CA GRENOBLE (ch. com.), 13 mars 2025
CERCLAB - DOCUMENT N° 23696
CA GRENOBLE (ch. com.), 13 mars 2025 : RG n° 23/03902
Publication : Judilibre
Extrait : « Aux termes de l'article 1171, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite, l'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix à la prestation.
La clause litigieuse est celle figurant à l'article 8 du contrat de crédit-bail stipulant : « Sans qu'il y ait besoin d'aucune formalité judiciaire, le locataire reconnaissant avoir été mis en demeure par les présentes, le présent contrat peut être résilié de plein droit si bon semble au bailleur dans les cas suivants : - non-respect de l'un des engagements prévus au présent contrat et notamment le défaut de paiement d'une échéance ou de toute somme due en vertu du contrat, - modification de la situation du locataire et notamment décès, redressement judiciaire, liquidation amiable ou judiciaire, cessation d'activité, cession du fonds de commerce, de parts ou d'actions du locataire, changement de forme sociale - modification concernant l'équipement loué et notamment détérioration, destruction ou aliénation de l'équipement loué ou perte ou diminution des garanties fournies. (...) »
M. X. se prévaut de l'arrêt rendu par la Cour de cassation (Cass., Com 26 janvier 2022 n°20-16.782) pour considérer que cette clause est abusive. Or si dans cet arrêt, la Cour de cassation a considéré que l'article 1171 du code civil est applicable aux contrats de location financière, même conclus entre commerçants, industriels ou personnes immatriculées au répertoire des métiers, elle a néanmoins cassé l'arrêt de la cour d'appel qui avait déclaré réputée non écrite la clause au motif que celle-ci réserve au seul loueur la faculté de se prévaloir d'une résiliation de plein droit qu'aucune autre stipulation n'ouvre au locataire dès lors que le défaut de réciprocité de la clause résolutoire de plein droit pour inexécution du contrat se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties. Elle a aussi considéré que la clause qui permet de résilier le contrat de plein droit pour des causes affectant la vie sociale de la société locataire qui ne correspondent pas à des hypothèses de manquements contractuels de la société locataire quand ces possibilités ne sont pas offertes au locataire ne peut être réputée non écrite motifs pris du déséquilibre créé par la clause. M. X. ne peut donc retirer de cet arrêt que la faculté de résiliation unilatérale tenant à des causes affectant la vie sociale de la locataire sans manquement contractuel de celle-ci est abusive et doit être réputée non écrite sur le fondement de l'article 1171 du code civil.
En revanche, la clause prévoyant la faculté de résiliation en raison de la liquidation judiciaire de la société locataire ne peut recevoir application dès lors que l'article L. 641-11-1 du code de commerce invoquée par M. X. stipule que nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune résiliation d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire. C'est donc à juste titre que M. X. soutient que la société MGF n'a pu prononcer sur le fondement de l'article 8 du contrat de crédit-bail la résiliation du contrat en raison du prononcé de la liquidation judiciaire par jugement du 3 décembre 2019. Par ailleurs, la société MGF ne justifie pas d'une résiliation antérieure au prononcé de la liquidation judiciaire. Comme le fait observer M. X., la résiliation n'a pu intervenir postérieurement au 3 décembre 2019 pour un défaut de paiement de l'échéance du 2 décembre 2019, antérieur à l'ouverture de la procédure collective, alors que par application de l'article L.622-21 du code de commerce, est interdite toute résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, étant observé que le fait que le jugement de liquidation judiciaire n'a été publié au Bodacc que le 13 décembre 2019 est indifférent.
Néanmoins, le liquidateur judiciaire a la faculté de ne pas poursuivre le contrat en cours, étant relevé que s'il poursuit le contrat, il doit s'assurer qu'il dispose des fonds nécessaires. En l'espèce, comme relevé par la société MGF, le liquidateur a acquiescé à la restitution du bien sollicité par le bailleur, mettant ainsi fin au contrat.
La société MGF peut ainsi se prévaloir de la résiliation émanant du liquidateur, peu important que la clause stipulant une possibilité de résiliation pour redressement judiciaire ou liquidation judiciaire ne puisse prospérer. »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 13 MARS 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° RG 23/03902 - N° Portalis DBVM-V-B7H-MASQ. Appel d'une décision (N° RG 2022J182) rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE en date du 12 octobre 2023 suivant déclaration d'appel du 15 novembre 2023
APPELANTE :
SAS MGF (MANITOU GROUP FINANCE)
immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le n° 451 190 300, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, [Adresse 1], [Localité 5], représentée et plaidant par Me ALVES de la SELARL EYDOUX MODELSKI, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉ :
M. X.
né le [Date naissance 3] à [Localité 7], de nationalité Française, [Adresse 2], [Localité 4], représenté par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LX GRENOBLE-CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Armel JUGLARD, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre, M. Lionel BRUNO, Conseiller, Mme Raphaële FAIVRE, Conseillère,
DÉBATS : A l'audience publique du 10 janvier 2025, Mme FIGUET, Présidente, qui a fait rapport assistée de Anne Burel greffier, a entendu Me Alves en ses conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure
Par acte du 19 avril 2018, la société MGF (Manitou Group Finance) a consenti un crédit-bail pour le financement d'un chariot télescopique de marque Manitou à la société Ex-Terrior.
Par acte du même jour, M. X., gérant de la société Ex-Terrior, s'est porté caution solidaire de la société Ex-Terrior dans la limite de la somme de 73.000 euros.
La société Ex-Terrior a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 3 décembre 2019.
Par courrier du 16 décembre 2019, la société MGF a indiqué au liquidateur judiciaire que le contrat était résilié et a sollicité la restitution du matériel.
Elle a déclaré sa créance pour un montant de 76.915,87 euros Ttc à titre chirographaire le 16 décembre 2019.
Par courrier du 3 janvier 2020, le liquidateur judiciaire a acquiescé à la demande de la société et l'a invitée à procéder à la reprise du matériel. Le bien a été vendu.
Par courrier du 28 mai 2021, la société MGF a mis en demeure M. X. de lui régler la somme de 44.206,16 euros en lui indiquant que le prix de vente du matériel n'a pas permis de couvrir la dette.
Par jugement du 12 octobre 2023, le tribunal de commerce de Vienne a :
- constaté le caractère abusif de la clause de résiliation anticipée de l'article 8 du crédit-bail du 19 avril 2018,
- jugé que cette clause abusive est réputée non écrite,
- rejeté en conséquence l'intégralité des demandes de la société MGF (Manitou Group Finance),
- condamné la société MGF (Manitou Group Finance) à verser à M. X. la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société MGF (Manitou Group Finance) aux entiers dépens de l'instance après les avoir liquidés.
Par déclaration du 12 octobre 2023, la société MGF (Manitou Group Finance) a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 12 décembre 2024 à 9h52.
Les conclusions déposées par M. X. le 12 décembre 2024 à 16h5, soit postérieurement à la clôture, sont donc irrecevables.
Prétentions et moyens de la société MGF
Dans ses conclusions remises le 25 juin 2024, elle demande à la cour de :
- réformer et au besoin infirmer le jugement du tribunal de commerce de Vienne du 12 octobre 2023 en ce qu'il a :
*constaté le caractère abusif de la clause de résiliation de l'article 8 du contrat de crédit-bail du 19 avril 2018,
*jugé que cette clause abusive est réputée non écrite,
*rejeté par conséquent l'intégralité des demandes de la société MGF (Manitou Group Finance),
* condamné la société MGF (Manitou Group Finance) à verser à M. X. la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
*condamné la société MGF (Manitou Group Finance) aux entiers dépens de l'instance après les avoir liquidés,
Et par voie de réformation,
- condamner la société MGF à payer à M. X. la somme de 44.206,16 euros,
- juger que cette somme produira intérêts au taux contractuel soit 3 fois le taux légal à compter du 28 mai 2021, date du dernier décompte,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- juger que la clause contenue à l'article 8 des conditions générales ne crée pas de déséquilibre significatif entre les parties,
- juger en conséquence valable la clause contenue à l'article 8 des conditions générales du contrat consenti à la société Ex-Terrior,
- juger régulière la résiliation du contrat de crédit-bail souscrit par la société Ex-Terrior le 19 avril 2018,
- condamner M. X. à payer à la société MGF la somme de 4.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. X. aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle fait valoir que :
- l'arrêt de la Cour de cassation (Cass., Com 26 janvier 2022 n°20-16.782) invoquée par M. X. a simplement jugé que les dispositions de l'article 1171 du code civil étaient par principe applicable à un contrat de crédit-bail et a considéré, au contraire, qu'au regard des obligations respectives des parties la clause de résiliation de plein droit n'était pas abusive,
- la liquidation judiciaire met un terme définitif à l'existence de la société et ne permet pas en conséquence la poursuite du contrat,
- la société Ex-Terrior, débitrice principale, dont il est le dirigeant, n'a jamais contesté la résiliation du contrat laquelle a valablement été prononcée,
- de plus, le liquidateur judiciaire a acquiescé à la demande de restitution en considérant que les dispositions des articles L624-17, R624-13 ou R624-14 et R624-15 du code de commerce étaient remplies,
- quant bien même, le caractère abusif de la clause litigieuse serait retenu, la résiliation a valablement été prononcée compte tenu de l'échéance impayée du 2 décembre 2019 et se trouve parfaitement régulière,
- si M. X. considère que la résiliation ne peut être prononcée postérieurement au 3 décembre 2019 pour une échéance antérieure à la liquidation judiciaire, le jugement de liquidation judiciaire n'a été publiée que le 13 décembre 2019,
- en outre, M. X. a répondu favorablement sur la reprise du matériel reconnaissant ainsi la résiliation du contrat.
Sur la créance, elle fait observer que :
- elle a déclaré sa créance comportant l'échéance de loyer impayé et l'indemnité de résiliation laquelle n'a pas fait l'objet de contestation, l'état des créances a été publié au Bodacc et sa créance est donc incontestable,
- l'indemnité de résiliation correspond aux loyers restant dus juqu'à la fin du contrat de crédit bail, elle permet à la société MGF d'obtenir le remboursement de son investissement et se trouve donc justifiée,
- il en est de même de la pénalité de 10%,
- s'agissant des intérêts, le taux de référence n'est autre que la moyenne des derniers taux connus et publiés au jour du contrat de l'Euribor et du Swap, elle est légitime à solliciter des intérêts de retard de trois fois le taux d'intérêt légal conformément à l'article 10 du contrat.
Sur la vente du chariot télescopique, elle fait remarquer qu'elle avait donné son accord pour une vente du chariot à M. X. mais celui-ci a refusé de régler le prix convenu.
Prétentions et moyens de M. X.
Dans ses conclusions remises le 3 septembre 2024, il demande à la cour de:
A titre principal :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Vienne le 12 octobre 2023 en toutes ses dispositions,
- constater le caractère abusif de la clause de résiliation unilatérale de l'article 8 du contrat de crédit-bail du 19 avril 2018,
- juger que ladite clause abusive sera réputée non écrite,
- rejeter l'intégralité des demandes de la société MGF,
A titre subsidiaire :
- juger mal fondées les demandes de condamnation de M. X. en qualité de caution personnelle de la société MGF,
- réduire, si elle devait intervenir, à de plus justes proportions la condamnation de M. X. en qualité de caution au titre de la demande principale,
En tout état de cause :
- rejeter les demandes de condamnation de M. X. formulées par la société MGF au titre des intérêts, de leur capitalisation et de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société MGF à verser à M. X. la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société MGF aux entiers dépens de la procédure.
Sur le caractère abusif de la clause de résiliation unilatérale du contrat de crédit-bail, il fait valoir que :
- aux termes de l'article 1171, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite, l'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix à la prestation,
- dans son arrêt du 26 janvier 2022 n°20-16.782, la Cour de cassation n'a pas écarté le raisonnement de la cour d'appel qui a considéré que la clause de résiliation sans faute, justifiée notamment par cette faculté pour la partie contractante de résilier le contrat en raison d'une cessation de l'activité de la société, est abusive,
- en outre, l'article L.641-11-1 du code de commerce prévoit l'interdiction absolue, nonobstant l'existence d'une clause contraire, de résiliation d'un contrat en cours en raison de l'ouverture d'une liquidation judiciaire,
- est ainsi interdite toute action en résiliation fondée sur le défaut de paiement d'une obligation antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective,
- en l'espèce, la société MGF a librement établi un contrat d'adhésion soumis au locataire au sein duquel une clause l'autorise librement à résilier le contrat de bail pour diverses raisons et selon son bon vouloir,
- la faculté de résiliation unilatérale justifiée par le placement en liquidation judiciaire du locataire est abusive et doit être réputée non écrite,
- la société MGF s'est autorisée à récupérer l'ensemble des loyers avec majoration et intérêts de retard à un taux disproportionné et clause pénale, cette clause est donc exhorbitante et le jugement du tribunal doit être confirmé,
- il est vain pour la société MGF de dire que la résiliation serait intervenue, non pas en raison de la liquidation judiciaire, mais pour non paiement d'une échéance de remboursement alors qu'il est interdit au créancier de résilier un contrat en raison du défaut de paiement d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective,
- la société MGF ne disposait donc pas de la faculté de résilier le contrat postérieurement au 3 décembre 2019 en raison du non paiement de l'échéance du 2 décembre 2019,
Subsidiairement, il fait observer que :
- la société MGF n'apporte aucun élément de preuve relatif au montant du loyer et au défaut de paiement de l'échéance du 2 décembre 2019,
- le montant des demandes de la société MGF dépasse les engagements contractuels signés par M. X.,
- la société MGF n'hésite pas à solliciter une somme qui lui permettrait d'obtenir un solde comptable supérieur à ce qu'elle pouvait espérer obtenir de la relation commerciale,
- le montant de la vente du chariot est bien inférieur à la valeur du bien, le prix de vente étant inférieur aux deux tiers de la valeur du bien et de la proposition de M. X.,
- les intérêts de retard se chiffrent à la somme exhorbitante de 13.438,69 euros, la société MGF ne justifie pas du calcul de ces intérêts de retard, alors même que l'indice de référence prévu au contrat (Isdafix), outre sa formulation dénuée de clarté, n'était plus en vigueur au jour de la signature du contrat.
[*]
Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
1/ Sur le caractère abusif de la clause de résiliation et la résiliation du contrat
Aux termes de l'article 1171, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite, l'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix à la prestation.
La clause litigieuse est celle figurant à l'article 8 du contrat de crédit-bail stipulant :
« Sans qu'il y ait besoin d'aucune formalité judiciaire, le locataire reconnaissant avoir été mis en demeure par les présentes, le présent contrat peut être résilié de plein droit si bon semble au bailleur dans les cas suivants :
- non-respect de l'un des engagements prévus au présent contrat et notamment le défaut de paiement d'une échéance ou de toute somme due en vertu du contrat,
- modification de la situation du locataire et notamment décès, redressement judiciaire, liquidation amiable ou judiciaire, cessation d'activité, cession du fonds de commerce, de parts ou d'actions du locataire, changement de forme sociale
- modification concernant l'équipement loué et notamment détérioration, destruction ou aliénation de l'équipement loué ou perte ou diminution des garanties fournies.
(...) »
M. X. se prévaut de l'arrêt rendu par la Cour de cassation (Cass., Com 26 janvier 2022 n°20-16.782) pour considérer que cette clause est abusive.
Or si dans cet arrêt, la Cour de cassation a considéré que l'article 1171 du code civil est applicable aux contrats de location financière, même conclus entre commerçants, industriels ou personnes immatriculées au répertoire des métiers, elle a néanmoins cassé l'arrêt de la cour d'appel qui avait déclaré réputée non écrite la clause au motif que celle-ci réserve au seul loueur la faculté de se prévaloir d'une résiliation de plein droit qu'aucune autre stipulation n'ouvre au locataire dès lors que le défaut de réciprocité de la clause résolutoire de plein droit pour inexécution du contrat se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties. Elle a aussi considéré que la clause qui permet de résilier le contrat de plein droit pour des causes affectant la vie sociale de la société locataire qui ne correspondent pas à des hypothèses de manquements contractuels de la société locataire quand ces possibilités ne sont pas offertes au locataire ne peut être réputée non écrite motifs pris du déséquilibre créé par la clause.
M. X. ne peut donc retirer de cet arrêt que la faculté de résiliation unilatérale tenant à des causes affectant la vie sociale de la locataire sans manquement contractuel de celle-ci est abusive et doit être réputée non écrite sur le fondement de l'article 1171 du code civil.
En revanche, la clause prévoyant la faculté de résiliation en raison de la liquidation judiciaire de la société locataire ne peut recevoir application dès lors que l'article L. 641-11-1 du code de commerce invoquée par M. X. stipule que nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune résiliation d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire.
C'est donc à juste titre que M. X. soutient que la société MGF n'a pu prononcer sur le fondement de l'article 8 du contrat de crédit-bail la résiliation du contrat en raison du prononcé de la liquidation judiciaire par jugement du 3 décembre 2019.
Par ailleurs, la société MGF ne justifie pas d'une résiliation antérieure au prononcé de la liquidation judiciaire. Comme le fait observer M. X., la résiliation n'a pu intervenir postérieurement au 3 décembre 2019 pour un défaut de paiement de l'échéance du 2 décembre 2019, antérieur à l'ouverture de la procédure collective, alors que par application de l'article L.622-21 du code de commerce, est interdite toute résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, étant observé que le fait que le jugement de liquidation judiciaire n'a été publié au Bodacc que le 13 décembre 2019 est indifférent.
Néanmoins, le liquidateur judiciaire a la faculté de ne pas poursuivre le contrat en cours, étant relevé que s'il poursuit le contrat, il doit s'assurer qu'il dispose des fonds nécessaires.
En l'espèce, comme relevé par la société MGF, le liquidateur a acquiescé à la restitution du bien sollicité par le bailleur, mettant ainsi fin au contrat.
La société MGF peut ainsi se prévaloir de la résiliation émanant du liquidateur, peu important que la clause stipulant une possibilité de résiliation pour redressement judiciaire ou liquidation judiciaire ne puisse prospérer.
2/ Sur la créance
Le contrat stipule: ‘La résiliation entraîne de plein droit, au profit du bailleur, le paiement par le locataire ou ses ayants droits, en réparation du préjudice subi en sus des loyers impayés et de leurs accessoires, d'une indemnité égale à la somme des loyers restant à échoir, au jour de la résiliation et de l'option d'achat. Cette indemnité sera majorée d'une somme forfaitaire égale à 10% de ladite indemnité à titre de clause pénale.'.
La société MGF a déclaré sa créance à hauteur de la somme de 76.915,87 euros à titre chirographaire dont1.090,19 euros au titre de l'échéance impayée du 2 décembre 2019 et 75.825,68 euros au titre de l'indemnité de résiliation. Cette déclaration n'a pas fait l'objet d'une contestation et l'état des créances a été publié au Bodacc le 21novembre 2020.
En outre, l'indemnité de résiliation ne peut être considérée comme manifestement excessive dès lors qu'elle vise à indemniser le crédit-bailleur à hauteur des loyers qu'il aurait dû percevoir jusqu'à la fin du contrat de bail, étant précisé qu'il a dû faire l'acquisition du bien loué.
M. X. ne justifie d'aucun paiement.
La société MGF a vendu le chariot télescopique de marque Manitou pour la somme de 48.000 euros. Rien ne permet d'établir que ce matériel a été revendu à un prix inférieur à sa valeur, étant observé que M. [F] [D] qui s'était proposé pour acquérir ce matériel ne l'a finalement pas acquis.
Au regard de cette vente dont le prix vient s'imputer sur la somme due, la créance de la société MGF s'élève à la somme de 28.915,87 euros.
S'agissant des intérêts de retard, la société MGF réclame la somme de 13.438,69 euros sans faire état des modalités de calcul de ces intérêts, ni en préciser la période. Il sera observé que la société MGF n'a fait état d'aucun intérêt dans sa déclaration de créance.
En conséquence, la société MGF sera déboutée de sa demande à ce titre.
Contrairement à ce que soutient M. X., la somme restant due n'est pas supérieure au montant de son engagement de caution.
En conséquence, M. X. sera condamné à payer à la société MGF la somme de 28.915,87 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2021, date de la mise en demeure.
3/ Sur les mesures accessoires
M. X. qui succombe en appel sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société MGF la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement rendu le 12 octobre 2023 par le tribunal de commerce de Vienne.
Statuant à nouveau,
Dit que la clause prévoyant la faculté de résiliation en raison de la liquidation judiciaire de la société locataire ne peut recevoir application.
Mais constate que la résiliation du contrat de crédit-bail est intervenue à l'initiative du liquidateur judiciaire.
Condamne M. X. en sa qualité de caution à payer à la société MGF la somme de 28.915,87 euros outre intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2021.
Ordonne la capitalisation des intérêts.
Déboute la société MGF de ses demandes plus amples.
Déboute M. X. de sa demande de réduction de l'indemnité de résiliation.
Condamne M. X. aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Condamne M. X. à payer à la société MGF la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente