CA VERSAILLES (ch. civ. 1-3), 15 mai 2025
- TJ Versailles (1re ch.), 3 juin 2022 : RG n° 21/01302
CERCLAB - DOCUMENT N° 23858
CA VERSAILLES (ch. civ. 1-3), 15 mai 2025 : RG n° 22/04802
Publication : Judilibre
Extrait : « Aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt Pannon - CJCE 4 juin 2009, aff. C-243/08) et de la Cour de cassation (Civ. 2e, 14 oct. 2021, n° 19-11.758), « il incombe au juge d'examiner d'office la conformité de cette clause aux dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives en recherchant si elle était rédigée de façon claire et compréhensible et permettait à l'adhérent d'évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques et financières qui en découlaient pour lui, et, dans le cas contraire, si elle n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnel ou consommateur. »
Il ressort de l'avis n° 06-02 de la commission des clauses abusives rendue le 23 février 2006 concernant une assurance complémentaire à un crédit (exclusion de garantie) et alléguée par Mme X. que : la clause qui « exclut toute intervention de l'assureur en cas de survenance, postérieurement à la conclusion du contrat, de l'un des événements qui y sont visés, est une clause d'exclusion de garantie » et que « que la préretraite, la retraite ou la cessation d'activité professionnelle peuvent être la conséquence directe et involontaire de la réalisation du risque, à savoir l'invalidité permanente et totale, dont la couverture est la cause de l'engagement de l'assuré ; qu'en pareil cas, la clause litigieuse, qui, sans être mentionnée en caractères très apparents, exclut la garantie du risque assuré, a pour effet de priver le contrat de toute efficacité ; qu'elle crée ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties » ; La commission des clauses abusives a déclaré dans cet avis que ladite clause, « qui au demeurant n'est pas rédigée en caractère très apparents, est abusive, en ce qu'elle exclut la garantie de l'assureur dans le cas où la réalisation du risque d'invalidité permanente et totale, dont la garantie est l'objet même du contrat, a pour conséquence fortuite la mise en préretraite ou en retraite ou la cessation d'activité professionnelle de l'adhérent ».
Toutefois, il est depuis régulièrement jugé pour de telles clauses que, selon l'alinéa 3 de l'article L. 212-1, l'appréciation de leur caractère abusif au sens du premier alinéa du même article ne concerne pas celles qui portent sur l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible. (Civ. 1ère, 21 mars 2018, n°16-26320)
En l'espèce, la notice d'assurance du contrat en son chapitre IX « garantie arrêt de travail » stipule: « Définition de la garantie arrêt de travail - Vous bénéficiez de la garantie si : - à la suite d'une maladie ou à un accident survenant avant le 31 décembre qui suit votre 65ème anniversaire de naissance, vous êtes contraint d'interrompre totalement votre activité professionnelle sur prescription médicale plus de 902 jours consécutifs (…) votre arrêt de travail doit être médicalement constaté et reconnu par le médecin conseil de l'assureur. (…) » La clause litigieuse est la suivante : « Fin de la garantie et des prestations : - le 31 décembre qui suit votre 65ème anniversaire de naissance - en cas de non-paiement des primes - au terme normal ou anticipé de chaque prêt - à la date de déchéance du terme - à la date de votre préretraite ou de votre retraite, quelle qu'en soit la cause, y compris pour inaptitude au travail ».
Mme X., âgée de 58 ans au moment de la souscription des contrats de prêts en décembre 2010 s'est vue, sur le fondement de cette clause, refuser la garantie à compter du 31 janvier 2020, faisant suite à sa mise à la retraite d'office à l'âge de 62 ans le 1er septembre 2019. Comme l'a justement retenu le tribunal, la clause définit de manière claire et précise l'objet du contrat. Elle exclut clairement la garantie du risque d'arrêt de travail assuré, en cas de mise à la retraite consécutive à une déclaration d'inaptitude au travail. En mettant fin à la garantie lors de la mise à la retraite anticipée, en l'espèce imposée, à Mme X. en 2020, la Caci est déchargée de ses obligations à l'égard de l'assurée en invalidité qui pourtant n'avait pas atteint l'âge de 65 ans, alors que cette dernière était déjà en arrêt de travail depuis plusieurs années et qu'elle bénéficiait de ladite garantie « arrêt de travail » depuis 2014. Pour autant, il convient de rappeler que d'une part la prise en charge pendant 6 années n'était que l'application du contrat jusqu'à ce que l'assureur soit informé de la mise en retraite anticipée de Mme X. et que d'autre part, l'application de la garantie n'a pas pour objet de rétablir un équilibre dans l'économie juridique du contrat, mais constitue seulement l'exécution des obligations contractuelles de l'assureur. Aussi, c'est à tort que Mme X. soutient que le déséquilibre de cette clause entre les droits et obligations des parties doit être apprécié : Cette clause, dépourvue de toute ambigüité, ne peut donner lieu à l'appréciation d'un éventuel caractère abusif.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme X. de sa demande tendant à voir déclarer la clause inopposable et réputée non-écrite et par voie de conséquence, de ses demandes de prise en charge du prêt au-delà du 31 janvier 2020 au titre de la garantie « arrêt de travail ».
Mme X. formule une demande de dommages et intérêts, en vue de réparer son préjudice, à savoir notamment le stress qu'elle éprouve générant des poussées aggravant son état de santé, résultant, selon elle, de l'attitude de la société CACI et des procédés déloyaux qu'elle emploie pour éluder ses obligations contractuelles. Au regard de ce qui précède et en l'absence de démonstration d'une faute de la société Caci, la demande est rejetée. Le jugement est confirmé. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
CHAMBRE CIVILE 1-3
ARRÊT DU 15 MAI 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 22/04802. N° Portalis DBV3-V-B7G-VKPQ. Code nac : 58G. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 3 juin 2022 par le TJ de VERSAILLES, 1re ch. : RG n° 21/01302.
LE QUINZE MAI DEUX MILLE VINGT CINQ, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
Madame X.
née le [Date naissance 3] à [Localité 5] (pays), de nationalité Française, [Adresse 4], [Adresse 4], Représentant : Maître Sabine LAMIRAND de la SELARL LPALEX, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.455
INTIMÉES :
CACI NON LIFE DESIGNATED ACTIVITY COMPANY
société de droit irlandais [Adresse 6], et sa succursale en FRANCE :
N° SIRET : XXX, [Adresse 1], [Adresse 1], Représentant : Maître Carine LERENARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 548
SA LE CRÉDIT LYONNAIS
N° SIRET : YYY, [Adresse 2], [Adresse 2], Représentant : Maître Elisa GUEILHERS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 129
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 février 2025, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Florence PERRET, Présidente, Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller, Madame Charlotte GIRAULT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme FOULON
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 17 décembre 2010, Mme X. et M. Y. ont, par l'intermédiaire de la société Rega, souscrit 3 prêts immobiliers auprès de la banque Le Crédit Lyonnais :
- Un prêt n°4008992JTM5S11AH, le 18 janvier 2011,
- Un prêt n°4008992YYANU11AH, le 24 janvier 2011,
- Un prêt n°40089922E2711AH, le 22 mars 2011,
Chacun de ces contrats était assorti d'une assurance couvrant les risques décès, arrêts de travail et perte irréversible d'autonomie auprès de la société d'assurance Caci Vie et Caci non vie (ci-après, « la société Caci »), succursale en France de la société Caci Non Life designated activity Company :
- S'agissant du prêt n°4008992JTM5S11AH, pour une quotité égale du 50% du capital emprunté pour chacun des emprunteurs,
- S'agissant du prêt n°4008992YYANU11AH, pour une quotité égale du 50% du capital emprunté pour chacun des emprunteurs,
- S'agissant du prêt n°40089922E2711AH, pour une quotité égale à 70% du capital emprunté pour Mme X. et une quotité de 30% pour M. Y.
En novembre 2011, Mme X. a appris qu'elle souffrait d'une sclérose en plaque.
Par courrier du 7 janvier 2013, la MSA Île-de-France a informé Mme X. qu'elle était classée dans la catégorie médicale 2, conformément à l'article L.341-4 du code de la sécurité sociale, cette décision prenant effet au 1er janvier 2013.
Par courrier du 17 mars 2015, la société CACI a informé Mme X. qu'elle prenait en charge, à compter du 1er juillet 2014, sa situation au titre de la garantie arrêt de travail.
Le 12 juillet 2019, Mme X. a été informée par la MSA Île-de-France Secteur retraite, de l'attribution de sa retraite personnelle à compter du 1er septembre 2019 au titre d'ex-invalide.
Mme X. a informé son assureur de sa mise en préretraite pour inaptitude professionnelle à compter du 31 janvier 2020.
Par courrier du 13 mars 2020, la société CACI a informé Mme X. qu'elle refusait de poursuivre la prise en charge de son dossier, au titre de la garantie arrêt de travail à compter du 31 janvier 2020, aux motifs que la prestation devait cesser à la date de la retraite.
Mme X. a contesté cette décision.
Par courrier du 15 avril 2020, la société CACI a maintenu sa décision de refus d'indemnisation.
Par actes séparés du 22 et 23 février 2021, Mme X. a respectivement fait assigner la société CACI et la banque Le Crédit Lyonnais devant le tribunal judiciaire de Versailles, aux fins notamment de voir condamner la société CACI à lui verser la somme de 1 855,37 euros par mois du 1er février 2020 jusqu'au 31 décembre 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le versement des sommes dues et, à titre subsidiaire, de voir condamner la banque Le Crédit Lyonnais à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de conseil.
Par jugement du 3 juin 2022, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- reçu l'intervention volontaire de la société CACI prise en sa succursale CACI non vie,
- rejeté les demandes formées par Mme X. à l'encontre de la société CACI,
- rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme X. à l'encontre de la banque Le Crédit Lyonnais,
- condamné Mme X. à payer à la société CACI ainsi qu'à la banque Le Crédit Lyonnais la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme X. aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Sabine Lamirand.
[*]
Par acte du 20 juillet2022, Mme X. a interjeté appel et prie la cour, par dernières écritures du 19 octobre 2022, de :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :
* a rejeté ses demandes à l'encontre de la société CACI,
* a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Mme X. à l'encontre de la banque Le Crédit Lyonnais,
* l'a condamnée à payer à la société CACI ainsi qu'à la banque Le Crédit Lyonnais la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* l'a condamnée aux dépens de l'instance,
Statuant de nouveau,
- déclarer que la société CACI était mal fondée à lui refuser le bénéfice des garanties souscrites dans son adhésion au titre de son incapacité permanente totale,
- déclarer que la clause prévoyant la fin de la garantie et des prestations intervient " à la date de votre préretraite ou de votre retraite, quelle qu'en soit la cause, y compris pour inaptitude au travail " est abusive et donc non écrite,
- condamner en conséquence la société CACI à lui payer :
* la somme de 1 855,37 euros par mois à compter du 1er février 2020 jusqu'au 31 décembre 2022, année des 65 ans de l'assurée,
* ordonner que cette somme porte intérêt légal depuis le 1er février 2020 date d'exigibilité des indemnités,
- condamner la société CACI à maintenir ses prestations envers elle jusqu'au 31 décembre 2022, année des 65 ans de l'assurée et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le versement des sommes dues, (sic)
- condamner la société CACI à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice résultant de l'attitude de la société CACI et des procédés déloyaux qu'elle emploie pour éluder ses obligations contractuelles,
- condamner en tout état de cause la société CACI au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au paiement d'une somme de 3 000 euros pour les frais engagés en première instance et 3 000 euros en cause d'appel,
- condamner la société CACI aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sabine Lamirand conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- dire que les dépens comprendront le droit proportionnel de l'article A 444-32 du code de commerce,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire le jugement n'était pas infirmé concernant CACI et que l'assureur n'était pas condamné à verser les sommes sollicitées, il conviendra de retenir la responsabilité de la banque Le Crédit Lyonnais pour manquement à son devoir de conseil,
- condamner la banque Le Crédit Lyonnais à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice résultant de l'attitude de la société Le Crédit Lyonnais et des procédés déloyaux qu'elle emploie pour éluder ses obligations contractuelles de conseil,
- condamner la banque Le Crédit Lyonnais au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au paiement d'une somme de 3 000 euros pour les frais engagés en première instance et 3 000 euros en cause d'appel,
- condamner la banque Le Crédit Lyonnais aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sabine Lamirand conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Par dernières conclusions du 12 janvier 2023, la société CACI prie la cour de :
- confirmer en tout point le jugement déféré,
En conséquence,
- débouter Mme X. de toutes ses demandes à son encontre,
- condamner Mme X. à verser 1 500 euros supplémentaire au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
Par dernières conclusions du 6 janvier 2023, la banque Le Crédit Lyonnais prie la cour de :
- juger Mme X. mal fondée en son appel et en ses demandes dirigées à son encontre et l'en débouter,
- confirmer purement et simplement la décision entreprise,
Et y ajoutant,
- condamner Mme X. à lui payer une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme X. aux entiers dépens.
[*]
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Sur le caractère abusif de la clause de fin de garantie :
Le tribunal a jugé que la clause n'était pas abusive au motif qu'elle définissait de manière claire et précise l'objet principal du contrat en fixant les limites du risque assuré.
Pour voir déclarer la clause de fin de garantie des contrats litigieux comme abusive, Mme X. s'appuie sur l'avis n° 06-02 de la commission des clauses abusives et fait valoir qu'il existe un déséquilibre du contrat en ce qu'elle n'a été mise à la retraite qu'en raison de son inaptitude totale et définitive au travail, la clause conventionnelle vidant de sa substance la garantie invalidité.
La société Caci répond que les conditions de garantie ne sont pas réunies car l'objet de la garantie et la contrepartie du paiement de la prime par l'assuré est la prise en charge des sinistres « arrêt de travail » de l'assuré « en activité au jour du sinistre » et qui a vocation à reprendre son activité à l'issue de la période de maladie. En second lieu, la société Caci fait valoir que la commission des clauses abusives, dans son avis n°06-02 a requalifié à tort « la clause de délimitation du contrat » en « clause d'exclusion de garantie » alors que la clause contestée en l'espèce, ne répond pas à la définition de l'exclusion, qui est privative, mais fixe seulement des exigences générales et précises auxquelles la garantie est subordonnée. Elle fait valoir en outre qu'elle a pris en charge le risque durant 6 années (entre le 1er juillet 2014 et le 31 janvier 2020), ce qui démontre, selon elle que la clause n'est pas abusive et ne prive pas d'effectivité la garantie d'arrêt de travail qui y est énoncée.
Sur ce,
L'article L. 212-1 du code de la consommation « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1188, 1189, 1191 et 1192 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque les deux contrats sont juridiquement liés dans leur conclusion ou leur exécution.
L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.
Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa.
Un décret pris dans les mêmes conditions, détermine une liste de clauses présumées abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse.
Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies. »
Aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt Pannon - CJCE 4 juin 2009, aff. C-243/08) et de la Cour de cassation (Civ. 2e, 14 oct. 2021, n° 19-11.758), « il incombe au juge d'examiner d'office la conformité de cette clause aux dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives en recherchant si elle était rédigée de façon claire et compréhensible et permettait à l'adhérent d'évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques et financières qui en découlaient pour lui, et, dans le cas contraire, si elle n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnel ou consommateur. »
Il ressort de l'avis n° 06-02 de la commission des clauses abusives rendue le 23 février 2006 concernant une assurance complémentaire à un crédit (exclusion de garantie) et alléguée par Mme X. que : la clause qui « exclut toute intervention de l'assureur en cas de survenance, postérieurement à la conclusion du contrat, de l'un des événements qui y sont visés, est une clause d'exclusion de garantie » et que « que la préretraite, la retraite ou la cessation d'activité professionnelle peuvent être la conséquence directe et involontaire de la réalisation du risque, à savoir l'invalidité permanente et totale, dont la couverture est la cause de l'engagement de l'assuré ; qu'en pareil cas, la clause litigieuse, qui, sans être mentionnée en caractères très apparents, exclut la garantie du risque assuré, a pour effet de priver le contrat de toute efficacité ; qu'elle crée ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties » ;
La commission des clauses abusives a déclaré dans cet avis que ladite clause, « qui au demeurant n'est pas rédigée en caractère très apparents, est abusive, en ce qu'elle exclut la garantie de l'assureur dans le cas où la réalisation du risque d'invalidité permanente et totale, dont la garantie est l'objet même du contrat, a pour conséquence fortuite la mise en préretraite ou en retraite ou la cessation d'activité professionnelle de l'adhérent ».
Toutefois, il est depuis régulièrement jugé pour de telles clauses que, selon l'alinéa 3 de l'article L. 212-1, l'appréciation de leur caractère abusif au sens du premier alinéa du même article ne concerne pas celles qui portent sur l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible. (Civ. 1ère, 21 mars 2018, n°16-26320)
En l'espèce, la notice d'assurance du contrat en son chapitre IX « garantie arrêt de travail » stipule: « Définition de la garantie arrêt de travail
Vous bénéficiez de la garantie si :
- à la suite d'une maladie ou à un accident survenant avant le 31 décembre qui suit votre 65ème anniversaire de naissance, vous êtes contraint d'interrompre totalement votre activité professionnelle sur prescription médicale plus de 902 jours consécutifs (…) votre arrêt de travail doit être médicalement constaté et reconnu par le médecin conseil de l'assureur. (…) »
La clause litigieuse est la suivante :
« Fin de la garantie et des prestations :
- le 31 décembre qui suit votre 65ème anniversaire de naissance
- en cas de non-paiement des primes
- au terme normal ou anticipé de chaque prêt
- à la date de déchéance du terme
- à la date de votre préretraite ou de votre retraite, quelle qu'en soit la cause, y compris pour inaptitude au travail ».
Mme X., âgée de 58 ans au moment de la souscription des contrats de prêts en décembre 2010 s'est vue, sur le fondement de cette clause, refuser la garantie à compter du 31 janvier 2020, faisant suite à sa mise à la retraite d'office à l'âge de 62 ans le 1er septembre 2019.
Comme l'a justement retenu le tribunal, la clause définit de manière claire et précise l'objet du contrat.
Elle exclut clairement la garantie du risque d'arrêt de travail assuré, en cas de mise à la retraite consécutive à une déclaration d'inaptitude au travail.
En mettant fin à la garantie lors de la mise à la retraite anticipée, en l'espèce imposée, à Mme X. en 2020, la Caci est déchargée de ses obligations à l'égard de l'assurée en invalidité qui pourtant n'avait pas atteint l'âge de 65 ans, alors que cette dernière était déjà en arrêt de travail depuis plusieurs années et qu'elle bénéficiait de ladite garantie « arrêt de travail » depuis 2014. Pour autant, il convient de rappeler que d'une part la prise en charge pendant 6 années n'était que l'application du contrat jusqu'à ce que l'assureur soit informé de la mise en retraite anticipée de Mme X. et que d'autre part, l'application de la garantie n'a pas pour objet de rétablir un équilibre dans l'économie juridique du contrat, mais constitue seulement l'exécution des obligations contractuelles de l'assureur.
Aussi, c'est à tort que Mme X. soutient que le déséquilibre de cette clause entre les droits et obligations des parties doit être apprécié : Cette clause, dépourvue de toute ambigüité, ne peut donner lieu à l'appréciation d'un éventuel caractère abusif.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme X. de sa demande tendant à voir déclarer la clause inopposable et réputée non-écrite et par voie de conséquence, de ses demandes de prise en charge du prêt au-delà du 31 janvier 2020 au titre de la garantie « arrêt de travail ».
Mme X. formule une demande de dommages et intérêts, en vue de réparer son préjudice, à savoir notamment le stress qu'elle éprouve générant des poussées aggravant son état de santé, résultant, selon elle, de l'attitude de la société CACI et des procédés déloyaux qu'elle emploie pour éluder ses obligations contractuelles. Au regard de ce qui précède et en l'absence de démonstration d'une faute de la société Caci, la demande est rejetée.
Le jugement est confirmé.
Sur la demande au titre du manquement du LCL à son devoir de conseil :
Le tribunal a débouté Mme X. de sa demande en jugeant que la banque apportait la preuve qu'elle avait satisfait à son obligation d'information.
A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement, Mme X. fait valoir que le LCL a manqué à son devoir d'information en omettant de lui indiquer les conséquences financières d'une absence de garantie complémentaire en cas d'invalidité subie après 65 ans mais avant le terme du prêt. Elle soutient qu'elle a perdu une chance de rechercher une meilleure assurance voire de souscrire une assurance complémentaire qui lui aurait permis de percevoir un complément de revenu en cas d'invalidité jusqu'à 65 ans, du fait de ce manquement. Elle soutient que la remise d'une notice d'information est insuffisante à informer l'assurée sur l'étendue des risques encourus.
La société LCL la banque répond qu'elle a bien informé sa cliente sur les caractéristiques de l'assurance proposée ainsi qu'en attestent les fiches standardisées d'information remises à cette occasion et qu'elle a précisément pris le soin de mettre en avant certaines caractéristiques du contrat proposé en indiquant que « la garantie Arrêt de travail cessait le jour du départ en retraite ou préretraite et au plus tard au 31 décembre suivant votre 65ème anniversaire ». En outre elle relève que Mme X. ne prétend pas que le contrat ne serait pas en adéquation avec ses besoins, ni que la clause litigieuse n'aurait pas été portée à sa connaissance ou mériterait interprétation mais qu'il s'agit pour elle d'obtenir qu'elle soit déclarée abusive, ce qui ne résulte pas d'un quelconque manquement de la banque elle-même. Enfin, la société LCL soutient que Mme X. ne démontre pas la perte de chance qu'elle allègue et n'établit pas spécifiquement qu'elle aurait trouvé un assureur acceptant de garantir ce que la société Caci a refusé de garantir ni sa volonté d'accepter une assurance complémentaire pour lui permettre de percevoir un complément de revenus en cas d'invalidité jusqu'à soixante-cinq ans.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que c'est par de justes motifs qu'elle adopte que le tribunal a débouté Mme X. de sa demande d'indemnisation. Le jugement est donc confirmé.
Sur les autres demandes :
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.
Mme X. succombant est condamnée aux dépens et à verser à la société LCL et la société Caci la somme de 1 500 euros chacune au titre de leurs frais irrépétibles engagés,
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire mise à disposition,
Confirme le jugement dans ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant
Condamne Mme X. à verser à la société Caci non life designated activity company prise en sa succursale en France, la Caci non vie la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X. à verser à la société Le Crédit Lyonnais la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X. aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Florence PERRET, Présidente et par Madame FOULON, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,