encontre de la SA FIDEM :
Il convient d'examiner les demandes qui sont présentées à la fois à titre de demande principale contre la SA FIDEM et à titre de demande subsidiaire dans le cadre de l'action contre la SA NMM et la SA FIDEM.
A - Sur l'article L. 311-9 du Code de la consommation :
Aux termes des dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation, « lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable n'est obligatoire que pour l'offre initiale.
Elle précise que la durée du contrat est limitée à un an renouvelable et que le prêteur devra indiquer, trois mois avant l'échéance, les conditions de reconduction du contrat. Elle fixe également les modalités de remboursement, qui doit être échelonné, sauf volonté contraire du débiteur, des sommes restant dues dans le cas où le débiteur demande à ne plus bénéficier de son ouverture de crédit. »
En l'espèce, l'offre préalable en date du 26 octobre 1998 mentionne au recto qu'en ce qui concerne les conditions de reconduction du contrat « de convention expresse, pour limiter les coûts du crédit, la délivrance de cette information sera établie par la production de l'enregistrement automatique de l'envoi » ;
[minute page 13] Madame X. estime que cette clause viole les dispositions de l'article L. 311-9 al. 2 en ce qu'elle aggrave la situation de l'emprunteur.
A l'argumentation de la SA FIDEM qui se retranche derrière les dispositions de droit commun notamment en matière de notification (art. 667 du N.C.P.C) ou d'écriture de banque, il convient de rappeler que les crédits à la consommation sont régis par des règles particulières prévues par les dispositions d'ordre public du Code de la consommation.
Ces dispositions ont été édictées dans un but de protection du consommateur et, au delà, elles ont pour objectif la prévention d'un endettement excessif des ménages.
Les dispositions légales d'ordre public assorties de sanctions civiles et pénales relèvent à l'évidence d'un ordre public de direction.
Aussi, les dispositions spécifiques prévues par l'article L. 311-9 al. 2 ne peuvent s'analyser que dans cet esprit et elles ne doivent pas être vidées de leur contenu.
En ce sens, l'article L. 311-9 al. 2 impose une information annuelle complète de la situation contractuelle permettant à l'emprunteur d'opter soit pour un renouvellement par acceptation tacite, soit pour le terme du contrat, par un acte positif de renonciation.
S'il n'est pas contesté par la société FIDEM que la preuve de l'information annuelle lui incombe, elle ne peut néanmoins estimer satisfaire à cette obligation en insérant dans ses contrats une clause prévoyant que cette preuve « sera établie » par la simple production de l'enregistrement informatique de son envoi.
Celle ci est en effet tout à fait insuffisante à prouver le contenu de l'information personnalisée faite à l'emprunteur, lequel se voit alors en cas de litige réclamer le justificatif du contenu de l'information qui lui aurait été envoyée. (c'est d'ailleurs ce que réclame en l'espèce la société FIDEM à Madame X. alors qu'il lui appartient à elle seule de produire ce justificatif).
Cette conception aboutit finalement à un renversement de la charge de la preuve et crée ainsi une aggravation de la situation de l'emprunteur et un déséquilibre significatif entre les parties.
En conséquence, la clause incriminée doit être considérée comme abusive.
B - Sur l'article II-13-d du contrat :
La clause litigieuse est ainsi libellée :
[minute page 14] « En outre, le présent contrat pourra être résilié après envoi par le prêteur d'une mise en demeure, par lettre recommandée, dans les cas suivants :
- dépassement non autorisé du découvert autorisé
- deux remboursements mensuels successifs impayés
- inexactitude des renseignements confidentiels fournis
- usage abusif, frauduleux ou en infraction avec la réglementation en vigueur de la présente ouverture de crédit ou des moyens d'utilisation du compte
- refus de prise en charge d'un sinistre par l'assurance ou fausse déclaration
- défaut de communication par l'emprunteur de tout changement concernant les éléments indiqués à l'article lI-2 Ci dessus
- impayés sur les crédits de l'emprunteur auprès du prêteur
Dans ces hypothèses, la résiliation aura comme conséquence la déchéance du terme et l'exigibilité immédiate du solde débiteur.
Jusqu'à remboursement intégral du solde débiteur, celui-ci portera intérêt au taux en vigueur au jour de la résiliation.
En outre, en cas de résiliation pour impayé il sera fait application de l'article Intérêts.4 ci dessus, (...). »
L'examen des termes employés permettent de constater qu'il existe deux situations d'impayés :
1) lorsque deux remboursements mensuels successifs sont impayés
2) lorsqu'existent des impayés sur les crédits de l'emprunteur auprès du prêteur.
Par ailleurs, il est clairement indiqué qu'en cas de résiliation pour impayé, il sera fait application de l'article 1-4 ci dessus, c'est à dire la déchéance du terme, l'exigibilité immédiate des sommes dues et l'obtention de l'indemnité de résiliation.
Cette précision ne distingue nullement les deux situations d'impayés évoqués plus haut et par conséquent concerne bien ces deux situations.
Si tel n'était pas le cas, il eut été plus simple de préciser qu'en cas de résiliation pour les impayés « relatifs au présent contrat », il sera fait application de l'article 1-4 ci dessus.
De même, si tel n'était pas le cas, cette clause relative à l'application de l'article 1-4 n'aurait pas lieu d'être et serait une redondance puisque les conséquences des impayés du contrat lui-même sont justement réglés par l'article 1-4.
Le fait de prévoir l'application d'une clause pénale contractuelle, laquelle suppose, une faute dans l'exécution du contrat concerné, à une défaillance extra contractuelle crée à l'évidence un déséquilibre qui rend abusive la clause figurant à l'article 1-4-d et justement critiquée par Madame X.
[minute page 15]
C - Les sanctions :
Les clauses critiquées par Madame X. sont abusives, dès lors qu'elles sont réputées non écrites conformément aux dispositions prévues en la matière par l'article L. 132-1 du Code de la consommation.
Par ailleurs, l'article L. 311-33 prévoit que le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu.
Ces dispositions sont d'interprétation stricte et la demande de déchéance du droit aux intérêts présentée par Madame X. doit être examinée au regard de l'offre préalable tel quelle apparaît après avoir écarté les clauses abusives réputées non écrites.
Or, l'offre préalable, en l'absence de ces clauses, reste néanmoins conforme aux dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-13 du Code de la consommation.
En conséquence, la sanction de la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue en l'espèce.
III - Sur les autres demandes :
Par son action en justice. Madame X. n'a fait qu'user de son droit et aucun abus de droit ne peut être relevé à son encontre.
La société FIDEM sera donc déboutée de sa demande en dommages et intérêts et en amende civile.
Par ailleurs, Madame X., qui succombe pour l'essentiel de ses demandes, sera condamnée aux dépens.
En revanche, il apparaît équitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DÉCISION :
Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
- Déboute Madame X. de sa demande en nullité du contrat de vente et du contrat de crédit,
- Condamne Madame X. à payer à la S. la somme de 250 Francs en deniers ou quittance,
- [minute page 16] Dit qu'il n'existe qu'un seul contrat de crédit entre la société FIDEM et Madame X.,
- Déclare abusive et illicite la clause prévoyant que la délivrance de l'information exigée par l'article L. 311-9 du Code de la consommation sera prouvée par mention sur un listing informatique,
- Déclare abusive la clause II 13-d en ce qu'elle prévoit au profit du prêteur une clause pénale pour une faute extra contractuelle,
- Déboute Madame X., la SA FIDEM et la Société Nouvelle de la Maison du Meuble de toutes leurs autres demandes.
- Condamne Madame X. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle.