CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA NÎMES (ch. civ. 1re ch.), 30 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : CA NÎMES (ch. civ. 1re ch.), 30 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : Nimes (CA), 1re ch. civ.
Demande : 23/03080
Date : 30/01/2025
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 2/10/2023
Décision antérieure : T. proxim. Annonay, 29 août 2023 : RG n° 23-000117
Décision antérieure :
  • T. proxim. Annonay, 29 août 2023 : RG n° 23-000117
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 23575

CA NÎMES (ch. civ. 1re ch.), 30 janvier 2025 : RG n° 23/03080 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Le premier juge a considéré M. X. comme un consommateur dans ses rapports avec la société Leasecom, qui ne s'inscrivaient pas dans le cadre des activités de marquage de textiles auxquelles il se livrait à titre professionnel.

A la date de signature du contrat, le consommateur était défini par le code de la consommation comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ». Cette définition s'inscrit dans le cadre de celle de l'article 2 de la directive n°2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative au droit des consommateurs (« Toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale »).

En l'espèce, M. X. a conclu, pour le compte de son entreprise @Z.Doc, un contrat ayant pour objet la conception, création, réalisation d'un site internet vitrine, l'hébergement professionnel du site internet, le nom de domaine, des e-mails personnalisés, une mailing-list, une base de données produits, le référencement et le suivi du référencement ainsi que le suivi et la modification du site internet.

Cependant, selon l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions de ce code applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. Ce texte implique que seul le critère de la compétence professionnelle doit être pris en compte pour déterminer la soumission, ou non, du contrat aux dispositions du code de la consommation, et non les circonstances que le contrat a été conclu pour entreprendre ou développer cette activité principale ou seulement à l'occasion de cette activité (Civ. 1ère, 31 août 2022 n° 21-11.455). En l'espèce, la conclusion du contrat de licence d'exploitation de site internet par M. X. n'était pas spécifique à son activité de sérigraphie textile, et étrangère aux compétences professionnelles requises pour une telle activité.

Le contrat souscrit par M. X. est donc soumis aux dispositions du code de la consommation et au délai de prescription de deux ans applicable aux actions en paiement fondées sur ces contrats selon l'article L. 218-2 du code de la consommation.

Dans sa requête en injonction de payer, la société Leasecom sollicitait le paiement de 19 échéances, du 1er mai 2017 au 1er novembre 2018, et de l'indemnité de résiliation. Etant rappelé que la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, l'appelante disposait d'un délai allant expirant le 1er novembre 2020 pour agir en paiement. Or, elle a déposé sa requête aux fins d'injonction de payer le 3 juin 2021. Son action en paiement est donc prescrite, et le jugement sera confirmé. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 30 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/03080. N° Portalis DBVH-V-B7H-I6TI. Décision déférée à la cour : jugement du tribunal de proximité d'Annonay en date du 29 août 2023, RG n° 23-000117.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Mme Audrey Gentilini, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, Mme Alexandra Berger, conseillère, Mme Audrey Gentilini, conseillère

GREFFIER : Mme Audrey Bachimont, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS : A l'audience publique du 19 décembre 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 30 janvier 2025. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

 

APPELANTE :

La Sas LEASECOM

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité, [Adresse 2], [Localité 4], Représentée par Maître Pascale Comte de la Scp AKCIO BDCC Avocats, postulante, avocate au barreau de Nîmes, Représentée par Maître Carolina Cuturi-Ortega de la Scp Joly Cuturi Wojas Reynet- Dynamis Avocats, plaidante, avocate au barreau de Bordeaux

 

INTIMÉ :

M. X.

né le [date] à [Localité 6], [Adresse 3], [Localité 1], Représenté par Maître Elsa Tollis de la Selarl Tollis, plaidante/postulante, avocate au barreau d'Ardèche (bénéficie d'une aide juridictionnelle totale n° XXX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 7])

 

ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 30 janvier 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Le 3 décembre 2015, M. X. a conclu avec la société Cometik un contrat de licence d'exploitation d'un site internet pour une durée de 48 mois à compter du 1er mars 2016, moyennant un loyer mensuel de 240 euros TTC.

La société Cometik, fournisseur, a cédé ses droits à la société Leasecom qui par courrier recommandé avec accusé de réception du 23 juin 2020, a mis en demeure M. X. de régler les loyers impayés du 1er mai 2017 au 1er novembre 2018.

Cette mise en demeure a été réitérée le 10 mai 2021.

Les deux courriers sont revenus à l'expéditeur avec la mention « destinataire inconnu à l'adresse indiquée ».

Sur requête en injonction de payer et par ordonnance du 18 juin 2021 le tribunal de proximité d'Annonay a enjoint à M. X. de payer à cette société la somme de 7.440 euros au titre du principal avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2021.

M. X. a formé opposition à cette ordonnance le 22 décembre 2021 et par jugement contradictoire du 29 août 2023 le tribunal de proximité d'Annonay

- a déclaré la société Leasecom prescrite dans ses demandes,

- l'a condamnée à payer à l'opposant la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code procédure civile, distraction faite au profit de la Selarl [S],

- l'a condamnée aux dépens de l'instance avec application des règles de l'aide juridictionnelle,

- a rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

La société Leasecom a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 2 octobre 2023.

Par ordonnance du 6 septembre 2024, la procédure a été clôturée le 5 décembre 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 19 décembre 2024.

 

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 22 novembre 2024, la société Leasecom demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- de débouter M. X. de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

Statuant à nouveau,

- de constater la résiliation du contrat de licence d'exploitation au 1er juillet 2020,

- de condamner M. X. au paiement de la somme de 7.530 euros, arrêtée au 1er juillet 2020, outre intérêts au taux légal multiplié par trois, décomposé comme suit :

- 4.560 euros TTC au titre des sommes impayées au jour de la résiliation,

- 2.970 euros au titre de l'indemnité de résiliation, à savoir les loyers à échoir HT (2.700 euros) et la pénalité (270 euros),

- de le condamner à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

L'appelante soutient

- que les dispositions du code de la consommation sont inapplicables au litige, l'intimé ayant conclu le contrat de location du site internet dans le cadre de son activité professionnelle,

- que le délai de prescription de droit commun, qui s'applique, a commencé à courir à compter du 1er mai 2017, date de la cessation du paiement des loyers par le locataire, et été interrompu par la requête en injonction de payer du 3 juin 2021,

- que l'intimé ne peut se prévaloir des dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives,

- que la clause résolutoire et la clause de pénalités de retard stipulées au contrat de location ne constituent pas de telles clauses et ont vocation à pleinement s'appliquer en raison de l'inexécution de son obligation de paiement par le locataire,

- que l'indemnité de résiliation n'est nullement excessive,

- que l'intimé a déjà bénéficié des plus larges délais de paiement.

[*]

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 14 mars 2024, M. X. demande à la cour

A titre principal

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant

- de condamner la société Leasecom aux entiers dépens et à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

A titre subsidiaire

- de juger nulle et réputée non-écrite la clause résolutoire stipulée au contrat de location,

- de juger en conséquence nulle la résolution du contrat par la société Leasecom,

- de juger nulle la demande de paiement d'indemnités et de pénalités au titre de la résiliation du contrat.

A titre infirment subsidiaire

- de lui octroyer les plus larges délais de paiement, avec un échelonnement de sa dette sur une période de deux années,

- d'exclure tout intérêt et clause pénale,

En tout état de cause

- de condamner la société Leasecom à payer la somme de 3.500 euros à la Selarl [S] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Leasecom aux entiers dépens de l'instance,

- de le dispenser expressément du remboursement des dépens comme en matière d'aide juridictionnelle.

L'intimé réplique

- que la seule conclusion du contrat de location de site internet aux fins de promotion numérique de son activité de calligraphie textile ne lui a pas conféré la qualité de professionnel, le secteur publicitaire étant parfaitement étranger à son activité principale,

- que l'action de l'appelante est donc prescrite sur le fondement de la prescription biennale prévue par le code de la consommation,

à titre subsidiaire,

- que la clause de résiliation stipulée au bénéfice du bailleur est abusive comme non limitée dans le temps ; que la clause prévoyant des pénalités de retard est absente des conditions générales, n'a jamais été acceptée par lui et est dépourvue de fondement légal valide ;

en toute hypothèse, que la négligence de l'appelante qui a laissé volontairement courir le contrat constitue une faute la privant de son droit à se prévaloir de la clause pénale,

à titre infiniment subsidiaire,

- qu'il est dans l'incapacité de s'acquitter de la dette sans délais de paiement.

[*]

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

* Recevabilité de l'action en paiement :

Le premier juge a considéré M. X. comme un consommateur dans ses rapports avec la société Leasecom, qui ne s'inscrivaient pas dans le cadre des activités de marquage de textiles auxquelles il se livrait à titre professionnel.

A la date de signature du contrat, le consommateur était défini par le code de la consommation comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ».

Cette définition s'inscrit dans le cadre de celle de l'article 2 de la directive n°2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative au droit des consommateurs (« Toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale »).

En l'espèce, M. X. a conclu, pour le compte de son entreprise @Z.Doc, un contrat ayant pour objet la conception, création, réalisation d'un site internet vitrine, l'hébergement professionnel du site internet, le nom de domaine, des e-mails personnalisés, une mailing-list, une base de données produits, le référencement et le suivi du référencement ainsi que le suivi et la modification du site internet.

Cependant, selon l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions de ce code applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

Ce texte implique que seul le critère de la compétence professionnelle doit être pris en compte pour déterminer la soumission, ou non, du contrat aux dispositions du code de la consommation, et non les circonstances que le contrat a été conclu pour entreprendre ou développer cette activité principale ou seulement à l'occasion de cette activité (Civ. 1ère, 31 août 2022 n° 21-11.455).

En l'espèce, la conclusion du contrat de licence d'exploitation de site internet par M. X. n'était pas spécifique à son activité de sérigraphie textile, et étrangère aux compétences professionnelles requises pour une telle activité.

Le contrat souscrit par M. X. est donc soumis aux dispositions du code de la consommation et au délai de prescription de deux ans applicable aux actions en paiement fondées sur ces contrats selon l'article L. 218-2 du code de la consommation.

Dans sa requête en injonction de payer, la société Leasecom sollicitait le paiement de 19 échéances, du 1er mai 2017 au 1er novembre 2018, et de l'indemnité de résiliation.

Etant rappelé que la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, l'appelante disposait d'un délai allant expirant le 1er novembre 2020 pour agir en paiement.

Or, elle a déposé sa requête aux fins d'injonction de payer le 3 juin 2021.

Son action en paiement est donc prescrite, et le jugement sera confirmé.

 

* Autres demandes :

Le jugement sera confirmé en ce ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile.

La société Leasecom, qui succombe en appel, sera condamnée aux dépens de la présente procédure.

Elle sera en outre condamnée à payer à Maître S. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile, conformément aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement rendu le 29 août 2023 par le tribunal de proximité d'Annonay en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Leasecom aux dépens de la procédure d'appel,

Condamne la société Leasecom à payer à Maître Elsa S., la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE,                            LA PRÉSIDENTE,