CA VERSAILLES (ch. civ. 1-6), 20 mars 2025
- TJ Pontoise, 25 septembre 2023 : RG n° 18/07050
CERCLAB - DOCUMENT N° 23745
CA VERSAILLES (ch. civ. 1-6), 20 mars 2025 : RG n° 23/07132
Publication : Judilibre
Extrait : « Ceci étant exposé, et s'agissant d'abord de la qualification du bail en contrat d'adhésion et du déséquilibre significatif, ne peut prospérer le moyen d'irrecevabilité soulevé par l'intimée se prévalant de la qualification de contrat de gré à gré contenue dans le préambule de leur convention dès lors que cette qualification du bail est précisément débattue au fond.
Si l'action ne peut être fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce qui permet d'engager la responsabilité d'une partie qui soumet « ou tente de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » dans la mesure où seules les activités de production, de distribution ou de services entrent dans son champ d'application, comme soutenu par l'intimée et comme a pu en juger la Cour de cassation dans un litige qui portait sur l'exécution d'un bail commercial (Cass. civ. 3ème, 15 février 2018, pourvoi n° 17-11329, publié au bulletin), l'article 1171 du code civil, issu de la réforme du droit des contrats et dont se prévaut également la preneuse, dispose : « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation ». Comme elle se prévaut des dispositions de l'article 1110 alinéa 2 du même code selon lequel, par opposition au contrat de gré à gré dont les stipulations sont négociables : « Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties ».
Mais outre le fait que le bail ne peut être assimilé à certains contrats qui relèvent du code de la consommation où toute négociation est exclue, l'article 1105 du code civil prévoit que « les règles particulières à certains contrats sont des dispositions propres à chacun d'eux » que « les règles générales s'appliquent sous réserve de ces règles particulières » et que le statut des baux commerciaux régi par les articles L. 145-1 et suivants du code de commerce, d'ordre public et poursuivant des finalités protectrices au bénéfice du preneur, relève de règles particulières.
La preneuse peut d'autant moins soutenir que le contrat doit être qualifié de contrat d'adhésion que la bailleresse lui oppose justement diverses clauses du contrat qui ont fait l'objet de négociations. Tels l'article 19.3 (qui accorde au preneur la faculté de résiliation du bail à sa première échéance triennale et non à la durée ferme de six ans prévue à l'article 2.2), l'article 19.4.3 (qui déroge à l'article 3.1.6 des conditions générales puisqu'il réduit à deux ans l'interdiction d'installer un commerce similaire), l'article 19.5 (qui élargit la possibilité de changement d'enseigne prévue à l'article 3.1.3 des conditions générales) ou encore l'article 19.12 (par lequel le bailleur renonce à son droit de préférence prévu à l'article 6.3.2 et à l'établissement de toute cession par acte authentique). »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
CHAMBRE CIVILE 1-6
ARRÊT DU 20 MARS 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° RG 23/07132 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WEJY. Code nac : 30B. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 septembre 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE : RG n° 18/07050.
LE VINGT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTES :
S.A.S.U. IV CONSULTING
Prise en la personne de Maître S. de la SELARL V&V, demeurant [Adresse 2], ès qualités d'administrateur judiciaire de la SASU IV CONSULTING, désigné selon jugement du Tribunal de Commerce de PONTOISE en date du 10 mai 2021, N° Siret : XXX (Pontoise), [Adresse 6], [Adresse 6], [Localité 7], Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
S.C.P. OUIZILLE- [V]
Prise en la personne de Maître V., ès qualité de représentant des créanciers, désigné selon jugement du Tribunal de Commerce de PONTOISE en date du 10 mai 2021, [Adresse 1], [Localité 5], Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 21423 - Représentant : Maître Judith BENGUIGUI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2254
INTIMÉE :
OUTLET INVEST
N° Siret : YYY RCS Paris), [Adresse 3], [Localité 4], Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentant : Maître Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699 - Représentant : Maître Dominique COHEN-TRUMER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 février 2025, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : Madame Fabienne PAGES, Présidente, Madame Caroline DERYCKERE, Conseillère, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 27 juillet 2017, la société Outlet Invest a donné à bail commercial à la société IV Consulting, exploitant sous l'enseigne IT Style, un local d'une surface de 57m²constituant le lot n°1 du centre commercial Usines Center [Localité 8] Nord II àGonesse (95), avec pour destination 'la vente de produits et d'articles de maquillage et de beauté', ceci pour une durée de 10 ans commençant à courir le 02 octobre 2017. Il était convenu d'un loyer de 350 euros hors taxes et hors charges par an et par m² de surface, indexé sur l'indice des loyers commerciaux, assorti d'un loyer variable additionnel de 7% HT du chiffre d'affaires, payable trimestriellement et d'avance, avec un allégement de loyer durant les deux premières années et une franchise jusqu'à l'ouverture du local au public.
Ce bail a fait l'objet de deux avenants le 14 septembre 2017 et le 05 février 2018.
Au constat d'impayés et à la suite d'un pli recommandé de la preneuse du 06 juin 2018 la mettant en demeure de lui assurer la délivrance et la jouissance paisible des lieux loués en sollicitant une réduction du loyer outre l'indemnisation de ses pertes d'exploitation,par acte du l5 juin 2018, la bailleresse lui a fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire pour avoir paiement de la somme en principal de 9.035,74 euros, correspondant aux loyers et charges impayés au 13 juin 2018.
La société IV Consulting a assigné en opposition à ce commandement la société Outlet Invest selon acte du 13 juillet 2018, sollicitant, outre son annulation, des dommages-intérêts pour troubles de jouissance et perte d'exploitation, et, subsidiairement des délais de paiement avec suspension de la clause résolutoire ainsi que le débouté de la bailleresse en ses demandes et la compensation de la somme indemnitaire allouée, du fait d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, avec les sommes dues.
Postérieurement, selon acte du 02 août 2019, la bailleresse a fait délivrer à la preneuse une mise en demeure d'exercer dans les lieux loués l'activité de vente de produits et d'articles de maquillage et de beauté à l'exclusion de tout autre et de cesser en conséquence celle de vente de prêt-à-porter, laquelle visait la clause résolutoire.
Le 30 août 2019, la société IV Consulting a de nouveau assigné la société Outlet Invest en opposition à cette mise en demeure, faute de délivrance de bonne foi, sollicitant subsidiairement délais et suspension des effets de la clause résolutoire dans l'attente d'une décision au fond sur une demande de déspécialisation.
Par ordonnance rendue le 03 octobre 2019, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures successivement enregistrées.
S'agissant de la situation juridique de la preneuse, suivant jugement du 10 mai 2021, le tribunal de commerce de Pontoise a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à son encontre, désignant maître S. en qualité d'administrateur judiciaire et maître [L] [F] [V] en qualité de mandataire judiciaire.
La bailleresse a déclaré sa créance le 05 juillet 2021 et les organes de la procédure sont intervenus volontairement à la procédure devant les premiers juges.
Ce même tribunal, par jugement du 18 octobre 2022, a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de cette société présenté par l'administrateur judiciaire, désignant maître [S] de la Selarl V&V en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Dans un premier jugement rendu le 21 novembre 2022 le tribunal judiciaire de Pontoise saisi a révoqué l'ordonnance de clôture, ordonné la réouverture des débats et invité la société bailleresse à produire : la pièce qu'elle visait au n° 87 de son bordereau de pièces correspondant exactement à son intitulé soit "déclaration de créance à titre privilégié du 05 juillet 2021 + décompte’ et justifiant du montant réclamé de 93.251,4 I euros // les décomptes faisant ressortir distinctement le montant global des sommes réclamées en fonction de leur nature (loyers, charges, pénalités, frais), de leur caractère privilégié ou chirographaire et de leur période (antérieure ou postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective) // l'ensemble des factures correspondant aux pénalités réclamées, avec les tableaux des infractions reprochées par périodes susvisées, et renvoyé1'affaire et les parties à l'audience du juge de la mise en état.
Par jugement contradictoire rendu le 25 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Pontoise a :
déclaré la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès qualités, recevable en ses demandes,
déclaré valable la mise en demeure d'exercer dans les lieux loués l'activité de vente de produits et articles de maquillage et de beauté à l'exclusion de tout autre et de cesser en conséquence celle de vente de prêt à porter, délivrée le 02 août 2019 à la société IV Consulting,
constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant les parties sont réunies à la date du 03 septembre 2019,
accordé à la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, un délai de 10 mois pour mettre son activité en conformité avec les clauses du bail, sous réserve de la décision qui sera rendue dans l'instance en déspécialisation, actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Pontoise,
suspendu durant ce délai de 10 mois la réalisation et les effets des clauses de résiliation et dit que la clause résolutoire ne jouera pas si la locataire respecte les modalités de mise en conformité de son activité,
dit qu'à défaut pour la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, de mettre son activité en conformité, les poursuites pourront reprendre, la clause reprendra ses effets et son expulsion des lieux pourra être poursuivie ainsi que celle de tous les occupants de sonchef, le cas échéant avec l'assistance de la force publique, et qu'en cas de besoin, lesmeubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés à ses frais en un autre lieu approprié,
dans cette hypothèse
fixé le montant d'indemnité d'occupation au montant du loyer en cours résultant du bail, charges et taxes en sus, à compter de la date d'acquisition de la clause résolutoire, soit au 03 septembre 2019, et ce jusqu'à la libération effective des lieux, outre une pénalité d'1 euro,
condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, à payer ladite indemnité d'occupation à la société Outlet Invest, à compter du 10 mai 2021,
fixé la créance de la société Outlet Invest à l'encontre de la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès qualités, aux sommes suivantes :
80.369.41 pour la période allant du 10 mai 2019 au 09 mai 2021,
36.785,64 pour la période du 1eravril 2018 au 09 mai 2019,
condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S] ès-qualités, à payer à la société Outlet Invest la somme de 4.775,60 euros au titre de son arriéré locatif postérieur au jugement d'ouverture de la procédure collective, arrêté au 11 janvier 2023, et dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de cette date et jusqu'à son règlement,
condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, à payer à la société Outlet Invest la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
rejeté ou dit sans objet les demandes plus amples ou contraires des parties,
condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S] ès-qualités, au paiement des dépens,
ordonné l'exécution provisoire de la décision.
[*]
Par dernières conclusions notifiées le 12 janvier 2024, la société par actions simplifiée IV Consulting et la SCP Ouizille-[V], représentée par maître V., ès-qualités de représentant des créanciers de la société IV Consulting désignée suivant jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 10 mai 2021 ouvrant une procédure de redressement judiciaire, appelants du jugement entrepris suivant déclaration reçue au greffe le 18 octobre 2023, demandent à la cour, au visa des dispositions des articles 1104, 1110, 1171, 1719 et suivants du code civil, des dispositions manifestement déséquilibrées du bail du 27 juillet 2017, du commandement de payer du 15 juin 2018 et de la mise en demeure visant la clause résolutoire du 02 août 2019 :
de dire la IV Consulting recevable et bien fondée en son appel,
de confirmer 'le jugement rendu le 07 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny n° RG 19/13285" (sic) en ce qu'il a déduit des sommes réclamées par la société Outlet Invest les pénalités règlement intérieur et l'a déboutée de ses demandes à ce titre, pour un montant de 12.882 euros (pour la période allant du 10 mai 2019 au 9 mai 2021), de 8.630,80 euros (pour la période allant du 1er avril 2018 au 9 mai 2021), de 14.744.40 euros (pour la période postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de la société IV Consulting rendu le 10 mai 2021 par le tribunal de commerce de Pontoise),
d'infirmer le jugement (entrepris) pour le surplus de ses dispositions et statuant à nouveau,
à titre principal
de débouter la société Outlet Invest de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
de juger nul et de nul effet le commandement signifié à la société IV Consulting suivant exploit du 15 juin 2018, dès lors que cet acte a été délivré par la société Outlet Invest dans des conditions exclusives de toute bonne foi,
de juger nulle et de nul effet la mise en demeure visant la clause résolutoire signifiée à la société IV Consulting suivant exploit du 02 août 2019, dès lors que cet acte a été délivré par la société Outlet Invest dans des conditions exclusives de toute bonne foi,
de condamner la société Outlet Invest à payer à la société IV Consulting, assistée par maître S., Selarl V&V, ès-qualités d'administrateur judiciaire, à titre de dommages-intérêts au titre de son trouble de jouissance, la somme de40.934,67 euros HT, soit 49.121,60 euros TTC, sur la période allant du 2 octobre 2017 à ce jour, sauf à parfaire, et la somme de 12.523,33 euros HT(soit 15.027,96 euros TTC) au titre du remboursement de la totalité de la contribution au fonds marketing versé sans contrepartie,
de condamner la société Outlet Invest à payer à la société IV Consulting assistée par maître S., Selarl V&V, ès-qualités d'administrateur judiciaire, à titre de dommages-intérêts au titre de ses pertes d'exploitation, la somme de 279.000 euros, sur la période allant du 2 octobre 2017 à ce jour, sauf à parfaire,
de juger que la société Outlet Invest n'est pas fondée à facturer à la société IV Consulting des pénalités au titre du parfumage de ses clients aux abords de son magasin, et sollicite en conséquence que le bailleur soit débouté de ses demandes de paiement de la somme s'élevant à ce jour à 46.008 euros,
à titre subsidiaire, si la cour jugeait néanmoins valable le commandement de payer visant la clause résolutoire du bail et recevable la demande d'acquisition de ladite clause sur ce fondement,
de juger que les créances antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective de la société IV Consulting rendu le 10 mai 2021 par le tribunal de commerce de Pontoise soient fixées au passif de la société en redressement,
de suspendre en tant que de besoin les effets de la clause résolutoire dans les termes des dispositions légalessus-rappelées,enaccordantundélaide24moisaudébiteuràcompter de l'arrêt à intervenir pour s'acquitter des sommes dues et se mettre en conformité avec les clauses du bail, et permette au juge du fond du tribunal judiciaire de Pontoise saisi parallèlement de la demande de déspécialisation plénière de rendre sa décision, ce avec les conséquences qui en découlent à l'égard des prétentions de la société bailleresse qui doit être déboutée en tout état de cause de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
d'ordonner la compensation entre les sommes sollicitées du chef des loyers, de l'indemnité d'occupation et de l'indemnité de résiliation avec les dommages et intérêts auxquels la société locataire peut prétendre en raison du trouble de jouissance et des pertes d'exploitation qu'elle a subies,
en tout état de cause
de condamner la société Outlet Invest à payer à la société IV Consulting, assistée par maître S., Selarl V&V, ès-qualités d'administrateur judiciaire, la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (ainsi qu') auxdépensdepremièreinstance et d'appel qui pourront être recouvrés par maître Buquet-Roussel, avocat, dans les conditions de l'article 699 du ‘CPC'.
[*]
Par dernières conclusions 'd'appel en réponse et incident (n°2)’notifiées le 13 janvier 2025, la société Outlet Invest, société de placement à prépondérance immobilière à capital variable sous la forme SAS prie la cour :
de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : déclaré valable la mise en demeure d'exercer dans les lieux loués l'activité de vente de produits et articles de maquillage et de beauté à l'exclusion de tout autre et de cesser en conséquence celle de vente de prêt à porter, délivrée le 02 août 2019 à la société IV Consulting //constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant les parties sont réunies à la date du 03 septembre 2019 //
condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S] ès-qualités, à payer à la société Outlet Invest la somme de 4.775,60 euros au titre de son arriéré locatif postérieur au jugement d'ouverture de la procédure collective, arrêté au 11 janvier 2023, et dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de cette date et jusqu'à son règlement // condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, à payer à la société Outlet Invest la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile // condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, au paiement des dépens,
de déclarer la société Outlet Invest recevable et bien fondée en son appel incident, y faisant droit,
de l'infirmer en ce qu'il a :accordé à la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, un délai de 10mois pour mettre son activité en conformité avec les clauses du bail, sous réserve de la décision qui sera rendue dans l'instance en déspécialisation, actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Pontoise // suspendu durant ce délai de 10 mois la réalisation et les effets des clauses de résiliation et dit que la clause résolutoire ne jouera pas si la locataire respecte les modalités de mise en conformité de son activité // dit qu'à défaut pour la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, de mettre son activité en conformité, les poursuites pourront reprendre, la clause reprendra ses effets et son expulsion des lieux pourra être poursuivie ainsi que celle de tous les occupants de son chef, le cas échéant avec l'assistance de la force publique, et qu'en cas de besoin, les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés à ses frais en un autre lieu approprié // dans cette hypothèse* fixé le montant d'indemnité d'occupation au montant du loyer en cours résultant du bail, charges et taxes en sus, à compter de la date d'acquisition de la clause résolutoire, soit au 03 septembre 2019, et ce jusqu'à la libération effective des lieux, outre une pénalité d'1 euro * condamné la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès-qualités, à payer ladite indemnité d'occupation à la société Outlet Invest, à compter du 10 mai 2021 // fixé la créance de la société Outlet Invest à l'encontre de la société IV Consulting, assistée de maître [S], ès qualités, aux sommes suivantes* 80.369.41 pour la période allant du 10 mai 2019 au 09 mai 2021 * 36.785,64 pour la période du 1eravril 2018 au 09 mai 2019,
et, statuant à nouveau
'sur la résiliation du bail
de constater le jeu de la clause résolutoire du bail de la société IV Consulting à effet du 03 août 2019,
subsidiairement de prononcer la résiliation du bail aux torts exclusifs de la société IV Consulting,
en tant que de besoin, ordonner en conséquence l'expulsion de la société IV Consulting assistée de maître S., ès-qualités, ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique et l'aide d'un serrurier, du local à usage commercial portant le n°1 qu'elle occupe, dépendant du centre commercial Usines Center [Localité 8]-Nord II à [Localité 7],
de dire que la société Outlet Invest pourra procéder à l'enlèvement et au déménagement des objets mobiliers garnissant les lieux, soit dans l'immeuble, soit chez un garde-meubles, au choix de la demanderesse, aux frais, risques et périls de la société IV Consulting, assistée de maître S., es-qualités,
‘sur les demandes financières
de fixer la créance à titre privilégié de la société Outlet Invest au passif de la société IV Consulting à la somme de 93.251,41 euros,
de fixer la créance à titre chirographaire de la société Outlet Invest au passif de la société IV Consulting à la somme de 37.241,13 euros,
de condamner la société IV Consulting à payer à la société Outlet Invest, au titre de son arriéré locatif postérieur au jugement d'ouverture de la procédure collective à la somme en principal de 48.052,28 euros arrêtée au 31 décembre 2024,
de condamner la société IV Consulting à payer à la société Outlet Invest, au titre de ses deux premières annuités de son plan de redressement la somme de 32.623,14 euros,
de condamner la société IV Consulting à payer à la société Outlet Invest une indemnité d'occupation mensuelle établie sur la base du loyer global de la dernière année de location, majoré de cent pour cent (100 %) à compter du 10 mai 2021 et jusqu'à la reprise du local par le bailleur,
de condamner la société IV Consulting à payer à la société Outlet Investune pénalité de retard de 10 % sur les sommes dues en principal au titre de sa créance postérieure,
de condamner la société IV Consulting à payer à la société Outlet Invest 'à lui régler’les intérêts de retard au taux d'intérêt légal majoré de 3 points sur la totalité des sommes dues par le preneur à compter du 10 mai 2021,
de dire et juger que le montant du dépôt de garantie restera acquis à la société Outlet Invest,
‘sur les demandes de la société IV Consulting
de dire et juger la société IV Consulting, maître S. et maître V., ès-qualités, irrecevables en leurs demandes fondées sur le défaut de commercialité et de fréquentation du centre, sur le prétendu contrat d'adhésion et le déséquilibre significatif, subsidiairement, de 'l'en’débouter,
de débouter la société IV Consulting, maître S. et maître V., ès-qualités, de l'ensemble de 'ses’ demandes, fins et conclusions,
à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait fait droit en tout ou partie aux demandes de la société IV Consulting, maître S. et maître V., ès-qualités, de dire que les sommes qui seraient mises à la charge de la société Outlet Invest se compenseront prioritairement avec sa créance à l'encontre de la société IV Consulting antérieure à la procédure collective par application de l'article L622-27 du code de commerce et pour le surplus éventuel avec sa créance postérieure par le jeu de la compensation légale,
‘sur l'article 700, les dépens, l'exécution provisoire
de condamner, en cause d'appel, la société IV Consulting à payer à la société Outlet Invest la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (ainsi qu') aux entiers dépens d'appel.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2024.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la situation locative de la société IV Consulting :
Appelante du jugement entrepris, cette société a saisi la cour de demandes relatives au commandement de payer et à la mise en demeure visant la clause résolutoire précités délivrés, respectivement, les 15 juin 2018 et 02 août 2019, mais n'a pas conclu postérieurement à la notification de ses premières conclusions d'appel du 12 janvier 2024.
Or, dans ses dernières conclusions d'intimée, la société Outlet Invest expose, en en justifiant (pièces n° 97 et 98), qu'est venu à expiration le 17 août 2024 le délai de dix mois accordé par ce jugement, signifié à la preneuse les 16 et 17 octobre 2023, pour reprendre son activité de vente de produits de maquillage et de beauté à l'exclusion de tout autre et cesser celle de vente de prêt à porter et que, selon un procès-verbal de constat dressé le 04 septembre 2024, elle n'a pas repris son activité initiale.
Elle relate, en produisant ses pièces n°99 à 101, que, la clause résolutoire ayant par suite produit ses effets, elle lui a fait délivrer un commandement de quitter les lieux le 10 octobre 2024, que celui-ci est demeuré sans effet, tout comme la tentative d'expulsion à laquelle a procédé le commissaire de justice si bien qu'il a été contraint de requérir le concours de la force publique pour la réalisation des opérations d'expulsion ; qu'il a été obtenu le 28 novembre 2024 et que le local lui a finalement été restitué le 24 décembre 2024.
Il s'en déduit pour la cour que les prétentions des parties sur le sort du bail commercial sont devenues sans objet, qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur les demandes de la bailleresse relatives à la résiliation du bail de plein droit, à l'expulsion de la preneuse ou à l'indemnité d'occupation dont elle précise, dans ces écritures (page 8/54) qu'elles sont présentées 'en tant que de besoin'.
Tout au plus peut-il être constaté que la clause résolutoire que les premiers juges avaient suspendue a produit ses effets, encore que l'obligation de faire en cause était conditionnelle, et qu'en tout cas les lieux ont été libérés 'le 24 décembre 2024 au matin', avec restitution des clefs, suivant courriel du commissaire de justice instrumentaire du 27 décembre 2024 (pièce n° 101).
Quoi qu'il soit, la cour reste saisie des demandes financières respectives des parties.
Sur les créances de la société Outlet Invest :
Sur la créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective
Il convient de rappeler que pour juger comme il l'a fait, le tribunal a d'abord énoncé que, suivant courriers recommandés du 05 juillet 2021, la société Outlet Invest a déclaré ses créances entre les mains du mandataire judiciaire comme suit :
une somme de 93.251,41 euros déclarée à titre privilégié correspondant aux arriérés de loyers, charges et accessoires de la société IV Consulting pour la période allant du 10 mai 2019 au 09 mai 2021, date d'ouverture de la procédure collective,
une somme de 45.416,44 euros déclaréeà titre chirographaire correspondant aux arriérés de loyers, charges et accessoires de la société IV Consulting pour la période antérieure au 10 mai 2019.
Pour conclure à la fixation de la créance à ce titre (en précisant qu'il ne lui appartenait pas de statuer sur le caractère privilégié ou chirographaire d'une créance) aux sommes de :
80.369,41 euros (soit : 93.251,41 - 12.882 euros)pour la période s'étendant du 10 mai 2019 au 09 mai 2021 (ci-après la première période),
36.785,64 euros (soit : 45.416,44 euros - 8.630,80) pour la période du 1er avril 2018 au 09 mai 2019 (ci-après la seconde période), il a déduit des sommes réclamées des 'pénalités règlement intérieur’ aux montants de 12.882 euros et de 8.630,80 euros.
Sur ces pénalités, la bailleresse faisait valoir que la preneuse ne respectait ni la clause de destination du bail ni les horaires d'ouverture et qu'elle procédait au démarchage de la clientèle dans les parties communes du centre alors que la preneuse les contestait du fait de leur nombre exorbitant, du défaut de preuve, ou encore d'opérations de parfumage de sa clientèle dans ses propres locaux qui ne pouvaient être tenues pour du racolage dans les allées du centre.
Le tribunal a considéré que si les procès-verbaux d'huissier des 19 avril et 28 mai 2019 constataient l'offre à la vente de prêt à porter, les faits de racolage incriminés n'étaient pas établis et jugé qu'en dépit de la réouverture des débats destinée à permettre la clarification des multiples infractions reprochées quant aux manquements sanctionnés, quant aux clauses du bail non respectées et quant aux montants globalisés réclamés, les pièces produites ne permettaient pas de faire droit à une demande qui n'était justifiée ni dans son principe ni dans son quantum.
Tandis que la partie appelante, par-delà une erreur de plume relative au jugement déféré affectant le dispositif de ses conclusions, poursuit la confirmation du jugement en cette disposition, la bailleresse intimée renouvelle sa demande de fixation de sa créance à titre privilégié à hauteur de la somme de 93.251,41 euros pour la première période considérée et, pour la seconde, de sa créance à titre chirographaire à celle, finalement évaluée, de 37.241,13 euros.
Elle se prévaut des dispositions combinées de l'article 7.1 du contrat de bail prévoyant notamment que le bailleur s'oblige expressément à respecter les clauses et stipulations de tous documents régissant le fonctionnement de l'ensemble commercial, dont le règlement intérieur, et de l'article III de celui-ci, intitulé 'sanctions’ selon lequel 'Toute infraction au présent règlement intérieur sera sanctionné par une pénalité forfaitaire correspondant à 360ème des charges afférentes aux locaux en infraction au cours de l'exercice annuel écoulé, affecté d'un multiple correspondant au nombre de jours pendant lesquels l'infraction se poursuivra ou se renouvellera'.
Estimant qu'il est en l'espèce 'constant et absolument non contesté’qu'en infraction à la clause de destination contractuelle, la société IV Consulting exploite, comme constaté pour la première fois le 19 avril 2019, une activité différente, poursuivie sans discontinuer, de celle contractuellement stipulée, elle affirme que la preneuse ne le conteste pas et l'a même revendiquée en lui reprochant sa mauvaise foi. Elle considère, en outre, qu'est indifférente la procédure de déspécialisation initiée et invoquée par la preneuse en précisant qu'en cette affaire le juge de la mise en état a sursis à statuer dans l'attente du présent arrêt selon ordonnance rendue le 04 mars 2021 ;que la société IV Consulting a modifié unilatéralement la destination du bail et l'a mise devant le fait accompli ; qu'est semblablement indifférente, à son sens, la question de la survie de l'entreprise invoquée, laquelle n'a repris le paiement du loyer courant que pour éviter la liquidation judiciaire, alors qu'est violée une obligation fondamentale du bail en infraction à l'article 1728 du code civil.
Elle explicite les modalités de ses calculs (pages 41 et 42/54 de ses conclusions) desquels il ressort:
pour la seconde période réduite à 21 jours (du 19 avril au 09 mai 2019), qu'elle peut prétendre à une somme de 455,49 euros TTC (soit une pénalité journalière de 21,69 euros correspondant à des charges réelles de 7.809,79 euros après reddition de comptes) de sorte qu'elle est fondée à poursuivre la fixation au passif de sa créance à la somme de 37.785,46 euros qui cumule la somme de 36.785, 64 euros retenue par le tribunal et cette pénalité de 455,49 euros,
pour la première période (inchangée), qu'elle peut prétendre à une somme de 15.024,10 euros TTC (suivant les indemnités journalières successives de 21,69 euros, de 20,97 euros puis de 21,10 euros correspondant aux charges réelles, respectivement, de 7.809,79 euros, de 7.548,40 euros et de 7.885,20 euros), de sorte qu'elle est fondée à prétendre à la fixation au passif de sa créance à hauteur de la somme de 93.251,41 euros.
Elle fait, de plus, état du jugement du 18 octobre 2022 du tribunal de commerce arrêtant le plan de redressement de la preneuse qui prévoit le règlement du passif tant chirographaire que privilégié à hauteur de 12,5 % par an sur huit ans, le premier versement devant intervenir un an après l'arrêté du plan par le tribunal, cela pour expliciter la demande de condamnation de son adversaire à lui verser la somme totale de 32.623,14 euros ainsi décomposée :23.312,86 euros (soit : 93.251,41 euros x 12,5% x 2) à laquelle s'ajoute celle de 9.310,28 euros (soit : 37.241,13 euros x 12,5 % x 2).
Ceci étant rappelé, il échet d'observer qu'est seule incriminée devant la cour, au rang des manquements donnant lieu à pénalités, l'infraction de la preneuse à la destination contractuelle du bail (page 40/54 des conclusions de la bailleresse) de sorte qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur l'argumentation de la société IV Consulting portant sur le 'racolage’ qui lui était reproché en première instance.
Il ressort des éléments de la procédure qu'entendant bénéficier de la déspécialisation entière du contrat de bail, comme prévu à l'article L145-48 du code de commerce, la preneuse en a fait la demande à la bailleresse le 08 avril 2019, que celle-ci lui a opposé en refus le 03 mai 2019, tout ceci dans les formes et délais prévus à l'article L 148-9 de ce code, et que la procédure introduite par la preneuse devant la tribunal judiciaire de Pontoise, suivant assignation du 15 juillet 2019, fait l'objet d'un sursis à statuer, la bailleresse précisant qu'elle a à nouveau saisi ce juge aux mêmes fins du fait du présent appel.
Il convient de considérer que les éventuels sanctions ou effets de cette procédure distincte, toujours pendante, sont susceptibles d'être soumis à l'appréciation de cette juridiction en application de l'article L 145-50 du même code.
Et surtout, en la présente espèce, que la société Outlet Invest n'établit pas qu'elle est fondée à réclamer des pénalités en se bornant à invoquer la clause du bail la liant à la société IV Consulting qui concerne la destination contractuelle du local et le règlement de l'établissement privé recevant du public.
Ce règlement produit par l'appelante (en pièce n° 22) n'a vocation qu'à régir l'organisation générale du centre (horaires, horaires de livraison, utilisation des parties communes, parking, sécurité, accès de la clientèle, fermeture temporaire) et les modalités d'exploitation qui visent les activités commerciales(obligations générales relatives à la nature du produit vendu (fins de série, dégriffés, sur-stocks...), auprix de vente, à l'attitude commerciale spécifique (étiquetage, terminologie, respect du consommateur,... ) ainsi que le personnel, l'éclairage, l'entretien et le nettoyage.
Et il peut être relevé, au surplus, s'agissant des pénalités que ce règlement prévoit qu'elles 'seront affectées à due concurrence au règlement des charges pénales du Centre'.
Si bien qu'en dépit des calculs opérés pour expliciter le quantum des sommes réclamées, la demande en paiement de la bailleresse portant sur les pénalités ainsi décomptées ne peut être considérée comme fondée.
Le jugement sera, par conséquent, confirmé en ses évaluations des sommes fixées au passif, tant sur la première période considérée que sur la seconde.
Par ailleurs, la société Outlet Invest sera déboutée de sa demande de condamnation au paiement de la somme réclamée au titre des deux premières annuités du plan de redressement, en toute hypothèse calculées sur des montants non retenus par le tribunal, qu'elle ne fonde sur aucun texte.
Sur la créance postérieure au jugement d'ouverture du redressement judiciaire :
Alors qu'il lui était demandé de condamner la preneuse au paiement d'un arriéré locatif, d'une pénalité de retard de 10%, d'intérêts de retard au taux légal majoré de 3% sur la totalité des sommes dues et d'autoriser la bailleresse à conserver le dépôt de garantie, le tribunal a :
ramené à la somme de 4.775,60 euros le montant de l'arriéré locatif (arrêté au 11 janvier 2023), déduisant de la somme réclamée de 19.550 euros le montant des pénalités, à nouveau comptabilisées pour un montant de 14.774,40 euros, par mêmes motifs que précédemment, mais jugeant que les taxes foncières et celles sur les locaux commerciaux dont le fait générateur était leur occupation devaient être mises à la charge de la preneuse,
rejeté la demande présentée au titre de la pénalité de 10% et des intérêts de retard comme nonjustifiée par une référence aux clauses du bail et déjà incluse dans le décompte produit, la société IV Consulting étant à jour pour le règlement des loyers et l'essentiel de ses charges,
assorti la créance retenue (soit : 4.775,60 euros) d'un intérêt au taux légal en raison du caractère limité du montant de la dette.
La société intimée poursuit devant la cour le paiement d'une somme de 48.052,28 euros arrêtée au 31 décembre 2024, outre le paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyerglobal de la dernière année majoré de 100% à compter du 10 mai 2024 et d'une pénalité de retard de 10%, demandant, de plus, que la totalité des sommes dues soient assorties de l'intérêt au tauxlégal majoré de 3 points à compter de cette dernière date et qu'il soit jugé que le dépôt de garantie lui restera acquis.
Dans ses dernières conclusions du 12 janvier 2024, la partie appelante ne se prononçait que sur le décompte antérieurement produit pour dire qu'elle était parfaitement à jour du paiement des loyers et des charges, qu'elle approuvait le tribunal en sa condamnation en principal, sauf en son imputation de la taxe foncière 2021 qui s'analyse, soutient-elle, en une créance antérieure, comme en son rejet des pénalités pour infractions au règlement intérieur.
Sur les loyers, les charges et accessoires et l'indemnité d'occupation réclamée
Si la société Outlet Invest poursuit, à ce titre, le paiement de la somme de 48.052,38 euros arrêtée au 31 décembre 2024, elle se borne à se référer à sa pièce n° 102 en indiquant que s'ajoute à la dette locative (au montant de 19.006,18 euros) des pénalités contractuelles correspondant à l'infraction constatée, au montant de 29.046,20 euros ; elle ne consacre de développements qu'à la taxe foncière pour approuver le tribunal en ce qu'il a jugé (s'agissant de la taxe foncière 2021, prorata temporis,pour la période du 10 mai au 31 décembre 2021) que, dans les rapports entre le preneur et le bailleur, la date de naissance ou le fait générateur de la créance de son remboursement par le preneur était l'occupation du local ; elle sollicite donc la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la preneuse au paiement, à ce titre et pour ladite période, de la somme de 4.775,60 euros.
Il y a d'abord lieu de considérer, comme précédemment statué, que la bailleresse ne saurait prétendre au paiement des 'pénalités contractuelles’qu'elle s'est unilatéralement et sans fondement arrogé le droit de facturer à son profit.
Elle est, en revanche, fondée à poursuivre la confirmation du jugement en sa condamnation au titre de la taxe foncière 2021 dans la mesure où, contrairement à ce que soutient la preneuse qui entend voir juger qu'il s'agit d'une créance antérieure donnant lieu à déclaration, les règles fiscales qui conduisent à mettre en recouvrement cette taxe contre le propriétaire d'un bien immobilier au 1er janvier de l'année n'a pas vocation à s'appliquer, quant à cette date, au preneur dans ses rapports contractuels avec son bailleur.
En l'espèce, l'exigibilité de cette taxe résulte des articles 4.7.6 et 4.9 du contrat de bail ; il y est simplement stipulé que 'la taxe foncière afférente aux locaux sera calculée sur la base de l'imposition par l'Administration et, à défaut, comme pour les charges et travaux'.
S'agissant du surplus de sa réclamation au titre des loyers, charges, accessoires, ou encore taxes, force est de considérer que la société Outlet Invest ne satisfait pas aux exigences de l'article 9 du code de procédure civile selon lequel :'Il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention'.
En effet, le 'décompte’(ainsi dénommé dans son bordereau de pièces communiquées) qu'elle produit en pièce n°102 sans l'assortir d'un quelconque développement ni l'étayer par quelque justificatif que ce soit, se borne à recenser trois 'factures émises’au titre des échéances globalisées du 11/05/2021 au 31/12/2021, puis du 01/01/2023 au 31/12/2023 et enfin du 01/04/2024 au 30/06/2024 ; et elle ne justifie pas des sommes ainsi réclamées alors qu'elle a déjà contraint le tribunal judiciaire de Pontoise à surseoir à statuer dans un premier jugement (comme explicité ci-avant) afin de l'inviter à clarifier et à étayer les divers postes de la créance alors réclamée.
De plus, ces synthèses lapidaires de 'factures émises', qui ne peuvent s'analyser en des décomptes de créance comportant notamment, outre le détail des sommes appelées en conformité avec les périodicités contractuelles, l'enregistrement des paiements de la bailleresse (comme l'était l'extrait de compte arrêté au 19/08/2020 que la société IV Consulting verse en pièce n° 49), privent son adversaire de la faculté de débattre contradictoirement de la créance.
A cet égard, il peut être relevé, à titre exemplatif, que l'examen des 'décomptes’émis le 05/04/2024 puis le 09/01/2025 (pièces n° 93 et 102 de la bailleresse) comportent, pour la même période de facturation et sans nulle explication, l'inscription au débit de la somme de 3.343,94 euros TTC puis de celle de 10.316,44 euros TTC, ou encore que parmi les pièces versées aux débats par la société IV Consulting figurent des preuves de paiements du 1er juillet 2021 au 10 janvier 2023 (pièces n° 63 à 63) sans que la pièce n° 102 de la société Outlet Invest permette de vérifier qu'ils ont bien été pris en compte.
Par suite, il y a lieu de confirmer le jugement en sa condamnation au titre de l'arriéré locatif(soit la somme de 4.775,60 euros arrêtée au 11 janvier 2023 assortie de l'intérêt au taux légal à compter de cette date) mais de déclarer la société Outlet Invest irrecevable en ses réclamations pour le surplus.
Et si elle demande à la cour de fixer une indemnité d'occupation, il échet de rappeler qu'elle dispose d'une décision judiciaire à ce titre et de dire qu'en méconnaissance des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne développe aucun moyen permettant de remettre en cause l'indemnité d'occupation telle que fixée.
Sur la pénalité de retard de 10% et sur la demande relative au taux d'intérêt majoré
La société Outlet Invest poursuit le paiement de ces deux pénalités qu'elle entend voir cumuler, sans en préciser la nature juridique, alors que rien ne permet d'exclure qu'il s'agit ici d'un cumul de clauses pénales, etceci sans les chiffrer autrement que sur la base de sa créance postérieure au redressement judiciaire ni se référer, en dépit des termes du jugement sur ce point, aux clauses du bail susceptibles de les stipuler.
En toute hypothèse, ces pénalités sont réclamées avec pour assiette les sommes en principal ou la totalité des sommes dues par le preneur au titre de sa créance postérieure et la cour, qui n'a fait que confirmer le jugement en sa disposition relative à la taxe foncière assortie de l'intérêt légal, a déclaré la bailleresse irrecevable en sa demande de ce chef pour le surplus.
En conséquence, elle sera déboutée de ses demandes à ces deux titres.
Sur la conservation du dépôt de garantie
Pour motiver le rejet de cette demande, le tribunal a jugé qu'elle n'était pas fondée, s'agissant d'une sûreté destinée à garantir les obligations locatives qui doit être restituée au locataire après son départ des lieux et que l'acquisition de la clause résolutoire était suspendue.
Il convient de rappeler que le dépôt de garantie a pour finalité de permettre de couvrir d'éventuels manquements du preneur, tels des loyers ou des charges impayés ou bien encore des frais de remise en état, et il peut s'analyser en un gage susceptible de compensation.
Mais, au cas particulier, la bailleresse revendique le droit de conserver ce dépôt de garantie indépendamment de cette finalité alors que dans sa déclaration de créance du 05 juillet 2021, peut-il être relevé, elle écrivait :
'Il est expressément demandé que le dépôt de garantie détenu par la société Oulet Invest d'un montant de 4.934,20 euros) vienne en déduction du montant de la créance présentement déclarée par le jeu de la compensation prévue par l'article L 622-7 du code de commerce (pièce n° 8).
Il apparaît qu'elle se borne désormais à réclamer le droit de conserver cette somme sans développer aucun moyen de fait et de droit (notamment en réponse à la motivation du tribunal qui n'est pas même évoquée) pour étayer sa demande, ceci en méconnaissance, comme déjà énoncé, des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Si bien qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce point, le dépôt de garantie en cause devant conserver sa vocation première.
Il s'évince de tout ce qui précède que le jugement sera confirmé en son évaluation de la créance postérieure au jugement d'ouverture, sans plus y ajouter.
Sur les demandes indemnitaires de la société IV Consulting :
La partie appelante se prévaut, d'abord, d'un préjudice résultant d'un trouble de jouissance et poursuit la condamnation de la bailleresse à l'en indemniser en sollicitant, sur la base de 50% des loyers acquittés, la somme de 40.934,67 euros HT (49.121,60 TTC) pour la période du 02 octobre 2017 jusqu'au 3ème trimestre 2021, sauf à parfaire, et en sollicitant, d'autre part, le remboursement de la somme de 12.523,33 euros HT (soit 15.027,96 euros TTC) correspondant à la totalité de sa contribution au fonds marketing (soit environ 3.210 euros HT par an) versée sans contrepartie dans la mesure où la bailleresse omet de faire figurer son enseigne dans ses opérations commerciales.
Elle invoque, ensuite, un préjudice résultant de pertes d'exploitation sur la période s'étendant du 02 octobre 2017 jusqu'à la date de ses écritures et demande à la cour de condamner la bailleresse à lui verser à ce titre la somme de 279.000 euros calculée, selon ses explications, sur la base d'un chiffre d'affaires prévisionnel de création d'activité de 280.000 euros HT et d'un manque à gagner de 57%, comme constaté lors de ses 7 premiers mois d'exploitation, par rapport au chiffre d'affaires espéré.
En faisant valoir qu'ont nécessairement eu un impact sur ce chiffre en ce qu'ils ont constitué une entrave à l'exercice normal de son activité économique, tout à la fois, le défaut de remplissage de 32 cellules vides et le manque d'effort de re-commercialisation pour y parvenir, le caractère trompeur des chiffres de fréquentation annoncés et qui l'ont incitée à prendre à bail les locaux sur la base d'informations ne correspondant pas à la réalité, le grave manquement à assurer une visibilité du commerce et les discriminations pratiquées ainsi que les troubles de jouissance par elle subis.
Les griefs qu'elle développe pour stigmatiser la mauvaise foi de la bailleresse concernent d'abord la détérioration de la commercialité du centre.
Elle soutient que le bailleur est tenu à une obligation de délivrance et de jouissance entendues au sens large et que des obligations spécifiques pèsent sur le bailleur d'un local situé dans un centre commercial dès lors qu'il en maîtrise l'organisation et la cohérence en nouant des contrats avec les locataires ; que l'environnement commercial favorable est un des avantages que le preneur tient d'un tel bail ; que le bail consenti s'analyse en un contrat d'adhésion avec pour conséquence que doivent être sanctionnées, par application de l'article 1171 (nouveau) du code civil des clauses abusives, comme les clauses exonératoires de responsabilité du bailleur (en l'espèce l'article 12)en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif ; que le bail en cause, imposant au preneur des modalités particulières d'exploitation (comme les prix qui, selon l'article 3.2.1 du bail, doivent être au minimum de 30% inférieurs à ceux effectivement pratiqués), atteste de l'ingérence du bailleur et met à sa charge des obligations implicites, telles la commercialité du centre qui est ici une obligation de moyens.
Elle recense les obligations du bail en cause pour démontrer qu'elle a accepté de se soumettre à des obligations exorbitantes du droit commun en contrepartie de l'obligation pour la bailleresse non seulement de conférer au centre une attractivité commerciale favorable mais de la maintenir; elle vise les documents publicitaires destinés aux candidats potentiels, son préambule, son article 4.7 qui oblige le preneur à régler non seulement les charges de son lot mais aussi une quote-part des charges du centre commercial, son article 8 qui restreint son pouvoir de promotion par voie d'affiches, bannières, (...) et son article 10 qui laisse à la bailleresse la prérogative d'organiser l'animation et la promotion de ce centre.
Elle estime qu'elle n'a pas exécuté ses obligations en laissant se détériorer la commercialité du centre et se prévaut de sa carence à relouer les cellules vacantes, tout ceci en se référant à des situations et des chiffres précisément développés dans ses conclusions (pages 23 à 28/51) et étayés ; elle fait en outre état de l'absence de viabilité de l'activité de vente de cosmétiques qu'elle exerce, au demeurant en recul sur le marché français, du refus qu’a opposé la bailleresse à sa demande de déspécialisation alors que l'activité de prêt-à-porter pour enfants se révèle viable, de la fréquentation annoncée du centre en 2017, soit : 2.022.288 visiteurs par an, qui n'a jamais été atteint en s'établissant à environ 800.000, de sorte qu'elle n'a pu réaliser le chiffre d'affaires prévisionnel escompté.
Comme elle entend établir la carence du bailleur à assurer des conditions d'exploitation paisibles en produisant des pièces destinées à attester de l'absence de chauffage dans le hall et de raccordement du local à la climatisation, son impéritie dans l'entretien et le nettoyage de la galerie, son incurie pour assurer la visibilité de son enseigne ou sa négligence pour l'associer à des opérations programmées à l'occasion de certaines fêtes, revendiquant, en conséquence de la gêne substantielle dans l'exploitation des locaux, la légitimité de l'exception d'inexécution.
Au visa des articles 1110 et 1171 (nouveaux) du code civil, enfin, elle identifie des stipulations révélatrices, selon elle, d'un déséquilibre significatif avec un effet 'démultiplicateur’ sur sa situation financière en cas de détérioration de la commercialité du centre, à savoir : son préambule, l'article concernant les modalités très défavorables de révision des loyers, la clause 'charge’ qui la contraint à assumer, sans concertation sur leur opportunité, sa quote-part de charges privatives et communes, le caractère exorbitant des pénalités convenues, l'article 'responsabilité et recours’ par lequel elle renonce à tout recours contre le bailleur 'en cas de défaut d'exploitation des autres locaux de l'ensemble commercial et l'article 10.4 par lequel le bailleur se dégage de sa responsabilité quant à la commercialité du site.
Pour répondre à ces demandes indemnitaires et solliciter la confirmation du jugement en ce qu'il les a rejetées, l'intimée soutient d'abord que preneuse est irrecevable à critiquer les clauses du bail dès lors que son préambule contient la reconnaissance d'une négociation de bonne foi de l'ensemble des conditions du bail et stipule notamment 'Le bail constitue en conséquence un contrat de gré à gré au sens des dispositions de l'article 1110 du code civil'.
Subsidiairement, elle considère que ne sont que prétendus la qualification du bail en contrat d'adhésion et le déséquilibre significatif et soutient cumulativement que son adversaire ne peut prétendre que leur contrat a été 'soustrait à la négociation', ainsi que cet article 1110 définit le contrat d'adhésion ; qu'est en outre inapplicable l'article 1171 du même code, le déséquilibre significatif ne pouvant se rapporter à 'l'adéquation du prix à la prestation’ dès lors que le bail commercial n'est pas une prestation comme il a pu être jugé pour écarter l'application de l'article L 442-6 du code de commerce également invoqué par la preneuse ; que n'est pas davantage applicable l'article 3 de la directive CE 93/13 du 05 avril 2013 sur les clauses abusives entre professionnels et non-professionnels ; et elle reprend les clauses du bail invoquées pour stigmatiser la mauvaise foi de son adversaire.
Sur l'assurance d'une bonne commercialité du centre, elle lui oppose les stipulations du bail, la validité et la portée de la clause de non recours convenue et se réclame de diverses jurisprudences en ce sens.
Subsidiairement, elle se prévaut du défaut de clauses mettant à sa charge des obligations particulières portant sur la garantie de commercialité des lieux, cite à nouveau des jurisprudences dans ce sens pour dire qu'en l'absence d'une législation propre aux centres commerciaux, elle n'avait pas d'obligations spécifiques liées à la commercialité, et détaille les moyens qu'elle a mis en oeuvre pour commercialiser les locaux vacants, notamment des travaux de restructuration ou ses actions de promotion, de communication et d'animation pour satisfaire à son obligation de moyens.
Elle répond, en outre, aux griefs adverses sur la plaquette publicitaire valable en son temps et dénuée de valeur contractuelle, sur le chauffage et la climatisation dont la preuve de dysfonctionnements n'est pas administrée, sur le défaut d'entretien qui n'est que prétendu, à l'instar des pratiques discriminatoires incriminées, et sur la déspécialisation litigieuse pratiquée unilatéralement sans respecter la loi ou le contrat.
Ceci étant exposé, et s'agissant d'abord de la qualification du bail en contrat d'adhésion et du déséquilibre significatif, ne peut prospérer le moyen d'irrecevabilité soulevé par l'intimée se prévalant de la qualification de contrat de gré à gré contenue dans le préambule de leur convention dès lors que cette qualification du bail est précisément débattue au fond.
Si l'action ne peut être fondée sur les dispositions de l'article L 442-6, I, 2° du code de commerce qui permet d'engager la responsabilité d'une partie qui soumet « ou tente de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » dans la mesure où seules les activités de production, de distribution ou de services entrent dans son champ d'application, comme soutenu par l'intimée et comme a pu en juger la Cour de cassation dans un litige qui portait sur l'exécution d'un bail commercial (Cass. civ. 3ème, 15 février 2018, pourvoi n° 17-11329, publié au bulletin), l'article 1171 du code civil, issu de la réforme du droit des contrats et dont se prévaut également la preneuse, dispose :
« Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation ».
Comme elle se prévaut des dispositions de l'article 1110 alinéa 2 du même code selon lequel, par opposition au contrat de gré à gré dont les stipulations sont négociables :
« Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties ».
Mais outre le fait que le bail ne peut être assimilé à certains contrats qui relèvent du code de la consommation où toute négociation est exclue, l'article 1105 du code civil prévoit que « les règles particulières à certains contrats sont des dispositions propres à chacun d'eux » que « les règles générales s'appliquent sous réserve de ces règles particulières » et que le statut des baux commerciaux régi par les articles L 145-1 et suivants du code de commerce, d'ordre public et poursuivant des finalités protectrices au bénéfice du preneur, relève de règles particulières.
La preneuse peut d'autant moins soutenir que le contrat doit être qualifié de contrat d'adhésion que la bailleresse lui oppose justement diverses clauses du contrat qui ont fait l'objet de négociations. Tels l'article 19.3 (qui accorde au preneur la faculté de résiliation du bail à sa première échéance triennale et non à la durée ferme de six ans prévue à l'article 2.2), l'article 19.4.3 (qui déroge à l'article 3.1.6 des conditions générales puisqu'il réduit à deux ans l'interdiction d'installer un commerce similaire), l'article 19.5 (qui élargit la possibilité de changement d'enseigne prévue à l'article 3.1.3 des conditions générales) ou encore l'article 19.12 (par lequel le bailleur renonce à son droit de préférence prévu à l'article 6.3.2 et à l'établissement de toute cession par acte authentique).
S'agissant de l'obligation de délivrance qui pèse sur le bailleur et de la portée de l'article 1719 du code civil du même code, duquel il résulte que le bailleur est obligé, par la nature même du contrat, de délivrer au preneur la chose louée et de l'entretenir en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, les parties s'opposent sur le fait de savoir si, au-delà de la délivrance d'un bien matériellement conforme à sa destination, le bailleur se trouve tenu d'en assurer la commercialité, l'attractivité du centre commercial où se situe le local étant alors regardée comme nécessaire pour rendre le bien conforme à sa destination.
Pour affirmer qu'il appartenait à la bailleresse d'assurer l'attractivité et l'environnement commercial du bail, la société IV Consulting fait état, outre, comme il a été dit, de la plaquette publicitaire (dont il n'est pas établi qu'elle soit entrée dans le champ contractuel), du préambule du contrat relatif aux spécificités du centre commercial, de diverses clauses relatives au remboursement des charges s'étendant aux parties communes, à l'esthétique et à l'enseigne, à l'animation ou à la promotion tendant à démontrer que la bailleresse était tenue de lui assurer un environnement commercial favorable.
Mais ces clauses ne contiennent en réalité que des obligations pesant sur la preneuse et il ne peut s'en déduire une obligation d'assurer la commercialité à la charge du bailleur.
D'autant que la bailleresse est fondée à lui opposer les stipulations clairement exprimées et librement consenties du contrat prévoyant, en son préambule, que 'Le preneur déclare contracter aux présentes en acceptant les aléas économiques pouvant résulter d'une évolution de la zone d'implantation du centre commercial, de la concurrence, du dynamisme des commerçants de l'ensemble commercial, des actions commerciales relevant des décisions de l'association des commerçants ou de tout autre mode de fonctionnement, du maintien, de la transformation ou de la disparition des commerces constituant l'ensemble commercial, sans pouvoir rechercher le bailleur à cet égard'.
Ou son article 10.4 stipulant : 'Le preneur déclare avoir apprécié par lui-même et sous sa propre responsabilité, la commercialité du centre commercial, et reconnaît que le bailleur n'est tenu à aucune obligation de résultat dans le cadre de ses actions de promotion et d'animation commerciales. En conséquence, le preneur dégage le bailleur de toute responsabilité à cet égard'.
Ou encore son article 12 relatif à la responsabilité et aux recours par lequel il renonce à toute action en responsabilité contre le bailleur 'en cas de défaut d'exploitation des autres locaux de l'ensemble commercial'.
Il s'en déduit que la société IV Consulting ne peut se prévaloir d'aucune faute de la société Outlet Invest tenant à un manquement à sa garantie de commercialité qui n'est que prétendue.
S'agissant toujours de l'obligation de délivrance mais tenant à l'entretien et à l'usage de la chose louée à laquelle la preneuse soutient que la bailleresse a failli, si la vente de prêt-à-porter pour enfants pouvait éventuellement ouvrir à la preneuse un marché davantage porteur que celle de cosmétiques et de parfum, force est de considérer qu'elle a enfreint la destination contractuelle du bail et les dispositions relatives à la déspécialisation qui postulent l'accord préalable du bailleur ou une autorisation judiciaire.
Par ailleurs, elle ne peut être suivie en son grief relatif à l'absence de chauffage dans son local (n°1) situé à une entrée du centre dès lors qu'il repose sur un unique constat d'huissier dressé au mois de mai 2018 et sur des bruits de soufflerie, sans davantage d'éléments techniques ou d'autres preuves à d'autres périodes des années écoulées ;comme en son grief relatif au défaut de raccordement à la boucle d'eau chaude et froide qui la prive de la possibilité d'installer une climatisation réversible dans ses locaux, la bailleresse étant fondée à lui opposer le cahier des charges travaux (annexe 2-2 du bail) selon lequel (pièce n° 76) :
'1) boutique se trouvant dans le centre existant, cellules 01 à 76 : cette partie du centre n'est pas raccordée au réseau boucle chaud/froid du centre commercial. Il vous est toutefois possible d'installer un système de climatisation type SPIT dans votre cellule, pour cela un raccordement sur la toiture du centre sera nécessaire', outre l'article 5.1 du bail aux termes duquel 'le preneur fera son affaire des abonnements et raccordements nécessaires au fonctionnement de ses installations (fluides, télécommunications, ...)'.
Enfin, pour ce qui est du défaut d'entretien du centre également imputé à faute à la bailleresse, si l'unique constat d'huissier du vendredi 07 juin 2019 (aux environs de 17h) lui permet de faire état, à cette date, d'un manque de propreté des toilettes, de la présence d'eau et de papier au sol, de celle de papier également sur celui des travées, de poubelles non vidées, de parties sombres ou de spots défectueux en un point précis, il s'agit là d'un constat ponctuel, non étayé par d'autres éléments à d'autres heures ou dates et, quoi qu'il en soit, insuffisants pour permettre à la cour de porter une appréciation valable sur l'inexécution par la bailleresse de son obligation d'entretien.
Ceci d'autant que cette dernière explique notamment que tout ceci a pu être relevé en raison de la fermeture de boutiques assombrissant certaines travées, que les désordres ont pu être constatés entre deux passages du personnel d'entretien et qu'elle produit aux débats un contrat de nettoyage et d'entretien.
Aucune faute ne peut être retenue et il s'évince de tout ce qui précède que le jugement doit être confirmé en ce qu'il déboute la société IV Consulting de ses entières demandes indemnitaires.
Sur les frais de procédure et les dépens
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre partie au litige.
Leur succombance partielle conduit à laisser à chacune d'entre elles la charge de ses propres dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement entrepris ;
Déclare la société Outlet Invest irrecevable en ses demandes en paiement de la dette locative postérieure au 11 janvier 2023 ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation, en l'état, au titre des deux premières années du plan ;
Rejette la demande de la société Outlet Invest portant sur la réévaluation de l'indemnité d'occupation ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel ;
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Présidente et par Mme Mélanie RIBEIRO, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente