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CA LIMOGES (ch. soc.), 12 septembre 2024

Nature : Décision
Titre : CA LIMOGES (ch. soc.), 12 septembre 2024
Pays : France
Juridiction : Limoges (CA), ch. écon. soc.
Demande : 23/00632
Date : 12/09/2024
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 8/08/2023
Décision antérieure : T. com. Brive-La-Gaillarde, 7 juillet 2023 : Dnd
Décision antérieure :
  • T. com. Brive-La-Gaillarde, 7 juillet 2023 : Dnd
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CERCLAB - DOCUMENT N° 22968

CA LIMOGES (ch. soc.), 12 septembre 2024 : RG n° 23/00632

Publication : Judilibre

 

Extraits (arguments de l’appelant) : 1/ « A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que les clauses du contrat conclu avec la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP l'obligeant à la fois à la restitution du matériel et au paiement intégral des loyers prévus sont des clauses abusives au sens de l'article 1171 du code civil qui doivent être réputées non écrites, notamment en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »

2/ « Mais, force est de constater que le contrat de location du 7 janvier 2020 lie les trois parties, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, en qualité de bailleur, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION, en qualité de locataire et la SARL BPI en qualité de fournisseur. De plus, le contrat « équilibre » conclu le 7 janvier 2020 entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI stipulait que sa conclusion était subordonnée à l'acceptation du financement par le partenaire financier de la SARL BPI. En outre, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ne peut valablement soutenir avoir financé une location sans connaître les modalités de cette opération. En conséquence, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP avait connaissance de l'opération tripartite interdépendante.

En conséquence, le contrat de location financière du 7 janvier 2020 étant caduc, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP doit : - être déboutée de sa demande en paiement dirigée contre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION de la somme de 20.218,44 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021 ; - en application des dispositions de l'article 1187 du code civil, être condamnée à rembourser à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3.468 € au titre des échéances versées par cette dernière du 1er mai 2020 au 1er février 2021.

En revanche, sur le même fondement de l'article 1187 du code civil, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION doit être condamnée à restituer à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP le copieur scan imprimante MF 223 de marque Olivetti avec accessoires donné en location ce, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/00632. N° Portalis DBV6-V-B7H-BIPPH.

Le douze Septembre deux mille vingt-quatre la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

 

ENTRE :

SAS XAINTRIE CONSTRUCTION

demeurant [Adresse 3], représentée par Maître Mélanie COUSIN de la SELAS GOUT DIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE, APPELANTE d'une décision rendue le 7 JUILLET 2023 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BRIVE LA GAILLARDE

 

ET :

SA BNP PARIBAS LEASE GROUP

demeurant [Adresse 2], représentée par Maître Paul GERARDIN, avocat au barreau de LIMOGES

SELARL DAVID GOIC ET ASSOCIES es qualité de mandataire liquidateur de la SARL BUREAUTIQUE PROFESSIONNELLE ET IMPRESSION

demeurant [Adresse 1], défaillante, régulièrement assignée à personne.

INTIMÉES

 

Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 10 Juin 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mai 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile 71192CCF7D68F6ECF7E8E35EE0AB5BBF, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.

Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.

Après quoi, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 19 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

Au cours de ce délibéré, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, et d'elle-même. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

La mise à disposition de cette décision a été avancée au 12 septembre 2024, les avocats des parties en ayant été régulièrement informés.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR :

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant acte sous seing privé en date du 7 janvier 2020, la SARL BUREAUTIQUE PROFESSIONNELLE ET IMPRESSION (BPI) a fourni à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION un copieur scan imprimante MF 223 de marque Olivetti, moyennant un coût locatif mensuel sur 63 mois de 289 € HT.

La société BPI s'engageait également :

- à la maintenance du matériel,

- au rachat du matériel en place pour un montant de 5.133 €,

- à l'absence de prélèvement les 3 premiers mois,

- à la fourniture d'un kit de 9.600 copies noir/blanc et 2.400 copies couleur,

- à « l'évolution du matériel possible à partir de 21 mois avec solde du contrat en cours » par les soins de BPI,

- au renouvellement du contrat, prime au minimum identique,

- solde du contrat en cours dans son intégralité.

Les parties ont convenu également du caractère solidaire et indivisible de ce contrat avec le bon de commande de matériel et le contrat de maintenance signés le même jour. Elles l'ont également conclu sous réserve de l'acceptation du dossier de financement par le partenaire financier de la SARL BPI, de la bonne réception du matériel livré par le fournisseur et du respect des échéances financières par la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION.

Le même jour, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, bailleur, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION, locataire, et la SARL BPI, fournisseur, ont conclu un contrat de location tripartite de ce copieur multifonctions pour une durée de 63 mois moyennant un loyer mensuel de 289 € HT.

Le 30 janvier 2020, la SARL BPI a émis une facture au nom de la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP pour paiement de la somme de 20 146 € TTC correspondant à l'acquisition de ce copieur multifonctions.

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION a reçu réception par la SARL BPI du dit copieur multifonctions le 30 janvier 2020.

Par courriers des 19 mars, 2 avril et 7 mai 2020, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION a réclamé à la SARL BPI le versement de la somme de 5 133 € au titre du rachat de son matériel en place, tel que convenu le 7 janvier 2020.

Par jugement du tribunal de commerce de Rennes du 6 janvier 2021, la SARL BPI a été placée en liquidation judiciaire.

Par ordonnance rendue le 3 février 2021, le juge commissaire à la liquidation judiciaire de la SARL BPI a autorisé la cession du fichier clients de la SARL BPI à la société ACTEIS.

Par courrier du 16 février 2021, la société ACTEIS a informé la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION de cette cession et lui a proposé de devenir son prestataire de service pour la maintenance du copieur multifonctions.

A compter du 1er mars 2021, la SAS XAINTRIE CONTRUCTION a cessé de régler ses loyers de location à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, malgré des courriers de mise en demeure de cette dernière du 6 août, 16 septembre et 13 octobre 2021.

Par lettre recommandée avec accusé réception en date du 15 novembre 2021, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP a notifié à la SAS XAINTRIE CONTRUCTION la résiliation du contrat de location conclu le 7 février 2020, lui a demandé de lui restituer le copieur et de lui payer la somme de 20 218,44 € correspondant aux loyers impayés et à l'indemnité de résiliation.

Malgré sommation de payer délivrée le 5 janvier 2022, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION n'a pas payé à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP le montant de cette somme.

* * *

Par assignation délivrée le 3 juin 2022, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP a saisi le tribunal de commerce de Brive afin de voir condamner la SAS XAINTRIE CONTRUCTION à lui restituer le copieur multifonctions avec accessoires sous astreinte et à lui payer la somme de 20.218,44 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021.

Par assignation délivrée le 3 janvier 2023, la SAS XAINTRIE CONTRUCTION a appelé en la cause la SELARL DAVID GOIC ET ASSOCIES, ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL BPI.

Par jugement rendu le 7 juillet 2023 en l'absence du liquidateur de la SARL BPI, le tribunal de commerce de Brive-la-Gaillarde a :

- condamné la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION à restituer sous astreinte à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP le copieur multifonctions Olivetti MF 223 avec accessoires donné en location suivant contrat du 7 février 2020 ;

- condamné la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION à payer à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP la somme de 20 218,44 € outre intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021 ;

- condamné la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION à payer à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Le 8 août 2023, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION a relevé appel de ce jugement.

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 février 2024, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION demande à la cour de :

« - Réformer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de BRIVE le 7 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;

- Débouter la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP de toutes demandes, fins et prétentions contraires ;

Statuant à nouveau,

Vu notamment les dispositions des articles 1103, 1104, 1130, 1171, 1186, 1187, 1194, 1227, 1228 du Code Civil ; les articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation ; les articles 519-1 et suivants du Code monétaire et financier ;

A titre principal,

- Prononcer la nullité du contrat entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et l'EURL BPI (prise en la personne de son mandataire liquidateur régulièrement appelé à la cause) ainsi que la nullité du contrat entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ;

- Condamner la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP à rembourser à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3.468,00 € correspondant aux échéances du 1er mai 2020 au 1er février 2021 ;

- Débouter la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre subsidiaire,

- Prononcer la résiliation du contrat entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI ;

- Prononcer la caducité du contrat de financement interdépendant entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ;

- Condamner la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP à rembourser à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3.468,00 € correspondant aux échéances du 1er mai 2020 au 1er février 2021 ;

- Débouter la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Juger abusives les clauses 8 et 9.2 du contrat de financement de la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ;

- Débouter la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

- Condamner la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP à verser à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION soutient que le contrat conclu le 7 février 2020 avec la SARL BPI est entaché de dol en ce qu'elle lui a fait miroiter des avantages matériels et financiers qu'elle n'a pas honorés.

