CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA ORLÉANS (ch. civ.), 30 avril 2025

Nature : Décision
Titre : CA ORLÉANS (ch. civ.), 30 avril 2025
Pays : France
Juridiction : Orléans (CA), ch. civ.
Demande : 23/00923
Date : 30/04/2025
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 5/04/2023
Décision antérieure : TJ Orléans, 9 mars 2023
Décision antérieure :
  • TJ Orléans, 9 mars 2023
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 23820

CA ORLÉANS (ch. civ.), 30 avril 2025 : RG n° 23/00923 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « L'événement constitutif d'un cas de force majeure doit présenter les caractères d'extériorité, d'imprévisibilité et d'irrésistibilité.

Une pandémie comme celle du COVID 19 est un événement extérieur à M. X. et Mme Y. qui était, à la date de conclusion du contrat de réservation du 11 mars 2019, totalement imprévisible en raison de son caractère inédit. La proclamation de l'état d'urgence sanitaire, l'impossibilité des rassemblements, le report de la célébration des mariages et l'incertitude quant à l'évolution de la situation et des mesures gouvernementales justifient de retenir le caractère d'irrésistibilité de la pandémie. L'avenant le 10 juin 2020 a reporté la période de location du vendredi 16 avril 2021 au dimanche 18 avril 2021. Cependant, la loi du 15 février 2021 prorogeant l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 31 décembre 2021, M. X. et Mme Y. ont été conduits à annuler la fête de mariage, dont la célébration était prévue le 17 avril 2021, et à réclamer à la société Domaine des Cygnes la restitution des sommes versées dès le courrier recommandé du 10 mars 2021, précité.

Il est constant qu'il résulte des articles 1218 et 1229, alinéa 3, du code civil que lorsque le contrat est synallagmatique et que les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, le créancier de l'obligation inexécutée du fait de l'empêchement du débiteur est également libéré de son obligation et a droit à la restitution du prix payé en contrepartie de l'obligation inexécutée (Cass., Com., 26 février 2025, pourvoi n° 23-21.266).

La survenance d'un cas de force majeure ayant définitivement empêché l'exécution par la société Domaine des Cygnes de sa prestation dans les termes convenus, le mariage ayant été maintenu à la date prévue du 17 avril 2021, pièce n°12, il y a lieu de prononcer la résolution de plein droit du contrat.

En conséquence, la société Domaine des Cygnes doit être condamnée, infirmant le jugement, à restituer à M. X. et Mme Y. la somme de 5/900 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2021, en deniers ou quittances. »

 

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 30 AVRIL 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/00923. N° Portalis DBVN-V-B7H-GYON. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ORLEANS en date du 9 mars 2023.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: XXX

Monsieur X.

né le [date] à [Localité 5], [Adresse 3], [Localité 1], représenté par Maître Pierre-François DEREC de la SELARL DEREC, avocat au barreau D'ORLEANS

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [Localité 6], [Adresse 3], [Localité 1], représentée par Maître Pierre-François DEREC de la SELARL DEREC, avocat au barreau D'ORLEANS

D'UNE PART

 

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: YYY

La Société DOMAINE DES CYGNES

Société à Responsabilité Limitée au capital de 3.000 € immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'ORLEANS sous le numéro XXX, agissant en la personne de son Gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 4], [Localité 2], représentée par Maître Arthur DA COSTA de la SELARL MALTE AVOCATS, avocat au barreau d'ORLEANS, D'AUTRE PART

 

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 5 avril 2023.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 2 décembre 2024

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats à l'audience publique du 11 février 2025 à 14h00, l'affaire a été plaidée devant Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, en l'absence d'opposition des parties ou de leurs représentants.

Lors du délibéré, au cours duquel Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles a rendu compte des débats à la collégialité, la Cour était composée de : Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre, Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

GREFFIER : Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT : Prononcé publiquement le 30 avril 2025 (délibéré prorogé, initialement fixé au 1er avril 2025) par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

M. X. et Mme Y. ont conclu le 11 mars 2019 avec la société Nature Prestige, devenue Domaine des Cygnes, un contrat de location de la ferme des Quatre Vents située à [Localité 2] pour fêter leur mariage avec leurs 115 à 155 invités du vendredi 12 juin 2020 au dimanche 14 juin 2020 moyennant un loyer de 5.900 euros payable pour moitié à la signature du contrat et pour moitié au plus tard 30 jours ouvrables avant la date de début de la location.

La loi du 23 mars 2020 déclarant un état d'urgence sanitaire en raison de l'épidémie de COVID 19, à compter du 24 mars 2020 prorogé jusqu'au 10 juillet 2020, a conduit les parties à reporter la période de location, selon avenant le 10 juin 2020, du vendredi 16 avril 2021 au dimanche 18 avril 2021 mais elles ont maintenu que le solde du loyer devait être versé dans les conditions initiales, ce qui obligeait son versement le jour de signature de l'avenant.

La loi du 15 février 2021 prorogeant l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 31 décembre 2021, M. X. et Mme Y. ont été conduits à annuler la fête de mariage, dont la célébration était prévue le 17 avril 2021, et à demander la restitution de l'intégralité des sommes versées, ce qui leur a été refusé.

Par acte du 26 juillet 2022 ils ont fait assigner la société Domaine des Cygnes devant le tribunal judiciaire d'Orléans en résolution du contrat et en restitution du prix payé d'avance.

Par jugement en date du 9 mars 2023, le tribunal judiciaire d'Orléans a :

- débouté M. X. et Mme Y. de leurs demandes,

- condamné in solidum M. X. et Mme Y. à payer à la SARL Domaine des Cygnes la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. X. et Mme Y. aux dépens.

Par déclaration en date du 5 avril 2023, M et Mme X. ont relevé appel de l'intégralité des chefs de ce jugement.

Les parties ont constitué avocat et ont conclu.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 décembre 2024.

[*]

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 4 janvier 2024, M et Mme X. demandent à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par M. et Mme X. à l'encontre du jugement déféré à la censure de la Cour, et en conséquence, y faisant droit,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions critiquées, en ce qu'il a débouté M. X. et Mme Y. de leurs demandes, et les a condamnés in solidum à payer à la SARL Domaine des Cygnes la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Et statuant à nouveau,

- prononcer la résolution du contrat à raison de l'impossibilité pour la société Domaine des Cygnes d'exécuter ses obligations contractuelles dans les termes convenus,

Subsidiairement,

- déclarer que le contrat est caduc à raison de la disparition de l'un de ses éléments essentiels,

Dans tous les cas,

- condamner la société Domaine des Cygnes à verser à M. X. et Mme Y. la somme de 5.900 euros en restitution du prix payé d'avance, en quittance ou en deniers, avec intérêt au taux légal à compter du 19 mars 2021 et subsidiairement du 31 mai 2021, et capitalisation des intérêts par année entière,

Plus subsidiairement,

- déclarer que la clause du contrat selon laquelle « en cas d'annulation de la part du preneur moins de 12 mois avant la date de location, les arrhes versées restent dues » est abusive et doit être réputée non écrite,

Et en conséquence,

- condamner pareillement la société Domaine des Cygnes à verser à M. X. et Mme Y. la somme de 5.900 euros en restitution du prix payé d'avance, en quittance ou en deniers, avec intérêt au taux légal à compter du 19 mars 2021 et subsidiairement du 31 mai 2021, et capitalisation des intérêts par année entière,

Encore plus subsidiairement,

- condamner la société Domaine des Cygnes à verser à M. X. et Mme Y. la somme de 2 950 euros en restitution du prix payé d'avance et excédant le montant des arrhes, en quittance ou en deniers, avec intérêt au taux légal à compter du 19 mars 2021 et subsidiairement du 31 mai 2021, et capitalisation des intérêts par année entière,

En tout état de cause,

- condamner la société Domaine des Cygnes à verser à M. X. et Mme Y. la somme de 600 euros chacun, soit 1.200 euros au total, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

- condamner la société Domaine des Cygnes à verser à M. X. et Mme Y. la somme de 3.500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de justice,

- condamner la société Domaine des Cygnes au paiement des dépens de première instance et d'appel, et accorder à la Selarl Derec, avocat, le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner la société Domaine des Cygnes à restituer à M. et Mme X. la somme de 1 513 euros qu'ils ont versé à la société Domaine des Cygnes au titre des frais et dépens de première instance en exécution du jugement de première instance infirmé,

Et rejeter toutes les demandes et conclusions de la société Domaine des Cygnes.

[*]

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 12 janvier 2024, la SARL Domaine des Cygnes demande à la cour de :

- déclarer la SARL Domaine des Cygnes recevable et bien fondée en ses écritures.

Et, y faisant droit,

- constater qu'aux termes de leurs conclusions notifiées le 5 juillet 2023, M. X. et Mme Y., épouse X., ont déclaré qu'ils avaient annulé leur réservation et qu'ils regrettaient que la Société Domaine des Cygnes n'en ait pas pris acte et ne leur ait pas restitué la somme excédant le montant des arrhes, soit la somme de 2.950 euros,

- constater que la société Domaine des Cygnes a pris acte de leur décision d'annulation notifiée le 5 juillet 2023 et a restitué la somme excédant le montant des arrhes, soit la somme de 2.950 euros,

En conséquence,

- dire n'y avoir lieu à statuer sur les demandes en résolution judiciaire du contrat de location, en déclaration de caducité de ce contrat et en restitution de la somme excédant le montant des arrhes, ces demandes étant devenues sans objet en raison, d'une part, de la décision d'annulation de la réservation notifiée le 5 juillet 2023 ayant mis fin à l'exécution du contrat de location et, d'autre part, de la restitution en cours d'instance de la somme excédant le montant des arrhes,

- déclarer M. X. et Mme Y., épouse X., mal fondés en leur demande en paiement d'intérêts au titre de la somme excédant le montant des arrhes à compter du 19 mars 2021 ou du 31 mai 2021, la décision d'annulation de leur réservation ayant mis fin à l'exécution du contrat de location et la demande de restitution de la somme excédant le montant des arrhes ayant été notifiées le 5 juillet 2023, et les en débouter,

Subsidiairement,

- déclarer M. X. et Mme Y., épouse X., mal fondés en leur demande en résolution judiciaire du contrat de location ou, subsidiairement, en déclaration de caducité de ce contrat, et les en débouter,

En tout état de cause,

- déclarer M. X. et Mme Y., épouse X., irrecevables en leur demande nouvelle visant à voir déclarer abusive la clause relative aux arrhes et la rejeter,

A défaut, déclarer M. X. et Mme Y., épouse X., mal fondés en leur demande visant à voir déclarer abusive la clause relative aux arrhes et les en débouter,

- déclarer M. X. et Mme Y., épouse X., mal fondés en leur demande en paiement de dommages et intérêts et les en débouter,

En conséquence de l'ensemble,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X. et Mme Y., épouse X., de toutes leurs demandes et les a condamnés in solidum à payer à la société Domaine des Cygnes la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

- condamner in solidum M. X. et Mme Y., épouse X., à payer à la SARL Domaine des Cygnes la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. X. et Mme Y., épouse X., aux entiers frais et dépens d'appel,

- rejeter toutes prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la résolution du contrat :

Moyens des parties :

Les appelants indiquent que les festivités telles que prévues et réservées, à savoir, la réception de 115 à 155 invités, pendant trois jours (repas et coucher) concomitamment à la cérémonie de mariage du 17 avril 2021 étaient totalement interdites à cette période. L'annulation du contrat, qui est une résolution, qu'ils ont demandée, ne résulte pas d'un libre choix de leur part de se dédire mais du constat de l'impossibilité pour la société Domaine des Cygnes de leur fournir les prestations convenues aux dates et conditions convenues et donc d'exécuter ses obligations contractuelles telles que convenues. Ils estiment qu'il ne peut leur être reproché de n'avoir pas reporté une seconde fois leur mariage et d'avoir décidé de se marier à la date prévue.

Ils font plaider que l'intimée n'est pas fondée à invoquer la force majeure puisque, si elle pouvait être entendue pour le premier report, elle ne pouvait l'être pour justifier un second report car lors de la signature de l'avenant du 10 juin 2020, les parties connaissaient la situation sanitaire et pouvaient s'attendre à ce que les mesures restrictives de déplacement et de réunion soient prolongées ou réintroduites, ce qui a été le cas à la faveur de nouvelles vagues de l'épidémie, la condition d'imprévisibilité raisonnable de la force majeure ne peut être invoquée. Ils ajoutent, en tout état de cause, que l'article 1218 alinéa 2 du code civil dispose que si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat ; tel est le cas, les festivités de leur mariage, déjà reportées une première fois, n'auraient plus eu de sens si elles avaient dû l'être encore une fois sine die ou à une date lointaine et incertaine compte tenu de la situation de l'époque, pour intervenir sans aucune concomitance avec leur mariage célébré le 17 avril 2021.

Ils précisent que selon lettre recommandée du 19 mars 2021, ils ont fait part à l'intimée de leur décision d'annuler le contrat et demandé la restitution de l'intégralité des sommes versées ; que la lettre de la CIVIS du 31 mai 2021 la mettait en demeure de lui faire parvenir la somme de 5 900 euros dans le délai de 10 jours ; finalement, il a fallu attendre le mois d'octobre 2023 pour qu'elle restitue la somme de 2 950 euros alors qu'elle ne peut se prévaloir de cette stipulation du contrat selon laquelle, en cas d'annulation de la part du preneur moins de 12 mois avant la date de location, les arrhes versées restent dues, dès lors que le contrat est résolu à raison du constat de son impossibilité d'exécuter ses obligations contractuelles dans les conditions convenues.

Elle ajoute que cette clause est abusive et doit être réputée non écrite, en vertu de l'article R. 212-2 du code de la consommation, sa demande, qui n'est pas nouvelle étant recevable, pour constituer un moyen nouveau au soutien de sa demande de restitution du montant des arrhes.

La société Domaine des Cygnes répond que les appelants font preuve de mauvaise foi en prétendant qu'ils lui ont fait part de leur décision d'annuler le contrat alors qu'aucune de leurs lettres n'en exprime la volonté, d'autant qu'en réponse elle leur demandait expressément de prendre position sur le report ou l'annulation du contrat et qu'ils ne lui ont jamais répondu, sauf dans leurs écritures d'appelants du 5 juillet 2023 ; en considération de cette décision d'annulation, elle a restitué le montant excédant celui des arrhes, soit la somme de 2 959 euros.

Elle soutient que la demande des appelants, formée pour la première fois en cause d'appel de ce chef, est ainsi devenue sans objet, tant pour le principal que pour les intérêts qui ne peuvent certainement pas être dus à compter du 19 mars 2021 ou du 31 mai 2021, la décision d'annulation du contrat et la demande de restitution de la somme excédant le montant des arrhes ayant été notifiées le 5 juillet 2023 ; la décision d'annulation des appelants, dont il est pris acte conformément à leur demande, modifie radicalement les données du litige puisqu'il est désormais question d'un contrat annulé par l'effet de la libre volonté des appelants ; un contrat annulé ne pouvant donner lieu à résolution judiciaire, la décision d'annulation prise par les appelants, expressément exprimée dans leurs écritures notifiées le 5 juillet 2023, aux termes desquelles ils ont en outre demandé à la concluante d'en prendre acte et de leur restituer le montant excédant les arrhes, ayant mis fin à l'exécution du contrat conformément à la faculté contractuelle permettant au preneur d'annuler sa réservation. Elle considère qu'il n'y a donc plus lieu de statuer sur la demande de résolution judiciaire du contrat qui est devenue sans objet.

Réponse de la cour :

Il apparaît que par lettre recommandée du 19 mars 2021 avec avis de réception du 22 mars 2021, pièce appelants n°6, M. X. et Mme Y. se sont exprimés en ces termes,

- paragraphe 2, Nous gardant d'évoquer une fois encore les raisons qui nous ont contraints à annuler notre réception fixée initialement au 13 juin 2020 puis reportée au 17 avril 2021...

- dernier paragraphe, Par voie de conséquence, nous vous réitérons notre demande de restitution de l'intégralité des sommes qui vous ont été versées conformément à notre engagement initial et vous faisons sommation de le faire dans le délai de cinq jours ouvrables à compter de la première présentation du présent courrier. Passé ce délai nous saisirons le tribunal judiciaire d'Orléans aux fins de restitution.

En réponse, par courrier recommandé du 29 mars 2021, la société Domaine des Cygnes, après avoir relevé qu'ils adoptaient la même attitude cavalière qu'à l'époque de nos premières discussions, observait que, c'est par choix que vous avez décidé de reporter votre location alors que vous auriez pu la maintenir au mois de juin dernier... vous avez aujourd'hui la possibilité de reporter votre location, en raison de la force majeure, à une date à convenir d'un commun accord et selon les conditions financières applicables à la date de votre éventuel report, soit comme vous semblez nous le notifier, d'annuler votre location. Dans une telle hypothèse, vous connaissez les termes du contrat signé. Nous vous les rappelons néanmoins : En cas d'annulation de la part du Preneur moins de 12 mois avant la date de location, les arrhes versées restent dues.

Il résulte des termes de cet échange que les appelants ont fait part à la société Domaine des Cygnes de leur décision d'annuler le contrat ; qu'en effet, M. et Mme X., en indiquant qu'ils annulaient leur réception et en demandant le remboursement de la somme versée, se prévalaient nécessairement de la résolution du contrat de réservation, ce qu'avait d'ailleurs compris ainsi la société Domaine du Cygne ainsi que le prouve sa réponse.

A l'énoncé de l'article 1218 du code civil,

Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.

Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.

L'événement constitutif d'un cas de force majeure doit présenter les caractères d'extériorité, d'imprévisibilité et d'irrésistibilité.

Une pandémie comme celle du COVID 19 est un événement extérieur à M. X. et Mme Y. qui était, à la date de conclusion du contrat de réservation du 11 mars 2019, totalement imprévisible en raison de son caractère inédit.

La proclamation de l'état d'urgence sanitaire, l'impossibilité des rassemblements, le report de la célébration des mariages et l'incertitude quant à l'évolution de la situation et des mesures gouvernementales justifient de retenir le caractère d'irrésistibilité de la pandémie.

L'avenant le 10 juin 2020 a reporté la période de location du vendredi 16 avril 2021 au dimanche 18 avril 2021. Cependant, la loi du 15 février 2021 prorogeant l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 31 décembre 2021, M. X. et Mme Y. ont été conduits à annuler la fête de mariage, dont la célébration était prévue le 17 avril 2021, et à réclamer à la société Domaine des Cygnes la restitution des sommes versées dès le courrier recommandé du 10 mars 2021, précité.

Il est constant qu'il résulte des articles 1218 et 1229, alinéa 3, du code civil que lorsque le contrat est synallagmatique et que les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, le créancier de l'obligation inexécutée du fait de l'empêchement du débiteur est également libéré de son obligation et a droit à la restitution du prix payé en contrepartie de l'obligation inexécutée (Cass., Com., 26 février 2025, pourvoi n° 23-21.266).

La survenance d'un cas de force majeure ayant définitivement empêché l'exécution par la société Domaine des Cygnes de sa prestation dans les termes convenus, le mariage ayant été maintenu à la date prévue du 17 avril 2021, pièce n°12, il y a lieu de prononcer la résolution de plein droit du contrat.

En conséquence, la société Domaine des Cygnes doit être condamnée, infirmant le jugement, à restituer à M. X. et Mme Y. la somme de 5/900 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2021, en deniers ou quittances.

 

Sur la demande de dommages et intérêts :

Moyens des parties :

M. X. et Mme Y. reprochent à la société Domaine des Cygnes d'avoir fait preuve d'une résistance injustifiée, qui a généré pour eux de nombreux tracas, toutes démarches amiables ayant été vaines.

La société Domaine des Cygnes répond que le préjudice est inexistant et ne peut être imputé à sa faute.

Réponse de la cour :

Aux termes de l'article 1240 du code civil, Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il apparaît que la société Domaine des Cygnes a fait preuve de mauvaise foi en prétendant jusqu'à ses dernières écritures que M. X. et Mme Y. ne lui avaient jamais fait part de leur décision d'annuler le contrat, s'opposant ainsi à la restitution des sommes versées. Ce refus leur a nécessairement causé un préjudice moral, d'autant que les circonstances avaient conduit à l'annulation de la réception prévue sur plusieurs jours à l'occasion de leur mariage.

Le demande étant justifiée, il y sera fait droit en la condamnant à leur payer à chacun une indemnité de 300 euros.

 

Sur les demandes annexes :

La société Domaine des Cygnes, qui succombe, sera condamnée au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel distraits à la Selarl Derec, avocat, au titre de l'article 699 du code de procédure civile et d'une indemnité de procédure de 3.200 euros à M. X. et Mme Y. au titre de l'article 700 de ce code.

La société Domaine des Cygnes sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure.

Elle sera condamnée à restituer à M. X. et Mme Y. de la somme de 1 513 euros réglés au titre des dépens de première instance, en exécution du jugement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, rendu en dernier ressort ;

Infirme le jugement, en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau ;

Prononce la résolution du contrat de location liant la société Domaine des Cygnes à M. X. et Mme Y. ;

Condamne la société Domaine des Cygnes à restituer à M. X. et Mme Y. la somme de 5 900 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2021, en deniers ou quittances ;

La condamne à leur verser à chacun une indemnité de 300 euros à titre de dommages et intérêts (600 euros au total) ;

Condamne la société Domaine des Cygnes au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel distraits à la Selarl Derec, avocat, d'une indemnité de procédure de 3 200 euros à M. X. et Mme Y. ;

Déboute la société Domaine des Cygnes de sa demande d'indemnité de procédure ;

La condamne à payer à M. X. et Mme Y. la somme de 1 513 euros réglés au titre des dépens de première instance.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT