CASS. CIV. 1re, 10 juillet 2024
- CA Douai (ch. 8 sect. 1), 15 décembre 2022 : Dnd
CERCLAB - DOCUMENT N° 23212
CASS. CIV. 1re, 10 juillet 2024 : pourvoi n° 23-11751 ; arrêt n° 408
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « Vu l'article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
5. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
6. Pour condamner la banque à restituer aux emprunteurs l'ensemble des sommes versées en exécution du contrat de crédit et rejeter sa demande de condamnation solidaire des emprunteurs à lui rembourser le capital emprunté, l'arrêt retient que la faute de la banque, qui n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés, a incontestablement occasionné un préjudice dont l'exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond, que ce préjudice ne saurait être réduit à la seule perte de chance de ne pas contracter et, qu'enfin, les emprunteurs ont subi un préjudice lié au fait qu'ils ont utilisé un matériel qui, faute d'informations préalables suffisantes, pouvait n'être pas en parfaite adéquation avec leurs souhaits.
7. En statuant ainsi, sans caractériser le préjudice en lien causal avec la faute de la banque lors de la délivrance des fonds, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 10 JUILLET 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : Y 23-11.751. Arrêt n° 408 F-B.
DEMANDEUR à la cassation : Société Cofidis
DÉFENDEUR à la cassation :
Président : Mme Champalaune. Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 23-11.751 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. E. X., 2°/ à Mme Y. X., tous deux domiciliés [Adresse 2], 3°/ à la société Isowatt, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Isowatt, après débats en l'audience publique du 28 mai 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 15 décembre 2022), le 30 novembre 2015, M. et Mme X. (les emprunteurs) ont conclu hors établissement, avec la société Isowatt (le vendeur), un contrat portant sur l'acquisition et l'installation d'un « kit aérovoltaïque » dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Les 12 et 13 novembre 2019, les emprunteurs ont assigné le vendeur et la banque en annulation des contrats de vente et de crédit affecté.
Examen des moyens :
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, et sur les deuxième et troisième moyens :
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
4. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer aux emprunteurs l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit affecté et de rejeter sa demande de condamnation solidaire des emprunteurs à lui rembourser le capital emprunté avec intérêts de retard au taux légal, déduction faite des échéances payées, alors « que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute, de sorte qu'en se déterminant, par motifs propres, pour la raison que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle-même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal » et, par motifs à les supposer adoptés, que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse comme une sanction de la faute commise par le professionnel ? ; que l'ordre public de protection du consommateur s'impose en la matière indépendamment de toute notion d'indemnisation du consommateur et par conséquent de toute démonstration d'un quelconque préjudice de celui-ci", la cour d'appel a violé les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable au litige et l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l'article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
5. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
6. Pour condamner la banque à restituer aux emprunteurs l'ensemble des sommes versées en exécution du contrat de crédit et rejeter sa demande de condamnation solidaire des emprunteurs à lui rembourser le capital emprunté, l'arrêt retient que la faute de la banque, qui n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés, a incontestablement occasionné un préjudice dont l'exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond, que ce préjudice ne saurait être réduit à la seule perte de chance de ne pas contracter et, qu'enfin, les emprunteurs ont subi un préjudice lié au fait qu'ils ont utilisé un matériel qui, faute d'informations préalables suffisantes, pouvait n'être pas en parfaite adéquation avec leurs souhaits.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. En statuant ainsi, sans caractériser le préjudice en lien causal avec la faute de la banque lors de la délivrance des fonds, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Mise hors de cause
8. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Isowatt dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Cofidis à restituer à M. et Mme X. l'ensemble des sommes versées à quelque titre que soit en exécution du contrat de crédit affecté conclu le 30 novembre 2015, rejette la demande formée par la société Cofidis de condamnation solidaire de M. et Mme X. à lui rembourser le capital emprunté avec intérêts de retard au taux légal, déduction faite des échéances payées, condamne la société Cofidis à payer à M. et Mme X. les sommes de 500 euros au titre de la première instance et de 700 euros au titre de l'instance d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et condamne la société Cofidis aux dépens, l'arrêt rendu le 15 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composé ;
Condamne M. et Mme X. aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille vingt-quatre.