Elle n'a pas été informée de la liquidation judiciaire de la SARL BPI avant la réception du courrier de la société ACTEIS du 16 février 2021 et il importe peu qu'elle n'ait pas déclaré sa créance à la liquidation judiciaire de la SARL BPI pour apprécier le bien-fondé de ses demandes, dans la mesure notamment où le dol doit être apprécié à la date de la conclusion du contrat.

Par ailleurs, elle fait valoir que le contrat est également nul en ce que la SARL BPI lui a fait signer une demande de financement, intervenant donc comme un intermédiaire financier, sans respecter les dispositions des articles L. 519-1 et suivants du code monétaire et financier.

Elle soutient en conséquence que le contrat de financement conclu avec la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP étant un contrat interdépendant du contrat principal conclu avec la SARL BPI, la nullité du contrat principal conclu avec la SARL BPI entraîne celle du contrat conclu avec la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP.

- A titre subsidiaire, elle soutient que le contrat conclu avec la SARL BPI doit être résilié en raison de l'inexécution par cette dernière de clauses contractuelles déterminantes à l'économie générale du contrat. En conséquence de la résiliation, le contrat conclu avec la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, interdépendant et résultant d'une opération contractuelle unique, est donc nécessairement caduque, faute de cause.

La SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'alinéa 3 de l'article 1186 du code civil, en ce qu'elle ne pouvait pas ignorer l'opération d'ensemble.

- A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que les clauses du contrat conclu avec la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP l'obligeant à la fois à la restitution du matériel et au paiement intégral des loyers prévus sont des clauses abusives au sens de l'article 1171 du code civil qui doivent être réputées non écrites, notamment en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En outre, l'indemnité de résiliation de 10 % du montant des loyers restant à payer constitue une clause pénale manifestement excessive, en application de l'article 1231-5 du code civil.

 

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 26 janvier 2024, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP demande à la cour de :

« - Juger la S.A.S. XAINTRIE CONSTRUCTION non fondée en son appel, en conséquence l'en débouter purement et simplement.

- Juger, en revanche, la S.A. BNP PARIBAS LEASE GROUP recevable et bien fondée en son argumentation et, dès lors, y faire droit.

En conséquence,

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce de BRIVE LA GAILLARDE en date du 07 juillet 2023 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- Condamner encore la S.A.S. XAINTRIE CONSTRUCTION à payer a la S.A BNP PARIBAS LEASE GROUP une indemnité pour frais irrépétibles d'appel de 2.000 €, outre intérêts au taux légal à dater de l'arrêt à intervenir.

- Condamner enfin la S.A.S. XAINTRIE CONSTRUCTION aux entiers dépens de procédure, en ce compris le coût de la sommation du ministère de la SCP SEIJO -LOPEZ et LALLART en date du 5 janvier 2022, le bénéfice de distraction étant accordé à Maître Paul GERARDIN, Avocat, pour les sommes dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision.

La SA BNP PARIBAS LEASE GROUP fait valoir que la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION admet ne pas avoir de créance à l'égard de la SARL BPI puisqu'elle n'a pas régularisé de déclaration de créance à sa liquidation judiciaire.

En tout état de cause, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION ne rapporte pas la preuve des agissement dolosifs de la SARL BPI, ni que le contrat conclu avec BNP PARIBAS LEASE GROUP soit irrégulier.

Sur le moyen tiré de l'interdépendance des contrats, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP fait valoir qu'elle ignorait totalement l'existence et la teneur du contrat 'équilibre' conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI, si bien qu'elle ne peut pas subir les conséquences de son annulation ou de sa résiliation.

Les clauses relatives aux conséquences de la résiliation prévues par le contrat de financement ne créent nullement un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, en ce qu'elles trouvent leur cause dans la réparation du préjudice lié à l'acquisition du matériel par la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP.

De même, l'indemnité de résiliation prévue par la clause pénale n'est pas manifestement excessive au regard du prix d'achat du matériel par elle-même.

[*]

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION a fait signifier le 6 septembre 2023 par commissaire de justice la déclaration d'appel à la SELARL DAVID GOIC ET ASSOCIES à sa personne. Cette dernière ne s'est pas constituée.

[*]

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mai 2024.

Titrage Contrats, Autres contrats de prestation de services, Autres demandes relatives à un contrat de prestation de services.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Sur la déclaration de créance :

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION ne demande pas paiement de somme d'argent à la SARL BPI. Elle n'avait donc pas à déclarer sa créance à la liquidation judiciaire de cette dernière.

 

I - Sur la demande de la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION tendant à l'annulation du contrat du 7 janvier 2020 l'unissant à la SARL BPI :

- La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION fonde en premier lieu son action en annulation de ce contrat sur l'article 1137 du code civil dispose que « Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie ».

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION ne rapporte pas la preuve des manœuvres, mensonges, dissimulation intentionnelle d'une information que la SARL BPI aurait commis à son encontre et qui aurait vicié son consentement.

En effet, les griefs qu'elle invoque contre la SARL BPI relèvent d'un défaut d'exécution de ses obligations contractuelles (notamment défaut du versement de la somme de 5.133 €) et non d'un dol ayant vicié le consentement de la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION.

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION doit donc être déboutée de sa demande tendant à l'annulation du contrat conclu entre elle-même et la SARL BPI et par voie de conséquence du contrat accessoire l'unissant à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP.

- En second lieu, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION fonde son action en nullité sur les dispositions des articles L. 519-1 du code monétaire et financier et suivants qui n'auraient pas été respectées par la SARL BPI.

L'article L. 519-1 I. du code monétaire et financier dispose que : « L'intermédiation en opérations de banque et en services de paiement est l'activité qui consiste à présenter, proposer ou aider à la conclusion des opérations de banque ou des services de paiement ou à effectuer tous travaux et conseils préparatoires à leur réalisation.

Est intermédiaire en opérations de banque et en services de paiement toute personne qui exerce, à titre habituel, contre une rémunération ou toute autre forme d'avantage économique, l'intermédiation en opérations de banque et en services de paiement, sans se porter ducroire ou qui fournit un service de conseil au sens de l'article L. 519-1-1 ».

L'article R. 519-1 du code monétaire et financier dispose que « Pour l'application de l'article L. 519-1, est considéré comme présentation, proposition ou aide à la conclusion d'une opération de banque ou à la fourniture d'un service de paiement le fait pour toute personne de solliciter ou de recueillir l'accord du client sur l'opération de banque ou le service de paiement ou d'exposer oralement ou par écrit à un client potentiel les modalités d'une opération de banque ou d'un service de paiement, en vue de sa réalisation ou de sa fourniture ».

Or, le contrat conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI stipule seulement que : « Le présent contrat et son renouvellement sont conclus sous la réserve de l'acceptation du dossier de financement par notre partenaire financier', soit la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP. Il ne peut donc être considéré que la SARL BPI est intervenue comme intermédiaire financier. Il s'agit seulement d'un contrat de fourniture avec paiement d'échéances et non d'un contrat de financement, si bien que les dispositions des articles L. 519-1 du code monétaire et financier et suivants ne sont pas applicables.

En tout état de cause, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION ne caractérise pas précisément en quoi ces dispositions n'auraient pas été respectées.

Elle doit donc être également déboutée de son action en nullité sur ce fondement.

 

II - Sur la demande de la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION tendant à voir résilier le contrat l'unissant à la SARL BPI :

1) Sur son bien-fondé :

L'article 1224 du code civil dispose que « La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice ».

L'article 1227 du même code « La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice ».

La SARL BPI n'a pas exécuté le contrat « équilibre » du 7 janvier 2020 en ce qu'elle n'a pas racheté à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION l'ancien matériel pour la somme de 5.133 € correspondant au rachat de son ancien matériel. En outre, ayant été placée en liquidation judiciaire le 6 janvier 2021, la SARL BPI n'a pas procédé au renouvellement du matériel au terme du délai contractuel de 21 mois, ni verser la prime lors du renouvellement du matériel, ni procéder au « solde du contrat en cours dans son intégralité ».

La SAS XAINTRIE CONSTRUCTION a mis en demeure la SARL BPI le 19 mars 2020, le 2 avril 2020 et le 7 mai 2020 de lui payer la somme de 5.133 € au titre du rachat de l'ancien matériel.

Au vu des manquements de la SARL BPI à l'exécution du contrat qui sont nombreux et suffisamment graves, il convient de prononcer la résiliation du contrat du 7 janvier 2020 l'unissant à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION.

 

2) Conséquences sur le contrat conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP :

Aux termes de l'article 1103 du code civil, « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

L'article 1104 du même code dispose que « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d'ordre public ».

L'article 1193 du même code : « Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise ».

En application de ces dispositions, les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants. L'anéantissement de l'un quelconque des contrats interdépendants entraîne la caducité des autres.

En conséquence, le contrat principal de fourniture conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI étant résilié, le contrat de location financière conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP doit être déclaré caduc.

La SA BNP PARIBAS LEASE GROUP invoque l'alinéa 3 de l'article 1186 du code civil qui dispose que : « La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement » en soutenant qu'elle n'avait pas connaissance qu'un contrat ait été conclu entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI.

Mais, force est de constater que le contrat de location du 7 janvier 2020 lie les trois parties, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP, en qualité de bailleur, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION, en qualité de locataire et la SARL BPI en qualité de fournisseur. De plus, le contrat « équilibre » conclu le 7 janvier 2020 entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI stipulait que sa conclusion était subordonnée à l'acceptation du financement par le partenaire financier de la SARL BPI. En outre, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ne peut valablement soutenir avoir financé une location sans connaître les modalités de cette opération. En conséquence, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP avait connaissance de l'opération tripartite interdépendante.

En conséquence, le contrat de location financière du 7 janvier 2020 étant caduc, la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP doit :

- être déboutée de sa demande en paiement dirigée contre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION de la somme de 20.218,44 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021 ;

- en application des dispositions de l'article 1187 du code civil, être condamnée à rembourser à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3.468 € au titre des échéances versées par cette dernière du 1er mai 2020 au 1er février 2021.

En revanche, sur le même fondement de l'article 1187 du code civil, la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION doit être condamnée à restituer à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP le copieur scan imprimante MF 223 de marque Olivetti avec accessoires donné en location ce, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La SA BNP PARIBAS LEASE GROUP succombant à l'instance, elle doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Il est équitable en outre de la condamner à payer à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION :

- la somme de 1.500 € en ce qui concerne la première instance, le jugement étant réformé de ce chef,

- la somme de 1.500 € en ce qui concerne l'instance d'appel,

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

INFIRME le jugement rendu le 7 juillet 2023 par le tribunal de commerce de Brive,

sauf en ce qu'il a condamné la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION à restituer à la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP le copieur scan imprimante MF 223 de marque Olivetti avec accessoires donné en location et le CONFIRME de ce chef ;

Statuant à nouveau,

PRONONCE la résiliation du contrat conclu le 7 janvier 2020 entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SARL BPI prise en la personne de son liquidateur la SELARL DAVID GOIC ET ASSOCIES ;

DECLARE caduc le contrat de financement conclu le 7 janvier 2020 entre la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION et la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP ;

DEBOUTE la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP de sa demande tendant à condamner la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION à lui payer la somme de 20.218,44 € avec intérêts au taux légal à compter du 6 août 2021 ;

CONDAMNE la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP à payer à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION la somme de 3 468 € ;

CONDAMNE la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP à payer à la SAS XAINTRIE CONSTRUCTION les sommes de :

- 1.500 € en ce qui concerne la première instance,

- 1.500 € en ce qui concerne l'instance d'appel,

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA BNP PARIBAS LEASE GROUP aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER,                                           LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT.                                   Pierre-Louis PUGNET.