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CA VERSAILLES (ch. civ. 1-2), 3 juin 2025

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (ch. civ. 1-2), 3 juin 2025
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), ch. civ. 1-2
Demande : 24/04786
Décision : 25/178
Date : 3/06/2025
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 23/07/2024
Décision antérieure : T. proxim. Gonesse, 14 décembre 2023 : RG n° 1123000929
Numéro de la décision : 178
Décision antérieure :
  • T. proxim. Gonesse, 14 décembre 2023 : RG n° 1123000929
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23934

CA VERSAILLES (ch. civ. 1-2), 3 juin 2025 : RG n° 24/04786 ; arrêt n° 178 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « L'article 1346-1 du code civil dispose : « La subrogation conventionnelle s'opère à l'initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur. Cette subrogation doit être expresse. Elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n'ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement. La concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tous moyens. »

L'article 1346-2 du même code dispose : « La subrogation a lieu également lorsque le débiteur, empruntant une somme à l'effet de payer sa dette, subroge le prêteur dans les droits du créancier avec le concours de celui-ci. En ce cas, la subrogation doit être expresse et la quittance donnée par le créancier doit indiquer l'origine des fonds. La subrogation peut être consentie sans le concours du créancier, mais à la condition que la dette soit échue ou que le terme soit en faveur du débiteur. Il faut alors que l'acte d'emprunt et la quittance soient passés devant notaire, que dans l'acte d'emprunt il soit déclaré que la somme a été empruntée pour faire le paiement, et que dans la quittance il soit déclaré que le paiement a été fait des sommes versées à cet effet par le nouveau créancier. »

Il est constant que le créancier est ici la société GCA Livry, fournisseur du véhicule, lequel a reçu paiement directement de la part de la société Toyota Kreditbank GMBH, prêteur, et a dès lors subrogé celle-ci dans ses droits à l'égard des emprunteurs-acquéreurs, M. et Mme Y.

Le document intitulé « Quittance subrogative (réserve de propriété) » comporte une clause de réserve de propriété au profit de la société Toyota Kreditbank GMBH rédigée en ces termes : « Le fournisseur vend à l'acquéreur-emprunteur un bien dont le prix, la désignation et les caractéristiques sont les suivantes, étant précisé que la livraison dudit bien sera postérieure à la signature du présent engagement (...). L'acquéreur-emprunteur se reconnaît dûment informé de l'existence de cette clause de réserve de propriété. Il confirme l'accepter purement et simplement et s'engage à ne pas y faire obstacle (...). Par la suite du paiement opéré par le prêteur, le fournisseur subroge le prêteur dans ses droits et actions à l'encontre de l'acquéreur-emprunteur et notamment dans le bénéfice de la clause de réserve de propriété conformément aux dispositions de l'article 1346-1 du code civil. Parallèlement, l'acheteur accepte de subroger le prêteur dans les droits du fournisseur avec le concours de celui-ci conformément aux dispositions de l'article 1346-2 du code civil. En conséquence, en cas d'exigibilité immédiate du solde du prêt dans les conditions prévues au contrat y afférent, le prêteur pourra exiger la restitution immédiate du véhicule à laquelle l'acquéreur-emprunteur devra satisfaire à ses frais, risques et périls (...) »

Le premier juge a retenu que cette clause, en ce qu'elle prévoit une subrogation qui laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété, a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment. Il a considéré abusive la clause au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation et en a conclu qu'elle devait être déclarée non écrite, la société Toyota Kreditbank GMBH devant en conséquence être déboutée de sa demande de restitution du véhicule et de ses demandes subséquentes.

Certes, lorsque le prêteur se borne à verser au vendeur du bien financé les fonds empruntés par son client, il n'est pas l'auteur du paiement mais le mandataire de l'emprunteur-acheteur et l'emprunteur-acheteur devient, dès ce versement, propriétaire du matériel vendu de sorte que dès ce paiement, fût-ce au moyen d'un crédit, la clause de réserve de propriété n'a plus d'effet. En revanche, si la subrogation est consentie au prêteur par le débiteur lui-même, conformément aux dispositions de l'article 1346-2 alinéa 1er du code civil, elle conserve son plein effet/ Au cas d'espèce, les parties ont signé une clause, rappelée ci-dessus, qui prévoit les deux hypothèses permettant de transmettre la garantie tenant à la réserve de propriété. Si le mécanisme de l'article 1346-1 du code civil n'a aucune efficacité, celui de l'article 1346- 2 peut être utilement invoqué par la société Toyota Kreditbank GMBH.

En conséquence, il convient d'enjoindre à M. et Mme Y. de restituer à la société Toyota Kreditbank GMBH le véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], dans le mois suivant la signification de l'arrêt, et, à défaut de restitution dans ce délai, d'autoriser la société Toyota Kreditbank GMBH à faire procéder à son appréhension, en tous lieux et entre toutes mains par le ministère de tel commissaire de justice qu'il lui plaira. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

CHAMBRE CIVILE 1-2

ARRÊT DU 3 JUIN 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 24/04786. Arrêt n° 178. N° Portalis DBV3-V-B7I-WVLV. Code nac : 53D. PAR DEFAUT. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 décembre 2023 par le Juridiction de proximité de GONESSE : R.G. n° 1123000929.

LE TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT CINQ, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

Société TOYOTA KREDITBANK GMBH PRISE EN SA SUCCURSALE TOYOTA FRANCE FINANCEMENT

société de droit Allemand au capital de XXX dont le siège social est sis [Adresse 8] (Allemagne) prise en sa succursale TOYOTA FRANCE FINANCEMENT, située [Adresse 3], et en ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège. N° SIRET : B YYY, [Adresse 3], [Localité 5], Représentant : Maître Claire CHEVANNE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 703, Plaidant : Maître Amaury PAT de la SELARL RIVAL, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0348

 

INTIMÉS :

Madame X. épouse Y.

née le [Date naissance 1] à [pays], de nationalité Française, [Adresse 4], [Localité 6], Défaillante, déclaration d'appel signifiée par dépôt à étude de commissaire de justice

Monsieur Y.

né le [Date naissance 2] à [pays], de nationalité Haïtienne, [Adresse 4], [Localité 6], Défaillant, déclaration d'appel signifiée par dépôt à étude de commissaire de justice

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 3 avril 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Philippe JAVELAS, Président, Madame Anne THIVELLIER, Conseillère, Madame Valérie DE LARMINAT, Conseillère,

Greffière en pré-affectation, lors des débats et du prononcé de la décision : Madame Bénédicte NISI,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Rappel des faits constants :

Suivant offre de contrat acceptée le 10 octobre 2020, la société de droit allemand Toyota Kreditbank GMBH, prise en sa succursale Toyota France Financement, a consenti à Mme Y. née X. et M. Y. un crédit à la consommation amortissable d'un montant en capital de 22.590 euros, remboursable en 60 mensualités de 427,01 euros au taux de 4,31 % l'an.

Ce crédit était affecté au financement de l'achat d'un véhicule d'occasion de marque Toyota et de modèle C-HR l22H édition 2WD E-CVT C-HR, qui a été livré le 23 octobre 2020, suivant procès-verbal de réception signé le même jour.

Plusieurs mensualités étant restées impayées à leur échéance, la société Toyota Kreditbank GMBH a, par lettres recommandées avec accusé de réception du 14 mars 2022, mis en demeure M. et Mme Y. s'acquitter des mensualités échues impayées, dans un délai de huit jours, sous peine de déchéance du terme.

Par lettres recommandées avec accusé de réception du 22 avril 2022, la société Toyota Kreditbank GMBH s'est prévalue de la déchéance du terme, et a mis les emprunteurs en demeure de rembourser l'intégralité du crédit, toutefois sans effet.

Puis la société Toyota Kreditbank GMBH a assigné M. et Mme Y. devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Gonesse par acte de commissaire de justice délivré le 2 juin 2023 pour obtenir leur condamnation au paiement des sommes dues au titre du contrat de prêt.

 

La décision contestée

Devant le juge des contentieux de la protection, la société Toyota Kreditbank GMBH a présenté les demandes suivantes :

- enjoindre à M. et Mme Y. de restituer le véhicule financé de marque Toyota, immatriculé [Immatriculation 7], sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à défaut d'exécution dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

- autoriser l'appréhension du véhicule financé en tous lieux et entre toutes mains, par ministère de tel huissier territorialement compétent qu'il lui plaira,

- condamner solidairement M. et Mme Y. à lui payer une somme de 21 094,19 euros assortie des intérêts au taux contractuel de 4,31 % l'an courus et à courir à compter du 22 avril 2022 et jusqu'au jour du plus complet paiement,

- condamner en outre solidairement M. et Mme Y. à lui payer une somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers frais et dépens.

M. et Mme Y. n'ont pas comparu et n'étaient pas représentés lors de l'audience qui s'est tenue le 12 octobre 2023.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 14 décembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Gonesse a :

- prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts de la société Toyota Kreditbank GMBH au titre du crédit affecté souscrit le 10 octobre 2020 par M. et Mme Y.,

- écarté l'application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier,

- condamné solidairement M. et Mme Y. à payer à la société Toyota Kreditbank GMBH la somme de 17 418,73 euros à titre de restitution des sommes versées en application du contrat précité,

- dit que cette somme ne produira pas d'intérêts même au taux légal,

- débouté la société Toyota Kreditbank GMBH de sa demande de restitution sous astreinte du véhicule financé,

- débouté la société Toyota Kreditbank GMBH de sa demande tendant à être autorisée à faire procéder en tous lieux et entre toutes mains à l'appréhension du véhicule financé,

- condamner in solidum M. et Mme Y. à payer à la société Toyota Kreditbank GMBH la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Toyota Kreditbank GMBH du surplus de ses demandes,

- condamné in solidum M. et Mme Y. aux dépens,

- rappelé que le jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge a retenu que la société prêteuse ne justifiait pas avoir consulté le FICP (Fichier national des Incidents de remboursement des Crédits) en violation des dispositions de l'article L. 312-16 du code de la consommation.

Le premier juge a également débouté la société Toyota Kreditbank GMBH de sa demande de restitution sous astreinte du véhicule financé et des mesures d'exécution forcée, motif pris que la clause de subrogation insérée au contrat prévoyant la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété grevant le bien financé était abusive, qu'elle ne pouvait donc trouver à s'appliquer.

 

La procédure d'appel

La société Toyota Kreditbank GMBH a relevé appel du jugement par déclaration du 23 juillet 2024 enregistrée sous le numéro de procédure 24/04786.

Par ordonnance rendue le 6 février 2025, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 3 avril 2025, dans le cadre d'une audience devant le conseiller rapporteur.

Le conseil de la société Toyota Kreditbank GMBH a procédé au dépôt de son dossier de plaidoiries sans se présenter à l'audience.

 

Prétentions de la société Toyota Kreditbank GMBH, appelante

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 21 octobre 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Toyota Kreditbank GMBH demande à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

. prononcé la déchéance totale du droit à ses intérêts au titre du crédit affecté souscrit le 10 octobre 2020 par M. et Mme Y.,

. écarté l'application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier,

. condamné solidairement M. et Mme Y. à lui payer la somme de 17 418,73 euros à titre de restitution des sommes versées en application du contrat précité,

. dit que cette somme ne produira pas d'intérêts même au taux légal,

. l'a déboutée de sa demande de restitution sous astreinte du véhicule financé,

. l'a déboutée de sa demande tendant à être autorisée à faire procéder, en tous lieux et en toutes mains, à l'appréhension du véhicule financé,

. l'a déboutée du surplus de ses demandes,

statuant à nouveau,

vu les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation,

vu l'article 514 du code de procédure civile,

- la déclarer bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- enjoindre à M. et Mme Y. de lui restituer le véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7],

- juger que cette injonction de restituer le véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], sera assortie d'une astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard, à défaut d'exécution dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

- l'autoriser à faire procéder à l'appréhension du véhicule de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], en tous lieux et entre toutes mains, par ministère de tel huissier territorialement compétent qu'il lui plaira,

- condamner in solidum M. et Mme Y. à lui payer la somme de 21 094,19 euros assortie des intérêts au taux contractuel de 4,31 % l'an courus et à courir à compter du 22 avril 2022 et jusqu'au jour du plus complet paiement,

- condamner in solidum M. et Mme Y. au paiement d'une somme de 2 000 euros à son profit, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. et Mme Y. aux entiers frais et dépens.

 

Prétentions de M. et Mme Y., intimés

M. Y. n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel lui a été signifiée par acte du 30 août 2024 délivré en l'étude du commissaire de justice chargé de le remettre. Les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées par acte du 30 octobre 2024 délivré à une personne présente au domicile du destinataire.

Mme Y. n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel lui a été signifiée par acte du 30 août 2024 délivré en l'étude du commissaire de justice chargé de le remettre. Les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées par acte du 30 octobre 2024 délivré au destinataire en personne.

L'arrêt sera rendu par défaut, conformément aux dispositions de l'article 474 alinéa 2 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

A titre liminaire, il est rappelé qu'en application du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile, « La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ».

Par ailleurs, en application de l'article 472 du code de procédure civile, le juge d'appel ne fait droit à l'appel que si celui-ci lui paraît fondé dans ses critiques de la décision rendue par les premiers juges.

 

Sur la consultation du FICP :

La société Toyota Kreditbank GMBH indique produire, en cause d'appel, la preuve de la consultation du FICP.

Il est rappelé qu'en application de l'article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 751-1, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 751-6.

Il résulte de l'article 13 I. de l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, dans sa version applicable au jour de la conclusion du contrat, qu'en application de l'article L. 751-6 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l'article 2, conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées. Constitue un support durable tout instrument permettant aux établissements et organismes mentionnés à l'article 1er de stocker les informations constitutives de ces preuves, d'une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l'identique.

En l'espèce, la société Toyota Kreditbank GMBH produit aux débats un extrait du portail de la Banque de France (sa pièce 7).

Ce document, présenté sous la forme d'un relevé informatique, précise :

- la date de consultation,

- la clé BDF et le nom de l'emprunteur,

- le motif de la consultation,

- la date de la réponse,

- le résultat de la consultation.

Au regard de ce document, certes succinct mais dont la force probante apparaît suffisante, il y a lieu de constater que la société Toyota Kreditbank GMBH a satisfait à son obligation et donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déchu le prêteur de son droit aux intérêts conventionnels pour ce motif, sans qu'il y ait lieu d'examiner la question subséquente de la privation des intérêts au taux légal.

 

Sur le montant de la créance :

Aux termes de l'article L. 312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.

En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L'article D. 312-16 dudit code dispose que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

La société Toyota Kreditbank GMBH verse aux débats, en plus des pièces déjà évoquées, les pièces suivantes :

- le contrat de crédit,

- la notice d'assurance,

- le procès-verbal de livraison,

- la quittance subrogative,

- la FIPEN,

- la fiche de dialogue,

- les justificatifs personnels,

- le détail de créance,

- le tableau d'amortissement,

- l'historique de compte,

- les deux lettres de mise en demeure du 14 mars 2022,

- les deux lettres de mise en demeure valant déchéance du terme du 22 avril 2022.

Au vu de ces éléments, la créance de la société Toyota Kreditbank GMBH à l'égard de M. et Mme Y. s'établit ainsi :

. 17 713,62 euros au titre du capital restant dû au jour de la déchéance du terme,

. 1 789,36 euros au titre des intérêts échues impayées,

soit au total la somme de 19 052,98 euros.

Il convient donc de condamner M. et Mme Y. au paiement de la somme ainsi arrêtée, laquelle produira intérêts au taux contractuel de 4,31 %, à compter du 22 avril 2022, date de la déchéance du terme.

La société Toyota Kreditbank GMBH sollicite également la condamnation de M. et Mme Y. à lui verser la somme de 1 560,24 euros au titre de l'indemnité de résiliation.

Aux termes de l'article 1231-5 du code civil, le juge peut toujours, même d'office, modérer ou réduire la pénalité prévue au contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Il convient pour apprécier, d'office ou en cas de contestation, le montant contractuellement prévu de l'indemnité, de se référer à l'économie globale du contrat et à son équilibre, ainsi qu'à son application, et notamment au montant du crédit, à la durée d'exécution du contrat, au bénéfice déjà retiré par le prêteur, au taux pratiqué et au pourcentage fixé pour l'indemnité.

En l'espèce, compte tenu du montant et de la durée du prêt, du taux d'intérêt et des remboursements déjà effectués par les emprunteurs, l'indemnité contractuelle de 8 % apparaît manifestement excessive au regard du bénéfice déjà retiré par le prêteur. Elle doit être réduite à la somme de 300 euros qui produira intérêts au taux légal à compter du présent arrêt jusqu'à parfait paiement. Le jugement sera infirmé de ce chef.

M. et Mme Y. sont tenus solidairement au paiement des sommes ainsi fixées, conformément à l'engagement de solidarité figurant dans le contrat in fine.

 

Sur la restitution du bien financé :

A l'appui de sa demande de restitution du véhicule financé, la société Toyota Kreditbank GMBH

produit une quittance subrogative et rappelle que le contrat contient une garantie tenant à une clause de réserve de propriété.

Elle soutient que c'est à tort que le premier juge a jugé que les conditions de la subrogation conventionnelle n'étaient pas satisfaites, au motif que le paiement du créancier subrogeant n'avait pas été effectué par un « tiers ».

Sur ce,

L'article 1346-1 du code civil dispose : « La subrogation conventionnelle s'opère à l'initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur.

Cette subrogation doit être expresse.

Elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n'ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement. La concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tous moyens. »

L'article 1346-2 du même code dispose : « La subrogation a lieu également lorsque le débiteur, empruntant une somme à l'effet de payer sa dette, subroge le prêteur dans les droits du créancier avec le concours de celui-ci. En ce cas, la subrogation doit être expresse et la quittance donnée par le créancier doit indiquer l'origine des fonds.

La subrogation peut être consentie sans le concours du créancier, mais à la condition que la dette soit échue ou que le terme soit en faveur du débiteur. Il faut alors que l'acte d'emprunt et la quittance soient passés devant notaire, que dans l'acte d'emprunt il soit déclaré que la somme a été empruntée pour faire le paiement, et que dans la quittance il soit déclaré que le paiement a été fait des sommes versées à cet effet par le nouveau créancier. »

Il est constant que le créancier est ici la société GCA Livry, fournisseur du véhicule, lequel a reçu paiement directement de la part de la société Toyota Kreditbank GMBH, prêteur, et a dès lors subrogé celle-ci dans ses droits à l'égard des emprunteurs-acquéreurs, M. et Mme Y.

Le document intitulé « Quittance subrogative (réserve de propriété) » comporte une clause de réserve de propriété au profit de la société Toyota Kreditbank GMBH rédigée en ces termes :

« Le fournisseur vend à l'acquéreur-emprunteur un bien dont le prix, la désignation et les caractéristiques sont les suivantes, étant précisé que la livraison dudit bien sera postérieure à la signature du présent engagement (...). L'acquéreur-emprunteur se reconnaît dûment informé de l'existence de cette clause de réserve de propriété. Il confirme l'accepter purement et simplement et s'engage à ne pas y faire obstacle (...). Par la suite du paiement opéré par le prêteur, le fournisseur subroge le prêteur dans ses droits et actions à l'encontre de l'acquéreur-emprunteur et notamment dans le bénéfice de la clause de réserve de propriété conformément aux dispositions de l'article 1346-1 du code civil.

Parallèlement, l'acheteur accepte de subroger le prêteur dans les droits du fournisseur avec le concours de celui-ci conformément aux dispositions de l'article 1346-2 du code civil. En conséquence, en cas d'exigibilité immédiate du solde du prêt dans les conditions prévues au contrat y afférent, le prêteur pourra exiger la restitution immédiate du véhicule à laquelle l'acquéreur-emprunteur devra satisfaire à ses frais, risques et périls (...) »

Le premier juge a retenu que cette clause, en ce qu'elle prévoit une subrogation qui laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété, a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment.

Il a considéré abusive la clause au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation et en a conclu qu'elle devait être déclarée non écrite, la société Toyota Kreditbank GMBH devant en conséquence être déboutée de sa demande de restitution du véhicule et de ses demandes subséquentes.

Certes, lorsque le prêteur se borne à verser au vendeur du bien financé les fonds empruntés par son client, il n'est pas l'auteur du paiement mais le mandataire de l'emprunteur-acheteur et l'emprunteur-acheteur devient, dès ce versement, propriétaire du matériel vendu de sorte que dès ce paiement, fût-ce au moyen d'un crédit, la clause de réserve de propriété n'a plus d'effet.

En revanche, si la subrogation est consentie au prêteur par le débiteur lui-même, conformément aux dispositions de l'article 1346-2 alinéa 1er du code civil, elle conserve son plein effet

Au cas d'espèce, les parties ont signé une clause, rappelée ci-dessus, qui prévoit les deux hypothèses permettant de transmettre la garantie tenant à la réserve de propriété.

Si le mécanisme de l'article 1346-1 du code civil n'a aucune efficacité, celui de l'article 1346- 2 peut être utilement invoqué par la société Toyota Kreditbank GMBH.

En conséquence, il convient d'enjoindre à M. et Mme Y. de restituer à la société Toyota Kreditbank GMBH le véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], dans le mois suivant la signification de l'arrêt, et, à défaut de restitution dans ce délai, d'autoriser la société Toyota Kreditbank GMBH à faire procéder à son appréhension, en tous lieux et entre toutes mains par le ministère de tel commissaire de justice qu'il lui plaira.

En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte, les modalités prévues afin de permettre au prêteur d'appréhender le véhicule le cas échéant, notamment le recours à la force publique, apparaissant suffisamment comminatoires.

Le jugement sera en conséquence infirmé au titre des demande de restitution et d'appréhension du véhicule financé et confirmé en ce qu'il n'a pas été fait droit à la demande d'astreinte.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure :

Compte tenu de la teneur de la décision rendue, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a condamné M. et Mme Y. au paiement des dépens de l'instance et à payer à la société Toyota Kreditbank GMBH une somme de 300 euros au titre des frais irrépétibles.

M. et Mme Y., tenus à paiement, supporteront in solidum les dépens d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

M. et Mme Y. seront en outre condamnés in solidum à payer à la société Toyota Kreditbank GMBH une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 800 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt rendu par défaut,

INFIRME le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection de Gonesse le 14 décembre 2023, en ce qu'il a condamné M. Y. et Mme Y. née X. au paiement des dépens de l'instance et à payer à la société de droit allemand Toyota Kreditbank GMBH une somme de 300 euros au titre des frais irrépétibles,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts,

CONDAMNE solidairement M. Y. et Mme Y. née X. à payer à la société de droit allemand Toyota Kreditbank GMBH les sommes suivantes :

. 19 052,98 euros avec intérêts au taux de 4,31 % l'an à compter du 22 avril 2022 au titre du prêt n° 28961000735736,

. 300 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt au titre de l'indemnité de résiliation afférente à ce prêt,

ENJOINT à M. Y. et Mme Y. née X. de restituer à la société Toyota Kreditbank GMBH le véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], dans le mois suivant la signification de l'arrêt,

AUTORISE, à défaut de restitution dans ce délai, la société Toyota Kreditbank GMBH à faire procéder à l'appréhension du véhicule financé de marque Toyota de type C-HR, immatriculé [Immatriculation 7], en tous lieux et entre toutes mains par le ministère de tel commissaire de justice qu'il lui plaira,

DÉBOUTE la société de droit allemand Toyota Kreditbank GMBH de toutes autres demandes, plus amples ou contraires,

CONDAMNE in solidum M. Y. et Mme Y. née X. au paiement des dépens d'appel,

CONDAMNE in solidum M. Y. et Mme Y. née X. à payer à la société de droit allemand Toyota Kreditbank GMBH une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Bénédicte NISI, Greffière en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière,                                                Le Président,