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CA BORDEAUX (4e ch. civ.), 11 juin 2025

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (4e ch. civ.), 11 juin 2025
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 4e ch.
Demande : 23/02008
Date : 11/06/2025
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 26/04/2023
Décision antérieure : T. com. Bordeaux, 18 avril 2023 : RG n° 2021F00700
Décision antérieure :
  • T. com. Bordeaux, 18 avril 2023 : RG n° 2021F00700
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24051

CA BORDEAUX (4e ch. civ.), 11 juin 2025 : RG n° 23/02008

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « 15. En l'espèce, il est constant que le contrat de licence d'exploitation de site Internet a été conclu le 22 juillet 2020 à [Localité 4], à la suite d'un démarchage de la société Notariale Automobile au siège de son établissement principal par un préposé de la société Incomm, dont le siège social est situé à [Localité 3].

L'appelante verse à son dossier un avis de situation Insee (répertoire SIRENE) dont les mentions indiquent qu'elle exerce une activité principale de commerce de voitures et de véhicules automobiles légers.

Par son objet, le contrat de licence d'exploitation de site internet est certes en rapport avec l'activité professionnelle de la société Notariale Automobile puisqu'il est de nature à promouvoir ses services auprès de la clientèle potentielle par une meilleure visibilité, mais il n'entre pas dans le champ de son activité principale, qui est celle du commerce automobile.

Par ailleurs, l'appelante produit à son dossier une attestation délivrée le 17 mai 2021 par l'Urssaf Nord-Pas de [Localité 5] qui mentionne que l'entreprise a été affiliée en qualité d'employeur de personnel salarié le 1er avril 2021, ce qui établit que la société Notariale Automobile n'avait pas de salarié lors de la conclusion du contrat litigieux, ce qui n'est pas discuté par les parties.

16. Il résulte de ces éléments que la société Notariale Automobile réunit les conditions prévues par l'article L. 221-3 du code la consommation pour bénéficier des dispositions des sections 2,3 et 6 du chapitre 1er relatives aux contrats conclus à distance et hors établissement. »

2/ « 18. Les intimées soutiennent à tort que le contrat de licence d'exploitation de site internet ne pourrait donner lieu à l'exercice du droit de rétractation, en invoquant les dispositions de l'article L. 221-28 3° du code de la consommation, selon lesquelles le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés. En effet, les dispositions précitées doivent être d'interprétation stricte dès lors qu'elles ont pour conséquence de limiter les droits octroyés à un professionnel, qui, par l'effet de la loi, se trouve assimilé à un consommateur pour l'exercice de certains droits dans le cadre d'un contrat conclu hors établissement. En l'espèce, le contrat du 22 juillet 2020 ne concerne pas la fourniture d'un bien au sens de l'article 528 du code civil, c'est-à-dire un objet mobilier corporel, mais une prestation de services consistant en la conception, la création, la réalisation d'un site internet, son hébergement, son référencement et sa location. L'exception prévue par l'article L.221-28 3° du code de la consommation ne peut donc trouver à s'appliquer.

En toute hypothèse, si elle estimait que le droit de rétractation n'était pas applicable à l'opération contractuelle envisagée, il incombait à la société Incomm de respecter les dispositions de l'article L.221-5-5° du code de la consommation, et d'en aviser préalablement la société Notariale Automobile de manière compréhensible, ce qui n'a pas été fait, ainsi que détaillé ci-après. »

3/ « Il convient en effet de rappeler que l'exercice du droit de rétractation doit seulement répondre aux conditions prévues par l'article L.221-21 du code de la consommation selon lequel le consommateur exerce son droit de rétractation en informant le professionnel de sa décision de se rétracter par l'envoi, avant l'expiration du délai prévu à l'article L. 221-18, du formulaire de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5 ou de toute autre déclaration, dénuée d'ambiguïté, exprimant sa volonté de se rétracter. Or, en l'espèce, l'article 17.1 des conditions générales stipule : « […] »

Il sera relevé en premier lieu que la référence faite à l'article L.121-20-12 du code de la consommation est erronée, puisque cet article n'existait plus à la date du contrat, le 22 juillet 2020, de sorte que la société Notariale Automobile n'était pas en mesure de saisir, à la lecture de cette stipulation, si sa situation lui permettait ou non d'exercer le droit de rétractation. Les dispositions d'ordre public du code de la consommation applicables en matière d'exercice du droit de rétractation n'étaient pas rappelées, ni leur contenu. Par ailleurs, la rédaction ambiguë de l'article 17.1 précitée, et la formulation soulignée par la cour au paragraphe 23, laisse à penser que le droit de rétractation doit obligatoirement s'accompagner de l'envoi concomitant d'un justificatif concernant l'effectif de l'entreprise pour être considéré par la société Incomm comme régulier et éviter au contractant le paiement d'une indemnité de 40 % du montant des échéances. Il en résulte que l'information donnée à l'appelante sur les conditions d'exercice du droit de rétractation, avant qu'elle s'engage par signature du contrat le 22 juillet 2020, n'était pas compréhensible.

Enfin, la formule insérée dans un cartouche en première page du contrat et dénommée « Information Précontractuelle », par laquelle la société Notariale Automobile reconnaît avoir reçu du fournisseur avant la signature du contrat les informations prévues par les articles L. 111-1 et L. 221-5 du code de la consommation constitue seulement un indice qu'il incombait à la société Incomm de corroborer par plusieurs éléments complémentaires ce qui n'est pas le cas en l'espèce, au regard des circonstances précédemment rappelées, étant de surcroît observé qu'il y est fait mention de « l'existence éventuelle [souligné par la cour] d'un droit de rétractation ».

4/ « De plus, la société Locam, qui indique que la société Notariale Automobile s'est abstenue de régler les loyers à compter du mois de janvier 2021, ne discute donc pas que l'appelante lui a réglé les deux premier loyers de novembre et décembre 2020 et sera dès lors condamnée à restituer à l'appelante la somme de 1790,40 euros à ce titre. Dès lors que ces sommes n'ont pas été restituées dans le délai de 14 jours, elles produisent intérêt au taux légal majoré, dans les conditions prévues par l'article L.242-4 du code de la consommation, avec capitalisation par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil. 23. La société Locam, agissant en qualité de cessionnaire, n'est pas fondée à solliciter paiement de sommes au titre du contrat dès lors que celui-ci se trouve anéanti du fait de l'exercice du droit de rétractation. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 11 JUIN 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/02008. N° Portalis DBVJ-V-B7H-NHRS. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 avril 2023 (R.G. 2021F00700) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 26 avril 2023.

 

APPELANTE :

EURL NOTARIALE AUTOMOBILE

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1], Représentée par Maître Delphine BARTHELEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Bassirou KÉBÉ, avocat au barreau de LILLE

 

INTIMÉES :

SAS INCOMM

prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6], Représentée par Maître Anthony BABILLON de la SELARL ANTHONY BABILLON AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX

SAS LOCAM

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social [Adresse 2], Représentée par Maître Bertrand GABORIAU de la SELARL B.G.A., avocat au barreau de BORDEAUX

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 mars 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sophie MASSON, Conseiller chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président, Madame Sophie MASSON, Conseiller, Madame Anne-Sophie JARNEVIC, Conseiller.

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1. Le 22 juillet 2020, la société à responsabilité limitée Notariale Automobile a conclu avec la société par actions Comm, devenue société Incomm, un contrat de licence d'exploitation de site internet pour une période de 4 ans moyennant le versement de 48 échéances mensuelles de 895,20 euros TTC, outre une somme de 1.291,20 euros de frais d'adhésion.

Le contrat prévoyait la création du site internet, la maintenance du site de base de données pendant 4 ans, l'hébergement et le référencement pour la même durée.

Le 7 octobre 2020, le procès-verbal de livraison et de conformité a été signé par les parties pour le site www.notarialeautomobile.fr.

Le 27 octobre 2020, ce site internet a été cédé à la société par actions simplifiée Locam - Location Automobiles Matériels, qui a alors adressé à la société Notariale Automobile une facture de loyer le 29 octobre suivant.

Par courrier du 15 décembre 2020, la société Notariale Automobile a notifié à la société Incomm et à la société Locam sa volonté de résilier le contrat en raison de l'inachèvement de la prestation, de promesses non tenues et du non-respect du droit de la consommation relativement au droit de rétractation, et s'est opposée au prélèvement des loyers.

Par courrier du 8 janvier 2021, la société Incomm a notifié à la société Notariale Automobile que la résiliation entraînerait le versement d'une indemnité égale au montant des mensualités restant à courir ainsi qu'une pénalité de 10 %.

Par courrier recommandé du 7 avril 2021, la société Locam a mis en demeure la société Notariale Automobile de lui payer sous huitaine la somme de 3.904,80 euros représentant les loyers échus impayés outre la clause pénale de 10 % et les intérêts de retard, indiquant qu'à défaut le contrat serait résilié et rendrait la somme de 45.263,04 euros exigible.

Par deux courriers en date du 10 mai 2021, la société Notariale Automobile s'est prévalue, par l'intermédiaire de son conseil, de son droit de rétractation et a mis en demeure les sociétés Incomm et Locam de restituer les sommes perçues.

2. Par acte du 5 juillet 2021, la société Notariale Automobile a assigné les sociétés Locam et Incomm devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins, principalement, de consécration de l'anéantissement du contrat par l'effet de la rétractation et de paiement de diverses sommes.

Par jugement du 18 avril 2023, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- Débouté la société Notariale Automobile de sa demande de condamnation de la société Locam - Location Automobiles Matériels SAS à lui payer la somme de 1.790,40 euros en raison de la nullité de la cession ;

- Débouté la société Notariale Automobile de sa demande de condamnation de la société Incomm SAS à lui restituer la somme de 1.291,20 euros et la société Locam Location Automobiles Matériels SAS à lui restituer la somme de 1.790,40 euros en raison de l'anéantissement du contrat, de son annulation, ou de sa résolution ;

- Condamné la société Notariale Automobile à payer à la société Locam la somme de 45.263,04 euros, outre intérêts à compter du 17 août 2021, date de la mise en demeure ;

- Ecarté l'exécution provisoire ;

- Dit que chacune des parties conserverait la charge de ses frais irrépétibles ;

- Condamné la société Notariale Automobile aux dépens.

Par déclaration au greffe du 26 avril 2023, la société Notariale Automobile a relevé appel du jugement énonçant les chefs expressément critiqués, intimant les sociétés Incomm et Locam Location Automobiles Matériels.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

3. Par dernières écritures notifiées par message électronique le 27 janvier 2025, la société Notariale Automobile demande à la cour de :

Vu les articles L.221-1 et suivants du code de la consommation

Vu l'article L.242-1 du code de la consommation,

Vu les articles 1130 et suivants du code civil,

Vu les articles 1194 et suivants du code civil,

Vu les articles 1178, 1128, 1163, 1216, 1302, 1353 et 1359 du code civil,

Vu le Règlement général sur la protection des données personnelles,

Vu les articles 226-16 et suivants du code pénal,

- Annuler le jugement dont appel,

- Ou à défaut, de l'infirmer ou de le réformer dans toutes ses dispositions et dans les limites des chefs de jugement qui lui sont déférés,

Statuant à nouveau,

- Déclarer applicables les dispositions visées par l'article L.221-3 du code de la consommation,

A titre principal

- Déclarer l'opération contractuelle litigieuse anéantie par l'effet de la rétractation exercée par la société Notariale Automobile,

En conséquence,

- Débouter les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels de toutes leurs demandes,

- Condamner les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels à restituer respectivement à la société Notariale Automobile, la somme de 1.291,20 euros et la somme de 1790,40 euros, avec intérêts calculés selon les modalités de l'article L. 242-4 du code de la consommation, et capitalisation,

Premier niveau de subsidiarité

- Annuler toute l'opération contractuelle litigieuse notamment pour les motifs suivants :

Violation de l'obligation d'information sur le délai de livraison ou d'exécution des prestations,

Violation de l'obligation d'indiquer le total des coûts mensuels,

Violation de l'obligation d'indiquer les caractéristiques essentielles du site web,

Stipulation d'obligation sans contrepartie,

Erreur sur les qualités essentielles du site internet,

En conséquence,

- Débouter les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels de toutes leurs demandes,

- Condamner les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels à restituer respectivement à la société Notariale Automobile, la somme de 1'291,20 euros et la somme de 1'790,40 euros, avec intérêts :

calculés selon les modalités de l'article L.242-4 du code de la consommation à compter de l'assignation, et capitalisation, en cas de violation du code de la consommation,

au taux légal avec capitalisation, à compter de l'assignation, en l'absence de violation du code de la consommation.

Second niveau de subsidiarité

- Prononcer la résolution rétroactive du contrat litigieux et ce, avec effet rétroactif à la date de sa conclusion,

En conséquence,

- Débouter les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels de toutes leurs demandes,

- Condamner les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels à restituer respectivement à la société Notariale Automobile, la somme de 1.291,20 euros et la somme de 1'790,40 euros, avec intérêts au taux légal avec capitalisation, à compter de l'assignation.

En tout état de cause

- Débouter la société Locam de toutes ses demandes et la condamner à restituer à la société Notariale Automobile la somme de 1'790,40 euros.

- Condamner in solidum les sociétés Incomm et Locam - Location Automobiles Matériels à verser à la société Notariale Automobile, la somme de 8000 euros au titre

des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, ainsi qu'aux entiers frais et dépens, en ce compris les frais de constat d'huissier.

***

4. Par dernières écritures notifiées par message électronique le 7 février 2025, la société Incomm demande à la cour de :

Vu les articles susvisés, vu les conditions générales,

Vu le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 18 avril 2023,

- Déclarer recevable et bien fondée la SAS Incomm dans l'ensemble de ses demandes fins et prétentions

Y faisant droit,

- Débouter la société Notariale Automobile de sa demande d'annulation du jugement du 18 avril 2023

- Débouter la société Notariale Automobile de sa demande d'infirmation du jugement du 18 avril 2023

- Confirmer le jugement du 18 avril 2023 en toutes ses dispositions

En conséquence

- Juger que la législation consumériste ne peut recevoir application à la présente espèce,

- Juger que le contrat n° 22072020LILJFA02 a été résilié aux torts exclusifs de la société Notariale Automobile

- Débouter la SARL Notariale Automobile de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions à l'encontre de la société Incomm

En toute hypothèse

- Condamner la société La SARL Notariale Automobile à verser la somme de 4000 euros à la société Incomm en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

***

5. Par dernières écritures notifiées par message électronique le 23 août 2023, la société Locam demande à la cour de :

Vu les articles L221-3, L221.5, L 221.18 du code de la consommation

Vu les articles 1101, 1231.2 et suivants du code civil

Vu les dispositions de l'article 463 du code de procédure civile

Vu les stipulations contractuelles notamment les articles 17.1 et 17.3.

- Juger la SARL Notariale Automobile recevable mais mal fondée en son appel.

- Débouter la SARL Notariale Automobile de sa demande d'annulation du jugement du 18 avril 2023.

- Débouter la SARL Notariale Automobile de sa demande d'infirmation du jugement en ce qu'il l'a :

Déboutée de sa demande de condamnation de la société Locam - Location Automobiles Matériels SAS à lui payer la somme de 1'790,40 euros en raison de la nullité de la cession,

Déboutée de sa demande de condamnation de la société Incomm SAS à lui restituer la somme de 1'291,20 euros, et la société Locam - Location Automobiles Matériels SAS à lui restituer la somme de 1'790,40 euros, en raison de l'anéantissement du contrat, de son annulation ou de sa résolution,

Condamnée à payer à la société Locam la somme de 45'263,04 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter du 17 août 2021, date de la mise en demeure,

Dit que la société Notariale Automobile conservera la charge de ses frais irrépétibles,

Condamnée aux entiers dépens.

- Débouter la SARL Notariale Automobile de l'ensemble de ses fins et prétentions.

- En conséquence confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 18 avril 2023 en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

- En tant que de besoin, prononcer formellement la résiliation du contrat du 22 juillet

2020 aux torts exclusifs de la SARL Notariale Automobile en raison de l'inexécution de ses obligations de paiement

- Condamner la SARL Notariale Automobile à payer à la société LOCAM 45.263,04

euros outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 avril 2021

réceptionnée le 13 avril 2021

- Condamner La SARL Notariale Automobile à payer à la SAS Locam une indemnité

de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamner La SARL Notariale Automobile aux dépens de première instance et d'appel.

***

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 février 2025.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande tendant à voir prononcer la nullité du jugement :

6. Au dispositif de ses conclusions notifiées le 27 janvier 2025, l'appelante demande à la cour d'annuler le jugement.

7. Les intimées n'ont formulé aucune observation concernant cette prétention.

Sur ce,

8. Selon les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

9. En l'espèce, dans la partie discussion de ses conclusions, la société Notariale Automobile n'a présenté aucun moyen au soutien de sa demande tendant à l'annulation du jugement.

10. Il convient en conséquence de rejeter cette demande.

 

Sur la demande tendant à voir constater l'anéantissement de l'opération contractuelle par l'effet de la rétractation :

11. Au visa des articles L.111-1, L.221-1, L. 221-3, L.221-5, L.221-9, L.221-18 du code de la consommation, la société Notariale Automobile soutient que le contrat litigieux a été signé à [Localité 4] (Pas de [Localité 5]) à la suite d'un démarchage physique sur son lieu de travail de sorte qu'il doit être qualifié de contrat conclu hors établissement n'entrant pas dans le champ de son activité principale.

L'appelante fait valoir qu'elle a pu valablement exercer son droit de rétractation en raison d'une part d'une indication erronée du point de départ du délai de rétractation et d'autre part d'une information conditionnelle sur l'existence de ce droit.

12. La société Incomm réplique que le site Internet constitue un bien nettement personnalisé, au sens de l'article L.221-28 du code de la consommation, de sorte que les dispositions du code de la consommation invoquées par la société Notariale Automobile ne sont pas applicables, en l'absence de soumission volontaire des parties aux droits de la consommation.

Elle soutient que l'exercice du droit de rétractation n'est pas intervenu de manière utile.

13. La société Locam fait également valoir que le contrat litigieux n'entre pas dans le champ d'application du code de la consommation, puisque le site créé par la société Incomm constitue un bien immatériel confectionné selon les spécifications de l'appelante et nettement personnalisé.

Sur ce,

14. Il résulte des dispositions de l'article L. 221-1 I 2° a) du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date de conclusion du contrat, issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que pour l'application du Titre II (Règles de formation et d'exécution de certains contrats), est considéré comme un contrat hors établissement tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur.

Selon les dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

15. En l'espèce, il est constant que le contrat de licence d'exploitation de site Internet a été conclu le 22 juillet 2020 à [Localité 4], à la suite d'un démarchage de la société Notariale Automobile au siège de son établissement principal par un préposé de la société Incomm, dont le siège social est situé à [Localité 3].

L'appelante verse à son dossier un avis de situation Insee (répertoire SIRENE) dont les mentions indiquent qu'elle exerce une activité principale de commerce de voitures et de véhicules automobiles légers.

Par son objet, le contrat de licence d'exploitation de site internet est certes en rapport avec l'activité professionnelle de la société Notariale Automobile puisqu'il est de nature à promouvoir ses services auprès de la clientèle potentielle par une meilleure visibilité, mais il n'entre pas dans le champ de son activité principale, qui est celle du commerce automobile.

Par ailleurs, l'appelante produit à son dossier une attestation délivrée le 17 mai 2021 par l'Urssaf Nord-Pas de [Localité 5] qui mentionne que l'entreprise a été affiliée en qualité d'employeur de personnel salarié le 1er avril 2021, ce qui établit que la société Notariale Automobile n'avait pas de salarié lors de la conclusion du contrat litigieux, ce qui n'est pas discuté par les parties.

16. Il résulte de ces éléments que la société Notariale Automobile réunit les conditions prévues par l'article L. 221-3 du code la consommation pour bénéficier des dispositions des sections 2,3 et 6 du chapitre 1er relatives aux contrats conclus à distance et hors établissement.

17. L'article L.221-9 du code de la consommation, dans sa rédaction ici applicable, dispose :

« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire-type de rétractation mentionné au 2° de l'article L.221-5.»

18. Les intimées soutiennent à tort que le contrat de licence d'exploitation de site internet ne pourrait donner lieu à l'exercice du droit de rétractation, en invoquant les dispositions de l'article L .221-28 3° du code de la consommation, selon lesquelles le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés.

En effet, les dispositions précitées doivent être d'interprétation stricte dès lors qu'elles ont pour conséquence de limiter les droits octroyés à un professionnel, qui, par l'effet de la loi, se trouve assimilé à un consommateur pour l'exercice de certains droits dans le cadre d'un contrat conclu hors établissement.

En l'espèce, le contrat du 22 juillet 2020 ne concerne pas la fourniture d'un bien au sens de l'article 528 du code civil, c'est-à-dire un objet mobilier corporel, mais une prestation de services consistant en la conception, la création, la réalisation d'un site internet, son hébergement, son référencement et sa location.

L'exception prévue par l'article L.221-28 3° du code de la consommation ne peut donc trouver à s'appliquer.

En toute hypothèse, si elle estimait que le droit de rétractation n'était pas applicable à l'opération contractuelle envisagée, il incombait à la société Incomm de respecter les dispositions de l'article L.221-5-5° du code de la consommation, et d'en aviser préalablement la société Notariale Automobile de manière compréhensible, ce qui n'a pas été fait, ainsi que détaillé ci-après.

19. Il est donc incontestable que, préalablement à la conclusion du contrat de licence d'exploitation du site internet, et par application des articles L.221-9, L.221-5 et L.111-1 du code de la consommation, la société Incomm devait donc communiquer à sa co-contractante de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

-en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à délivrer le bien ou à exécuter le service ;

- lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

L'appelante fait valoir à juste titre que le contrat litigieux ne comporte pas d'information exacte et compréhensible sur les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit de rétractation.

Il convient en effet de rappeler que l'exercice du droit de rétractation doit seulement répondre aux conditions prévues par l'article L.221-21 du code de la consommation selon lequel le consommateur exerce son droit de rétractation en informant le professionnel de sa décision de se rétracter par l'envoi, avant l'expiration du délai prévu à l'article L. 221-18, du formulaire de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5 ou de toute autre déclaration, dénuée d'ambiguïté, exprimant sa volonté de se rétracter.

Or, en l'espèce, l'article 17.1 des conditions générales stipule :

« Sous réserve que le contrat entre dans le cadre de l'application des articles L.121-20-12 et suivants du code de la consommation, notamment lorsque l'effectif du partenaire est inférieur ou égal à cinq, celui-ci dispose d'un délai de quatorze jours calendaires à compter de la signature du présent contrat pour exercer s'il le souhaite son droit de rétractation. Si le partenaire souhaite se rétracter, il lui appartient de notifier sa décision au fournisseur par tout moyen, le cas échéant au moyen du bordereau de rétractation ci-dessous, au plus tard le quatorzième jour suivant la signature du contrat, et de joindre un document officiel type récépissé DADSU de l'année en cours, justifiant l'effectif de son entreprise au jour de signature du contrat, étant entendu que la charge de la preuve de l'exercice du droit de rétractation dans les conditions légales pèse sur le partenaire. (...) À défaut d'exercice par le partenaire de la faculté légale de rétractation ou si la demande de rétractation ne respecte pas les conditions exposées ci-dessus [souligné par la cour] et en cas de résiliation à l'initiative du partenaire avant la signature du procès-verbal de livraison du site Internet, le partenaire versera au fournisseur une indemnité égale à 40 % de la totalité des échéances dues en vertu du contrat.

Il sera relevé en premier lieu que la référence faite à l'article L.121-20-12 du code de la consommation est erronée, puisque cet article n'existait plus à la date du contrat, le 22 juillet 2020, de sorte que la société Notariale Automobile n'était pas en mesure de saisir, à la lecture de cette stipulation, si sa situation lui permettait ou non d'exercer le droit de rétractation. Les dispositions d'ordre public du code de la consommation applicables en matière d'exercice du droit de rétractation n'étaient pas rappelées, ni leur contenu.

Par ailleurs, la rédaction ambiguë de l'article 17.1 précitée, et la formulation soulignée par la cour au paragraphe 23, laisse à penser que le droit de rétractation doit obligatoirement s'accompagner de l'envoi concomitant d'un justificatif concernant l'effectif de l'entreprise pour être considéré par la société Incomm comme régulier et éviter au contractant le paiement d'une indemnité de 40 % du montant des échéances.

Il en résulte que l'information donnée à l'appelante sur les conditions d'exercice du droit de rétractation, avant qu'elle s'engage par signature du contrat le 22 juillet 2020, n'était pas compréhensible.

Enfin, la formule insérée dans un cartouche en première page du contrat et dénommée « Information Précontractuelle », par laquelle la société Notariale Automobile reconnaît avoir reçu du fournisseur avant la signature du contrat les informations prévues par les articles L. 111-1 et L. 221-5 du code de la consommation constitue seulement un indice qu'il incombait à la société Incomm de corroborer par plusieurs éléments complémentaires ce qui n'est pas le cas en l'espèce, au regard des circonstances précédemment rappelées, étant de surcroît observé qu'il y est fait mention de « l'existence éventuelle [souligné par la cour] d'un droit de rétractation ».

20. Dès lors que les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation ne lui ont donc pas été fournies dans les conditions prévues à l'article L. 221-5 7° du code de la consommation, la société Notariale Automobile était fondée, par application de l'article L.221-20 alinéa 1er du même code, à notifier aux société Incomm et Locam l'exercice de ce droit de rétractation par l'intermédiaire de son conseil, ce qui a été fait de manière claire et exprès par deux lettres recommandées avec accusé de réception datées du 10 mai 2021, reçues l'une et l'autre le 17 mai suivant par les sociétés Incomm et Locam.

En effet, le délai de rétractation se trouvait prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial, tel que déterminé conformément à l'article L.221-18 du code de la consommation.

21. En application des articles L. 221-24 et L.221-27 du code de la consommation, l'exercice régulier du droit de rétractation par la société Notariale Automobile a mis fin aux obligations contractuelles des parties, les professionnels étant en conséquence tenus de restituer au consommateur les sommes reçues.

22. Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de condamner la société Incomm à restituer la somme de 1.291,20 euros qu'elle a admis, par courrier du 8 janvier 2021, avoir reçu au titre de 'frais d'adhésion/mise en ligne’stipulés en première page du contrat du 22 juillet 2020.

De plus, la société Locam, qui indique que la société Notariale Automobile s'est abstenue de régler les loyers à compter du mois de janvier 2021, ne discute donc pas que l'appelante lui a réglé les deux premier loyers de novembre et décembre 2020 et sera dès lors condamnée à restituer à l'appelante la somme de 1790,40 euros à ce titre.

Dès lors que ces sommes n'ont pas été restituées dans le délai de 14 jours, elles produisent intérêt au taux légal majoré, dans les conditions prévues par l'article L.242-4 du code de la consommation, avec capitalisation par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

23. La société Locam, agissant en qualité de cessionnaire, n'est pas fondée à solliciter paiement de sommes au titre du contrat dès lors que celui-ci se trouve anéanti du fait de l'exercice du droit de rétractation.

Elle sera donc déboutée de toutes ses demandes.

24. Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions.

 

Sur les demandes accessoires :

25. La société Incomm et la société Locam, parties succombantes, seront tenues au paiement in solidum des dépens de première instance et d'appel et seront condamnées à verser à la société Notariale Automobile la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

Rejette la demande formée par la société Notariale Automobile tendant à voir prononcer la nullité du jugement.

Infirme le jugement prononcé le 18 avril 2023 par le tribunal de commerce de Bordeaux.

Statuant à nouveau,

Dit que le contrat de licence d'exploitation de site Internet conclu le 22 juillet 2020 entre la société Notariale Automobile et la société Incomm, cédé ensuite à la société Locam, s'est trouvé anéanti par l'exercice du droit de rétractation par la société Notariale Automobile.

Condamne en conséquence la société Incomm à restituer à la société Notariale Automobile la somme de 1.291,20 euros.

Condamne la société Locam à restituer à la société Notariale Automobile la somme de 1790,40 euros au titre des loyers.

Dit que ces condamnations produisent intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, dans les conditions prévues par l'article L.242-4 du code de la consommation, avec capitalisation par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

Déboute la société Incomm et la société Locam de l'ensemble de leurs demandes.

Condamne in solidum la société Incomm et la société Locam aux dépens de première instance et d'appel.

Condamne in solidum la société Incomm et la société Locam à payer à la société Notariale Automobile la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier                                        Le Président