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TJ BORDEAUX (pôle prot.), 17 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : TJ BORDEAUX (pôle prot.), 17 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : T. jud. Bordeaux
Demande : 24/00765
Date : 17/01/2025
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 8/03/2024
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23642

TJ BORDEAUX (pôle prot.), 17 janvier 2025 : RG n° 24/00765 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Les dispositions de l'article L. 111-1, L. 121-1 et L. 221-1 du Code de la Consommation visent exclusivement les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales. Or en l'espèce, il découle du courriel en date du 27 septembre 2022 de Madame X. que l'acceptation du devis sur lequel la société OCIS fonde ses demandes, émane de la SCI KIMA, engagée par sa gérante, ce qui a été accepté par la société OCIS qui en conformité avec sa demande a établi la facture en date du 28 octobre 2022. Dès lors, la SCI KIMA, personne morale, ne peut invoquer les dispositions précitées qui ne lui sont pas applicables.

Au surplus le contrat a été conclu entre deux sociétés et a pour objet une prestation d'étude technique et production de plans liés au projet des constructions de maisons individuelles. Il ressort des faits portés à la connaissance du tribunal que la SCI KIMA a eu pour activité l'acquisition de terrains à bâtir, la construction de maisons, la conclusion du contrat avec la société P.I.A ayant pour objet les lots terrassement et maçonnerie. En conséquence, le contrat litigieux passé avec la société OCIS entre dans le champ de l'activité principale de la SCI KIMA. La SCI KIMA ne peut donc pas se prévaloir de la qualité de non professionnel pour voir appliquer les dispositions du code de la consommation.

Par conséquent il n'y a pas lieu de prononcer la nullité du contrat en raison du non-respect des dispositions du code de la consommation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

PÔLE PROTECTION ET PROXIMITÉ

JUGEMENT DU 17 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/00765. N° Portalis DBX6-W-B7I-Y5FI. 54Z.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE : Madame Edith VIDALIE-TAUZIA, Magistrat

GREFFIER : Madame Françoise SAHORES

 

DEMANDERESSE :

SARL OCIS

RCS [Localité 7] XXX, [Adresse 5], [Localité 2], représentée par Maître Ingrid THOMAS, Avocat au barreau de BORDEAUX

 

DÉFENDEURS :

Monsieur X.

[Adresse 6], [Localité 3]

SCI KIMA

RCS [Localité 7] YYY, [Adresse 4], [Localité 3]

Madame Y. épouse X.

[Adresse 6], [Localité 3]

représentés par Maître Baptiste MAIXANT, Avocat au barreau de BORDEAUX

 

DÉBATS : Audience publique en date du 18 novembre 2024

PROCÉDURE : Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Faits et procédure :

La société civile immobilière dénommée KIMA (SCI KIMA) a procédé à l'acquisition de deux terrains à bâtir sur la commune de [ville L.] en Gironde. Dans le cadre de son projet de construction de deux maisons individuelles, la SCI KIMA, représentée par sa gérante et associée Madame X., a confié le lot terrassement et maçonnerie à la société PATRIMOINE IMMOBILIER AQUITAINE (P.I.A.).

A compter du 27 avril 2022, la société P.I.A. a contacté puis échangé par courriels directement avec la société dénommée OCIS, représentée par son gérant et associé Monsieur Z., en vue de faire établir un devis ayant pour objet la réalisation de plans d'exécution techniques des fondations et l'étude d'une solution de micropieux.

Après établissement d'un premier devis transmis le 12 mai 2022 à la société PIA le 29 juillet 2022, la société OCIS a adressé à la société PIA un nouveau devis d'un montant forfaitaire de 8.100,00 euros correspondant à la réalisation de plusieurs prestations distinctes dont des plans Dossier des Ouvrages Exécutés (DOE) pour les deux maisons individuelles et le soutènement intermédiaire, devis transmis à la SCI KIMA par la société PIA.

Le 27 septembre 2022 Madame X., en sa qualité de représentante de la société KIMA, a adressé le devis signé par ses soins directement à la société OCIS et précisé que la facture devra être établie au nom de la SCI KIMA.

Le 28 octobre 2022, la société OCIS a adressé par mail à la SCI KIMA la facture correspondant au montant forfaitaire total d'un montant de 8.100 euros.

Le 31 janvier 2023 par mail adressé à la société OCIS, Monsieur et Madame X. au nom de la société KIMA, ont fait connaître leur refus de procéder au règlement de la facture de 8.100,00 euros.

Par courriel du 21 mars 2023, la société OCIS a mis en demeure la SCI KIMA d'avoir à procéder au règlement de la facture d'un montant de 8.100 euros.

Cette mise en demeure étant restée vaine, c'est dans ces conditions que la société OCIS, par exploit de commissaire de justice en date du 16 mai 2023, a assigné Monsieur X., Madame X. et la société civile immobilière dénommée KIMA en référé devant le Tribunal Judiciaire de Bordeaux. Par ordonnance en date du 15 décembre 2023, il a été jugé qu'il n'y avait pas lieu à référé et les parties ont été renvoyées à mieux se pouvoir au fond.

Par acte introductif d'instance du 8 mars 2024, la société OCIS, a fait assigner Monsieur X., Madame X. et la société civile immobilière dénommée KIMA devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX aux fins de faire déclarer recevable et bien fondée son action, condamner la SCI KIMA, Monsieur X., Madame X. au paiement provisionnel de la facture d'un montant de 8.100 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 mars 2023 et de la somme de 2.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

A l'audience du 29 avril 2024, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 04 septembre 2024 dans le cadre d'un calendrier de procédure, puis son examen a été reporté au 2 octobre 2024 puis au 18 novembre 2024, au cours de laquelle elle a été retenue.

 

Prétentions et moyens :

A l'audience du 18 novembre 2024, la société OCIS, représentée par son conseil, demande au tribunal, sur le fondement des dispositions de l'article 1231-1 du Code Civil, de :

- Déclarer recevable et bien fondée l'action de la société OCIS,

- Débouter la SCI KIMA, Monsieur X., Madame X. de toutes demandes, fins et prétentions,

- Condamner la SCI KIMA, Monsieur X., Madame X. au paiement de la somme de 8.100,00 euros en paiement de la facture en date du 28 octobre 2022, somme productible d'intérêts à taux légal à compter de la mise en demeure du 21 mars 2023,

- Condamner la SCI KIMA, Monsieur X., Madame X. au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile outre les dépens.

Elle observe s'agissant des dispositions des articles L. 111-1, L. 111-5, et L. 121-1 du code de la consommation qu'il n'est pas démontré en quoi en présence d'un devis signé par le maître de l'ouvrage elle aurait manqué à ses obligations et que la preuve d'un vice du consentement au titre du dol n'est pas rapportée par les époux X. A ce titre, elle explique qu'ils n'ont pas pris en compte les conclusions de l'étude de sol qui indiquaient que les constructions nécessitaient la mise en place de micropieux, qu'elle a été expressément consultée pour étudier la réalisation desdits micropieux, que leur consentement n'a pas été extirpé par dol, et qu'ils ont fait appel à un autre prestataire pour une réalisation à moindre coût. Elle soutient que le contrat d'étude technique est valablement formé et ne saurait être annulé pour vice du consentement.

Enfin, elle fait valoir que le contrat de prestation a été exécuté et en conséquence qu'elle est fondée à exiger le règlement de la facture d'un montant de 8.100,00 euros.

[*]

En défense, la SCI KIMA, Monsieur X. et Madame X. demandent au tribunal, sur le fondement des dispositions des articles 1101 et suivants du code civil, l'article L. 111-1, L. 121-1, L.2 21-1 et suivants du Code de la Consommation, et des dispositions des articles 6, 9 et 700 du Code de Procédure Civile, de :

- Déclarer irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société civile immobilière KIMA et la mettre hors de cause,

- Ordonner la nullité du contrat conclu le 27 septembre 2022 entre la société OCIS et les époux X.,

- Débouter en conséquence la société OCIS de l'ensemble de ses demandes, fins, prétentions en ce qu'elles sont mal dirigées à l'encontre de la société KIMA et qu'elles se heurtent en toute hypothèse à des contestations sérieuses,

- Condamner la société OCIS à verser aux époux X. et à la société KIMA la somme de 2.400 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Ils font valoir que la demande de la société OCIS est irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SCI KIMA puisqu'aucun contrat n'a été signé entre la société OCIS et la société KIMA. Ils observent que le devis a été libellé au nom de Madame X.

Ils indiquent que des échanges de courriels ayant pour objet la mise en place de la prestation d'étude et plans sont intervenus uniquement entre la société PIA et la société OCIS, qu'ils n'ont jamais été mis en copie de ces courriels, et en conséquence, que seule la société P.I.A. est engagée envers la société OCIS.

Ils soutiennent que les sociétés P.I.A. et OCIS se sont concertées préalablement afin d'obtenir la signature du devis par Madame X. dont le consentement a été vicié par des pratiques déloyales.

Ils font valoir que le contrat est nul pour méconnaissance des dispositions du code de la consommation, à savoir l'absence de formulaire de rétractation et en raison de pratiques commerciales qui ont eu lieu obligeant les époux X. à signer le devis sans réflexion préalable, sans avoir les éléments déterminants et sans leur laisser la possibilité de se rétracter.

Enfin, ils expliquent que le devis prévoyait plusieurs prestations dont les plans DOE de fin de chantier, que la société OCIS ne démontre pas avoir exécuté l'intégralité de sa mission et en conséquence, que la demande de règlement de l'intégralité de la facture émise est injustifiée.

[*]

La décision a été mise en délibéré au 17 janvier 2025.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1°/ Sur la recevabilité des demandes :

L'article 122 du Code de procédure civile dispose que : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

Selon l'article 71 du même code, « constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire ».

L'article 32 du même code dispose que : « Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ».

Selon l'article 1849 alinéa 1 du code civil : « Dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social. »

En l'espèce, il n'est pas discuté que la SCI KIMA, qui conclut à l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre, est une personne morale valablement constituée pourvue de la personnalité morale et de la capacité d'agir et de défendre en justice, qu'elle est propriétaire de terrains à bâtir sur lesquels la construction de deux maisons individuelles a été envisagée, et que les associés de ladite SCI KIMA ont confié le lot terrassement et fondation à la société P.I.A.

La demanderesse produit un courriel en date du 27 septembre 2022 de Madame X., laquelle a ainsi transmis à la société OCIS le devis initialement adressé par la société OCIS à la société PIA d'un montant forfaitaire de 8.100,00 euros correspondant à la réalisation de plusieurs prestations distinctes dont des plans Dossier des Ouvrages Exécutés (DOE) pour les deux maisons individuelles et le soutènement intermédiaire, ledit devis étant accepté et signé par Madame X. Celle-ci dans son courriel a précisé que la facture devra être établie au nom de la SCI KIMA.

Ce faisant, elle a agi en sa qualité de gérante de ladite société et a engagé la société par la signature de ce devis contractualisant ainsi ses relations avec la société OCIS.

En conséquence, le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande contre la SCI KIMA ne saurait être retenu, puisque celle-ci a la capacité de se défendre en justice et que la demanderesse justifie d'un intérêt à agir contre elle.

Au demeurant le moyen invoqué constitue en définitive une défense au fond, la SCI KIMA estimant ne pas être engagée à titre personnel.

Dans ces conditions, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'action de la société OCIS à l'encontre de la société sera écartée.

 

2°/ Sur la demande d'annulation du contrat sur le fondement des dispositions du code de la consommation :

À titre préalable, il convient de rappeler les conditions d'applicabilité des dispositions du Code de la Consommation.

Aux termes de l'article liminaire du Code de la consommation : « Pour l'application du présent code, on entend par :

1° Consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;

2° Non-professionnel : toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ;

3° Professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel ; (…). »

Aux termes de l'article L. 111-1 du code de la consommation, « Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

Aux termes de l'article L.121-1 du code de la consommation :

" Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.

Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.

Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7. »

Aux termes de l'article L. 221-1 du code de la consommation :

« I. - Pour l'application du présent titre, sont considérés comme :

1° Contrat à distance : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ;

2° Contrat hors établissement : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur :

a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur ;

b) Ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ;

c) Ou pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur.

II. - Les dispositions du présent titre s'appliquent aux contrats portant sur la vente d'un ou plusieurs biens, au sens de l'article 528 du code civil, et au contrat en vertu duquel le professionnel fournit ou s'engage à fournir un service au consommateur en contrepartie duquel le consommateur en paie ou s'engage à en payer le prix. Le contrat ayant pour objet à la fois le transfert de propriété d'un bien et la fourniture d'une prestation de services, y compris la prestation de livraison de biens, est assimilée à un contrat de vente.

III. - Les dispositions du présent titre s'appliquent également aux contrats par lesquels le professionnel fournit ou s'engage à fournir au consommateur un contenu numérique sans support matériel ou un service numérique et pour lesquels le consommateur lui fournit ou s'engage à lui fournir des données à caractère personnel, sauf lorsque ces données sont exclusivement traitées par lui pour fournir le contenu numérique sans support matériel ou le service numérique, ou lui permettre de remplir les obligations légales qui lui incombent. »

Les dispositions de l'article L. 111-1, L. 121-1 et L. 221-1 du Code de la Consommation visent exclusivement les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales.

Or en l'espèce, il découle du courriel en date du 27 septembre 2022 de Madame X. que l'acceptation du devis sur lequel la société OCIS fonde ses demandes, émane de la SCI KIMA, engagée par sa gérante, ce qui a été accepté par la société OCIS qui en conformité avec sa demande a établi la facture en date du 28 octobre 2022.

Dès lors, la SCI KIMA, personne morale, ne peut invoquer les dispositions précitées qui ne lui sont pas applicables.

Au surplus le contrat a été conclu entre deux sociétés et a pour objet une prestation d'étude technique et production de plans liés au projet des constructions de maisons individuelles. Il ressort des faits portés à la connaissance du tribunal que la SCI KIMA a eu pour activité l'acquisition de terrains à bâtir, la construction de maisons, la conclusion du contrat avec la société P.I.A ayant pour objet les lots terrassement et maçonnerie. En conséquence, le contrat litigieux passé avec la société OCIS entre dans le champ de l'activité principale de la SCI KIMA.

La SCI KIMA ne peut donc pas se prévaloir de la qualité de non professionnel pour voir appliquer les dispositions du code de la consommation.

Par conséquent il n'y a pas lieu de prononcer la nullité du contrat en raison du non-respect des dispositions du code de la consommation.

 

3°/ Sur la demande de nullité du contrat pour vices du consentement :

L'article 1130 du code civil prévoit que l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes et l'article 1137 dispose que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges et que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

L'article 1139 du même code prévoit que l'erreur qui résulte d'un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu'elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat.

En l'espèce, les époux X. arguent de la nullité du contrat pour avoir été manipulés par des entreprises qui ont manifestement l'habitude de travailler en concertation et qui par leurs pratiques commerciales les ont contraints à contracter et arguent avoir été trompés sur la nécessité de recourir à la solution la plus onéreuse des micro-pieux alors qu'existait une solution plus économique. Ils invoquent également l'étude de sol géotechnique dite G2 qui était annexée à l'acte authentique d'achat des terrains selon laquelle la solution des micro-pieux n'était pas une solution préconisée.

Concernant les liens entre la société P.I.A. et la société OCIS, si des relations partenariales résultent des pièces produites, rien ne permet d'établir une collusion frauduleuse entre elles du seul fait que les gérants des deux sociétés se connaissent, d'autant qu'il ressort des écritures que lesdites sociétés n'ont aucun lien capitalistique, financier ou juridique.

Concernant les pratiques commerciales ayant amené à la signature du devis d'étude, il résulte des conclusions et pièces des époux X. que ces derniers disposaient de l'étude géotechnique G2, qui selon eux démontrent l'inopportunité de la mise en place de micropieux, puisqu'elle était annexée à l'acte authentique d'achat des terrains, et était par suite en leur possession avant la signature du devis litigieux. Ils étaient donc en mesure d'examiner ce devis au regard de ladite étude, étant observé que le devis a été transmis par la société OCIS par courriel du 29 juillet 2022, et qu'il n'a été accepté que le 27 septembre 2022, ce qui leur a permis de bénéficier d'un délai substantiel avant que la gérante le signe et l'approuve, sans qu'aucune pression ne soit avérée en vue de l'y contraindre.

De plus, suite à la signature du devis, Mme X. a adressé le 29 septembre 2022 à la société OCIS les plans dressés par l'architecte du projet afin qu'elle puisse exécuter sa prestation d'étude. Mme X. a aussi sollicité le 30 septembre 2022, en réponse au courriel du même jour du gérant de la société OCIS qui lui indiquait qu'il lançait les études en début de semaine prochaine, l'envoi de l'assurance décennale sollicitée par la banque pour garantie du prêt, ce qui tend à conforter l'absence de toute pression et la capacité de la gérante à appréhender la situation.

En conséquence, le dol n'est nullement démontré par la SCI KIMA et les époux X.

La SCI KIMA ne prouve pas davantage qu'elle ait commis une erreur sur les qualités essentielles et déterminantes du contrat en s'engageant par le contrat litigieux.

Les vices du consentement allégués ne sont donc pas démontrés, la demande d'annulation du contrat sur ce fondement sera rejetée.

 

4°) Sur la demande en paiement de la prestation :

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être exécutés de bonne foi.

Aux termes de l'article 1217 du même code, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté ou l'a été imparfaitement, peut refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation, poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation, provoquer la résolution du contrat, demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Il est constant, d'une part, que l'interdépendance des obligations réciproques résultant d'un contrat synallagmatique permet à l'une des parties de ne pas exécuter son obligation lorsque l'autre n'exécute pas la sienne et, d'autre part, qu'il incombe à la juridiction saisie de vérifier que l'inexécution de ses obligations par une partie au contrat est proportionnée à l'inexécution par son cocontractant de ses propres obligations et, enfin qu'il relève du pouvoir souverain des juges du fond d'apprécier la mesure dans laquelle l'inexécution de ses obligations par l'une des parties est de nature à affranchir totalement l'autre partie de ses obligations corrélatives.

Il est établi par l'historique des pièces que le 7 octobre 2022, la société OCIS a procédé à l'exécution de sa prestation en adressant par mail à la SCI KIMA les plans prévus au devis signé par cette dernière. La prestation prévue au devis intitulée "DOE" ne pouvait être réalisée qu'à compter de l'achèvement des travaux de construction.

Or, la SCI KIMA, par sa rupture des liens contractuels, a fait obstacle à la réalisation de cette prestation finale mettant ainsi la société OCIS dans l'impossibilité de procéder à l'exécution intégrale de la prestation prévue initialement.

Dans ces conditions la société OCIS est fondée à obtenir paiement de l'intégralité du coût de la prestation, soit la somme de 8.100 euros.

Il ressort en outre de l'analyse qui précède que la SCI KIMA a été engagée par la signature du devis par sa gérante et que la société OCIS l'a agréée en établissant la facture au nom de la SCI KIMA conformément à la demande de Mme X.

Dès lors, il convient de condamner la SCI KIMA au règlement de la somme de 8.100,00 euros.

La demanderesse ne précise pas sur quel fondement elle entend obtenir la condamnation conjointe des époux X., qui ne se sont pas engagés à titre personnel, ne peuvent donc être tenus personnellement au paiement de la facture, ni voir engager leur responsabilité sur un fondement contractuel. Dès lors il convient de rejeter les demandes dirigées à leur encontre.

L'article 1231-6 du code civil prévoit que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

La somme de 8.100 euros portera donc intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2023, date de la mise en demeure.

 

5°) Sur les dépens :

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie qui succombe est condamnée aux dépens. Ceux-ci seront donc mis à la charge de la SCI KIMA.

 

6°) Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Aux termes de l'article 700 du même code, le juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, la somme qu'il détermine en tenant compte de l'équité.

En l'espèce, la SCI KIMA, condamnée au paiement, sera tenue au paiement d'une indemnité de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, en premier ressort,

DÉCLARE recevable la société OCIS en son action à l'encontre de la SCI KIMA ;

DÉBOUTE la SCI KIMA de ses demandes tendant à l'annulation du contrat passé avec la société OCIS ;

DÉBOUTE la société OCIS en ses demandes à l'encontre de Monsieur X. et Madame X. ;

CONDAMNE la SCI KIMA à payer à la société OCIS la somme de 8.100,00 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2023,

CONDAMNE la SCI KIMA aux dépens ;

CONDAMNE la SCI KIMA à payer à la société OCIS la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONSTATE l'exécution provisoire de droit de la décision.

Ainsi jugé les jour, mois et an susdits.

LA GREFFIÈRE                                         LA PRÉSIDENTE