CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 20 juin 2024
- TJ Paris (18e ch. 2e sect.), 6 mai 2021 : RG n° 18/09561 ; Dnd
CERCLAB - DOCUMENT N° 23167
CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 20 juin 2024 : RG n° 21/11289 ; arrêt n° 178/2024
Publication : Judilibre
Extrait : « Aux termes de l'article 1719 du code civil, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le bailleur est tenu, de par la nature du contrat, de trois obligations principales, celle de délivrer la chose louée, d'entretenir la chose en état de servir à l'usage à laquelle elle est destinée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.
Au cas d'espèce, le bail conclu entre la SCFHP et la société Sephora comporte une clause 19 intitulée « Assurances », dans les conditions générales du contrat, aux termes de laquelle, d'une part, le bailleur est tenu d'assurer les bâtiments et les installations générales et techniques du centre contre divers risques et, notamment, les dégâts des eaux et s'engage, ainsi que son assureur, à renoncer à tout recours contre le preneur, d'autre part, le preneur doit assurer à ses frais pendant toute la durée du bail « ses aménagements, son mobilier, son matériel, ses marchandises et, en général, l'ensemble de ses biens » contre divers risques et, notamment, les dégâts des eaux et s'engage à titre de réciprocité, ainsi que son assureur, à renoncer à tout recours contre le bailleur.
L'article 20 des conditions générales relatif aux « Responsabilités et recours » prévoit que le preneur, ainsi que ses assureurs, renoncent à tous recours contre le bailleur du fait des dommages résultant des risques visés au contrat et, notamment, des dégâts des eaux atteignant ses biens mais aussi en cas de « dommages matériels ou immatériels, des indemnités pour privation de jouissance ou perte d'exploitation du fait de l'interruption, totale ou partielle, de son exploitation pour quelque cause que ce soit ».
Le point 10 des dispositions particulières ajoute une renonciation à toutes actions contre le bailleur « du chef des travaux réalisés par la ville de Paris », le preneur ayant une parfaite connaissance des éléments attachés au projet de réaménagement du quartier des halles par la ville de Paris, le bailleur s'engageant néanmoins à s'associer à toute action contre la ville de Paris qui serait menée par le locataire.
Cependant, l'article 20 de l'annexe au contrat de bail, relatifs aux « Responsabilités et recours », prévoit que les dispositions du premier et second alinéa de l'article 20 sont complétées de la mention suivante « le preneur se réserve le droit d'agir en cas de fautes graves et répétées du bailleur », fautes dont il doit rapporter la preuve.
C'est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte que le premier juge a considéré licites ces clauses qui définissent de façon claire et non équivoque les conditions de leur application.
Contrairement à ce que soutient le preneur, de telles clauses de renonciation à recours sont courantes, notamment, dans les contrats de baux commerciaux et il n'en résulte aucun déséquilibre significatif, notamment, du fait de leur réciprocité s'agissant de l'article 19 susvisé. La clause 20 des conditions générales visant des préjudices particuliers au preneur résultant d'un défaut d'exploitation, l'absence de réciprocité ne saurait être invoquée, le bailleur n'étant pas exploitant.
Au demeurant, l'avenant négocié entre les parties, qui ouvre la possibilité au preneur de rechercher la responsabilité du bailleur en cas de fautes graves et répétées de ce dernier, l'a été « en considération de [la] personnalité et de [l'] enseigne » du preneur ce qui exclut le déséquilibre allégué et l'hypothèse d'un contrat d'adhésion, le preneur ayant une capacité de négociation avérée.
Ces clauses n'exonèrent toutefois pas le bailleur de son obligation de réaliser les travaux nécessaires résultant de la vétusté dès lors qu'elle affecte des biens et équipements relevant de son obligation d'entretien.
Il s'infère de ces éléments que, comme pertinemment retenu par le premier juge, ces clauses de non recours sont licites. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 3
ARRÊT DU 20 JUIN 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 21/11289. Arrêt n° 178/2024 (11 pages). N° Portalis 35L7-V-B7F-CD4D7. Décision déférée à la Cour : Jugement du 6 mai 2021 - Tribunal judiciaire de Paris (18ème chambre, 2ème section) - RG n° 18/09561.
APPELANTE :
SASU SEPHORA
Immatriculée au R.C.S. de Nanterre sous le n° XXX, Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, [Adresse 2], [Localité 5], Représentée par Maître Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de Paris, toque : B0515, Assistée de Maître Rémy CONSEIL de la SELARL BARBIER Associés, avocat au barreau de Paris, toque : C987
INTIMÉE :
S.C. SOCIETE CIVILE DU FORUM DES HALLES DE PARIS
Immatriculée au R.C.S. de Paris sous le n° YYY, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, [Adresse 3], [Localité 4], Représentée par Maître Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de Paris, toque : C2477, Assistée de Maître Sohel HAFIZ, substituant Me Géraldine PIEDELIEVRE de LPA-CGR avocats, avocat au barreau de Paris, toque : P238
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile B85D525D8D5030285E5B8CDF386E109B 71192CCF7D68F6ECF7E8E35EE0AB5BBF, l'affaire a été débattue le 02 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et Mme Sandra Leroy, conseillère, rapport ayant été présenté par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, Mme Sandra Leroy, conseillère, Mme Emmanuelle Lebée, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile F23D2CC483AC17020CAB97538F82B395. - signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant acte sous seing privé du 29 juin 2012, la Société civile du forum des halles de Paris, ci-après dénommée la société SCFHP, a renouvelé le bail commercial consenti à la société Sephora portant sur un local d'environ 754 m² situé au niveau -3 du centre commercial du Forum des Halles, [Adresse 1], pour une durée de 10 ans à compter du 1er janvier 2013, pour l'exercice de l'activité principale de vente de parfums, de produits de soin, de beauté, de santé, de maquillage et de toilette.
La location a été conclue en contrepartie du versement par le preneur d'un loyer de base annuel de 618.280 euros HT et HC, outre un loyer variable additionnel représentant 5 % du chiffre d'affaires.
Préalablement à la conclusion de ce bail, la ville de Paris, propriétaire de différents volumes et titulaires de droits réels sur certaines parties de l'ensemble immobilier dans lequel est situé le centre commercial, avait confié à la société d'économie mixte Paris Seine, ci-après dénommée la SEM PariSeine, la maîtrise d'ouvrage déléguée de l'opération de réaménagement du site parisien des Halles. Ces travaux ont débuté dans le courant de l'année 2010.
Alors que les travaux étaient en cours, plusieurs dégâts des eaux successifs sont survenus dans le local loué par la société Sephora.
Le 4 juillet 2014, la société Sephora a fait assigner la société SCFHP devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris. La société SCFHP a fait assigner en intervention forcée la Ville de Paris ainsi que la SEM PariSeine en qualité de maître d'œuvre de la Ville de Paris. Par ordonnance du 23 octobre 2014, le juge a désigné M. [C] en qualité d'expert judiciaire avec mission de décrire les désordres, d'en trouver l'origine, de déterminer les mesures nécessaires pour y remédier et de donner son avis sur les préjudices. L'expertise a ultérieurement été étendue à plusieurs sociétés intervenant dans les travaux de construction et à leurs assureurs.
L'expert a déposé son rapport le 12 mai 2017.
Le 28 novembre 2017, la société Sephora a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la société SCFHP, la Ville de Paris et la SEM PariSeine aux fins de condamnation in solidum à l'indemniser de divers préjudices imputables selon elle aux désordres ayant affecté son local. Cette instance a été enrôlée sous le n° RG 17/16466.
Lors de la mise en état, la Ville de Paris et la SEM PariSeine ont soulevé une exception d'incompétence au profit du tribunal administratif. A cette occasion, la société Sephora a sollicité la condamnation du bailleur à lui verser une provision sur dommages et intérêts.
Par ordonnance du 8 août 2018, le juge de la mise en état a, notamment, ordonné la disjonction de l'instance entre, d'une part, l'instance opposant la société Sephora à la Ville de Paris et à la SEM PariSeine et, d'autre part, l'instance opposant la société Sephora à la société SCFHP, dit que l'action de la société Sephora dirigée contre la Ville de Paris et la SEM PariSeine s'analyse en une action en responsabilité du fait de dommages causés par des travaux publics et déclaré le tribunal de grande instance de Paris incompétent pour connaître de l'instance et de l'action dirigées par la société Sephora contre la Ville de Paris et la SEM PariSeine et renvoyé la société Sephora à mieux se pourvoir et rejeté la demande de provision formée par la société Sephora.
A la suite de la décision du juge de la mise en état, la société Sephora, agissant par requête du 14 mai 2019, a saisi le tribunal administratif de Paris de sa demande indemnitaire à l'encontre de la Ville de Paris et de la SEM PariSeine. Dans le cadre de cette procédure, la société SCFHP est intervenue en qualité d'observateur.
Par jugement du 6 mai 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :
- dit irrecevable la demande de la Société civile du forum des halles de Paris de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du tribunal administratif de Paris, saisi par la société Sephora selon requête du 14 mai 2019 ;
- dit n'y avoir lieu de prononcer d'office un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du tribunal administratif de Paris, saisi par la société Sephora selon requête du 14 mai 2019 ;
- sur le fond, débouté la société Sephora de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné la société Sephora à payer à la société Civile du forum des halles de Paris la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la société civile du forum des Halles de Paris du surplus de ses demandes ;
- condamné la société Sephora aux dépens de l'instance.
Par déclaration du 18 juin 2021, la société Sephora a interjeté appel partiel du jugement.
Par conclusions déposées le 15 décembre 2021, la Société civile du forum des Halles de Paris a interjeté appel incident partiel du jugement.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 février 2024.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Aux termes de ses conclusions notifiées le 27 février 2024, la société Sephora, appelante à titre principal et intimée à titre incident, demande à la cour de :
- recevoir et dire bien fondée en son appel la société Sephora ;
Y faisant droit :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- sur le fond, débouté la société Sephora de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné la société Sephora à payer à la Société Civile du Forum des Halles de Paris la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la Société Civile du Forum des Halles de Paris du surplus de ses demandes ;
- condamné la société Sephora aux dépens de l'instance ;
Et statuant à nouveau :
- déclarer inopérantes, inefficaces et réputer non écrites les clauses de renonciation à recours stipulées au bail, à savoir l'article 20 des conditions générales « responsabilité et recours » (pièce n° 1, bail p. 27) et l'article 10 des conditions particulières « dispositions particulières » (pièce n° 1, bail p. 38) ;
- juger que la Société Civile du Forum des Halles de Paris n'a pas respecté son obligation de délivrance et de jouissance paisible envers la société Sephora ;
- juger que la Société Civile du Forum des Halles de Paris est responsable des dégâts des eaux subis par Sephora dans les locaux situés au [Adresse 1]), le 19 février 2013 (n° 2), le 19 avril 2013 (n° 2 bis), le 24 janvier 2014 (n° 3), le 11 février 2014 (n° 4), le 17 mars 2014 (n° 5) le 28 mai 2014 (n° 6), du 2 au 5 juin 2014 (7°), le 11 juin 2014 (8°) et le 12 septembre 2014 (n° 8 bis) ;
- juger que la Société Civile du Forum des Halles de Paris doit réparer l'intégralité des préjudices subis par Sephora au titre des dégâts des eaux survenus le 19 février 2013 (n° 2), le 19 avril 2013 (n° 2 bis), le 24 janvier 2014 (n° 3), le 11 février 2014 (n° 4), le 17 mars 2014 (n° 5) le 28 mai 2014 (n° 6), du 2 au 5 juin 2014 (7°), le 11 juin 2014 (8°) et le 12 septembre 2014 (n° 8 bis) ;
En conséquence :
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris à verser à la société Sephora la somme de 7.877,71 € au titre des frais de constats et de réparations des dégâts des eaux dans son magasin situé dans le Forum des Halles, [Adresse 1] ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris à verser à la société Sephora la somme de 1.833,05 € au titre des frais de réparations des fissures dans ledit magasin ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris à verser à la société Sephora la somme de 208.343,65 € au titre du trouble de jouissance subi par Sephora sur la période des dégâts des eaux ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris à verser à la société Sephora la somme de 90.000 € au titre de la désorganisation de son activité commerciale pendant la période des dégâts des eaux ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris à verser à la société Sephora la somme de 33.333 € au titre de l'atteinte à son image de marque pendant la période des dégâts des eaux ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles à verser des intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter de l'assignation en référé, en date du 4 juillet 2014, puis à compter de la date de survenance de chaque dégât des eaux ;
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'ancien article 1154 du code civil applicable en l'espèce ;
- confirmer le surplus du jugement entrepris ;
- débouter la Société Civile du Forum des Halles de Paris de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la Société Civile du Forum des Halles de Paris au paiement d'une somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner aux entiers dépens qui comprendront :
- les frais de l'assignation devant le Juge des référés pour la désignation d'un expert, d'un montant de 64,06 € (pièce n° 25) ;
- les frais de l'expertise, d'un montant de 8.348,36 € (pièce n° 25) ;
- les frais de l'assignation devant le tribunal judiciaire de 241,69 € (pièce n° 26) ;
- le coût du timbre BRA pour la procédure de première instance ;
- le coût de signification du jugement ;
- les timbres fiscaux d'appel ;
- la signification de l'arrêt à intervenir.
Au soutien de ses prétentions, la société Sephora fait valoir :
- sur le rejet de la demande de sursis à statuer, que cette demande n'a plus lieu d'être dès lors que le jugement du tribunal administratif a été rendu ;
- sur les responsabilités :
- sur celle de la Ville de Paris et de SEM PariSeine, que les dégâts des eaux du 25 octobre 2011 et ceux du 3 au 9 septembre 2015 ne font plus l'objet de la présente procédure dès lors que la concluante a été indemnisée de ces préjudices dans le cadre du jugement rendu par le tribunal administratif le 18 juillet 2022 ;
- sur celle de SCFHP en raison de l'état de vétusté du centre commercial, que le rapport d'expertise judiciaire a retenu que la SCFHP était directement responsable de quatre dégâts des eaux, à savoir ceux des 24 janvier 2014, 11 février 2014, 17 mars 2014 et 12 septembre 2014, en raison de l'état de vétusté du centre commercial ;
- sur celle de SCFHP pour les dégâts des eaux dont l'origine est inconnue, que l'origine des dégâts des eaux du 28 mai 2014, du 2 au 5 juin 2014 et du 11 juin 2014 est inconnue ;
- que le bailleur a violé son obligation de délivrance et de jouissance paisible envers son locataire aux termes de l'article 1719 du code civil en raison des multiples dégâts des eaux survenus dans les locaux loués ; que les sinistres n'ont aucun lien avec les travaux de rénovation ;
- sur l'inapplicabilité des clauses de renonciation à recours :
- sur le réputé non écrit, qu'au regard de l'article 1170 du code civil, les deux clauses de renonciation à recours dérogent aux obligations de délivrance et de jouissance paisible du bailleur, qui sont d'ordre public, de sorte qu'elles seront réputées non écrites ;
- sur le déséquilibre, qu'aux termes de l'article 1171 du code civil, les deux clauses créent un déséquilibre significatif entre les obligations des parties dans le bail en ce que, d'une part, la bailleresse n'a plus à respecter son obligation de délivrance et de jouissance paisible et, d'autre part, la locataire ne peut plus rechercher la responsabilité de sa bailleresse ou de son assureur et ne peut donc plus leur réclamer l'indemnisation de son préjudice ;
- sur sa portée au regard des fautes, que la clause de renonciation à recours prévue dans les conditions générales ne s'applique pas en raison des fautes graves et répétées de la bailleresse ; qu'elle n'a pas suffisamment entretenu le centre commercial du forum des halles pendant des dizaines d'années ; qu'elle n'a pas réparé la canalisation vétuste et fuyarde située au-dessus de la boutique de Sephora ;
- sur sa portée au regard du sinistre, que la clause de renonciation à recours prévue dans les conditions particulières ne s'applique pas car les sinistres n'ont pas pour origine les travaux de rénovation du centre commercial ;
- sur les préjudices subis par Sephora,
- au titre des réparations, que des frais ont été engagés pour faire face aux dégâts des eaux :
- celui du 19 février 2013, les frais s'élèvent à la somme de 387,51 euros TTC ;
- celui du 24 janvier 2014 a généré un montant total de 2.197,80 euros TTC ;
- celui du 11 février 2014 a généré un montant de 566,40 euros TTC ;
- celui du 17 février 2014 a nécessité le paiement de la somme de 1.151,28 euros TTC ;
- celui du 28 mai 2014 a exigé le paiement de la somme de 2.156,96 euros TTC ;
- qu'au titre de celui survenu du 2 au 5 juin 2014, la concluante a dépensé la somme de 1.316,96 euros TTC ;
- que celui du 12 septembre 2014 a entraîné les frais de 100,80 euros TTC ;
- que les frais engagés au titre des fissures s'élèvent à la somme de 1.833,05 euros TTC ;
- au titre du trouble de jouissance, que durant toute la période de désordres, c'est un tiers du magasin, soit 33 % de la surface louée, qui a été atteint par les désordres, à savoir les fissures à l'entrée du magasin et les dégâts des eaux au niveau des caisses et des présentoirs, de sorte que le loyer doit être réduit à 20 %, le trouble de jouissance s'élevant donc à la somme de 208.343,65 euros ;
- au titre du préjudice d'image, que Sephora est perçue comme « la perle de LVMH » et présentée comme « le spécialiste de la beauté » ; que la clientèle de Sephora est une clientèle soignée et exigeante qui ne peut être attirée par un magasin faisant l'objet de diverses nuisances, de sorte que le préjudice s'élève à la somme de 90.000 euros ;
- au titre de la désorganisation du magasin, que les salariés ont installé des bâches de protection et des poubelles pour récupérer les eaux boueuses dans l'attente de l'intervention des réparateurs, de sorte que le préjudice s'élève à la somme de 33.333 euros.
- sur l'intérêt au taux légal, sur le fondement des articles 1153-1 et 1154 du code civil, que Sephora n'a toujours pas été dédommagée alors que le premier dégât des eaux remonte à plus de 10 ans.
[*]
Aux termes de ses conclusions signifiées le 19 février 2024, la Société civile du forum des Halles, intimée à titre principal et appelante à titre incident, demande à la cour de :
- déclarer que la demande de sursis à statuer formée par la Société civile du forum des Halles de Paris dans l'attente de la décision du tribunal administratif de Paris n'a plus d'objet compte tenu du jugement rendu par le tribunal administratif le 18 juillet 2022 ;
Par conséquent :
- donner acte à la Société civile du forum des halles de Paris du fait qu'elle ne forme plus de demande de sursis à statuer ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Sephora de l'ensemble de ses demandes ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Sephora à payer à la société civile du forum des Halles de Paris la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Si par extraordinaire la cour infirmait le jugement dont appel sur le fond,
- juger que le rapport de Monsieur [C] impute l'essentiel des sinistres subis par Sephora aux travaux de restructuration réalisés par la ville de Paris et la SEM PariSeine ; que pour les autres sinistres, ni Sephora, ni l'expert n'ont apporté d'éléments de preuve permettant d'en imputer la responsabilité à la SCFHP ;
- juger que la SCFHP ne peut encourir de responsabilité à l'égard de son locataire Sephora, à raison de dommages causés par les travaux publics de la Ville de Paris, sur quelque fondement juridique que ce soit, et que seule la Ville de Paris et son maître d'ouvrage délégué la SEM PariSeine doivent répondre de ces dommages et réparer les préjudices causés ;
- juger que Sephora ne rapporte pas la preuve d'une faute imputable à la SCFHP, ni celle d'un lien de causalité entre cette faute et les préjudices allégués ;
- juger que Sephora ne justifie pas de l'existence des préjudices allégués qui ne sont fondés ni dans leur principe, ni dans leur quantum ;
En conséquence :
- débouter la société Sephora de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre de la SCFHP ;
- débouter, notamment, la société Sephora de l'ensemble de ses demandes indemnitaires tant principales que subsidiaires dirigées à l'encontre de la SCFHP ;
- débouter la société Sephora de sa demande au titre de l'intérêt légal et de la capitalisation des intérêts ;
- débouter la société Sephora de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au titre des dépens ;
A titre subsidiaire, si la Cour jugeait la SCFP responsable des préjudices allégués par Sephora,
- limiter le montant des indemnisations en réparation des préjudices allégués en prenant en considération celles allouées dans le cadre de la procédure administrative ;
En tout état de cause :
- condamner Sephora au paiement d'une somme de 30.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, qui comprendront les frais et honoraires de l'expert désigné ;
- dire que les dépens d'appel seront recouvrés par Maître Matthieu Boccon-Gibod, société Lexavoue Paris Versailles conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, la SCFP oppose :
- sur le sursis à statuer, que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet dès lors que le tribunal administratif a finalement rendu son jugement le 18 juillet 2022 ;
- sur les demandes indemnitaires adverses, que les clauses de renonciation à recours négociées et acceptées par Sephora sont valables dès lors que la jurisprudence reconnaît leur validité ; que ces clauses ne dérogent pas à l'obligation de délivrance d'ordre public ; que les clauses litigieuses n'ont pas un caractère général ; que ces clauses n'empêchent pas Sephora d'engager toute responsabilité du bailleur ; qu'elle a accepté un risque de perturbation lié aux travaux engagés et a ainsi renoncé en toute connaissance de cause à tout recours contre la SCFHP ; que le contrat de bail n'est pas un contrat d'adhésion, étant précisé que les clauses litigieuses ne créent pas un déséquilibre significatif entre les parties ; que l'origine des dégâts des eaux n'empêche pas l'application des clauses de renonciation à recours ;
- sur l'absence de responsabilité de la SCFHP, que Sephora ne rapporte ni la preuve d'une faute, ni celle d'un lien de causalité avec les désordres allégués ; que les désordres imputables à la concluante n'ont été ni identifiés, ni individualisés ; que Sephora ne démontre aucune faute qui serait imputable à la SCFHP ; que les désordres allégués par Sephora ne sont pas du fait de la SCFHP en ce qu'ils sont du fait des travaux de restructuration du Forum des Halles de Paris qui ont été exécutés par la Ville de Paris et son maître d'ouvrage, la SEM PariSeine entre la fin de l'année 2010 et la fin du premier trimestre 2016 ; que la SCFHP a mis en 'uvre tous moyens pour permettre à Sephora de ne pas souffrir des travaux litigieux et n'a commis aucun manquement à son obligation de délivrance et de jouissance paisible ; qu'elle a mis en place un circuit d'information, participé à des réunions et installé une signalétique provisoire ; qu'en l'absence de démonstration d'une faute qui serait imputable à Sephora, il ne peut être retenu une responsabilité en concours avec la Ville de Paris ; qu'il n'existe pas de lien entre les dégâts relevés par Sephora et la SCFHP ; qu'il n'y a pas eu de déclaration de sinistre et de constat d'huissier de justice par Sephora ; que l'expert a retenu la responsabilité de la SCFHP pour trois désordres, sans pour autant avoir établi une faute et un lien de causalité entre cette faute et les préjudices subis par Sephora ; qu'il a écarté la responsabilité de la SCFHP pour les autres dégâts ou n'a pas été en mesure d'en déterminer l'origine ;
- sur les préjudices, que Sephora a sollicité devant le tribunal administratif de Paris la réparation des mêmes postes de préjudices ; que la société Sephora a été indemnisée des dégâts des eaux n° 1 et n° 9 ; qu'elle n'a pas été en mesure de prouver la réalité du préjudice ou qu'il n'y avait pas eu d'interruption de vente ou de fermeture de magasin, pour les autres dégâts des eaux ; que Sephora n'a soulevé aucun grief au titre de prétendues fissures dans son assignation ; que le préjudice matériel n'est pas fondé ; que le préjudice commercial et la perte de marge ne sont pas justifiés par Sephora ; que la demande formée par Sephora au titre d'un prétendu trouble de jouissance est dénuée de fondement ; que le préjudice d'image et la désorganisation du magasin sont inexistants ;
- sur l'intérêt au taux légal, que Sephora a été de mauvaise foi tout au long de la procédure, étant précisé que le rapport d'expertise n'a pas directement mis en cause la SCFHP.
[*]
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Conformément aux dispositions des articles 4 et 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes aux fins de voir « donner acte » ou de « constater », lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions visant à conférer un droit à la partie qui les requiert mais ne sont en réalité que de simples allégations ou un rappel des moyens invoqués.
Sur la demande de sursis à statuer :
Les parties s'accordent pour dire que la demande de sursis à statuer est devenue sans objet, le tribunal administratif ayant rendu son jugement le 18 juillet 2022.
Sur les clauses de non-recours :
Aux termes de l'article 1719 du code civil, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le bailleur est tenu, de par la nature du contrat, de trois obligations principales, celle de délivrer la chose louée, d'entretenir la chose en état de servir à l'usage à laquelle elle est destinée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.
Au cas d'espèce, le bail conclu entre la SCFHP et la société Sephora comporte une clause 19 intitulée « Assurances », dans les conditions générales du contrat, aux termes de laquelle, d'une part, le bailleur est tenu d'assurer les bâtiments et les installations générales et techniques du centre contre divers risques et, notamment, les dégâts des eaux et s'engage, ainsi que son assureur, à renoncer à tout recours contre le preneur, d'autre part, le preneur doit assurer à ses frais pendant toute la durée du bail « ses aménagements, son mobilier, son matériel, ses marchandises et, en général, l'ensemble de ses biens » contre divers risques et, notamment, les dégâts des eaux et s'engage à titre de réciprocité, ainsi que son assureur, à renoncer à tout recours contre le bailleur.
L'article 20 des conditions générales relatif aux « Responsabilités et recours » prévoit que le preneur, ainsi que ses assureurs, renoncent à tous recours contre le bailleur du fait des dommages résultant des risques visés au contrat et, notamment, des dégâts des eaux atteignant ses biens mais aussi en cas de « dommages matériels ou immatériels, des indemnités pour privation de jouissance ou perte d'exploitation du fait de l'interruption, totale ou partielle, de son exploitation pour quelque cause que ce soit ».
Le point 10 des dispositions particulières ajoute une renonciation à toutes actions contre le bailleur « du chef des travaux réalisés par la ville de Paris », le preneur ayant une parfaite connaissance des éléments attachés au projet de réaménagement du quartier des halles par la ville de Paris, le bailleur s'engageant néanmoins à s'associer à toute action contre la ville de Paris qui serait menée par le locataire.
Cependant, l'article 20 de l'annexe au contrat de bail, relatifs aux « Responsabilités et recours », prévoit que les dispositions du premier et second alinéa de l'article 20 sont complétées de la mention suivante « le preneur se réserve le droit d'agir en cas de fautes graves et répétées du bailleur », fautes dont il doit rapporter la preuve.
C'est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte que le premier juge a considéré licites ces clauses qui définissent de façon claire et non équivoque les conditions de leur application.
Contrairement à ce que soutient le preneur, de telles clauses de renonciation à recours sont courantes, notamment, dans les contrats de baux commerciaux et il n'en résulte aucun déséquilibre significatif, notamment, du fait de leur réciprocité s'agissant de l'article 19 susvisé. La clause 20 des conditions générales visant des préjudices particuliers au preneur résultant d'un défaut d'exploitation, l'absence de réciprocité ne saurait être invoquée, le bailleur n'étant pas exploitant.
Au demeurant, l'avenant négocié entre les parties, qui ouvre la possibilité au preneur de rechercher la responsabilité du bailleur en cas de fautes graves et répétées de ce dernier, l'a été « en considération de [la] personnalité et de [l'] enseigne » du preneur ce qui exclut le déséquilibre allégué et l'hypothèse d'un contrat d'adhésion, le preneur ayant une capacité de négociation avérée.
Ces clauses n'exonèrent toutefois pas le bailleur de son obligation de réaliser les travaux nécessaires résultant de la vétusté dès lors qu'elle affecte des biens et équipements relevant de son obligation d'entretien.
Il s'infère de ces éléments que, comme pertinemment retenu par le premier juge, ces clauses de non recours sont licites.
Sur le manquement du bailleur à son obligation de jouissance paisible :
Au cas d'espèce, il est constant que les locaux de la société Sephora ont eu à subir dix épisodes de dégâts des eaux entre 2011et 2015.
Dans son rapport du 12 mai 2017, M. [C], expert judiciaire désigné, conclut pour chacun d'entre eux :
- dégâts des eaux n° 1 du 25.10.11, 1 bis du 26.07.12, 1 ter du 19.02.13 qu'au regard des informations qu'il a pu recouper, l'origine des désordres résulte d'une EP défaillante ne garantissant plus le recueil des eaux et la cause provient d'un défaut du joint de dilatation au niveau de la voirie, imputable à des travaux sous maîtrise d'ouvrage de la SEM PariSeine ;
- dégâts des eaux n° 2 du 19.02.13 et 2 bis du 19.04.13 que faute d'éléments communiqués par les parties, l'origine et la cause ne sont pas déterminées ;
- dégât des eaux n° 3 du 21.01.14 que ce désordre récurrent affecte l'entrée du magasin et les réserves, que son origine se trouve dans une étanchéité vétuste de la voirie située au-dessus des locaux commerciaux, qu'il a été remédié aux infiltrations en ayant résulté dans le centre commercial, par « la présence d'une gouttière [dans le plénum...] qui récupère ces eaux d'infiltrations » « certainement mise en place par la SCFHP dont la date de mise en 'uvre est inconnue mais ancienne » et qui « ne s'est pas avérée pérenne puisque des infiltrations ont persisté et ont affecté le faux-plafond du local commercial. Cette réparation insuffisante est à l'origine de ces désordres » ;
- dégât des eaux n° 4 du 11.02.14 qu'il a, pour les dégâts sur les caisses, la même origine que le dégât des eaux n° 1 et, pour les dégâts sur la colonne, la même origine que le dégât n° 3 sans toutefois ventiler les responsabilités entre la SEM PariSeine et la SCFHP ;
- dégât des eaux n° 5 du 17.03.14 qu'il a la même origine que le dégât des eaux n° 3 ;
- dégâts des eaux n° 6 du 28.05.14, 7 du 2 au 5.06.14, 8 du 11.06.14 qu'au regard des informations qu'il a pu recouper, l'origine des désordres résulte des carottages effectués par un sous-traitant de la SEM PariSeine mais que faute d'informations factuelles plus précises il ne peut conclure sur la cause ;
- dégât des eaux n° 8 bis du 12.09.14 qu'il a la même origine que le dégât des eaux n° 3 ;
- dégât des eaux n° 9 du 3.09.15 qu'il résulte des travaux de suppression de la voirie située au-dessus du centre sous la maîtrise d'ouvrage de la SEM PariSeine.
Contrairement à ce que soutient la société Sephora, il s'infère de ces éléments que la responsabilité du bailleur ne peut être engagée pour les désordres, soit dont la cause et l'origine restent inconnues à l'issue des opérations d'expertise (n°s 2, 6 et 8), soit qui trouvent leur source dans les travaux de réhabilitation du quartier des Halles menés sous la maîtrise d'ouvrage de la SEM PariSeine et pour lesquels la société Sephora a obtenu réparation auprès du juge administratif, sans que le caractère partiel de l'indemnisation octroyée puisse valablement prospérer devant la cour au regard de la licéité du point 10 des dispositions particulières. Au demeurant, c'est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie et qu'elle adopte que le premier juge a rappelé que lors de la signature de l'acte de renouvellement du bail, l'appelante avait subi son premier dégât des eaux et a néanmoins consenti à la clause de renonciation à recours en parfaite connaissance de l'ampleur des travaux menés par la ville de Paris et des risques qu'ils emportaient.
Concernant, les dégâts des eaux n°s 3, 5 et 8 bis et partiellement pour le dégât des eaux n° 4 attribués à la vétusté de la gouttière installée dans le plénum surplombant le magasin, l'expert n'a pas été en mesure d'établir avec certitude que ces travaux auraient été menés par la SCFHP et n'a formulé qu'une hypothèse sur ce point. S'il a relevé la vétusté de la gouttière, les quatre dégâts des eaux subis de ce chef, dont un partiellement, ne suffisent pas à caractériser les fautes graves et répétées du bailleur en dehors de toute autre démonstration du preneur, lequel s'appuie uniquement sur le rapport de la Cour des Comptes concernant la gestion par la ville de Paris de l'opération d'aménagement des Halles.
En page 45/78 du rapport, la Cour des Comptes mentionne que « L'état de dégradation du centre et l'importance de sa remise aux normes étaient une des causes principales de l'opération de rénovation (objectivement la seule cause originelle). » Elle relève toutefois en page 11 que « Les superstructures du Forum des Halles vieilles d'à peine 18 ans et réhabilitées 7 ans auparavant (par la ville de Paris) témoignaient déjà d'un vieillissement prématuré, sous l'effet de la corrosion, des infiltrations et de la pollution ». Si la Cour rappelle aussi que pesait sur le preneur à bail l'obligation d'entretien des locaux, elle souligne la difficulté résidant dans « l'imbrication des intérêts publics et des intérêts privés en jeu, [...] la porosité des responsabilités superposées sur des propriétés de volume inclus les uns dans les autres ».
Il se déduit de ces observations que, contrairement à ce que soutient Sephora, il ne peut être établi avec certitude que la gouttière litigieuse, destinée à pallier aux infiltrations résultant d'un défaut d'étanchéité de la voirie sous responsabilité de la ville de Paris, ait été installée par la SCFHP, ni que cette dernière ait manqué de façon grave et répétée à l'entretien de la gouttière alors que le vieillissement prématuré du bâtiment et de ses équipements techniques est attribué pour partie aux infiltrations majoritairement liées au défaut d'étanchéité de la voirie susvisé.
Dès lors, ni la faute de la SCFHP, ni le lien de causalité entre cette dernière et les désordres subis par la société Sephora ne sont établis avec certitude, de sorte qu'aucun manquement du bailleur à son obligation de délivrance et de jouissance paisible n'est caractérisé.
Le jugement sera confirmé de ce chef et en ce qu'il, par voie de conséquence, rejeté toutes demandes indemnitaires.
Sur les demandes accessoires :
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCFHP, les frais par elle engagés dans le cadre de la présente instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La société Sephora sera donc condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 mai 2021 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la société Sephora à payer à la Société civile du forum des halles de Paris la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la Société civile du forum des halles de Paris à supporter la charge des dépens de d'appel.
La greffière, La présidente