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TJ BOBIGNY (ch. 6 sect. 4), 4 novembre 2024

Nature : Décision
Titre : TJ BOBIGNY (ch. 6 sect. 4), 4 novembre 2024
Pays : France
Juridiction : T. jud. Bobigny
Demande : 23/08247
Décision : 24/00656
Date : 4/11/2024
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 11/07/2023
Numéro de la décision : 656
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24025

TJ BOBIGNY (ch. 6 sect. 4), 4 novembre 2024 : RG n° 23/08247 ; jugt n° 24/00656

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Pour appréciation des événements ci-dessus évoqués les parties d’un commun accord déclarent s’en rapporter, sauf en ce qui concerne le retard de paiement de l’acquéreur, dès à présent à un certificat établi par le maître d’œuvre ayant la direction des travaux, sous sa propre responsabilité ».

La clause de référence à un certificat du maître d’œuvre d’exécution doit trouver application, en ce que le maître d’œuvre d’exécution est, sauf preuve contraire, non rapportée en l’espèce, un professionnel indépendant du vendeur et le mieux à même d’avoir un avis utile sur l’existence et la portée d’événements susceptibles d’affecter la date de livraison. »

2/ « L'article 1611 du code civil dispose que, dans tous les cas, en ce compris celui de la vente d'immeuble à construire prévu par l'article 1601-1 du même code, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.

A cet égard, il y a lieu de préciser que la clause d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou consommateur qui stipule qu'en cas de cause légitime de suspension du délai de livraison du bien vendu, justifiée par le vendeur à l'acquéreur par une lettre du maître d'œuvre, la livraison du bien vendu sera retardée d'un temps égal au double de celui effectivement enregistré en raison de leur répercussion sur l'organisation générale du chantier n'a ni pour objet, ni pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et, partant, n'est pas abusive, qu’il s’agisse de l’admission de la preuve par simple attestation du maître d’œuvre, ou du doublement du délai des périodes de suspension (voir en ce sens Cass. civ. 3, 24 octobre 2012, 11-17.800 et 23 mai 2019, 18-14.212). »

3/ « Pour justifier du report de la date de livraison, la SCCV invoque :

- 69 jours d’intempéries, qu’il y a lieu de retenir s’agissant d’un motif dont la nature et la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution et une compilation par la FFB des relevés de la station météorologique de [Localité 7] sur la période en cause, dont le contenu n’est pas contesté, sont conformes au contrat ;

- 104 jours liés à l’impact des mesures gouvernementales décidées dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie de covid 19, qu’il y a lieu de retenir, s’agissant d’un motif dont la nature, injonctions administratives de suspendre les travaux et difficultés d’approvisionnement subséquentes, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat ;

- 3 mois liés à des pénuries de matières premières et de matériaux qu’il y a lieu de retenir s’agissant d’un motif dont la nature, des difficultés d’approvisionnement, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat, sans qu’il y ait toutefois lieu en plus à doublement dès lors que le maître d’œuvre indique expressément que l’impact effectif sur le chantier est de trois mois ;

- 2 mois liés un retard de raccordement au réseau de gaz par GRDF, qu’il y a lieu de retenir, s’agissant d’un motif dont la nature, un retard de la mise disposition par les organismes concessionnaires des différents fluides, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat, sans qu’il y ait toutefois lieu en plus à doublement, dès lors que le maître d’œuvre indique expressément que l’impact effectif sur le chantier est de deux mois.

Au total, la SCCV justifie d’au moins 496 jours ouvrés (3 mois + 2 mois + ((69+104) x 2)) de report légitime de la date de livraison, sur les 697 jours séparant le 31 décembre 2020, date de livraison mentionnée au contrat de VEFA, et le 28 novembre 2022, date de livraison.

La SCCV expose ainsi sa responsabilité contractuelle pour le surplus du retard de livraison non justifié, à hauteur de 201 jours. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

CHAMBRE 6 SECTION 4

JUGEMENT DU 4 NOVEMBRE 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/08247. Jugement n° 24/00656. N° Portalis DB3S-W-B7H-XZXW.

 

DEMANDEURS :

Monsieur X.

[Adresse 3], [Localité 4], représenté par Maître Jacques GELPI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0212

Madame Y.

[Adresse 3], [Localité 4], représentée par Maître Jacques GELPI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0212

 

DÉFENDEURS :

Société SCCV [Adresse 6]

[Adresse 1], [Localité 2], représentée par Maître Sorin MARGULIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1850

SAS PROMOTION PICHET

[Adresse 1], [Localité 2], représentée par Maître Sorin MARGULIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1850

SARL PROMOBAT

[Adresse 1], [Localité 2], représentée par Maître Sorin MARGULIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1850

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Madame Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maud THOBOR, greffier.

DÉBATS : Audience publique du 7 octobre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 4 Novembre 2024.

JUGEMENT : Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Madame Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente, assistée de Madame Maud THOBOR, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant acte notarié reçu le 24 juillet 2018, la SCCV [Adresse 6] a vendu en l’état futur d’achèvement, à Monsieur X. et Madame Y., un appartement (lot n°46) dépendant d’un ensemble immobilier situé à [Localité 5], la livraison étant prévue au 4e trimestre 2020.

La livraison est intervenue le 28 novembre 2022.

C’est dans ce contexte que, par actes d’huissier enrôlés le 11 juillet 2023, Monsieur X. et Madame Y. ont fait assigner la SCCV [Adresse 6], la SAS PROMOTION PICHET et la SARL PROMOBAT devant le tribunal judiciaire de Bobigny, aux fins d’obtenir leur condamnation solidaire, avec capitalisation des intérêts et exécution provisoire, à leur payer, outre les dépens, les sommes suivantes :

- 8.580 € au titre de la perte locative ;

- 10.000 € au titre de leur préjudice moral ;

- 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions, ils soutiennent que la SCCV engage sa responsabilité, solidairement avec ses associées Promotion Pichet et Promobat au sens de l’article L. 211-2 du code de la construction et de l’habitation, pour manquement à son obligation de livrer l’immeuble dans le délai contractuellement prévu, conformément à l’article 1601-1 du code civil ; que les causes de retard invoquées en défense ne sont pas justifiées, en tout cas pas dans leur quantum ; que chaque cause de retard alléguée doit être de gravité suffisante pour pouvoir reporter la date de livraison, preuve non rapportée en l’espèce, s’agissant d’événements courants pour la vie d’un chantier ; que la crise sanitaire ne présente pas les caractères de la force majeure, si ce n’est sur une courte période courant 2020 ; que l’expertise judiciaire constitue un événement courant pour un chantier ; que leur préjudice correspond à l’impossibilité de pouvoir louer les biens acquis et aux tracas liés au présent litige.

[*]

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 4 juin 2024, la SCCV [Adresse 6], la SAS PROMOTION PICHET et la SARL PROMOBAT demandent au tribunal de rejeter les prétentions adverses, en tout cas en ce qu’elles sont dirigées contre les sociétés Promobat et Promotion Pichet, et de condamner le demandeur aux dépens ainsi qu’à leur payer la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions et au visa des articles 1103, 1231-1 et 1218 du code civil ainsi que de l’article L. 261-1 du code de la construction et de l’habitation, elles soutiennent que l’existence d’un éventuel retard de livraison doit être déterminée à partir de la date de livraison mentionnée dans l’acte authentique de vente (soit le 30 juin 2021) ; qu’il convient en outre de tenir compte des éventuelles causes légitimes de suspension du délai de livraison, telles que définies par le contrat, lequel précise en outre que ces causes peuvent être justifiées par simple lettre du maître d’œuvre, et qu’elles induisent un report du délai égal au double de celui effectivement enregistré en raison de leur répercussion sur l’organisation générale du chantier ; que ce cadre juridique est validé par la jurisprudence, qui a écarté le moyen selon lequel il s’agirait de clauses abusives ; qu’en l’espèce, une information régulière des difficultés rencontrées a été donnée aux acquéreurs, certificats du maître d’œuvre Ecotech, indépendant, à l’appui ; que 69 jours d’intempéries sont ainsi justifiés, notamment avec les relevés météorologiques utiles ; que le confinement ordonné à l’occasion de la crise sanitaire a induit un retard de 104 jours ouvrés, s’agissant d’un cas de force majeure, le législateur ayant du reste accordé aux contribuables acquéreurs en VEFA un report de 261 jours pour continuer à bénéficier de la déduction fiscale promise ; que la présence du RER A en sous-sol du terrain a nécessité une visite préalable de la RATP qui n’est intervenue que le 14 novembre 2018 alors qu’elle avait été réclamée depuis juillet 2017, le fisc ayant reconnu un retard légitime de 220 jours à ce titre ; que les travaux de raccordement du réseau de concessionnaire gaz ont également été décalés de 91 jours ; que des difficultés d’approvisionnement justifiées par une attestation du maître d’œuvre Ecotech ont entraîné une suspension de 84 jours ouvrés ; que cumulés, ces jours de retard légitiment le retard de livraison subi.

Subsidiairement, les défenderesses font valoir que le préjudice de jouissance n’est pas justifié dès lors que si le demandeur n’a pas immédiatement perçu de loyers, en contrepartie un report corrélatif de l’amortissement du prêt ; que le préjudice moral doit être écarté, dans la mesure où les acquéreurs ont été constamment accompagnés et informés ; que la responsabilité de Promotion Pichet et Promobat en leur qualité d’associées de la SCCV n’est que subsidiaire et ne peut ainsi être recherchée directement.

[*]

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il sera renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 6 mars 2024 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 10 juin 2024.

Par jugement en date du 1er juillet 2024, le tribunal a ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture du 6 mars 2024, ordonné une nouvelle clôture de manière différée au 2 octobre 2024, avec calendrier de procédure comprenant des conclusions en demande avant le 1er septembre 2024, d’ultimes échanges avant le 27 septembre 2024 et la fixation de l’affaire en audience de plaidoiries du 7 octobre 2024.

A l’audience du 7 octobre 2024, l'affaire a été mise en délibéré au 4 novembre 2024, date du présent jugement.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire :

Aux termes de l'article 768 du code de procédure civile, le tribunal ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. Or ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir « constater », « dire », « juger » ou « donner acte », en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que le tribunal n'y répondra qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs, sauf à statuer sur les demandes des parties tendant à « dire et juger » lorsqu'elles constituent un élément substantiel et de fond susceptible de constituer une prétention (Civ. 2ème, 13 avril 2023, pourvoi n° 21-21.463).

 

Sur les demandes principales :

L'article 1611 du code civil dispose que, dans tous les cas, en ce compris celui de la vente d'immeuble à construire prévu par l'article 1601-1 du même code, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.

A cet égard, il y a lieu de préciser que la clause d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou consommateur qui stipule qu'en cas de cause légitime de suspension du délai de livraison du bien vendu, justifiée par le vendeur à l'acquéreur par une lettre du maître d'œuvre, la livraison du bien vendu sera retardée d'un temps égal au double de celui effectivement enregistré en raison de leur répercussion sur l'organisation générale du chantier n'a ni pour objet, ni pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et, partant, n'est pas abusive, qu’il s’agisse de l’admission de la preuve par simple attestation du maître d’œuvre, ou du doublement du délai des périodes de suspension (voir en ce sens Cass. civ. 3, 24 octobre 2012, 11-17.800 et 23 mai 2019, 18-14.212).

Conformément à l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve du préjudice dont il se prévaut en lien avec le retard de livraison ; qu'il soit entier ou résulte d'une perte de chance, ce préjudice, pour être indemnisable, doit être certain, actuel et en lien direct avec le manquement commis ; la réparation de la perte de chance doit être mesurée en considération de l'aléa jaugé et ne saurait être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

En l’espèce, l’acte authentique de vente du 24 juillet 2018, produit par la SCCV, mentionne une date de livraison « dans le courant du 4e trimestre 2020 » au plus tard, soit le 31 décembre 2020, « sauf cas de force majeure ou de causes légitimes de suspension du délai ».

Bien qu’aucune des parties n’ait jugé utile de produire le procès-verbal de livraison dont elles sont pourtant nécessairement en possession, elles s’accordent à indiquer que la livraison est intervenue le 28 novembre 2022, soit un retard de livraison de 697 jours.

L’acte authentique de vente du 24 juillet 2018 prévoit néanmoins, pages 31 et 32, que :

« Ce délai serait différé en cas de force majeure ou d’une autre cause légitime.

Pour l’application de cette disposition pourraient notamment être considérées comme causes légitimes de suspension de ce délai :

les intempéries retenues par le maître d’œuvre, gênant les travaux ou l’exécution du corps d’état considéré, et dûment justifiées par un relevé de la station météorologique la plus proche de l’immeuble, (…) les difficultés d’approvisionnement, (…) les retards de la mise disposition par les organismes concessionnaires des différents fluides, les retards provenant d’anomalies du sous-sol (telle que présence de source ou résurgence d’eau, découvert de site archéologique, de poche d’eau, tous éléments de nature à nécessiter des fondations spéciales ou particulières, découverte d’une pollution du sous-sol) et plus généralement tous les éléments dans le sous-sol susceptibles de nécessiter des travaux non programmés complémentaires ou nécessitant un délai complémentaire pour leur réalisation, injonctions administratives ou judiciaires de suspendre les travaux, (…)

S’il survenait un cas de force majeure ou une cause légitime de suspension du délai de livraison, l’époque prévue pour l’achèvement des travaux serait différée d’un temps égal à celui du double pendant lequel l’événement considéré aurait mis obstacle à la poursuite des travaux.

Pour appréciation des événements ci-dessus évoqués les parties d’un commun accord déclarent s’en rapporter, sauf en ce qui concerne le retard de paiement de l’acquéreur, dès à présent à un certificat établi par le maître d’œuvre ayant la direction des travaux, sous sa propre responsabilité ».

La clause de référence à un certificat du maître d’œuvre d’exécution doit trouver application, en ce que le maître d’œuvre d’exécution est, sauf preuve contraire, non rapportée en l’espèce, un professionnel indépendant du vendeur et le mieux à même d’avoir un avis utile sur l’existence et la portée d’événements susceptibles d’affecter la date de livraison.

Pour justifier du report de la date de livraison, la SCCV invoque :

- 69 jours d’intempéries, qu’il y a lieu de retenir s’agissant d’un motif dont la nature et la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution et une compilation par la FFB des relevés de la station météorologique de [Localité 7] sur la période en cause, dont le contenu n’est pas contesté, sont conformes au contrat ;

- 104 jours liés à l’impact des mesures gouvernementales décidées dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie de covid 19, qu’il y a lieu de retenir, s’agissant d’un motif dont la nature, injonctions administratives de suspendre les travaux et difficultés d’approvisionnement subséquentes, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat ;

- 3 mois liés à des pénuries de matières premières et de matériaux qu’il y a lieu de retenir s’agissant d’un motif dont la nature, des difficultés d’approvisionnement, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat, sans qu’il y ait toutefois lieu en plus à doublement dès lors que le maître d’œuvre indique expressément que l’impact effectif sur le chantier est de trois mois ;

- 2 mois liés un retard de raccordement au réseau de gaz par GRDF, qu’il y a lieu de retenir, s’agissant d’un motif dont la nature, un retard de la mise disposition par les organismes concessionnaires des différents fluides, ainsi que la preuve, une attestation du maître d’œuvre d’exécution, sont conformes au contrat, sans qu’il y ait toutefois lieu en plus à doublement, dès lors que le maître d’œuvre indique expressément que l’impact effectif sur le chantier est de deux mois.

Au total, la SCCV justifie d’au moins 496 jours ouvrés (3 mois + 2 mois + ((69+104) x 2)) de report légitime de la date de livraison, sur les 697 jours séparant le 31 décembre 2020, date de livraison mentionnée au contrat de VEFA, et le 28 novembre 2022, date de livraison.

La SCCV expose ainsi sa responsabilité contractuelle pour le surplus du retard de livraison non justifié, à hauteur de 201 jours.

 

S’agissant du préjudice, les consorts X.-Y. se prévalent :

- d’une perte locative ; à ce titre, il est démontré que les consorts X.-Y. ont conclu un bail commercial avec la SARL GESTLEGRAND le 20 novembre 2018, soit avant même la livraison, pour un loyer annuel de 3.900 € hors taxe et hors charges dont ils ont été privés sur la période de retard litigieuse, pour une somme de 2.147,67 € (3.900 x 201/365) ; il s’agit d’une perte définitive, qui n’est pas compensée par le fait que l’amortissement du prêt immobilier a été reporté à la date de livraison effective ;

- d’un préjudice moral ; à ce titre, il est évident que les tracas occasionnés par les reports successifs de la date de livraison et la nécessité d’une action en justice sont à l’origine d’un trouble moral, qui sera réparé par l’allocation d’une indemnité de 1.000 € chacun.

La capitalisation annuelle des intérêts, qui est de droit, sera ordonnée, conformément à l’article 1343-2 du code civil.

A l’encontre de la SAS PROMOTION PICHET et la SARL PROMOBAT

Il résulte des dispositions de l’article L211-2 du code de la construction et de l’habitation que les associés d’une SCCV, tenus du passif social à proportion de leurs droits sociaux, ne peuvent être poursuivis par les créanciers sociaux qu’à titre subsidiaire, et non de manière conjointe, encore moins solidaire, avec la société.

En l’espèce, et dans ces conditions, les demandes dirigées directement contre les sociétés PROMOTION PICHET et PROMOBAT en leur qualité d’associées de la SCCV au titre d’une dette de responsabilité de cette dernière, sans titre ni mise en demeure préalable de la SCCV demeurée infructueuse, seront rejetées.

 

Sur les demandes accessoires :

Sur les dépens :

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Succombant, la SCCV [Adresse 6] sera condamné aux entiers dépens de la procédure.

 

Sur les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 700 1°du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.

En l’espèce, sera prononcée la condamnation de la SCCV [Adresse 6], partie condamnée aux dépens, à payer aux consorts X.-Y. une somme qu’il est équitable de fixer à 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

 

Sur l'exécution provisoire :

Aux termes des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont, de droit, exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement ; le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, compte tenu des circonstances de la nature de l'affaire et de l'issue du litige, il n’y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONDAMNE la SCCV [Adresse 6] à payer à Monsieur X. et Madame Y., les sommes suivantes :

- 2.147, 67 € (deux mille cent quarante-sept euros et soixante-sept centimes) au titre de la perte locative ;

- 1.000 € (mille euros) chacune au titre de leur préjudice moral.

ORDONNE la capitalisation des intérêts par année entière conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

DÉBOUTE Monsieur X. et Madame Y. de leurs autres demandes indemnitaires, y compris celles dirigées contre la SAS PROMOTION PICHET et la SARL PROMOBAT ;

CONDAMNE la SCCV [Adresse 6] aux dépens ;

CONDAMNE la SCCV [Adresse 6] à payer à Monsieur X. et Madame Y. la somme de 1.500 € (mille cinq cent euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit et DIT n'y avoir lieu à l'écarter ;

DÉBOUTE les parties de l'ensemble de leurs autres fins, moyens, demandes et prétentions ;

La minute est signée par Madame Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente, assistée de Madame Maud THOBOR, greffier.

La greffière,                                      La présidente,