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CA RIOM (3e ch. civ. com.), 14 mai 2025

Nature : Décision
Titre : CA RIOM (3e ch. civ. com.), 14 mai 2025
Pays : France
Juridiction : Riom (CA), 3e ch. civ. et com.
Demande : 24/00906
Décision : 25/161
Date : 14/05/2025
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 4/06/2024
Décision antérieure : TJ Clermont Ferrand, 12 février 2024 : RG n° 21/04009
Numéro de la décision : 161
Décision antérieure :
  • TJ Clermont Ferrand, 12 février 2024 : RG n° 21/04009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23834

CA RIOM (3e ch. civ. com.), 14 mai 2025 : RG n° 24/00906 ; arrêt n° 161

Publication : Judilibre

 

Extrait : « La lettre de mise en demeure du 9 octobre 2020 prévoit un délai de préavis de 15 jours pour régler les échéances impayées du prêt soit une somme de 4.796,17 euros. Or, au regard du montant sollicité, il apparaît que ce délai constitue une durée raisonnable et ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte que la clause de déchéance du terme n'est pas abusive.

De surcroît, force est de constater que les courriers recommandés prononçant la déchéance du terme ont été adressés à M. Y. et Mme X. le 15 décembre 2020 soit plus de deux mois après les mises en demeure préalables.

En conséquence, la déchéance du terme du prêt immobilier est donc régulière, de sorte que Mme X. sera déboutée de sa demande de nullité de la déchéance du terme tirée du caractère abusif de la clause de déchéance du terme. »

 

COUR D’APPEL DE RIOM

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 14 MAI 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/00906. Arrêt n° 161. N° Portalis DBVU-V-B7I-GGBA. Sur APPEL d'un jugement au fond du tribunal judiciaire de Clermont Ferrand en date du 12 février 2024, enregistrée sous le n° 21/04009.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, Mme Sophie NOIR, Conseiller, Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

 

ENTRE :

APPELANTE :

Mme X. divorcée Y.

[Adresse 4], [Localité 7], Représentée par Maître Jean-Louis TERRIOU de la SCP TERRIOU RADIGON FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-XXX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)

 

ET :

INTIMÉS :

M. Y.

[Adresse 1], [Localité 7], Non représenté, assigné à personne

BNP PARIBAS

SA immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro YYY, [Adresse 3], [Localité 6], Représentée par Maître Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

 

DÉBATS : Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, à l'audience publique du 11 mars 2025, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame BERGER, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré. L'affaire est mise en délibéré au 14 mai 2025.

ARRÊT : Prononcé publiquement le 14 mai 2025 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Mme BERGER, conseiller pour la présidente empêchée, et par Mme Valérie SOUILLAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé du litige :

Le 11 août 2010, M. Y. et Mme X. ont souscrit auprès de la SA BNP Paribas un crédit immobilier d`un montant de 162.645,77 euros, remboursable en 240 mensualités, au taux contractuel de 3,55 %.

Les époux ont divorcé selon convention de divorce par consentement mutuel enregistrée par Maître [R], notaire, le 11 août 2017.

Par courriers recommandés du 9 octobre 2020, la SA BNP Paribas a mis en demeure M. Y. et Mme X. de s`acquitter des échéances impayées pour un montant de 4.796,17 euros, en vain.

La banque s'est prévalue de la déchéance du terme le 15 décembre 2020.

Par exploit d'huissier de justice en date du 17 novembre 2021, la SA BNP Paribas a assigné M. Y. et Mme X. devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand afin de demander leur condamnation solidaire à lui régler la somme de 107.666,41 euros, outre intérêts au taux de 3,55% à compter de la mise en demeure du 9 octobre 2020 et une somme de 3.000 euros au titre de l`article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 12 février 2024, le tribunal a :

- condamné solidairement M. Y. et Mme X. à payer à la SA BNP Paribas la somme de 97.821,68 euros au titre du crédit immobilier souscrit le 11 août 2010 ;

- dit que cette somme produit intérêts au taux contractuel de 3,55% à compter du présent jugement ;

- condamné solidairement M. Y. et Mme X. à verser à la SA BNP Paribas la somme de 978,21 euros au titre de l`indemnité forfaitaire concernant le crédit immobilier souscrit le 11 août 2010 ;

- rejeté le surplus des demandes indemnitaires de la SA BNP Paribas ;

- condamné M. Y. à garantir Mme X. des condamnations prononcées à son encontre aux sommes ci-dessus ;

- accordé à Mme X. des délais de paiement à compter du présent jugement pour s`acquitter des sommes susvisées par 23 mensualités de 300 euros et jusqu'à apurement complet de la dette, la demière mensualité étant ajustée en fonction du solde de la dette ;

- dit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance et quinze jours après une vaine mise en demeure de régulariser envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, l'intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible ;

- rappelé que pendant ce délai, les procédures d`exécution, tendant au recouvrement des sommes dues, sont suspendues ;

- condamné M. Y. à verser à Mme X. la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

- condamné M. Y. aux dépens.

- condamné M. Y. à verser à Mme X. la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté la demande de la SA BNP Paribas formée à l`encontre de Mme X. au titre de l`article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.

Mme X. a interjeté appel de ce jugement par déclaration électronique du 4 juin 2024.

[*]

Par conclusions régulièrement notifiées par RPVA le 6 août 2024, Mme X. demande à la cour, au visa des dispositions de l'article 1134 et 1187 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et de l'article L. 212-1 du code de la consommation, de :

- la recevoir en son appel et le dire fondé ;

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand en date du 12 février 2024 en ce qu'il l'a condamnée à payer solidairement avec son ex-époux, M. Y. à la SA BNP Paribas la somme de 97.821,68 euros au titre du crédit immobilier souscrit le 11 août 2010, ainsi que la somme de 978,21 euros au titre de l'indemnité forfaitaire concernant le crédit immobilier souscrit le 11 août 2010 ;

- statuant de nouveau :

- compte tenu de l'absence de déchéance du terme, débouter la SA BNP Paribas de sa demande de condamnation à son encontre à lui payer la somme de 107.666,41 euros, arrêtée à la date du 21 septembre 2021, outre intérêts au taux de 3,55 % à compter de la mise en demeure du 09 octobre 2020 ;

- faisant application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle, condamner la SA BNP Paribas à payer et porter à Maître Emilie Radigon, exerçant au sein de la SCP Terriou Radigon Furlanini la somme de 2.000 euros au titre de ses honoraires ;

- donner acte à Maître Emilie Radigon de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle dans les conditions prévues à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991, si dans un délai de douze mois à compter de la délivrance de l'attestation de fin de mission, elle parvient à récupérer auprès de la SA BNP Paribas, la somme ainsi allouée.

[*]

Par conclusions notifiées par RPVA le 5 novembre 2024, la SA BNP Paribas demande, en réponse, à la cour au visa des articles 1103 et suivants du code civil :

- à titre principal,

- confirmer le jugement querellé en ce que M. Y. et Mme X. ont été condamnés solidairement à lui la somme de 97 821,68 euros correspondant au capital restant dû au taux de 3,55 % ;

- réformer le jugement pour le surplus ;

- condamner M. Y. solidairement avec Mme X. à lui payer :

- à titre principal, la somme de 97.821,68 euros outre intérêts au taux de 3,55 % à compter de la mise en demeure du 9 octobre 2020,

- la somme de 6.847,51 euros au titre de l'indemnité légale de 7 %,

- la somme de 2.997,22 euros au titre du solde d'intérêts dus,

- la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouter Mme X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- à titre subsidiaire, et si par extraordinaire, la cour devait considérer que la déchéance du terme n'était pas acquise ;

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit conclu entre elle et M. Y. et Mme X. ;

- condamner M. Y. solidairement avec Mme X. à lui payer :

- à titre principal, la somme de 97.821,68 euros outre intérêts au taux de 3,55 % à compter de la mise en demeure du 9 octobre 2020,

- la somme de 6.847,51 euros au titre de l'indemnité légale de 7 %,

- la somme de 2.997,22 euros au titre du solde d'intérêts dus,

- la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- en toute hypothèse, condamner les mêmes aux entiers dépens.

[*]

Il sera renvoyé pour l'exposé complet des demandes et moyens des parties à leurs dernières conclusions.

M. Y., à qui la déclaration d'appel et les conclusions de Mme X. ont été signifiées le 12 août 2024 à sa personne, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 mai 2025.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la nullité de la déchéance du terme :

Suite à des échéances de prêt non réglées de leur prêt immobilier, la SA BNP Paribas a adressé à M. Y. et Mme X. une lettre de mise en demeure le 9 octobre 2020 de procéder au paiement d'échéances non réglées et s'est ensuite prévalue de la déchéance du terme par courriers recommandés du 15 décembre 2020 (pièces 5 et 6).

Les courriers ont été adressés à l'adresse du couple au [Adresse 1] à [Localité 7].

Mme X. expose que le couple a divorcé en 2017, qu'elle ne vivait plus au domicile conjugal depuis le 1er avril 2014 et elle affirme que la banque avait connaissance de sa nouvelle adresse. Cependant, si Mme X. justifie qu'elle avait souscrit en mai 2014 un contrat de protection des professionnels auprès de la SA BNP Paribas et qu'elle avait ouvert un livret A à cette même date dans les livres de la BNP en mentionnant son adresse [Adresse 2] à [Localité 7], il apparaît, qu'en tout état de cause, en 2020, date où la banque a envoyé les courriers de mise en demeure puis de déchéance du terme, Mme X. ne résidait plus à cette adresse mais au [Adresse 5] à [Localité 7] comme les documents produits à hauteur de cour l'attestent. Or, Mme X. ne justifie par aucune pièce qu'elle avait informé la SA BNP Paribas de cette nouvelle adresse.

Mme X. sera donc déboutée de sa demande tendant à voir constater que la mise en demeure est intervenue de façon irrégulière.

L'appelante soutient ensuite que la clause de déchéance de terme stipulée par le contrat de prêt prévoyant que le prêteur pourra, en cas de défaillance de l'emprunteur, exiger le remboursement immédiat du solde du compte constitue une clause abusive.

La lettre de mise en demeure du 9 octobre 2020 prévoit un délai de préavis de 15 jours pour régler les échéances impayées du prêt soit une somme de 4.796,17 euros. Or, au regard du montant sollicité, il apparaît que ce délai constitue une durée raisonnable et ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte que la clause de déchéance du terme n'est pas abusive.

De surcroît, force est de constater que les courriers recommandés prononçant la déchéance du terme ont été adressés à M. Y. et Mme X. le 15 décembre 2020 soit plus de deux mois après les mises en demeure préalables.

En conséquence, la déchéance du terme du prêt immobilier est donc régulière, de sorte que Mme X. sera déboutée de sa demande de nullité de la déchéance du terme tirée du caractère abusif de la clause de déchéance du terme.

 

Sur l'indemnité légale de 7 % :

Le premier juge a considéré que l'indemnité de résiliation réclamée devait être réduite à la somme de 978,21 euros. au motif que l'indemnité forfaitaire égale à 7% des sommes dues est manifestement excessive l'équilibre économique de la banque n'ayant pas été affecté par le défaut de paiement qui ne lui a causé qu'un dommage minime.

La société BNP Paribas Personal Finance conteste cette réduction et sollicite la condamnation de M. Y. et Mme X. à lui payer la somme de 6 847,51 euros à ce titre. Elle oppose qu'il ne saurait être considéré que cette clause présente un caractère excessif.

Sur ce,

L'offre de prêt prévoyait en cas de défaillance de l'emprunteur le versement au prêteur d'une indemnité de 7 % calculée sur le montant du solde rendu exigible.

L'article 1231-5 du code civil dispose que le juge peut toujours, même d'office, modérer ou réduire la pénalité prévue au contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Il convient pour apprécier, d'office ou en cas de contestation, le montant contractuellement prévu de l'indemnité, de se référer à l'économie globale du contrat et à son équilibre, ainsi qu'à son application, et notamment au montant du crédit, à la durée d'exécution du contrat, au bénéfice déjà retiré par le prêteur, au taux pratiqué et au pourcentage fixé pour l'indemnité.

En l'espèce, compte tenu du montant et de la durée du prêt et du taux d'intérêt pratiqué, l'indemnité contractuelle de 7 % apparaît manifestement excessive au regard du bénéfice déjà retiré par le prêteur. Le jugement qui a réduit cette clause à 1% soit à la somme de 978,21 euros sera confirmé.

 

Sur les délais de paiement accordés à Mme X. :

Le jugement déféré a accordé à Mme X. des délais de paiement avec l'obligation de s'acquitter de sa dette par 23 mensualités de 300 euros et jusqu'à apurement complet de sa dette, la dernière mensualité étant affectée en fonction du solde de la dette.

La SA BNP Paribas conteste les délais de paiement accordés par le premier juge à Mme X. faisant valoir que Mme X. ne maintient aucune demande à ce titre.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

Les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier si des délais de paiement peuvent être accordés au débiteur ou s'ils doivent lui être refusés.

En l'espèce, la bonne foi de Mme X. est établie en ce que le défaut de paiement du solde du crédit résulte des agissements fautifs de M. Y. Il est justifié par les pièces produites que la situation financière de Mme X., par ailleurs bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale en appel selon décision du 22 mai 2024, justifie l'octroi de délais de paiement.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a accordé des délais de paiement à Mme X.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Mme X. qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

En revanche, pour des raisons tenant à l'équité, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la SA BNP Paribas au titre de ses frais irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de l'appel par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme X. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

Le greffier                             Pour la présidente empêchée