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TJ NÎMES (1re ch. civ. – Jme), 20 février 2025

Nature : Décision
Titre : TJ NÎMES (1re ch. civ. – Jme), 20 février 2025
Pays : France
Juridiction : T. jud. Nîmes
Demande : 23/04802
Date : 20/02/2025
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 19/09/2023
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23652

TJ NÎMES (1re ch. civ. – Jme), 20 février 2025 : RG n° 23/04802 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « En l’espèce, Mme X. soutient exercer la profession d’agent immobilier et être inscrite au registre du commerce et des sociétés. Elle produit un extrait des inscriptions du RCS au 28 février 2024 dont il résulte qu’elle est immatriculée au RCS pour une activité de « formation continue d’adultes », activité libérale non réglementée. Elle ne démontre donc pas être commerçante. L’exception d’incompétence matérielle au profit du tribunal de commerce sera rejetée. »

2/ « L’ancien article L. 137-2 devenu L. 218-2 du code de la consommation dispose que : « L’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ». L’article L. 121-16-1 III (devenu L. 221-3 à la suite de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016) dispose : « Les dispositions des sections 2, 3 et 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salarié employés est inférieur ou égal à cinq ».

Les dispositions de l’article L. 121-16-1 III ne sont pas applicables en l’espèce car il n’est ni allégué, ni établi que le contrat de location ait été conclu hors établissement.

Constitue un consommateur au sens de l’article L. 137-2 ancien du code de la consommation toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle. En l’espèce, il est manifeste que Mme X. a agi pour les besoins de son activité professionnelle puisqu’elle a mentionné qu’elle signait en qualité de « gérante » et a fait état de sa qualité de « conseiller immobilier ». Par conséquent, elle ne peut pas être qualifiée de consommatrice et le délai de l’article ancien L. 137-2 du code de la consommation ne lui est pas applicable. La fin de non-recevoir tirée de la prescription du droit de la consommation sera rejetée. »

3/ « Par conséquent, une assignation non enrôlée n’a pas de caractère interruptif de prescription, comme c’est le cas en l’espèce de celle dont fait état la SAS Locam. Il s’ensuit que l’assignation délivrée par la demanderesse le 19 septembre 2023 est tardive et l’action en paiement prescrite. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NÎMES

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN L’ÉTAT DU 20 FÉVRIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/04802. N° Portalis DBX2-W-B7H-KEME.

 

SAS LOCAM

SAS au capital de XXX euros, inscrite au RCS sous n° YYY (B ZZZ), prise en la personne de son représentant légal et dont le siège social est [Adresse 6] [Localité 5], dont le siège social est sis Chez Maître BIGONNET Jean-Pierre - [Adresse 4] - [Localité 2], représentée par Maître Jean-pierre BIGONNET, avocat au barreau d’ALES, avocat postulant, et par Maître Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

 

à :

Mme X. née Y.

Née le [date] à [Localité 7], de nationalité […], demeurant [Adresse 1] - [Localité 3], exploitant sous le n° de SIRET WWW, représentée par la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de NIMES, avocats plaidant

 

Nous, Nina MILESI, Vice-Présidente, agissant comme juge de la mise en état, assisté de Aurélie VIALLE, greffière,

Après débats à l’audience du 16 janvier 2025 avons rendu l’ordonnance suivante :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 21 avril 2016, Mme X. a conclu auprès de la SAS Locam un contrat de location portant sur un photocopieur pour une durée de 21 trimestres dont le loyer trimestriel était de 882 euros TTC.

Le 15 mars 2018, Mme X. a été mise en demeure de régler deux loyers impayés d’un montant de 2.104,98 euros. Aucun paiement n’ayant été effectué, la déchéance du terme a été prononcée.

Une assignation par la SAS Locam a été délivrée le 9 septembre 2019 à Mme X. Cette assignation n’a pas été enrôlée.

Par acte de commissaire de justice du 19 septembre 2023, la SAS Locam a fait assigner Mme X. devant le tribunal judiciaire de Nîmes aux fins d’obtenir sa condamnation à payer une somme de 15.523,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2018, à restituer le matériel sous astreinte et à payer une indemnité de procédure de 700 euros.

Par des conclusions notifiées le 29 février 2024, Mme X. a saisi le juge de la mise en état d’un incident tenant à l’incompétence matérielle du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce et à la forclusion de l’action intentée à son encontre.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 16 décembre 2024, Mme X. demande au juge de la mise en état de :

- débouter la SAS Locam de l’intégralité de ses demandes, se déclarer incompétence au profit du tribunal de commerce de Nîmes,

- [déclarer] l’action de la SAS Locam forclose ou prescrite,

- condamner la SAS Locam à lui payer une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de son exception d’incompétence, Mme Y. épouse X. indique qu’elle est autoentrepreneur exerçant la profession d’agent immobilier et inscrite au RCS ; qu’elle est donc commerçante et relève du tribunal de commerce de Nîmes.

Subsidiairement, Mme Y. épouse X. soutient que l’action de la SAS Locam se prescrit par deux ans en application de l’article L. 137-2 du code de la consommation ; que le premier incident de paiement non régularisé date du 30 septembre 2017 ; qu’un délai de plus de deux ans s’est écoulé entre cette date et l’assignation. Elle soutient que l’assignation qui lui a été délivrée le 9 septembre 2019 n’a pas été enrôlée de sorte qu’elle est devenue d’office caduque et n’a pas interrompu la prescription.

Plus subsidiairement, si le juge de la mise en état considérait que Mme X. ne relevait pas du code de la consommation, l’action de la SAS Locam serait prescrite en application du délai de droit commun qui a commencé à courir le 30 septembre 2017 et s’est achevé le 30 septembre 2022.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 novembre 2024, la SAS Locam demande au juge de la mise en état de :

- débouter Mme X. de sa demande d’incompétence, débouter Mme X. de sa demande de forclusion et de prescription, condamner Mme X. aux dépens.

Pour s’opposer à l’exception d’incompétence, la SAS Locam indique que Mme X. n’est ni commerçante, ni artisan car elle est inscrite au registre du commerce dans le domaine de l’enseignement qui relève d’une activité libérale non règlementée.

Sur la forclusion, la SAS Locam considère que le droit de la consommation est inapplicable à un contrat conclu entre professionnels.

Sur la prescription, la SAS Locam fait valoir qu’elle a délivré une première assignation le 9 septembre 2019 à Mme X. qui a interrompu la prescription ; que la caducité de l’assignation n’a jamais été constatée par un juge dès lors qu’elle n’a jamais été enrôlée ; que le délai de prescription quinquennal a bien été interrompu le 9 septembre 2019.

[*]

A l’audience du 16 janvier 2025, la décision a été mise en délibéré au 20 février 2025.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l’exception d’incompétence matérielle au profit du tribunal de commerce :

En application de l’article L. 721-3 du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent, notamment, des contestations relatives aux engagements entre commerçants et établissements de crédit.

En l’espèce, Mme X. soutient exercer la profession d’agent immobilier et être inscrite au registre du commerce et des sociétés. Elle produit un extrait des inscriptions du RCS au 28 février 2024 dont il résulte qu’elle est immatriculée au RCS pour une activité de « formation continue d’adultes », activité libérale non réglementée. Elle ne démontre donc pas être commerçante. L’exception d’incompétence matérielle au profit du tribunal de commerce sera rejetée.

 

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription du droit de la consommation :

L’ancien article L. 137-2 devenu L. 218-2 du code de la consommation dispose que : « L’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ».

L’article L. 121-16-1 III (devenu L. 221-3 à la suite de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016) dispose : « Les dispositions des sections 2, 3 et 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salarié employés est inférieur ou égal à cinq ».

Les dispositions de l’article L. 121-16-1 III ne sont pas applicables en l’espèce car il n’est ni allégué, ni établi que le contrat de location ait été conclu hors établissement.

Constitue un consommateur au sens de l’article L. 137-2 ancien du code de la consommation toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle.

En l’espèce, il est manifeste que Mme X. a agi pour les besoins de son activité professionnelle puisqu’elle a mentionné qu’elle signait en qualité de « gérante » et a fait état de sa qualité de « conseiller immobilier ». Par conséquent, elle ne peut pas être qualifiée de consommatrice et le délai de l’article ancien L. 137-2 du code de la consommation ne lui est pas applicable. La fin de non-recevoir tirée de la prescription du droit de la consommation sera rejetée.

 

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de droit commun :

L’article 2224 du code civil dispose : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

En l’espèce, le premier incident de paiement non régularisé date du 30 septembre 2017. Cela résulte à la fois de la lettre de mise en demeure visant la déchéance du terme, du décompte allant du 30 juin 2016 au 30 juin 2021 et de l’assignation portant décompte du montant demandé (16 échéances trimestrielles impayées).

Par conséquent, la SAS Locam disposait d’un délai de cinq ans à compter du 30 juin 2017 pour assigner Mme X., sauf interruption ou suspension.

L’article 2241 du code civil dispose que : « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure ».

Il est constant que l’article 2241 du code civil ne s’applique qu’aux deux hypothèses qu’il énumère, de saisine d’une juridiction incompétente ou d’annulation de l’acte de saisine par l’effet d’un vice de procédure.

Par conséquent, une assignation non enrôlée n’a pas de caractère interruptif de prescription, comme c’est le cas en l’espèce de celle dont fait état la SAS Locam. Il s’ensuit que l’assignation délivrée par la demanderesse le 19 septembre 2023 est tardive et l’action en paiement prescrite.

 

Sur les demandes accessoires :

La SAS X. perd le procès et sera condamnée aux dépens. Aucune considération tirée de l’équité ne permet de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme X. Sa demande sera rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le juge de la mise en état statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort :

Rejette l’exception d’incompétence matérielle soulevée par Mme X. ;

Rejette l’exception de prescription du droit de la consommation ;

Déclare prescrite l’action en paiement de la SAS Locam à l’encontre de Mme X. ;

Rejette la demande de Mme X. fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS Locam aux dépens.

La présente ordonnance a été signée par Nina MILESI, Vice-Présidente, et par Aurélie VIALLE, greffière présente lors de sa mise à disposition.

Le greffier,                            Le juge de la mise en état,