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CA NÎMES (4e ch. com.), 16 mai 2025

Nature : Décision
Titre : CA NÎMES (4e ch. com.), 16 mai 2025
Pays : France
Juridiction : Nimes (CA), 4e ch. com.
Demande : 24/02546
Décision : 25/152
Date : 16/05/2025
Nature de la décision : Réformation, Sursis à statuer
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 25/07/2024
Décision antérieure : TJ Privas (Jex), 4 juillet 2024 : RG n° 24/00261
Numéro de la décision : 152
Décision antérieure :
  • TJ Privas (Jex), 4 juillet 2024 : RG n° 24/00261
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23706

CA NÎMES (4e ch. com.), 16 mai 2025 : RG n° 24/02546 ; arrêt n° 152 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « L'article 1171 du code civil dispose que : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation. »

Par un arrêt du 26 janvier 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que, dans l'hypothèse où, lors d'un précédent examen d'un contrat litigieux ayant abouti à l'adoption d'une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée, le juge national s'est limité à examiner d'office, au regard de la directive 93/13 susvisée, une seule ou certaines des clauses de ce contrat, cette directive impose à un juge national d'apprécier, à la demande des parties ou d'office dès lors qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, le caractère éventuellement abusif des autres clauses dudit contrat (CJUE, arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus, C-421/14).

Lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à la créance dont le recouvrement est poursuivi sur le fondement d'un titre exécutoire relatif à un contrat, le juge de l'exécution est tenu, même en présence d'une précédente décision revêtue de l'autorité de la chose jugée sur le montant de la créance, sauf lorsqu'il ressort de l'ensemble de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge s'est livré à cet examen, et pour autant qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, d'examiner d'office si les clauses insérées dans le contrat conclu entre le professionnel et le non-professionnel ou consommateur ne revêtent pas un caractère abusif (Cass. 2e civ., 13 avril 2023, pourvoi n° 21-14.540).

En l'occurrence, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire a fait une simple application de la clause stipulée à l'article 8-4 du contrat de location avec option d'achat en considérant que Monsieur X. n'ayant pas restitué le véhicule loué, il était supposé avoir exercé l'option d'achat. Ce faisant, le juge des contentieux de la protection n'a pas procédé à l'examen de la validité de la dite clause. L'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement du 25 mai 2023 ne fait donc pas obstacle à ce que le juge de l'exécution apprécie, à la demande du débiteur saisi, le caractère éventuellement abusif de la clause litigieuse.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré compétent pour examiner le caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat. »

2/ « Lorsque la clause dont il est débattu ne figure ni sur la liste de l'article R. 212-1 du code de la consommation ni sur celle de l'article R. 212-2 du même code, il revient au consommateur d'établir que ladite clause a pour effet de créer au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Il s'agit alors de rechercher si, si négociation il y avait eu, la clause dont le caractère abusif est débattu aurait été retenue par des contractants loyaux.

L'article R. 212-1 du code de la consommation prévoit notamment que, dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 5° Contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n'exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou son obligation de fourniture d'un service ; 12° Imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en application du droit applicable, devrait incomber normalement à l'autre partie au contrat. Aux termes de l'article 1353, alinéa 1, du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

En l'occurrence, la clause de l'article 8-4 emporte une présomption d'exercice de l'option d'achat qui a été édictée dans le seul intérêt de la société de crédit. Il s'en opère un renversement de la charge de la preuve dès lors que la société de crédit qui réclame la valeur résiduelle finale du véhicule est dispensée de démontrer que le locataire a manifesté la volonté de se porter acquéreur du véhicule et qu'au contraire, il est imposé au locataire de renverser la présomption en prouvant qu'il n'a pas entendu lever l'option. De plus, la clause de l'article 8-4 est abusive dès lors qu'elle ne prévoit aucune contrepartie dans le cas où la société de crédit ne remplirait pas son obligation de rappel au locataire qu'à défaut de faire connaître explicitement au plus tard un mois avant la fin du contrat, sa décision de restituer le véhicule, il serait supposé avoir exercé l'option d'achat et être, par conséquent, acquéreur du véhicule.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce que le juge de l'exécution a constaté le caractère abusif de la clause litigieuse. »

3/ « Il résulte de l'avis rendu le 11 juillet 2024 par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation que le titre exécutoire étant privé d'effet en tant qu'il applique la clause abusive réputée non écrite, le juge de l'exécution est tenu de calculer à nouveau le montant de la créance selon les dispositions propres aux mesures d'exécution forcée dont il est saisi. Il tire ensuite toutes les conséquences de l'évaluation de cette créance sur les contestations des mesures d'exécution dont il est saisi. Lorsqu'il constate que le débiteur ne doit plus aucune somme, il doit ordonner la mainlevée de la mesure.

Or, en l'espèce, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Privas a exclusivement fondé la mainlevée de la saisie-attribution contestée sur le caractère non écrit de la clause, sans s'interroger sur le fait de savoir si Monsieur X. qui est resté en possession du véhicule au terme du contrat de location n'est pas débiteur envers la société de crédit d'une indemnité, à ce titre. Or, le contrat stipule que si le locataire décide de ne pas exercer son option d'achat, il doit restituer le véhicule selon les modalités indiquées. Si le locataire a fait connaître explicitement au bailleur sa décision de restituer le véhicule et en cas de retard dans la restitution, le locataire devra au bailleur pour chaque mois de retard commencé, une indemnité d'utilisation égale au montant de l'intégralité du dernier loyer mensuel facturé majoré de 20%.

Il convient, par conséquent, d'inviter les parties à présenter leurs observations sur le montant de la créance de la société BMW Finance et son incidence sur la validité de la saisie-attribution contestée, avant le 13 juin 2025 et d'ordonner la réouverture des débats à l'audience du 27 juin 2025 à 14 heures. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

QUATRIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 MAI 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/02546. Arrêt n° 152. N° Portalis DBVH-V-B7I-JI5L. Décision déférée à la cour : Jugement du Juge de l'exécution de privas en date du 4 juillet 2024 : RG n° 24/00261.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Christine CODOL, Présidente de Chambre, Agnès VAREILLES, Conseillère, Yan MAITRAL, Conseiller

GREFFIER : Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS : A l'audience publique du 10 avril 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2025. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

 

APPELANTE :

SNC BMW FINANCE

Société en nom collectif au capital de XXX € immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° YYY dont le siège social est [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 4], [Localité 6], Représentée par Maître Roch-Vincent CARAIL de l'AARPI BONIJOL-CARAIL-VIGNON, Postulant, avocat au barreau de NIMES, Représentée par Maître Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, Plaidant, avocat au barreau de LYON

 

INTIMÉ :

M. X.

né le [Date naissance 2] à [Localité 7], [Adresse 3], [Localité 1], Représenté par Me Céline GABERT de la SELARL FAYOL AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'ARDECHE

 

Affaire fixée en application des dispositions de l'ancien article 905 du code de procédure civile avec ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 3 avril 2025

ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 16 mai 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Vu l'appel interjeté le 25 juillet 2024 par la SNC BMW Finance à l'encontre du jugement rendu le 4 juillet 2024 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Privas dans l'instance n° RG 24/00261 ;

Vu l'avis de fixation de l'affaire à bref délai du 11 septembre 2024 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 26 mars 2025 par la SNC BMW Finance, appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 31 octobre 2024 par Monsieur X., intimé, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l'ordonnance du 11 septembre 2024 de clôture de la procédure à effet différé au 3 avril 2025.

 

Sur les faits :

Le 7 décembre 2016, Monsieur X. a souscrit auprès de la société BMW Finance un contrat de location avec option d'achat portant sur un véhicule Tesla Model X d'une valeur de 180.490 euros. Le contrat prévoit le paiement de 47 loyers de 1.218,30 euros chacun et un prix de vente final de 46,39% du prix du bien.

L'article 8.4 du contrat, intitulé « Retour restitution du véhicule / Levée de l'option d'achat » stipule que le locataire bénéficie d'une option d'achat qu'il peut exercer, ou à laquelle il peut renoncer en faisant savoir au bailleur qu'il entend restituer son véhicule. Le bailleur adressera au locataire un courrier lui rappelant qu'à défaut de faire connaître explicitement au bailleur au plus tard un mois avant la fin du contrat, sa décision de restituer le véhicule, il sera supposé avoir exercé l'option d'achat et être par conséquent acquéreur du véhicule. Si le locataire décide de ne pas exercer son option d'achat, il doit restituer le véhicule selon les modalités indiquées ci-dessous.

Le 23 mai 2022, les parties ont signé un avenant au contrat fixant la date de l'engagement de reprise au 23 mai 2022 et rappelant au locataire que s'il décide de ne pas exercer son option d'achat, il devra en informer le bailleur par lettre recommandée au plus tard un mois avant la date de fin du contrat.

Monsieur X. a payé les loyers convenus jusqu'au terme du contrat mais n'a pas restitué le véhicule.

Le 3 juin 2022, la SNC BMW Finance a mis en demeure Monsieur X. de régler la somme de 83.722,09 euros dans un délai de quinze jours et dit qu'à défaut, elle prononcerait la déchéance du terme du contrat.

Le 29 juillet 2022, la SNC BMW Finance a informé Monsieur X. de la résiliation de son contrat et a sollicité le paiement de la somme de 93 354.01 euros (comprenant une indemnité de résiliation à échoir de 9 631,92 euros et une valeur résiduelle finale de 83 722,09 euros) ainsi que la restitution du véhicule.

Selon jugement du 25 mai 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Privas a notamment condamné Monsieur X. à payer à la SNC BMW Finance la somme de 83 722,09 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2022, lui a ordonné de restituer le véhicule et a dit que la valeur du bien repris s'imputerait, à titre de paiement, sur le solde de la créance.

Ce jugement a été signifié le 14 novembre 2023 à Monsieur X.

La SNC BMW Finance a fait procéder le 1er décembre 2023 à une saisie attribution sur les comptes bancaires de Monsieur X. ouverts auprès du Crédit Lyonnais en vue du recouvrement de la somme totale de 87 163,67 euros dont celle de 83 722,09 euros en principal. Cette saisie a été dénoncée le 7 décembre 2023 au débiteur saisi.

 

Sur la procédure :

Par exploit du 8 janvier 2024, Monsieur X. a fait assigner la SNC BMW Finance devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Privas aux fins d'obtenir la mainlevée de la saisie-attribution.

Selon jugement du 4 juillet 2024, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Privas, après s'être déclaré compétent pour examiner le caractère abusif de la clause contractuelle 8.4, a :

- constaté le caractère abusif de la clause précitée,

- ordonné la mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 1er décembre 2023 par la SNC BMW Finance sur les comptes ouverts par Monsieur X. dans les livres du Crédit lyonnais en son agence de [Localité 8], et à lui signifiée le 7 décembre 2023,

-condamné la SNC BMW Finance à payer à Monsieur X. une indemnité de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté les parties de plus amples conclusions,

-rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

-condamné la SNC BMW Finance aux dépens, en ce compris les frais de saisie et de levée.

La SNC BMW Finance a relevé appel de ce jugement pour le voir réformer en toutes ses dispositions.

 

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Dans ses dernières conclusions, la société BMW Finance, appelante, demande à la cour, au visa de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, de :

« Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 juillet 2024 par le juge de l'exécution de Privas, à savoir en ce qu'il a :

- se déclare compétent pour examiner le caractère abusif de la clause contractuelle 8.4 et,

- constate le caractère abusif de la clause précitée,

- ordonne la mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 1er décembre 2023 par la SNC BMW Finance sur les comptes ouverts par Monsieur X. dans les livres du Crédit lyonnais en son agence de [Localité 8], et à lui signifiée le 7 décembre 2023,

- condamne la SNC BMW Finance à payer à Monsieur X. une indemnité de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute les parties de plus amples conclusions, rappelle que l'exécution provisoire est de droit,

- condamne la SNC BMW Finance aux dépens, en ce compris les frais de saisie et de levée.

Par conséquent, statuant à nouveau et y ajoutant :

‘Débouter Monsieur X. de toutes ses demandes, fins et prétentions,

‘Valider la mesure de saisie-attribution pratiquée le 1er décembre 2023 par la SNC BMW Finance sur les comptes ouverts par Monsieur X. dans les livres du Crédit lyonnais en son agence de [Localité 8], et à lui signifiée le 7 décembre 2023,

‘Condamner Monsieur X. à payer à la SNC BMW Finance la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

‘Condamner Monsieur X. aux entiers dépens de l'appel. ».

Au soutien de ses prétentions, l'appelante fait valoir qu'elle dispose bien d'un titre exécutoire fondant la saisie attribution pratiquée. Avant de faire application de cet article 8.4 du contrat, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Privas a nécessairement examiné sa validité. Ainsi, la clause litigieuse a déjà été contrôlée par le juge des contentieux de la protection ayant rendu la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée et valant titre exécutoire. Le juge de l'exécution ne pouvait de nouveau apprécier le caractère éventuellement abusif ou non de cette clause. La société BMW Finance justifie avoir rappelé à Monsieur X. toutes les options qui étaient possibles. Monsieur X. avait le choix d'exercer ou non l'option d'achat. Il pouvait y renoncer mais il ne s'est pas manifesté. Il n'était absolument pas obligé d'exercer l'option d'achat.

[*]

Dans ses dernières conclusions, Monsieur X., intimé, demande à la cour, au visa des articles L. 111-3, L. 121-2 et L. 211-1 du code de procédure civile d'exécution, des articles L. 212-1 et suivants du code de la consommation, et de l'article 478 du code de procédure civile, de :

« - Rejeter toutes demandes fins moyens et conclusions contraires

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution de Privas du 4 juillet 2024

- Condamner la société BMW Finance à payer à Monsieur X. la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. ».

L'intimé réplique que, dans les contrats conclus avec les consommateurs, l'autorité de la chose jugée ne fait pas obstacle en soi, à ce que le juge national soit tenu d'apprécier sur la demande des parties ou d'office, le caractère éventuellement abusif d'une clause même au stade d'une mesure d'exécution forcée, dès lors que cet examen n'a pas déjà été effectué à l'occasion du précédent contrôle juridictionnel ayant abouti à la décision revêtue de l'autorité de la chosé jugée.

L'intimé souligne que la clause figurant à l'article 8.4 du contrat s'apparente à une clause abusive car le locataire qui oublie de faire connaître sa volonté de résiliation se retrouve à devoir payer la totalité de la valeur de la vente finale sans aucune autre possibilité. Il n'est prévu aucune contrepartie dans le cas où la société de financement ne remplit pas quant à elle son obligation de rappel de cette condition. Le juge des contentieux de la protection s'est placé sur le terrain des effets de la clause et de non de sa formation. Il est reproché dans la clause l'absence de réciprocité ainsi que le défaut de rappel à la veille de la fin du contrat de l'existence d'une présomption de levée d'option.

[*]

Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

1) Sur la compétence du juge de l'exécution pour apprécier le caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat :

L'article 1171 du code civil dispose que : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation. »

Par un arrêt du 26 janvier 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que, dans l'hypothèse où, lors d'un précédent examen d'un contrat litigieux ayant abouti à l'adoption d'une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée, le juge national s'est limité à examiner d'office, au regard de la directive 93/13 susvisée, une seule ou certaines des clauses de ce contrat, cette directive impose à un juge national d'apprécier, à la demande des parties ou d'office dès lors qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, le caractère éventuellement abusif des autres clauses dudit contrat (CJUE, arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus, C-421/14).

Lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à la créance dont le recouvrement est poursuivi sur le fondement d'un titre exécutoire relatif à un contrat, le juge de l'exécution est tenu, même en présence d'une précédente décision revêtue de l'autorité de la chose jugée sur le montant de la créance, sauf lorsqu'il ressort de l'ensemble de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge s'est livré à cet examen, et pour autant qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, d'examiner d'office si les clauses insérées dans le contrat conclu entre le professionnel et le non-professionnel ou consommateur ne revêtent pas un caractère abusif (Cass. 2e civ., 13 avril 2023, pourvoi n° 21-14.540).

En l'occurrence, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire a fait une simple application de la clause stipulée à l'article 8-4 du contrat de location avec option d'achat en considérant que Monsieur X. n'ayant pas restitué le véhicule loué, il était supposé avoir exercé l'option d'achat. Ce faisant, le juge des contentieux de la protection n'a pas procédé à l'examen de la validité de la dite clause. L'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement du 25 mai 2023 ne fait donc pas obstacle à ce que le juge de l'exécution apprécie, à la demande du débiteur saisi, le caractère éventuellement abusif de la clause litigieuse.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré compétent pour examiner le caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat.

 

2) Sur le caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat :

Aux termes de l'article L. 212-1, alinéa 2, du code de la consommation, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque les deux contrats sont juridiquement liés dans leur conclusion ou leur exécution.

Lorsque la clause dont il est débattu ne figure ni sur la liste de l'article R. 212-1 du code de la consommation ni sur celle de l'article R. 212-2 du même code, il revient au consommateur d'établir que ladite clause a pour effet de créer au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il s'agit alors de rechercher si, si négociation il y avait eu, la clause dont le caractère abusif est débattu aurait été retenue par des contractants loyaux.

L'article R. 212-1 du code de la consommation prévoit notamment que, dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de :

5° Contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n'exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou son obligation de fourniture d'un service ;

12° Imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en application du droit applicable, devrait incomber normalement à l'autre partie au contrat.

Aux termes de l'article 1353, alinéa 1, du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

En l'occurrence, la clause de l'article 8-4 emporte une présomption d'exercice de l'option d'achat qui a été édictée dans le seul intérêt de la société de crédit. Il s'en opère un renversement de la charge de la preuve dès lors que la société de crédit qui réclame la valeur résiduelle finale du véhicule est dispensée de démontrer que le locataire a manifesté la volonté de se porter acquéreur du véhicule et qu'au contraire, il est imposé au locataire de renverser la présomption en prouvant qu'il n'a pas entendu lever l'option.

De plus, la clause de l'article 8-4 est abusive dès lors qu'elle ne prévoit aucune contrepartie dans le cas où la société de crédit ne remplirait pas son obligation de rappel au locataire qu'à défaut de faire connaître explicitement au plus tard un mois avant la fin du contrat, sa décision de restituer le véhicule, il serait supposé avoir exercé l'option d'achat et être, par conséquent, acquéreur du véhicule.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce que le juge de l'exécution a constaté le caractère abusif de la clause litigieuse.

 

3) Sur les conséquences du caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat :

Il résulte de l'avis rendu le 11 juillet 2024 par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation que le titre exécutoire étant privé d'effet en tant qu'il applique la clause abusive réputée non écrite, le juge de l'exécution est tenu de calculer à nouveau le montant de la créance selon les dispositions propres aux mesures d'exécution forcée dont il est saisi. Il tire ensuite toutes les conséquences de l'évaluation de cette créance sur les contestations des mesures d'exécution dont il est saisi. Lorsqu'il constate que le débiteur ne doit plus aucune somme, il doit ordonner la mainlevée de la mesure.

Or, en l'espèce, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Privas a exclusivement fondé la mainlevée de la saisie-attribution contestée sur le caractère non écrit de la clause, sans s'interroger sur le fait de savoir si Monsieur X. qui est resté en possession du véhicule au terme du contrat de location n'est pas débiteur envers la société de crédit d'une indemnité, à ce titre.

Or, le contrat stipule que si le locataire décide de ne pas exercer son option d'achat, il doit restituer le véhicule selon les modalités indiquées. Si le locataire a fait connaître explicitement au bailleur sa décision de restituer le véhicule et en cas de retard dans la restitution, le locataire devra au bailleur pour chaque mois de retard commencé, une indemnité d'utilisation égale au montant de l'intégralité du dernier loyer mensuel facturé majoré de 20%.

Il convient, par conséquent, d'inviter les parties à présenter leurs observations sur le montant de la créance de la société BMW Finance et son incidence sur la validité de la saisie-attribution contestée, avant le 13 juin 2025 et d'ordonner la réouverture des débats à l'audience du 27 juin 2025 à 14 heures.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré compétent pour examiner le caractère abusif de la clause figurant à l'article 8.4 du contrat et en a constaté le caractère abusif,

Avant dire droit sur le chef du jugement qui ordonne la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 1er décembre 2023,

Invite les parties à présenter leurs observations sur le montant de la créance de la société BMW Finance et son incidence sur la validité de la saisie-attribution contestée avant le 13 juin 2025,

Ordonne la réouverture des débats, sans révocation de l'ordonnance de clôture, à l'audience du 26 juin 2025 à 14 heures,

Réserve les demandes respectives des parties relatives aux autres chefs du jugement ainsi que les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE,                            LA PRÉSIDENTE,