TJ PARIS (ch. 9-2), 22 octobre 2024
CERCLAB - DOCUMENT N° 23311
TJ PARIS (ch. 9-2), 22 octobre 2024 : RG n° 23/04441
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « 1. Selon l'article 17, § 1, c) du règlement Bruxelles I bis, en matière de contrat conclu par un consommateur pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la section 4 de ce règlement (articles 17 à 19), lorsque le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), la notion d'activité dirigée vers l'Etat membre dans lequel le consommateur a son domicile repose sur une analyse globale des circonstances du litige, afin d'apprécier la volonté d'un acteur de diriger ses activités vers un Etat membre.
Pour la CJUE, il convient de rechercher si, avant la conclusion du contrat avec ce consommateur, il existait des indices démontrant que le commerçant envisageait de commercer avec ce consommateur domicilié dans un Etat membre où celui-ci a son domicile, en ce sens qu’il était disposé à conclure un contrat avec ce consommateur.
Sur ces indices, la CJUE écarte la mention sur un site Internet de l’adresse électronique ou géographique du commerçant ou encore l’indication des coordonnées téléphoniques du commerçant sans préfixe international qui ne sont pas considérés comme des indices pertinents. Il en est de même de la langue ou la monnaie utilisée, lorsqu’elles correspondent aux langues habituellement utilisées dans l’État membre à partir duquel le commerçant exerce son activité et à la monnaie de cet État membre.
En revanche, la CJUE considère que les éléments suivants, dont la liste n’est pas exhaustive, sont susceptibles de constituer des indices permettant de considérer que l’activité du commerçant est dirigée vers l’État membre du domicile du consommateur, à savoir la nature internationale de l’activité, la mention d’itinéraires à partir d’autres États membres pour se rendre au lieu où le commerçant est établi, l’utilisation d’une langue ou d’une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel est établi le commerçant avec la possibilité de réserver et de confirmer la réservation dans cette autre langue, la mention de coordonnées téléphoniques avec l’indication d’un préfixe international, l’engagement de dépenses dans un service de référencement sur Internet afin de faciliter aux consommateurs domiciliés dans d’autres États membres l’accès au site du commerçant ou à celui de son intermédiaire, l’utilisation d’un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l’État membre où le commerçant est établi et la mention d’une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents États membres.
En l'espèce, M. X. rapporte la preuve que le site internet de la CREDITBANK est en «.com », est rédigé en langue anglaise et propose l'ouverture des comptes bancaires en devises. Il ajoute que la convention de compte litigieuse a été établie en anglais et en arabe.
Il atteste en outre avoir été en contact, en français, avec un représentant de la CREDITBANK, de 2017 à 2022, ainsi qu'en 2017 pour l'ouverture d'un compte bancaire pour sa fille [D], dans cette même banque.
Il justifie que la CREDITBANK dispose d'un réseau de cinq banques correspondantes en France.
Cependant, ces éléments sont insuffisants pour caractériser une direction des activités vers la France, lors de la conclusion de la convention de compte.
En effet, l'utilisation de l'anglais, le fait que le site internet de la CREDITBANK soit en «.com » et la possibilité d'ouvrir des comptes bancaires en devises ne font que refléter l'activité internationale de la banque, qui serait en particulier tournée vers la diaspora libanaise.
Il ne peut être tiré aucune conséquence de l'utilisation du français dans les échanges avec la banque, alors que cette langue est couramment pratiquée au Liban. Au surplus, ces échanges sont postérieurs à la date de signature de la convention de compte, étant ajouté que ceux concernant Mme X. sont sans incidence sur le présent litige.
Par ailleurs, M. X. ne rapporte pas la preuve qu'il aurait été en contact en France, avec l'une des banques correspondantes de la CITY BANK, avant la signature de la convention de compte, pas plus qu'il n'atteste avoir été démarché en France pour la conclusion de cette convention, étant ajouté que ces banques correspondantes sont indépendantes de la CITY BANK.
Au contraire, il est établi que cette convention de compte a été signée au Liban, dans sa version en langue arabe, et que dans cet acte M. X. a indiqué résider au Liban, ne mentionnant son adresse française que comme une adresse professionnelle.
M. X. ne relève par conséquent pas des dispositions de la section 4 du règlement Bruxelles 1 bis et des règles dérogatoires de compétence qu'elle prévoit. »
2/ « M. X. soutient que cette clause serait potestative, en ce qu’elle permettrait à la CREDITBANK de saisir toute juridiction compétente en cas de litige.
Il est rappelé que cette clause est rédigée comme suit : « En cas de litige survenant entre les deux parties en relation avec le présent contrat et ses annexes, pour quelque raison que ce soit, les tribunaux de la ville de [Localité 8] et son bureau exécutif seront compétents, étant entendu que la banque aura le droit de recourir, à sa seule discrétion, à toute autorité judiciaire dont la compétence serait fondée sur un critère tel que le domicile ou le lieu de situation des fonds ».
Cette clause doit être validée puisqu’elle fait référence à des juridictions compétentes, de sorte qu’elle est suffisamment prévisible en renvoyant à des règles de compétence de droit commun, outre que la CREDITBANK n’ayant pas introduit l’action, elle n’a pas mis en œuvre le choix de juridiction qui lui était offert par ladite clause. De plus, l’impératif de prévisibilité est satisfait avec une clause d’élection de for qui laisse à une partie le choix de saisir, de manière optionnelle, d’autres juridictions que celles désignées dans la clause, comme au cas d’espèce.
S'agissant de l'application des dispositions en matière de clauses abusives, l'article L. 232-1 du code de la consommation dispose que, nonobstant toute stipulation contraire, le consommateur ne peut être privé de la protection que lui assurent les dispositions prises par un État membre de l'UE en application de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lorsque le contrat présente un lien étroit avec le territoire d'un État membre.
L'article L. 231-1 du même code indique que pour l'application des articles L. 232-1, L. 232-2, L. 232-3 et L. 232-4, un lien étroit avec le territoire d'un État membre est réputé établi notamment : - si le contrat a été conclu dans l'État membre du lieu de résidence habituelle du consommateur ; - si le professionnel dirige son activité vers le territoire de l'État membre où réside le consommateur, sous réserve que le contrat entre dans le cadre de cette activité ; - si le contrat a été précédé dans cet État membre d'une offre spécialement faite ou d'une publicité et des actes accomplis par le consommateur nécessaires à la conclusion de ce contrat ;
- si le contrat a été conclu dans un État membre où le consommateur s'est rendu à la suite d'une proposition de voyage ou de séjour faite, directement ou indirectement, par le vendeur pour l'inciter à conclure ce contrat.
M. X. ne relève d'aucun de ces cas de figure. En effet et en particulier, la convention n'a pas été conclue en France et il a été précédemment retenu que la CREDITBANK ne dirigeait pas ses activités vers la France, lorsque cette convention a été conclue.
Il n'est par conséquent pas fondé à invoquer la législation sur les clauses abusives pour s'opposer à l'application de la clause attributive de compétence.
M. X. se fonde par ailleurs sur les dispositions de l’article 1171 alinéa 1er du code civil qui précisent que, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
Cependant, il ne démontre pas en quoi la clause attributive de compétence serait abusive, en ce qu’elle supprimerait ou entraverait l’exercice de son action en justice.
En effet, il fait état à cet égard de la crise actuelle au Liban et des soupçons de corruption qui pèseraient sur la direction de la CREDITBANK, alors que ces éléments sont sans lien avec la suppression ou l’entrave de l’exercice de son action en justice.
Il doit être ajouté que lorsqu’il a accepté cette clause attributive de compétence, M. X. s’est expressément domicilié au Liban, ne mentionnant son adresse française que comme son adresse professionnelle.
Enfin, l'article R. 631-3 du code de la consommation invoqué par le défendeur à l’incident, qui permet au consommateur de saisir, soit l'une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, soit la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable est une règle de compétence interne qui n’a pas vocation à s’appliquer en présence d’une clause d’élection de for licite et opposable. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS
CHAMBRE 9 SECTION 2
ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/04441. N° Portalis 352J-W-B7H-CY2P5. Assignation du : 2 février 2023.
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT rendue le 22 octobre 2024.
DEMANDEUR :
Monsieur X.
[Adresse 6], [Localité 7], représenté par Maître Pierre-François ROUSSEAU de l’AARPI PHI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #P0026
DÉFENDERESSE :
Société CREDITBANK S.A.L
société de droit libanais dont le siège social est sis, [Adresse 9], [Localité 8], LIBAN, représentée par Maître Julie NGUYEN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #E0601, et Maîtres Danny RIFAAT, Gonzague D’AUBIGNY et Diane CARON-LAVIOLETTE, avocats au Barreau de Paris, avocats plaidant
MAGISTRAT DE LA MISE EN ÉTAT : M. MALFRE, Premier Vice-président adjoint, assisté de Camille CHAUMONT, Greffière
DÉBATS : A l’audience du 10 septembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 22 octobre 2024.
ORDONNANCE : Rendue publiquement par mise à disposition au greffe, Contradictoire, en premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X., de nationalité libano-franco-américaine, est client depuis 2011 de la CREDITBANK. Il a ouvert un compte bancaire dans les livres de cette banque libanaise, le 20 juillet 2015. En exécution de cette convention de compte, il a ouvert les cinq sous-comptes suivants, en trois devises différentes (livres libanaises, euros et dollars américains) :
- un compte de dépôt à termes n° [XXXXXXXXXX02] en livres libanaises ;
- un compte chèques n° [XXXXXXXXXX01] en livres libanaises ;
- un compte chèques n° [XXXXXXXXXX03] en dollars ;
- un compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX04] en dollars ;
- un compte d'épargne n° [XXXXXXXXXX05] en euros.
M. X. précise que le solde actuel de ces comptes s'élève à la somme de 7 977 148,24 en livres libanaises, soit 492,43 euros, de 1 297 049,09 dollars, soit 1 203 466,91 euros, outre 344,08 euros.
Par acte du 2 février 2023, il a fait assigner la CREDITBANK devant ce tribunal, afin qu'il lui soit ordonné de virer l’ensemble des avoirs qu'il détient dans ces cinq sous-comptes, dans la devise de dépôt, et ce, sur un compte bancaire qu'il ouvert en France dans les livres de la SOCIETE GENERALE, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter d’un délai de 8 jours suivant la notification de la décision à intervenir, cette condamnation à restituer la totalité des avoirs étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2022. Il poursuit en outre la condamnation de la CREDITBANK à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X. expose que depuis le début de la crise financière au Liban, en octobre 2019, ses avoirs sont arbitrairement bloqués par la CREDITBANK, n’ayant pas pu transférer de sommes en dollars américains ou en euros, malgré de multiples relances et mises en demeure.
La CREDITBANK a, dans le cadre d'une procédure d’offres réelles et de consignation prévue par la loi libanaise, le 31 août 2023, émis trois chèques correspondant au solde des comptes de M. X., déposés auprès d’un notaire à Beyrouth. Elle indique avoir notifié à M. X. cette procédure, qui n'a pas eu de suites.
Par conclusions d'incident du 23 août 2024, la CREDITBANK demande au juge de la mise en état, à titre principal de déclarer les juridictions françaises internationalement incompétentes pour statuer sur le litige et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir. A titre subsidiaire, elle sollicite le renvoi devant la formation de jugement, afin qu’elle statue sur la fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt à agir de M. X. et de l’absence d’objet de sa demande. A titre encore plus subsidiaire, elle entend que M. X. soit déclaré irrecevable en sa demande en paiement, pour défaut d’objet et d’intérêt à agir. En tout état de cause, elle demande au juge de la mise en état de dire la mesure conservatoire de constitution d’un séquestre mal fondée et entend que M. X. soit condamné à lui payer la somme de 15 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions d'incident du 2 septembre 2024, M. X. s'oppose à cette exception d'incompétence, demande au juge de la mise en état de le dire recevable en ses demandes et de débouter la CREDITBANK de ses demandes. A titre reconventionnel, il entend qu'il soit ordonné, à titre conservatoire, à la CREDITBANK, dans l'attente de la décision sur le fond, de consigner sur le compte CARPA de M. le bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris, désigné séquestre, l’intégralité des sommes lui appartenant, dans la devise de dépôt, sous astreinte définitive de 1 000 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir. Il sollicite par ailleurs que la CREDITBANK soit condamnée à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur l'exception d'incompétence :
A titre liminaire, il est relevé que la CREDITBANK ne conteste pas utilement que M. X. a la qualité de consommateur, dans le cadre du présent litige.
En outre, la banque n'établit pas que le demandeur au fond ne résidait pas en France à la date de délivrance de l'assignation. En effet, elle ne discute pas les différentes pièces produites par M. X. sur ce point (pièces n° 29 à 32, 46, et 56 à 60).
1. A l'appui de son exception d'incompétence, la CREDITBANK relève, en premier lieu, que pour justifier la compétence des juridictions françaises, M. X. oppose les articles 17 et 18 du règlement UE n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 dit « Bruxelles 1 bis », prévoyant une règle de compétence dérogatoire en faveur des consommateurs domiciliés au sein de l’Union Européenne (UE), qui leur permet de saisir les juridictions de l’Etat membre de leur domicile.
Elle rappelle que ce régime dérogatoire s’applique lorsqu’un consommateur domicilié dans un État membre de l’UE intente une action contre un professionnel domicilié dans un Etat tiers mais exerçant ou dirigeant ses activités vers l’État du domicile du consommateur et lorsque le contrat est conclu entre dans le cadre desdites activités.
Si M. X. se fonde sur l'article 18 susvisé, soutenant être un consommateur ayant conclu un contrat avec un professionnel qui exerce ou dirige ses activités vers la France, elle considère que les conditions d'application de cet article ne sont pas remplies, précisant qu'elle n'exerce ni ne dirige ses activités vers la France, étant une banque libanaise exerçant ses activités uniquement au Liban.
A cet égard, elle relève que si M. X. fait état d'indices de cette direction d'activités vers la France, elle estime ces indices non pertinents, n'établissant que la nature internationale de l’activité de la banque, ce que cette dernière ne conteste pas.
De même, elle fait valoir que le fait qu'elle dispose d’un réseau de banques correspondantes situées dans l’UE et en France, ne constitue pas un indice pertinent de direction de l’activité, rappelant être indépendante de ces banques.
Elle ajoute qu'il importe peu que les langues anglaises et françaises soient utilisées sur son site internet, sur les documents contractuels et lors des échanges avec ses préposés, ajoutant que M. X. a signé les conventions de compte dans leur version arabe, outre que ses échanges avec la CREDITBANK n’étaient pas uniquement en anglais et en français, mais aussi en arabe, précisant au surplus que la langue française est largement utilisée au Liban.
Sur le fait que les agents de la CREDITBANK peuvent être joints par des adresses e-mail en «.com », elle estime que cela démontre uniquement une activité internationale.
Quant à la possibilité d'effectuer des placements en euros et en dollars, elle observe que cela est proposé par toutes les banques, que dans les transactions au Liban les devises étrangères sont utilisées quotidiennement, outre que l’utilisation de l’euro n'indique pas nécessairement une direction d'activités vers la France.
Elle en conclut que M. X. ne peut pas solliciter l'application des dispositions dérogatoires du règlement Bruxelles 1 bis, du fait de sa qualité de consommateur, rappelant que lorsque la relation contractuelle n’est rattachée qu’au seul Etat du domicile du professionnel, comme c’est le cas en l'espèce, le lien de rattachement avec l’Etat du domicile du consommateur fait nécessairement défaut, de sorte que le régime dérogatoire n’a pas vocation à s’appliquer.
2. Dès lors, la CREDITBANK oppose à M. X. la clause d’élection de for prévue à la convention de compte.
Elle souligne que cette convention régissant l’ouverture et le fonctionnement des comptes litigieux, signée par M. X., prévoit en son article 9 que : « En cas de litige survenant entre les deux parties en relation avec le présent contrat et ses annexes, pour quelque raison que ce soit, les tribunaux de la ville de [Localité 8] et son bureau exécutif seront compétents, étant entendu que la banque aura le droit de recourir, à sa seule discrétion, à toute autorité judiciaire dont la compétence serait fondée sur un critère tel que le domicile ou le lieu de situation des fonds ».
Elle rappelle que de telles clauses prorogeant la compétence internationale sont en principe licites, lorsqu’il s’agit d’un litige international, et qu'elles le sont a fortiori en présence d’un litige interne à un pays étranger, lorsque c’est une juridiction de ce pays qui est désignée, comme en l'espèce.
Contrairement à ce que soutient M. X., la CREDITBANK conteste que cette clause n'aurait pas un caractère non exclusif. Elle estime sur ce point que le demandeur au fond ne saurait se prévaloir des dispositions de l’article R. 631-3 du code de la consommation, alors que cet article prévoit une règle de compétence interne qui n’a pas vocation à s’appliquer en présence d’une clause d’élection de for licite et opposable. Elle ajoute que dans tous les cas, cet article ne désigne pas les juridictions françaises mais offre au consommateur l’option de saisir la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou celle du lieu de la survenance du fait dommageable.
Or, elle relève que lors de la conclusion de la convention de compte, M. X. résidait au Liban, comme il l’a déclaré dans sa fiche client signée de sa main le jour même et que, s’agissant du lieu de survenance du fait dommageable, cette compétence correspond aux actions délictuelles et non pas à une action fondée sur un contrat, comme en l’espèce.
La demanderesse à l'incident conteste que cette clause attributive de juridiction soit potestative, en ce qu'elle offrirait à la banque l’option de saisir toute juridiction compétente, qu'en effet cette clause permet à M. X. d’identifier la juridiction compétente, de sorte qu'elle est suffisamment prévisible, outre que dans tous les cas elle énonce des critères objectifs permettant d’identifier les juridictions compétentes, à savoir les juridictions du domicile des parties et du lieu de situation des fonds, soulignant que la mention du bureau exécutif n’apporte aucune confusion puisqu'il s’agit du juge de l’exécution libanais.
Elle ajoute qu'à supposer que l’option de compétence soit invalide ou inopposable, le juge de la mise en état devra juger non écrite la seule portion de la clause prévoyant cette option. Sur ce point, elle relève que la clause comporte deux parties séparées. D’une part, celle qui prévoit qu'en cas de litige survenant entre les deux parties en relation avec le présent contrat et ses annexes, pour quelque raison que ce soit, les tribunaux de la ville de [Localité 8] et son bureau exécutif seront compétents et, d’autre part, celle qui stipule que la banque aura le droit de recourir, à sa seule discrétion, à toute autorité judiciaire dont la compétence serait fondée sur un tel critère tel que le domicile ou le lieu de situation des fonds, qui seule serait inopposable.
Par ailleurs, la CREDITBANK considère que M. X. ne peut pas se prévaloir du droit français de la consommation en matière de clauses abusives pour invalider la clause attributive de juridiction, faisant valoir que deux conditions doivent être réunies pour que le droit issu de la directive européenne sur les clauses abusives s’applique en présence d’une clause de choix de loi étrangère, dont le fait que le contrat doit présenter un lien étroit avec le territoire du domicile du consommateur résultant de la direction des activités du professionnel vers ce territoire, condition non remplie.
Elle souligne que dans tous les cas, cette clause n'est pas abusive, puisqu'elle ne supprime ni n'entrave l’exercice d’action ou les voies de recours pour le consommateur, alors que M. X. se contente d’affirmer sur ce point que la crise financière affectant le Liban et les prétendus soupçons de corruption pesant sur la direction de la banque feraient craindre une rupture d’égalité devant les juridictions libanaises, confondant ainsi la notion de déséquilibre significatif avec celle de déni de justice, relevant au surplus que M. X. se prévaut par ailleurs d’une jurisprudence libanaise abondante rendue récemment et prétendument en faveur des déposants.
Enfin, la CREDITBANK considère que cette clause attributive de juridiction ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au sens de l’article 1171 du code civil. Elle soutient que cet article 1171 ne s’applique que d'une manière résiduelle, lorsque les dispositions du code de la consommation en matière de clause abusive ne s’appliquent pas, outre que M. X. n’explique pas en quoi la clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties.
Elle note que dans tous les cas, les juridictions françaises rejettent l’application de cette disposition pour dire inopposable une clause attributive de juridiction valablement souscrite, en ce qu'il ne suffit pas que la juridiction désignée soit éloignée du domicile du demandeur ou que sa saisine entraîne des frais supplémentaires.
3. Sur l’article 14 du code civil, la CREDITBANK rappelle que la stipulation d’une clause attributive de juridiction dans un contrat emporte renonciation expresse au privilège de juridiction issu de cet article, ce qui est le cas en l’espèce puisque M. X. a expressément renoncé à se prévaloir de ce droit par son acceptation de la clause attributive de juridiction, rappelant qu'il a signé chaque page de la convention de compte, dont celle reprenant ladite clause, ce qui atteste de son acceptation libre et sans équivoque.
1. En réponse, sur l'application du règlement Bruxelles 1 bis, M. X. soutient que la banque dirige ses activités vers la France. Il fait valoir à cet égard que :
- le site internet de la banque mentionne ses relations avec de nombreuses banques correspondantes situées dans l’UE et en particulier en France ;
- ce site est rédigé en anglais et comporte un document listant les droits et devoirs des consommateurs rédigé en version bilingue anglais/arabe, outre que ce site publiait il y a peu des articles en anglais et en français ;
- lors de la signature du contrat d’ouverture de compte, il lui a été demandé les langues qu’il maîtrisait parmi les choix proposés : l’arabe, le français, et l’anglais ;
- le contrat d'ouverture de compte est rédigé en anglais et en arabe ;
- un grand nombre d’échanges écrits avec la banque était en français et en anglais ;
- les agents de la CREDITBANK peuvent être joints par des adresses e-mail en «.com » ;
- La CREDITBANK communique encore aujourd’hui sur les comptes à terme, sur son site internet, en anglais, soit à destination d’une clientèle internationale ;
- dans une brochure toujours disponible en ligne sur son site, elle promeut également les comptes d'épargne bloqués, toujours anglais, en insistant sur la possibilité d’ouvrir un compte, même pour les non-résidents Libanais ;
- La signature des courriels de M. [W], contact privilégié de M. X. à la CREDITBANK, démontre qu’il se présentait à l’égard de ses clients comme dirigeant son activité notamment vers l’UE ;
- il ressort des nombreux échanges entre M. X. et M. [W] que ce dernier s’est rendu en France pour faire conclure un contrat d’ouverture de compte à la fille de M. X..
Or, il rappelle que les éléments considérés comme pertinents pour considérer qu’un commerçant exerce son activité à l’égard des Etats membres de l'UE à travers son site internet sont présents en l’espèce, du fait de la nature internationale de l'activité, de l'utilisation d'une langue ou d'une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l'État dans lequel est établi le commerçant, de la mention de coordonnées téléphoniques avec un préfixe international et de l'utilisation d'un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l'État où le commerçant est établi.
M. X. conclut à l'application du règlement Bruxelles 1 bis, en particulier son article 18 qui lui permet de saisir le tribunal de son domicile, dans le cadre de l'option de compétence qui lui est ouverte.
2. Sur la clause attributive de compétence, M. X. considère que cette clause est potestative, en ce qu'elle laisse à la banque le choix de la juridiction compétente, ce qui est contraire à l’objet et à la finalité de la prorogation de compétence ouverte par l’article 23 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, dit règlement Bruxelles 1, devenu l'article 25 dans le règlement Bruxelles 1 bis.
Il soutient qu’une clause d’élection de for doit être écartée lorsqu’elle réserve à l’une des parties la possibilité de saisir tout autre tribunal compétent et qu’elle ne précise pas sur quels éléments objectifs cette compétence alternative était fondée, ce qui est contraire à l’objectif de prévisibilité et de sécurité juridique.
Or, il relève que la clause qui lui est opposée vise deux critères : le domicile, mais sans préciser de quel domicile il s’agit, et le lieu de situation des fonds, qui est nécessairement le Liban.
Il note par ailleurs que cette clause étant antérieure à la naissance du différend, son application est contraire aux dispositions de l'article 19 du règlement Bruxelles 1 Bis.
En outre, en vertu de l’article L. 212-1 du code de la consommation, applicable au présent litige, M. X. estime que la convention d’ouverture de compte bancaire est un contrat liant un consommateur à un professionnel qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par ce dernier et qui créé un déséquilibre significatif entre les parties.
De plus, il soutient que les dispositions du règlement Rome I imposent de laisser cette clause inappliquée, en ce qu'il retient l'application de la loi française, dans la mesure où il est un consommateur ayant conclu un contrat avec une banque dirigeant ses activités professionnelles vers la France.
Il souligne qu'en application de l’article 1171 alinéa 1er du code civil, alors que la convention d’ouverture de compte bancaire est un contrat d'adhésion, il doit être considéré que la clause d’élection de for est non-écrite, en ce qu’elle créé un déséquilibre significatif entre les parties.
Il ajoute que l’article R. 631-3 du code de la consommation lui permet de saisir le tribunal du lieu du dommage, soit le lieu du refus de la banque de restituer les fonds par virement bancaire sur son compte ouvert en France, qui se trouve en France.
Il en conclut que cette clause d’élection doit être considérée comme non-écrite.
3. Sur l’article 14 du code civil, M. X. soutient que, du fait de sa qualité de français, il peut faire assigner la CREDITBANK devant le tribunal judiciaire de Paris, la société ayant contracté au Liban avec un français.
Ceci étant exposé.
1. Selon l'article 17, § 1, c) du règlement Bruxelles I bis, en matière de contrat conclu par un consommateur pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la section 4 de ce règlement (articles 17 à 19), lorsque le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), la notion d'activité dirigée vers l'Etat membre dans lequel le consommateur a son domicile repose sur une analyse globale des circonstances du litige, afin d'apprécier la volonté d'un acteur de diriger ses activités vers un Etat membre.
Pour la CJUE, il convient de rechercher si, avant la conclusion du contrat avec ce consommateur, il existait des indices démontrant que le commerçant envisageait de commercer avec ce consommateur domicilié dans un Etat membre où celui-ci a son domicile, en ce sens qu’il était disposé à conclure un contrat avec ce consommateur.
Sur ces indices, la CJUE écarte la mention sur un site Internet de l’adresse électronique ou géographique du commerçant ou encore l’indication des coordonnées téléphoniques du commerçant sans préfixe international qui ne sont pas considérés comme des indices pertinents. Il en est de même de la langue ou la monnaie utilisée, lorsqu’elles correspondent aux langues habituellement utilisées dans l’État membre à partir duquel le commerçant exerce son activité et à la monnaie de cet État membre.
En revanche, la CJUE considère que les éléments suivants, dont la liste n’est pas exhaustive, sont susceptibles de constituer des indices permettant de considérer que l’activité du commerçant est dirigée vers l’État membre du domicile du consommateur, à savoir la nature internationale de l’activité, la mention d’itinéraires à partir d’autres États membres pour se rendre au lieu où le commerçant est établi, l’utilisation d’une langue ou d’une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel est établi le commerçant avec la possibilité de réserver et de confirmer la réservation dans cette autre langue, la mention de coordonnées téléphoniques avec l’indication d’un préfixe international, l’engagement de dépenses dans un service de référencement sur Internet afin de faciliter aux consommateurs domiciliés dans d’autres États membres l’accès au site du commerçant ou à celui de son intermédiaire, l’utilisation d’un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l’État membre où le commerçant est établi et la mention d’une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents États membres.
En l'espèce, M. X. rapporte la preuve que le site internet de la CREDITBANK est en «.com », est rédigé en langue anglaise et propose l'ouverture des comptes bancaires en devises. Il ajoute que la convention de compte litigieuse a été établie en anglais et en arabe.
Il atteste en outre avoir été en contact, en français, avec un représentant de la CREDITBANK, de 2017 à 2022, ainsi qu'en 2017 pour l'ouverture d'un compte bancaire pour sa fille [D], dans cette même banque.
Il justifie que la CREDITBANK dispose d'un réseau de cinq banques correspondantes en France.
Cependant, ces éléments sont insuffisants pour caractériser une direction des activités vers la France, lors de la conclusion de la convention de compte.
En effet, l'utilisation de l'anglais, le fait que le site internet de la CREDITBANK soit en «.com » et la possibilité d'ouvrir des comptes bancaires en devises ne font que refléter l'activité internationale de la banque, qui serait en particulier tournée vers la diaspora libanaise.
Il ne peut être tiré aucune conséquence de l'utilisation du français dans les échanges avec la banque, alors que cette langue est couramment pratiquée au Liban. Au surplus, ces échanges sont postérieurs à la date de signature de la convention de compte, étant ajouté que ceux concernant Mme X. sont sans incidence sur le présent litige.
Par ailleurs, M. X. ne rapporte pas la preuve qu'il aurait été en contact en France, avec l'une des banques correspondantes de la CITY BANK, avant la signature de la convention de compte, pas plus qu'il n'atteste avoir été démarché en France pour la conclusion de cette convention, étant ajouté que ces banques correspondantes sont indépendantes de la CITY BANK.
Au contraire, il est établi que cette convention de compte a été signée au Liban, dans sa version en langue arabe, et que dans cet acte M. X. a indiqué résider au Liban, ne mentionnant son adresse française que comme une adresse professionnelle.
M. X. ne relève par conséquent pas des dispositions de la section 4 du règlement Bruxelles 1 bis et des règles dérogatoires de compétence qu'elle prévoit.
2. Sur la clause attributive de compétence, il est rappelé que si, dans l’ordre interne, une telle clause n’est licite qu’à la condition d’avoir été stipulée entre commerçants, dans l’ordre international, une clause attribuant compétence à des juridictions étrangères est par principe licite, dans la mesure où elle remplit les trois conditions cumulatives suivantes :
- le litige doit présenter un caractère international ;
- aucune juridiction française ne doit être impérativement compétente ;
- la clause attributive de compétence à des juridictions étrangère doit avoir été acceptée.
En l’espèce, le présent litige revêt un caractère international puisque le demandeur sollicite un paiement transfrontière, c’est-à-dire l’exécution d’une opération de banque produisant des effets entre le Liban et la France, outre que la banque a son siège social au Liban.
Aucune règle n’attribue de compétence impérative à une juridiction française.
M. X. a valablement accepté, dans ses relations contractuelles avec la CREDITBANK, une clause attributive de compétence aux juridictions libanaises, lors de la signature de la convention de compte.
Le défendeur à l'incident ne pouvant pas se prévaloir des dispositions de la section 4 du règlement Bruxelles 1 bis, il ne peut pas opposer les dispositions de l'article 19 de ce règlement, pour contester l'application de la clause attributive de compétence.
M. X. soutient que cette clause serait potestative, en ce qu’elle permettrait à la CREDITBANK de saisir toute juridiction compétente en cas de litige.
Il est rappelé que cette clause est rédigée comme suit : « En cas de litige survenant entre les deux parties en relation avec le présent contrat et ses annexes, pour quelque raison que ce soit, les tribunaux de la ville de [Localité 8] et son bureau exécutif seront compétents, étant entendu que la banque aura le droit de recourir, à sa seule discrétion, à toute autorité judiciaire dont la compétence serait fondée sur un critère tel que le domicile ou le lieu de situation des fonds ».
Cette clause doit être validée puisqu’elle fait référence à des juridictions compétentes, de sorte qu’elle est suffisamment prévisible en renvoyant à des règles de compétence de droit commun, outre que la CREDITBANK n’ayant pas introduit l’action, elle n’a pas mis en œuvre le choix de juridiction qui lui était offert par ladite clause. De plus, l’impératif de prévisibilité est satisfait avec une clause d’élection de for qui laisse à une partie le choix de saisir, de manière optionnelle, d’autres juridictions que celles désignées dans la clause, comme au cas d’espèce.
S'agissant de l'application des dispositions en matière de clauses abusives, l'article L. 232-1 du code de la consommation dispose que, nonobstant toute stipulation contraire, le consommateur ne peut être privé de la protection que lui assurent les dispositions prises par un État membre de l'UE en application de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lorsque le contrat présente un lien étroit avec le territoire d'un État membre.
L'article L. 231-1 du même code indique que pour l'application des articles L. 232-1, L. 232-2, L. 232-3 et L. 232-4, un lien étroit avec le territoire d'un État membre est réputé établi notamment :
- si le contrat a été conclu dans l'État membre du lieu de résidence habituelle du consommateur ;
- si le professionnel dirige son activité vers le territoire de l'État membre où réside le consommateur, sous réserve que le contrat entre dans le cadre de cette activité ;
- si le contrat a été précédé dans cet État membre d'une offre spécialement faite ou d'une publicité et des actes accomplis par le consommateur nécessaires à la conclusion de ce contrat ;
- si le contrat a été conclu dans un État membre où le consommateur s'est rendu à la suite d'une proposition de voyage ou de séjour faite, directement ou indirectement, par le vendeur pour l'inciter à conclure ce contrat.
M. X. ne relève d'aucun de ces cas de figure. En effet et en particulier, la convention n'a pas été conclue en France et il a été précédemment retenu que la CREDITBANK ne dirigeait pas ses activités vers la France, lorsque cette convention a été conclue.
Il n'est par conséquent pas fondé à invoquer la législation sur les clauses abusives pour s'opposer à l'application de la clause attributive de compétence.
M. X. se fonde par ailleurs sur les dispositions de l’article 1171 alinéa 1er du code civil qui précisent que, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
Cependant, il ne démontre pas en quoi la clause attributive de compétence serait abusive, en ce qu’elle supprimerait ou entraverait l’exercice de son action en justice.
En effet, il fait état à cet égard de la crise actuelle au Liban et des soupçons de corruption qui pèseraient sur la direction de la CREDITBANK, alors que ces éléments sont sans lien avec la suppression ou l’entrave de l’exercice de son action en justice.
Il doit être ajouté que lorsqu’il a accepté cette clause attributive de compétence, M. X. s’est expressément domicilié au Liban, ne mentionnant son adresse française que comme son adresse professionnelle.
Enfin, l'article R. 631-3 du code de la consommation invoqué par le défendeur à l’incident, qui permet au consommateur de saisir, soit l'une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, soit la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable est une règle de compétence interne qui n’a pas vocation à s’appliquer en présence d’une clause d’élection de for licite et opposable.
3. Par ailleurs, M. X. n'est pas fondé à solliciter le bénéfice des dispositions de l'article 14 du code civil, dans la mesure où l'insertion d'une clause attributive de compétence dans un contrat international fait partie de l'économie dudit contrat et emporte renonciation à tout privilège de juridiction. De plus, les justiciables français peuvent toujours renoncer au bénéfice de cet article 14, à la faveur d’une clause attribuant compétence exclusive à des juridictions étrangères, ces dispositions ne prévoyant en effet qu'une règle de compétence supplétive et non d'ordre public.
Il convient par conséquent de faire droit à l'exception d'incompétence.
Cette exception d’incompétence étant retenue, il n’y a pas lieu de statuer sur l’irrecevabilité de la demande pour défaut d’intérêt à agir et défaut d’objet, pas plus que sur la mesure de séquestre.
Sur les autres demandes :
Au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, M. X. sera condamné à payer la somme de 3 000 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Déclare le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître des demandes formées par M. X., par assignation du 2 février 2023 ;
Invite M. X. à mieux se pourvoir ;
Condamne M. X. aux dépens de l'incident ainsi qu'à payer à la société de droit libanais CREDITBANK SAL la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Faite et rendue à Paris le 22 Octobre 2024
La Greffière Le Juge de la mise en état