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CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 31 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 31 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 24/01743
Date : 31/01/2025
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 2/09/2021
Décision antérieure : T. com. Paris, 9 juin 2021 : RG n° J201900349
Décision antérieure :
  • T. com. Paris, 9 juin 2021 : RG n° J201900349
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23585

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 31 janvier 2025 : RG n° 24/01743

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « L'article L. 121-16-1 III issu de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 est devenu l'article L. 221-3 du code de la consommation à la faveur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. Le contrat ayant été conclu le 12 février 2015, ce sont donc les dispositions issues de la loi dite « Hamon » du 17 mars 2014 qui sont applicables au présent litige. »

2/ « La société Vini d'Oc verse aux débats une attestation de son expert-comptable datée du 4 mars 2020 attestant que la société Vini d'Oc n'a employé aucun salarié permanent avant le 1er août 2016 et que depuis cette date elle emploie un salarié permanent. Elle justifie donc qu'elle employait, à la date de signature du contrat, moins de six salariés.

Il est manifeste que l'appelante ne s'est déplacée ni au siège de la société PIB ni à celui de la société Xerox Financial Services, puisque c'est par l'intermédiaire du fournisseur PIB qui s'est rendu en son établissement que le contrat a été conclu. Démarchée par PIB, la société Vini d'Oc a signé le contrat au lieu de son siège social et de l'exercice de son activité professionnelle, à [Localité 11]. Le contrat a donc été donc conclu « hors établissement » selon la définition précitée. En outre, la location d'un copieur n'entre pas dans le champ de l'activité principale de la société Vini d'Oc qui est spécialisée dans la viticulture.

La société Vini d'Oc bénéficie donc des dispositions protectrices du code de la consommation et le jugement sera infirmé sur ce point. »

3/ « A cet égard, aucun des documents contractuels remis à la société Vini d'Oc, dont le contrat de location financière conclu avec la société XFS, ne comporte d'information sur le droit de rétractation ni de formulaire pour ce faire. La sanction prévue par l'article L. 121-18-1 étant d'ordre public, l'extension de la possibilité de rétractation à un délai de douze mois au lieu de quatorze jours - en application des articles L. 121-21 à L. 121-21-1 (devenus L. 221-18 à L. 221-20) du code de la consommation - ne peut y faire échec. Il en résulte que le « bon de commande location » conclu avec la société XFS le 12 février 2015 ne respecte pas les exigences issues des articles L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation, applicables en la cause, et encourt de ce fait la nullité. Il convient par conséquent d'infirmer le jugement en ses dispositions déférées et de prononcer la nullité du contrat de location financière intitulé « bon de commande location » conclu avec la société Xerox Financial Services le 12 février 2015.

Les loyers versés depuis l'origine par la société Vini d'Oc doivent donc lui être restitués par la société XFS. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Vini d'Oc de toutes ses demandes. Le matériel étant la propriété de la société XFS, il devra lui être restitué mais cette récupération se fera aux frais du loueur.

La demande de la société XFS tendant au règlement d'une indemnité de jouissance est fondée sur l'article 1352-3 du code civil qui n'est cependant pas applicable dans la mesure où ce texte est entré en vigueur le 1er octobre 2016, soit postérieurement à la conclusion du contrat. Il n'en demeure pas moins que la société Vini d'Oc a bénéficié de la jouissance du copieur loué et que la nullité faisant disparaître le contrat, celui-ci est réputé n'avoir jamais existé et les parties doivent être remises dans la situation initiale.

La société XFS réclame la somme de 20.160 euros correspondant à 21 trimestres à hauteur de 960 euros par trimestre. La société Vini d'Oc a reçu livraison du photocopieur le 3 mars 2015. La société PIB a fait l'objet d'une liquidation judiciaire suivant jugement du 13 septembre 2018 de sorte que la maintenance du copieur n'a plus été assurée et l'utilisation du bien compromise. Il en résulte que la société Vini d'Oc sera redevable d'une indemnité de jouissance calculée sur dix trimestres soit 9.600 euros. Elle sera condamnée à payer cette somme à la société XFS à titre d'indemnité de jouissance. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 31 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n°24/01743 (10 pages). N° Portalis 35L7-V-B7I-CIZUT. Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 juin 2021 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° J201900349.

 

APPELANTE :

SARL VINI D'OC

prise en la personne de ses représentants légaux [Adresse 7], [Localité 3], immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le numéro XXX, Représentée par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09

 

INTIMÉS :

Maître H. ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS PHOTOCOPIEURS IMPRESSION BUREAUTIQUE

[Adresse 2] [Adresse 8], [Adresse 6], DÉFAILLANT

SAS XEROX FINANCIAL SERVICES

prise en la personne de ses représentants légaux, [Adresse 1], [Localité 4], immatriculée au RCS de [Localité 10] sous le numéro YYY, Représentée par Maître Rozenn GUILLOUZO de la SELARL DBC, avocat au barreau de PARIS, toque : K0180

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 novembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Denis ARDISSON, Président de chambre, Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, conseillère, Madame CAROLINE GUILLEMAIN, conseillère, Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. Damien GOVINDARETTY

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 12 février 2015, la société Vini d'Oc, exploitation viticole près de [Localité 5] dont la gérante est Mme X., née le [date], a conclu avec la société Xerox Financial Services (XFS) un contrat de location financière intitulé « Bon de commande location » d'une durée de 21 trimestres portant sur un copieur TA (Triumph Adler) P-C 2665MFP moyennant un loyer mensuel de 320 euros avec facturation trimestrielle de 960 euros HT, après avoir été préalablement démarchée par la société Photocopieur Impression Bureautique (PIB), revendeur de matériel bureautique à [Localité 9].

Elle a également signé le même jour le bon de commande dudit photocopieur auprès de la société PIB, un avenant au bon de commande comportant la mention manuscrite « Le renouvellement à compter du 20ème mois comprend une nouvelle participation d'un montant de 6.400 euros HT, les kits copies mis à disposition du client et le solde du dossier en cours », un contrat de garantie et de maintenance copie et les « conditions spécifiques au contrat » mentionnant la participation au solde de 6.400 euros HT.

La société Vini d'Oc a signé le bon de livraison du matériel de la société PIB le 3 mars 2015.

Le matériel a été acquis par la société Xerox Financial Services auprès de la société Photocopieur Impression Bureautique (PIB) pour un montant de 19.094,98 euros TTC selon facture du 4 mars 2015.

La société Vini d'Oc a cessé de régler les loyers à compter du mois de décembre 2017 et a, par lettre recommandée du 29 décembre 2017, indiqué à la société XFS avoir été victime d'une escroquerie de la part de la société PIB, de multiples contrats de location ayant été signés par l'intermédiaire du commercial de la société PIB et la participation commerciale promise au titre du dernier contrat n'ayant pas été versée. La société Xerox Financial Services a répondu par lettre du 22 janvier 2018 être étrangère au litige l'opposant à la société PIB.

Suivant jugement rendu le 13 septembre 2018, le tribunal de commerce de Salon-de-Provence a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Photocopieur Impression Bureautique et désigné Maître H. en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er octobre 2018, la société XFS a mis en demeure la société Vini d'Oc de lui régler les loyers impayés, en vain. Elle a réitéré sa mise en demeure de payer par l'intermédiaire de son conseil par lettre du 11 décembre 2018.

Suivant exploit du 13 février 2019, la société Xerox Financial Services a fait assigner la société Vini d'Oc en paiement devant le tribunal de commerce de Paris.

Suivant exploit du 12 juin 2019, la société Vini d'Oc a fait assigner Maître H., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société PIB, devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 9 juin 2021, le tribunal de commerce de Paris a :

- joint les affaires enrôlées sous les numéros de RG 201901530 et 2019033838 sous le même numéro RG 2019000349,

 - dit que le contrat objet de l'espèce signé entre la société XFS et la société Vini d'Oc entre dans le cadre de son activité principale,

 - débouté la société Vini d'Oc de ses demandes de prononcé de la nullité du bon de commande, du contrat de garantie et de maintenance de la nullité du contrat de client référent signés en date du 12 février 2015 entre la société Vini d'Oc et la société PIB ainsi que du contrat de location longue durée régularisé entre la société Vini d'Oc et la société XFS,

 - débouté la société Vini d'Oc de sa demande de prononcé de la nullité du contrat de location financière pour manquement à ses obligations liées au code monétaire et financier,

 - débouté la société Vini d'Oc de sa demande de prononcé de la nullité des contrats pour cause de dol et en conséquence de la caducité du contrat de location financière et du surplus de sa demande,

 - débouté la société Vini d'Oc de sa demande d'appel en garantie de Maître H., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société PIB,

 - constaté la résiliation judiciaire aux torts de la société Vini d'Oc du contrat de location financière n° 28499 à la date du 10 octobre 2018,

 - condamné la société Vini d'Oc à payer à la société XFS la somme totale de 11.077,64 euros, majorée des intérêts calculés à compter du 10 octobre 2018, date de la résiliation du contrat, au taux de trois fois l'intérêt légal et ce jusqu'à parfait paiement,

 - condamné la société Vini d'Oc à payer à la société XFS la somme de 160 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,

 - débouté la société XFS de sa demande de restitution de matériel,

 - condamné la société Vini d'Oc à payer à la société XFS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

 - rejeté les demandes des parties, autres, plus amples ou contraires,

 - ordonné l'exécution provisoire du jugement,

 - condamné la société Vini d'Oc aux dépens.

La société Vini d'Oc a formé appel de ce jugement par déclaration du 16 août 2021 enregistrée le 2 septembre 2021.

[*]

Suivant conclusions signifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 11 février 2022, la société Xerox Financial Services a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident de radiation au visa de l'article 526 du code de procédure civile.

Suivant conclusions signifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 6 avril 2022, la société Vini d'Oc demandait au conseiller de la mise en état :

 - à titre principal, de lui donner acte de ce qu'elle vient de procéder à l'exécution du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris, et de rejeter en conséquence toute demande de radiation de l'affaire,

 - à titre subsidiaire, d'accorder avant de prononcer la radiation un délai de huitaine devant permettre à la société XFS de s'assurer de la réalité de cette exécution,

 - en toute hypothèse, de prendre acte de ce que la société Vini d'Oc s'en remet à justice quant à la charge d'une éventuelle indemnité au titre de l'article 700 et des dépens.

A l'audience sur incident du 7 avril 2022, seule la société XFS était représentée et maintenait sa demande de radiation, tout en exposant subsidiairement s'en rapporter quant à un éventuel sursis à statuer.

Suivant ordonnance rendue le 21 avril 2022, le conseiller de la mise en état a renvoyé l'examen de l'incident de radiation soulevé par la société XFS à l'audience du 12 mai 2022 à 13 heures et réservé les dépens de l'incident.

Suivant ordonnance du 9 juin 2022, le conseiller de la mise en état a :

- prononcé la radiation de l'instance enregistrée sous le numéro de RG 21/15627,

- dit que la réinscription de l'affaire au rôle de la cour pourra être sollicitée sur justification de l'exécution de la décision attaquée,

- condamné la société Vini d'Oc aux dépens.

Suivant conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 décembre 2023, la société Vini d'Oc a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle de la cour

L'affaire a été réinscrite le 26 janvier 2024 sous le nouveau numéro de R.G. 24/01743.

[*]

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 30 septembre 2024, la société Vini d'Oc demande à la cour, au visa des articles L. 221-3, L. 221-5, L. 221-9 et L.242-1 du code de la consommation et des articles 6, 1116, 1138 1139, 1147, 1152 al.2, 1183, 1231-5 al.2,1692, 1289 et 1984 du code civil, applicables à la cause :

- de recevoir la société Vini d'Oc en son appel, ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- de les déclarer bien fondées ;

a titre principal :

- Y faisant droit, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 9 juin 2021, en ce qu'il a refusé d'annuler sur le fondement de l'article L.442-1 du code de la consommation le contrat de location de longue durée conclu le 12 février 2015 entre d'une part la société Vini d'Oc et la société Xerox d'autre part, afin qu'en soient tirées toutes conséquences de droit ;

- Le réformant, d'annuler sur le fondement de l'article L.442-1 du code de la consommation le contrat de location de longue durée conclu le 12 février 2015 entre d'une part la société Vini d'Oc et la société Xerox d'autre part, afin qu'en soient tirées toutes conséquences de droit ;

- Tirant toutes conséquences de droit de cette nullité, de condamner la société Xerox à la restitution de tous les loyers perçus, et de juger l'absence de toute créance de la société Xerox fondée sur ce contrat ;

- de débouter en conséquence la société Xerox de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

a titre subsidiaire :

- Y faisant droit, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 9 juin 2021, en ce qu'il a refusé d'annuler pour dol sur le fondement de l'article 1116 du code civil le contrat de location de longue durée conclu le 12 février 2015 entre la société Vini d'Oc et la société Xerox d'autre part, afin qu'en soient tirées toutes conséquences de droit ;

- Le réformant, d'annuler sur le fondement de l'article 1116 du code civil le contrat de location de longue durée conclu le 12 février 2015 entre la société Vini d'Oc et la société Xerox d'autre part, afin qu'en soient tirées toutes conséquences de droit ;

- Tirant toutes les conséquences de droit de cette annulation, de constater l'absence de toute créance de la société Xerox ayant pour fondement ce contrat de location, et de la condamner à restituer l'ensemble des loyers perçus par elle ;

a titre très subsidiaire :

- Y faisant droit, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 9 juin 2021, en ce qu'il a refusé annuler pour dol sur le fondement de l'article L. 242-1 du code de la consommation, et sur le fondement de l'article 1137 du Code civil le « bon de commande » signé le 12 février 2015 en vue de la location du matériel entre la Sarl Vini d'Oc et la société P.I.B., d'autre part, et, du fait du lien d'interdépendance entre le bon de commande et le contrat de location financière, de prononcer par voie de conséquence, la caducité du contrat de location longue durée conclu le 12 février 2015 en vue de la location du matériel entre la Sarl Vini d'Oc et la société Xerox ;

- Le réformant, d'annuler pour dol sur le fondement de l'article L.242-1 du code de la consommation, et sur le fondement de l'article 1137 du code civil le « bon de commande » signé le 12 février 2015 en vue de la location du matériel entre la Sarl Vini d'Oc et la société P.I.B., d'autre part, et, du fait du lien d'interdépendance entre le bon de commande et le contrat de location financière, et de prononcer par voie de conséquence, la caducité du contrat de location longue durée conclu le 12 février 2015 en vue de la location du matériel entre la Sarl Vini d'Oc et la société Xerox ;

- Tirant toutes les conséquences de droit de cette annulation et de cette caducité, constater l'absence de toute créance de la société Xerox ayant pour fondement ce contrat de location, et la condamner à restituer l'ensemble des loyers perçus par elle ;

a titre infiniment subsidiaire :

- Y faisant droit, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 9 juin 2021, en ce qu'il a refusé de dire et juger que la clause de résiliation anticipée imposant le paiement de l'ensemble des loyers à échoir s'analyse en une clause pénale, et de dire et juger que les différentes sommes réclamée par Xerox à titre de clause pénale doivent être réduites au montant d'un euro dans la mesure où elles s'avèrent manifestement excessives ;

- Le réformant, de dire et juger que la clause de résiliation anticipée imposant le paiement de l'ensemble des loyers à échoir s'analyse en une clause pénale, et dire et juger que les différentes sommes réclamée par Xerox à titre de clause pénale doivent être réduites au montant d'un euro dans la mesure où elles s'avèrent manifestement excessives ;

en toute hypothèse :

- de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 9 juin 2021 en ce qu'il a dit et jugé que la restitution du matériel se fera à la diligence et aux frais des sociétés P.I.B. et Xerox ;

- de débouter la société Xerox de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires ;

- de condamner la société Xerox au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 26 septembre 2024, la société Xerox Financial Services demande à la cour, au visa des anciens articles 1134, 1135 et 1147 du code civil (dans leur version applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016), des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation :

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 9 juin 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

* débouté de sa demande de restitution du matériel ;

Et statuant à nouveau,

- de condamner la société Vini d'Oc à restituer à XFS le copieur TA PC 2665 n° de série LYQ4804594, objet du contrat de location financière n°28499, ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

- de se réserver la liquidation de l'astreinte ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour venait à considérer que le contrat de location serait nul,

- de débouter la société Vini d'Oc de sa demande de remboursement des loyers ;

- de condamner la société Vini d'Oc à régler à XFS une indemnité de jouissance de 20.160 euros

En tout état de cause,

- de condamner la société Vii d'Oc à payer à XFS la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la société Vini d'Oc aux entiers dépens.

[*]

Maître H., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Photocopieurs Impression Bureautique (PIB) n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel lui a été signifiée à l'initiative de la société Vini d'Oc par acte d'huissier du 4 novembre 2021. La déclaration d'appel lui a été de nouveau signifiée avec les premières conclusions d'appel par acte d'huissier du 15 novembre 2021.

[*]

La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 3 octobre 2024.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Sur l'application du code de la consommation :

La société Vini d'Oc explique avoir été démarchée par la société PIB en janvier 2015, février 2015 puis septembre 2016 en lui faisant signer plusieurs liasses de documents contractuels pour la fourniture, la maintenance et la location financière de différents copieurs. S'agissant du contrat n° 28499 signé avec la société Xerox Financial Services le 12 février 2015, elle revendique l'application du code de la consommation, expliquant remplir toutes les conditions requises par l'article L. 221-3 de ce code.

La société XFS soutient à l'inverse que la société Vini d'Oc ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation dans la mesure où elle a souscrit le contrat pour les besoins de son activité principale, pour l'aider dans ses tâches quotidiennes, sa gestion et ses démarches administratives.

L'article L. 121-16-1 III issu de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 est devenu l'article L. 221-3 du code de la consommation à la faveur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. Le contrat ayant été conclu le 12 février 2015, ce sont donc les dispositions issues de la loi dite « Hamon » du 17 mars 2014 qui sont applicables au présent litige.

Aux termes de l'article L. 121-16-1 III du code de la consommation dans sa version en vigueur du 14 juin 2014 au 8 août 2015 : « III.-Les sous-sections 2, 3, 6 et 7, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. ».

Le contrat hors établissement est ainsi défini par l'article L. 121-16 :

« 2° "Contrat hors établissement" tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur :

a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur ;

b) Ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ;

c) Ou pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur. ».

La société Vini d'Oc verse aux débats une attestation de son expert-comptable datée du 4 mars 2020 attestant que la société Vini d'Oc n'a employé aucun salarié permanent avant le 1er août 2016 et que depuis cette date elle emploie un salarié permanent. Elle justifie donc qu'elle employait, à la date de signature du contrat, moins de six salariés.

Il est manifeste que l'appelante ne s'est déplacée ni au siège de la société PIB ni à celui de la société Xerox Financial Services, puisque c'est par l'intermédiaire du fournisseur PIB qui s'est rendu en son établissement que le contrat a été conclu. Démarchée par PIB, la société Vini d'Oc a signé le contrat au lieu de son siège social et de l'exercice de son activité professionnelle, à [Localité 11]. Le contrat a donc été donc conclu « hors établissement » selon la définition précitée.

En outre, la location d'un copieur n'entre pas dans le champ de l'activité principale de la société Vini d'Oc qui est spécialisée dans la viticulture.

La société Vini d'Oc bénéficie donc des dispositions protectrices du code de la consommation et le jugement sera infirmé sur ce point.

 

Sur la demande de nullité pour violation du droit de la consommation :

La société Vini d'Oc soutient que le contrat de location financière méconnaît les règles du code de la consommation sur les contrats conclus hors établissement. Elle fait valoir que ce contrat est frappé de nullité puisqu'elle n'a pas été informée de l'existence de son droit de rétractation et il ne lui a pas été fourni le formulaire correspondant.

La société XFS fait valoir qu'une sanction spécifique est prévue par l'article L. 221-20 du code de la consommation. Elle soutient qu'en l'absence d'information sur le droit de rétractation et de communication d'un formulaire de rétractation, la sanction n'est pas la nullité du contrat mais la prorogation pendant douze mois du délai de rétractation de quatorze jours. A titre subsidiaire, en cas de nullité, elle invoque les dispositions de l'article 1352-3 du code civil sur la restitution des fruits, en faisant valoir que la société Vini d'Oc doit s'acquitter d'une indemnité de jouissance pour avoir utilisé le copieur pendant plusieurs années.

En vertu de l'article L. 121-17 (devenu L. 221-5 et L. 221-7 du même code) :

« I. - Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'État ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 121-21-5 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 121-21-8, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'État.

II. - Si le professionnel n'a pas respecté ses obligations d'information concernant les frais supplémentaires mentionné au I de l'article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n'est pas tenu au paiement de ces frais.

III. - La charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnés à la présente sous-section pèse sur le professionnel. »

En vertu de l'article L. 121-18 (devenu L. 221-8) : « Dans le cas d'un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l'article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible. ».

En vertu de l'article L. 121-18-1 (devenu L. 221-9) du même code : « Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l'article L. 121-17. ».

A cet égard, aucun des documents contractuels remis à la société Vini d'Oc, dont le contrat de location financière conclu avec la société XFS, ne comporte d'information sur le droit de rétractation ni de formulaire pour ce faire. La sanction prévue par l'article L. 121-18-1 étant d'ordre public, l'extension de la possibilité de rétractation à un délai de douze mois au lieu de quatorze jours - en application des articles L. 121-21 à L. 121-21-1 (devenus L. 221-18 à L. 221-20) du code de la consommation - ne peut y faire échec.

Il en résulte que le « bon de commande location » conclu avec la société XFS le 12 février 2015 ne respecte pas les exigences issues des articles L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation, applicables en la cause, et encourt de ce fait la nullité.

Il convient par conséquent d'infirmer le jugement en ses dispositions déférées et de prononcer la nullité du contrat de location financière intitulé « bon de commande location » conclu avec la société Xerox Financial Services le 12 février 2015.

Les loyers versés depuis l'origine par la société Vini d'Oc doivent donc lui être restitués par la société XFS.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Vini d'Oc de toutes ses demandes.

Le matériel étant la propriété de la société XFS, il devra lui être restitué mais cette récupération se fera aux frais du loueur.

La demande de la société XFS tendant au règlement d'une indemnité de jouissance est fondée sur l'article 1352-3 du code civil qui n'est cependant pas applicable dans la mesure où ce texte est entré en vigueur le 1er octobre 2016, soit postérieurement à la conclusion du contrat. Il n'en demeure pas moins que la société Vini d'Oc a bénéficié de la jouissance du copieur loué et que la nullité faisant disparaître le contrat, celui-ci est réputé n'avoir jamais existé et les parties doivent être remises dans la situation initiale.

La société XFS réclame la somme de 20.160 euros correspondant à 21 trimestres à hauteur de 960 euros par trimestre. La société Vini d'Oc a reçu livraison du photocopieur le 3 mars 2015. La société PIB a fait l'objet d'une liquidation judiciaire suivant jugement du 13 septembre 2018 de sorte que la maintenance du copieur n'a plus été assurée et l'utilisation du bien compromise. Il en résulte que la société Vini d'Oc sera redevable d'une indemnité de jouissance calculée sur dix trimestres soit 9.600 euros. Elle sera condamnée à payer cette somme à la société XFS à titre d'indemnité de jouissance.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société XFS succombant en principal à l'action, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. La société XFS sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Il apparaît en outre équitable de la condamner à payer à la société Vini d'Oc la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement en ses dispositions déférées sauf en ce qu'il a débouté la société Xerox Financial Services de sa demande de restitution de matériel ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

PRONONCE la nullité du contrat de location financière intitulé « bon de commande location » n° 28499 conclu entre la société Vini d'Oc et la société Xerox Financial Services le 12 février 2015 ;

CONDAMNE la société Xerox Financial Services à restituer à la société Vini d'Oc tous les loyers versés depuis l'origine ;

CONDAMNE la société Vini d'Oc à payer à la société Xerox Financial Services la somme de 9.600 euros à titre d'indemnité de jouissance ;

DEBOUTE la société Xerox Financial Services de toutes ses autres demandes ;

DIT que la société Vini d'Oc devra tenir le matériel objet du contrat n° 28499 à la disposition de la société Xerox Financial Services qui devra le récupérer à ses frais ;

CONDAMNE la société Xerox Financial Services aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE la société Xerox Financial Services à payer à la société Vini d'Oc la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT