CA ORLÉANS (ch. com.), 23 janvier 2025
- T. com. Orléans, 20 octobre 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 23581
CA ORLÉANS (ch. com.), 23 janvier 2025 : RG n° 23/00648 ; arrêt n° 21-25
Publication : Judilibre
Extrait : 1/ « La société Haz, qui sollicite l'annulation du contrat en cause dans le corps de ses écritures, ne formule aucune prétention en ce sens dans le dispositif [partie finale] de ses dernières conclusions alors que par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne peut statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Dès lors que ladite société conclut au rejet des demandes de la société NBB lease en faisant valoir qu'à le supposer existant, le contrat litigieux serait nul, il convient néanmoins de retenir que le moyen de nullité est présenté comme une défense au fond qu'il revient à la cour d'examiner. »
2/ « En l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat litigieux ne contient pas d'informations sur le droit de rétractation ni de formulaire destiné à faciliter l'exercice de ce droit. Si, lorsque les informations relatives au délai de rétractation n'ont pas été fournies au client, celui-ci dispose d'une prolongation de douze mois pour exercer la faculté de rétractation de quatorze jours qui lui est offerte, cette sanction n'est pas exclusive de la nullité du contrat (v. par ex. Civ. 1, 31 août 2022, n° 21-10.075).
Il reste qu'en application de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions des sections II, III et IV du chapitre I du titre II de ce code, en particulier la section VI sur le droit de rétractation, sont applicables aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Dès lors que la société Haz ne justifie ni même n'allègue employer moins de six salariés, l'exception de nullité tirée du non-respect des dispositions du code de la consommation précitées ne peut qu'être rejetée, sans même qu'il soit utile de vérifier que le contrat litigieux n'entre pas dans le champ de l'activité professionnelle principale de la société Haz. »
3/ « Au regard du prix d'achat TTC des matériels (9.700,21 euros) et du montant des loyers TTC convenus ([Immatriculation 4], soit 13.608 euros), la clause pénale présente en l'espèce un caractère manifestement abusif qui commande sa réduction à un montant qui, pour conserver à la clause son caractère comminatoire, sera fixé à la somme TTC de 8.500 euros, laquelle sera majorée des intérêts au taux légal augmenté d'un point seulement. »
COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
ARRÊT DU 23 JANVIER 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/00648. Arrêt n° 21-25. N° Portalis DBVN-V-B7H-GX2W. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 20 octobre 2022.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265286254412735
SARL HAZ
Représentée par son gérant en exercice, Monsieur X., domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 3], [Localité 5], Ayant pour avocat postulant Maître Mahamadou KANTE, membre de la SELARL BAUR et Associés, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Jean-Philippe BAUR, membre de la SELARL SELARL BAUR et Associés, avocat au barreau de PARIS, D'UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: [XXXXXXXXXX01]
SAS NBB LEASE FRANCE 1
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 2], [Localité 6], Ayant pour avocat Maître Arthur DA COSTA, membre de la SELARL MALTE AVOCATS, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Carolina CUTURI-ORTEGA, membre de la SCP JOLY CUTURI WOJAS REYNET- DYNAMIS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 2 mars 2023
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 31 octobre 2024
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 14 NOVEMBRE 2024, à 14 heures, Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, en charge du rapport, et Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, et Monsieur Damien DESFORGES, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de : Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller,
Greffier : Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT : Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 23 JANVIER 2025 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 23 juillet 2019, la SARL Haz, qui exerce une activité de restauration rapide sous la dénomination commerciale Allo pizza, a conclu avec la société NBB lease France 1 (NBB lease) un contrat de location d'une durée de 63 mois portant sur un système de caméra IP. Le loyer mensuel stipulé est de 180 euros HT.
Le 23 juillet 2019, la société Haz, représentée par son gérant, M. X., a signé un procès-verbal de réception du matériel loué, fourni par la société ADN sécurité.
Aucun loyer n'ayant été réglé, la société NBB lease a mis en demeure la société Haz de régulariser la situation dans un délai de 8 jours sous peine de résiliation anticipée du contrat de location, le 25 novembre 2019, puis a saisi le 11 mars 2020 le président du tribunal de commerce d'Orléans qui, par ordonnance du 12 mai 2020, a enjoint à la société Haz de payer à la société NBB lease la somme de 11.548,64 euros avec intérêts légaux à compter du 3 décembre 2019, la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, celle de 5,30 euros au titre des frais accessoires, outre les dépens.
La société Haz a formé opposition le 10 décembre 2020 et par jugement du 20 octobre 2022, dont il précise à son dispositif qu'il se substitue à une ordonnance du 12 novembre 2020, le tribunal de commerce d'Orléans a :
- déclaré recevable l'opposition de la société Haz,
- constaté l'existence d'un contrat entre la société NBB lease France 1 et la société Haz,
- constaté la résiliation du contrat de location «'à la même date'»,
- condamné la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme 12.610,64 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de 5 % au titre de l'indemnité de résiliation à compter du 3 décembre 2019,
- constaté l'existence d'une clause de réserve de propriété du matériel loué au profit de la société NBB Lease France l,
- ordonné la restitution du matériel par la société Haz au profit de la société NBB lease France 1 en bon état d'entretien et de fonctionnement, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir,
- autorisé la société NBB lease France l à appréhender le matériel en quelque lieu qu'il se trouve pour en prendre possession en ses lieu et place, les frais d'enlèvement et de transport incombant exclusivement à la SARL Haz,
- débouté la société Haz de sa demande de dommages et intérêts,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,
- condamné la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme de 2.000 euros au titre de 1'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Haz en tous les dépens, y compris les frais d'injonction de payer et les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 98,18 euros.
La société Haz a relevé appel de cette décision par déclaration du 2 mars 2023, en critiquant expressément toutes ses dispositions.
[*]
Dans ses dernières conclusions notifiées le 17 octobre 2024, la société Haz demande à la cour de :
- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la SARL Haz ;
Y faisant droit,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Orléans en date du 20 octobre 2023 en ce qu'il a :
* constaté l'existence d'un contrat entre la société NBB Lease France 1 et la société HAZ ;
* constaté la résiliation du contrat de location à la même date ;
* condamné la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme de 12'610,64 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de 5 % au titre de l'indemnité de résiliation à compter 3 décembre 2019 ;
* constaté l'existence d'une clause de réserve de propriété du matériel loué au profit de la société NBB lease France 1 ;
* ordonné la restitution du matériel par la société Haz au profit de la société NBB lease France 1 en bon état d'entretien et de fonctionnement, sous astreinte de 100 euros à compter de la signification du jugement à intervenir ;
* autorisé la société NBB lease FRANCE 1 à appréhender le matériel en quelque lieu qu'il se trouve pour en prendre possession en ses lieu et place, les frais d'enlèvement et de transport incombant exclusivement à la SARL Haz ;
* débouté la société Haz de sa demande de dommages et intérêts ;
* condamné la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamné la société Haz en tous les dépens, y compris les frais d'injonction de payer et les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 98,8 euros ;
Et statuant à nouveau,
Vu les articles 1604, 1372, 1199, 2276,1103 et 1240 du code civil,
Vu les articles L. 441-3 et L. 441-9 en son grand I du code de commerce,
Vu l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts,
Vu les articles L. 242-1, L. 221-3, L. 221-9 et L. 221-5 2° du code de la consommation,
Vu les pièces du dossier,
- déclarer la société SARL Haz recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
- constater que la société Haz a été victime d'une usurpation d'identité et d'escroquerie ;
- dire et juger qu'il n'existe pas de contrat entre la SARL Haz et la société NBB lease ;
- constater que le contrat en question n'a jamais été exécuté par la société NBB lease ;
En conséquence,
- débouter la SAS NBB lease de ses demandes de paiement à l'encontre de la SARL Haz au titre du contrat de location du 23 juillet 2019 ;
- rejeter la demande de la partie adverse fondée sur la restitution du supposé matériel loué ;
- rejeter la demande de la partie adverse fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
- dire que la demande de résolution du contrat de location est sans objet ;
A titre reconventionnel :
- condamner la société NBB lease à payer la somme de 5.000 euros au titre de dommages et intérêts,
En tout état de cause,
- condamner la société NBB lease à payer à la société la SARL Haz la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner « Monsieur société NBB lease » aux entiers dépens.
[*]
Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 août 2023, la société NBB lease demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré (en date du 20 octobre 2022, n° 2020004747) du tribunal de commerce d'Orléans en toutes ses dispositions, à savoir :
* déclare recevable l'opposition de la société Haz,
* constate l'existence d'un contrat entre la société NBB lease France 1 et la société Haz,
* constate la résiliation du contrat de location à la même date,
* condamne la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme 12.610,64 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de 5 % au titre de l'indemnité de résiliation à compter du 3 décembre 2019,
* constate l'existence d'une clause de réserve de propriété du matériel loué au profit de la société NBB lease France 1,
* ordonne la restitution du matériel par la société Haz au profit de la société NBB lease France 1 en bon état d'entretien et de fonctionnement, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir,
* autorise la société NBB lease FRANCE 1 à appréhender le matériel en quelque lieu qu'il se trouve pour en prendre possession en ses lieu et place, les frais d'enlèvement et de transport incombant exclusivement à la SARL Haz,
* déboute la société HAZ de sa demande de dommages et intérêts,
* rappelle que l'exécution provisoire est de droit,
* condamne la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamne la société Haz en tous les dépens, y compris les frais d'injonction de payer et les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 98,18 euros,
- débouter la société Haz de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
A titre subsidiaire : si par extraordinaire, la cour infirmait/réformait le jugement déféré et prononçait l'inexistence ou la nullité du contrat de location,
- ordonner à la SARL Haz de restituer à ses frais le matériel objet du contrat de location en bon état d'entretien et de fonctionnement, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir, exclusivement à la société NBB lease France 1 au lieu choisi par cette dernière, ou à toute personne désignée par la société NBB lease France 1 ;
- autoriser la société NBB lease France 1 ou toute personne que la société NBB lease France 1 se réserve le droit de désigner, à appréhender le matériel objet du contrat de location en quelque lieu qu'il se trouve pour en prendre possession en ses lieu et place, les frais d'enlèvement et de transport incombant exclusivement à la SARL Haz, au besoin avec le recours de la force publique ;
En tout état de cause,
- condamner la SARL Haz à payer la somme de 3'500 euros à la société NBB lease France 1 au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des frais de la procédure d'appel ;
- condamner la SARL Haz aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 31 octobre 2024, pour l'affaire être plaidée le 14 novembre suivant et mise en délibéré à ce jour.
A l'audience, après avoir observé que la société Haz contestait l'existence, sur le contrat litigieux, de son cachet et de la signature de son représentant légal, la cour a enjoint à la société NBB Lease France 1 de remettre au greffe, sous quinzaine, l'original de ce contrat.
L'intimée a remis l'original du contrat litigieux au greffe le 11 décembre 2024, dans le délai complémentaire qui lui avait été accordé en cours de délibéré pour permettre le désarchivage du contrat en cause.
La société Haz n'a formulé aucune observation sur le document original ainsi communiqué.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
La cour précise à titre liminaire que le jugement déféré ne se substitue pas à une ordonnance du 12 novembre 2020, mais à une ordonnance du 12 mai 2020 signifiée le 12 novembre suivant.
Sur l'existence du contrat litigieux :
La société Haz réitère en cause d'appel avoir été victime, selon ses termes, d'une « escroquerie en bande organisée qu'elle se réserve de dénoncer au procureur de la République », en expliquant qu'elle a signé un contrat de publicité pour la mise en place d'un site internet pour son activité de restauration et que les coordonnées bancaires qu'elle a alors fournies à la société WeekWork ont été transmises à d'autres sociétés pour souscrire des contrats dont elle n'a pas connaissance.
Cette situation explique que, de manière incohérente selon elle, le contrat de location produit par la société NBB lease ne porte pas la même numérotation que le contrat d'abonnement de sécurité, que le matériel ait été réceptionné le jour où le contrat a été signé, que la facture du fournisseur de la société NBB lease soit datée du lendemain de la prétendue livraison et que, contrairement aux prévisions du contrat produit, la société intimée n'ait pu se faire régler par prélèvement puisqu'elle n'a jamais donné aucun mandat de prélèvement SEPA.
L'appelante ajoute que son tampon et la signature de son gérant qui figurent sur le contrat ne constituent pas une preuve suffisante de ce contrat puisqu'il est « possible aujourd'hui, avec le développement des nouvelles technologies, de reproduire la signature et le tampon d'une société à travers des logiciels ».
Elle en déduit qu'à défaut de pouvoir se prévaloir d'un quelconque engagement contractuel de sa part, la société NBB lease devra être déboutée de ses demandes de paiement.
Aux termes de l'article 1372 du code civil, l'acte sous signature privée, reconnu par la partie à laquelle on l'oppose ou légalement tenu pour reconnu à son égard, fait foi entre ceux qui l'ont souscrit et à l'égard de leurs héritiers et ayants cause.
Au cas particulier la société Haz ne soutient pas que la signature de son gérant sur le contrat produit par la société NBB lease ne correspond pas à la signature de M. X., mais affirme que, comme le cachet qui figure sur ce contrat, cette signature ne serait qu'une reproduction crapuleuse de la signature de l'intéressé.
L'original du contrat, dont la cour a ordonné la production, permet de constater que le cachet de la société Haz a été apposé avec un tampon encreur et que la signature de M. X. a été portée sur ce cachet au moyen d'un stylo à bille bleu dont l'appui sur le papier a laissé au verso de la feuille carbone une empreinte qui n'apparaît pas compatible avec l'utilisation d'un procédé de reproduction.
Contrairement à ce qu'affirme la société Haz, il n'est pas incohérent, bien au contraire, que le contrat de location de matériel et le contrat de prestation de services ne portent pas la même numérotation alors qu'il s'agit de contrats distincts qui n'ont pas été conclus entre les mêmes personnes.
La société Haz soutient sans sérieux n'avoir donné aucun mandat de prélèvement SEPA à la société NBB lease alors que l'intimée produit le mandat de prélèvement en pièce 8 et il n'y a aucune incohérence à ce que le matériel ait été réceptionné le jour de la signature du contrat de location, ce qui est usuel en matière de location financière, comme le fait que la société NBB lease n'ait acquis le matériel auprès du fournisseur que le lendemain de la signature du contrat de location en cause.
C'est à raison, au regard de l'ensemble de ces éléments, que les premiers juges ont retenu que la société Haz n'établit pas avoir été victime d'escroquerie ou d'usurpation de son identité et que, de son côté, la société BMM lease rapporte la preuve de l'existence du contrat dont elle se prévaut.
Sur les exceptions de nullité :
La société Haz, qui sollicite l'annulation du contrat en cause dans le corps de ses écritures, ne formule aucune prétention en ce sens dans le dispositif [partie finale] de ses dernières conclusions alors que par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne peut statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Dès lors que ladite société conclut au rejet des demandes de la société NBB lease en faisant valoir qu'à le supposer existant, le contrat litigieux serait nul, il convient néanmoins de retenir que le moyen de nullité est présenté comme une défense au fond qu'il revient à la cour d'examiner.
Il résulte de l'application combinée des articles L. 221-5, L. L. 221-8 et L. 221-9 du code de la consommation, dont les dispositions figurent aux sections II et III auxquelles il est fait référence à l'article L. 221-3 précité, que préalablement à la conclusion du contrat hors établissement, tout fournisseur de produits ou services doit informer son client, lorsque le droit de rétractation existe, des conditions, du délai et des modalités d'exercice de ce droit de rétractation, que le fournisseur doit fournir à son client un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, lequel doit notamment comprendre les informations prévues à l'article L. 221-5, 7° sur le droit de rétractation et être accompagné du formulaire de rétractation type mentionné à l'article L. 221-5.
Il résulte par ailleurs de l'article L. 221-18 du code de la consommation que, hors les cas prévus à l'article L. 221-28, étrangers au présent litige, le client dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation conclu à distance.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat litigieux ne contient pas d'informations sur le droit de rétractation ni de formulaire destiné à faciliter l'exercice de ce droit.
Si, lorsque les informations relatives au délai de rétractation n'ont pas été fournies au client, celui-ci dispose d'une prolongation de douze mois pour exercer la faculté de rétractation de quatorze jours qui lui est offerte, cette sanction n'est pas exclusive de la nullité du contrat (v. par ex. Civ. 1, 31 août 2022, n° 21-10.075).
Il reste qu'en application de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions des sections II, III et IV du chapitre I du titre II de ce code, en particulier la section VI sur le droit de rétractation, sont applicables aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Dès lors que la société Haz ne justifie ni même n'allègue employer moins de six salariés, l'exception de nullité tirée du non-respect des dispositions du code de la consommation précitées ne peut qu'être rejetée, sans même qu'il soit utile de vérifier que le contrat litigieux n'entre pas dans le champ de l'activité professionnelle principale de la société Haz.
La société Haz ne peut pas plus utilement faire valoir que le contrat en cause encourrait la nullité au motif que l'accord de financement ne lui a pas été notifié, alors que l'article 2.4 des conditions générales de location prévoit que pour la perfection du contrat de location, l'accord de financement doit être notifié par le loueur soit auprès du locataire, soit auprès du fournisseur, et qu'au cas particulier la société NBB lease justifie avoir fait connaître son accord à la fois au fournisseur mais également à la société Haz à laquelle elle a adressé, dès le 25 juillet 2019, un échéancier valant facture de son contrat de location.
Sur l'exécution contestée du contrat litigieux par le loueur :
Au soutien de sa demande tendant à voir constater que la société NBB lease n'a pas exécuté le contrat litigieux -demande qui n'est assortie d'aucune demande de résolution du contrat en cause, mais soutenue pour s'opposer à la demande de paiement, la société Haz reproche d'abord à l'intimée d'avoir méconnu les dispositions de l'article L. 441-36 du code du commerce, des 2e et 3e alinéas du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts et de l'article L. 441-9 du code du commerce, en faisant valoir que la société NBB lease ne produit pas de facture et «'ne rapporte pas la preuve de la facture d'achat auprès de son fournisseur'».
L'appelante reproche ensuite à la société NBB lease d'avoir failli à son obligation de délivrance, en soutenant que le procès-verbal de réception ne peut justifier de la livraison du matériel alors que les caméras de surveillance en cause sont des matériels sophistiqués qui supposent une mise au point effective.
A hauteur d'appel, la société Haz offre en outre de démontrer qu'aucun contrat n'a pu être conclu avec la société NBB lease et qu'aucun matériel n'a été installé en faisant valoir qu'il ressort du constat d'huissier qu'elle a fait réaliser le 20 novembre 2023 que «'les caméras installées par la société Leasecom ne correspondent aucunement à l'installation et la location visée par la société Leasecom'»[sic].
S'il faut comprendre de cette argumentation que le constat dressé le 20 novembre 2023 par Maître W., commissaire de justice, montre que les caméras de surveillance installées dans le local exploité [Adresse 8] à [Localité 7] par la société Haz, sous l'enseigne Allo pizza, n'ont pas les caractéristiques de caméras ayant pu être fournies et installées par un professionnel, telle la société ADN sécurité qui, selon les productions, a fourni et installé les caméras qu'elle a vendues à la société NBB lease, laquelle les a données en location financière à la société Haz, ce constat dressé le 20 novembre 2023 ne peut démontrer que la société ADN sécurité n'aurait pas fourni et installé, le 23 juillet 2019, soit plus de quatre ans auparavant, les caméras de surveillance faisant l'objet du contrat litigieux.
Dès lors qu'à cette date du 23 juillet 2019, M. X. a signé un procès-verbal de livraison sur lequel il a apposé le cachet de la société Haz en reconnaissant expressément que les biens décrits au contrat de location avaient été intégralement livrés par la société ADN sécurité, que la formation de son personnel avait été correctement effectuée et que les biens, en parfait état, fonctionnaient parfaitement, la société HAZ échoue à démontrer que le matériel ne lui aurait jamais été livré ou n'aurait jamais été installé.
C'est sans davantage de sérieux que la société Haz reproche à l'intimée de ne pas produire la facture d'achat des caméras litigieuses alors que cette facture est communiquée en pièce 7 et que cette production ne lui a pas échappée puisqu'elle s'est emparée de la date de cette facture, on l'a dit, pour soutenir que le contrat litigieux n'existerait pas.
Rien ne justifie donc de constater que la société NBB lease n'aurait pas exécuté le contrat en cause.
Sur les demandes de paiement du loueur :
L'article 14-1 des conditions générales de location prévoit que « le loueur pourra résilier de plein droit le contrat de location, avec effet immédiat, sans intervention judiciaire et sans être redevable de quelque indemnité que ce soit, dans les cas suivants :
- après mise en demeure préalable,
a) si le locataire manque au paiement à l'échéance d'un seul terme du loyer ou plus généralement à l'une quelconque de ses obligations...[...] »
L'article 14-2 précise : « le locataire devra, dès la résiliation, restituer immédiatement les biens au loueur dans les conditions prévues à l'article 15 et lui verser au titre des loyers échus et impayés, la totalité des loyers TTC restant à échoir postérieurement à la résiliation, en réparation du préjudice subi. Cette somme sera majorée, de tous frais de réparation, transport, garde et autres que le loueur devrait payer à des tiers afin d'assurer la revente ou la relocation des équipements, d'une somme égale à 10 % de la valeur des loyers TTC restant dus à la date de résiliation, à titre d'indemnité de résiliation. Les sommes ci-dessus porteront intérêt au taux défini à l'article 5.7 et seront majorées des taxes en vigueur ».
L'article 5.7 auquel il est renvoyé prévoit que «'toute somme à la charge du locataire non payée à son échéance portera intérêt au profit du loueur au taux légal majoré de 5'% à compter de sa date d'exigibilité'».
En application de l'article 14-1, la société LBB lease s'est régulièrement prévalue de la clause résolutoire, le 3 décembre 2019, après avoir vainement mis en demeure la société Haz, par courrier recommandé du 25 novembre 2019, de lui régler les loyers restés impayés dans un délai de 8 jours sous peine de résiliation anticipée du contrat.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce chef, sauf à préciser que le contrat a été résilié à la date du 3 décembre 2019.
L'appelante fait valoir à raison que la stipulation de l'article 14-2 constitue une clause pénale.
Si la cour ne peut « anéantir » cette clause, comme le lui demande l'appelante, et que l'article 1231-5 du code civil prévoit à son alinéa 1er que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre, le 2e alinéa de cet article précise que néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Au regard du prix d'achat TTC des matériels (9.700,21 euros) et du montant des loyers TTC convenus ([Immatriculation 4], soit 13.608 euros), la clause pénale présente en l'espèce un caractère manifestement abusif qui commande sa réduction à un montant qui, pour conserver à la clause son caractère comminatoire, sera fixé à la somme TTC de 8.500 euros, laquelle sera majorée des intérêts au taux légal augmenté d'un point seulement.
Dès lors qu'il ne relève d'aucune production que la société Haz aurait souscrit une quelconque assurance ou adhéré à une assurance que lui aurait proposée la société LBB lease, la créance de cette dernière sera arrêtée ainsi qu'il suit :
- loyers TTC restés impayés : 864 euros
- indemnité de résiliation réduite : 8'500 euros
Soit un solde de 9'364 euros
Par infirmation du jugement entrepris, la société Haz sera dès lors condamnée à payer à la société NBB lease la somme sus-énoncée de 9.364 euros, majorée des intérêts au taux légal sur la somme de 864 euros à compter du 27 novembre 2019 et des intérêts au taux légal augmenté d'un point sur le surplus à compter du 12 novembre 2020, date de signification de l'ordonnance portant injonction de payer valant mise en demeure au sens du dernier alinéa de l'article 1231-5.
Sur la demande de restitution du matériel loué :
Il convient de préciser à titre liminaire que, contrairement à ce que soutient la société NBB lease et ce qu'ont retenu par erreur les premiers juges, l'article 3 des conditions générales ne contient aucune réserve de propriété, mais rappelle seulement, ce qui est conforme à la nature du contrat qui n'est pas un contrat de vente, mais un contrat de location, que ledit contrat « n'entraîne pas le transfert de propriété des biens au profit du locataire », qui en est seulement « le gardien détenteur ».
L'article 15 des mêmes conditions générales, auquel il est renvoyé par l'article 14-1 en cas de résiliation anticipée, prévoit que « en cas de cessation du contrat de location, pour quelque cause que ce soit, le locataire doit, à ses frais, restituer au loueur l'intégralité des biens loués au titre du contrat de location sur le site qui lui sera désigné par ce dernier, en bon état d'entretien et de fonctionnement ».
Au cas particulier, la société NBB lease ne justifie ni même n'allègue avoir indiqué à la société Haz en quel lieu les matériels loués devaient lui être restitués.
Dans ces circonstances, la société Haz sera tenue de restituer les matériels à la société NBB lease dans les 15 jours du courrier que cette dernière lui adressera sous pli recommandé avec accusé de réception pour l'informer du lieu auquel les caméras doivent être restituées et rien ne justifie d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Le jugement déféré sera dès lors infirmé sur ces chefs.
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts :
Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l'espèce, la société Haz sollicite la condamnation de la société NBB lease à lui régler à titre de dommages et intérêts, sur le fondement du texte précité, la somme de 5.000 euros, au motif que cette dernière aurait agi à son encontre sans fondement.
Compte tenu de la solution du litige, l'appelante ne peut qu'être déboutée, par confirmation du jugement entrepris, de cette demande reconventionnelle.
Sur les demandes accessoires :
Sans qu'il y ait lieu de revenir sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance, sur lesquels il a été justement statué par les premiers juges, les parties, qui succombent respectivement à hauteur d'appel, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, conserveront la charge des dépens de l'instance d'appel dont elles ont fait l'avance et seront déboutées, l'une et l'autre, de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société Haz à payer à la société NBB lease France 1 la somme de 12'610,64 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de 5'% au titre de l'indemnité de résiliation à compter du 3 décembre 2019, en ce qu'elle a constaté l'existence d'une clause de réserve de propriété du matériel loué au profit de la société NBB lease France 1 et en ce qu'elle a assorti l'injonction de restituer le matériel loué d'une astreinte,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
Condamne la société Haz à payer à la société NBB lease France 1, pour solde du contrat de location financière conclu le 23 juillet 2019, la somme de 9'364 euros, avec intérêts au taux légal sur la somme de 864 euros à compter du 27 novembre 2019 et avec intérêts au taux légal augmenté d'un point à compter du 12 novembre 2020 sur le surplus,
Rejette la demande de la société NBB lease France 1 tendant à voir constater que le contrat de location contiendrait une clause de réserve de propriété à son profit, mais rappelle en tant que de besoin que cette société est propriétaire des biens qu'elle avait donnés en location à la société Haz,
Déboute la société NBB lease France 1 de sa demande tendant à voir assortir l'injonction de restitution des matériels loués d'une astreinte,
Confirme la décision pour le surplus de ses dispositions critiquées, sauf à préciser que le contrat de location litigieux a été résilié le 3 décembre 2019 et que le jugement déféré ne se substitue pas à une ordonnance portant injonction de payer du 12 novembre 2020, mais à une ordonnance du 12 mai 2020 signifiée le 12 novembre suivant,
Y ajoutant,
Déboute la société Haz de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la société NBB lease France 1 formée sur le même fondement,
Laisse à chacune des parties la charge des dépens de l'instance d'appel dont elle a fait l'avance.
Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT