CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 17 juin 2025

- Cass. civ. 1re, 9 octobre 2024 : pourvoi n° 22-23714 - CA Bordeaux (1re ch. civ.), 3 octobre 2022 : RG 18/5300 - TGI Bordeaux, 11 septembre 2018 : RG n°17/6499
- CASS. CIV. 1re, 9 octobre 2024
CERCLAB - DOCUMENT N° 24062
CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 17 juin 2025 : RG n° 24/05230
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Dans leurs dernières conclusions, la Selarl K. et son mandataire judiciaire, ne contestent plus l'admission de la créance de la Bnp Paribas au passif de la procédure collective qu'à hauteur de la somme de 100.745,66 euros correspondant au montant des clauses pénales jugées excessives, de sorte que le jugement n'étant pas remis en cause en ce qu'il a retenu le principe de la fixation de la créance de la Bnp Paribas lease group à hauteur du des échéances échues impayées et intérêts de retard, soit la somme de 19.881,34 euros (120.627-100.745,66), et fixé en conséquence cette somme au redressement judiciaire de la Selarl K., est confirmé. »
2/ « C'est par de justes motifs que la cour adopte en l'absence d'arguments plus pertinents développés devant elle, que le tribunal a retenu que les dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation applicables aux contrats conclus entre professionnels et consommateurs n'avaient pas vocation à s'appliquer aux contrats conclus comme en l'espèce avec une personne morale pour les besoins de son activité professionnelle et que de même, les dispositions de l'article 1171 du code civil telles que résultant de l'ordonnance du n° 2016-131 du 10 février 2016 entrée en vigueur au 1er octobre 2016, n'étaient pas applicables à l'espèce, les contrats en litige lui étant antérieurs.
Quant aux dispositions de l'article L. 442- I- 2° du code de commerce selon lequel, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, il n'ouvre dans ce cas qu'une action en responsabilité.
En outre, il est constant que les opérations de locations financières sont exclues du champ d'application de l'article L. 442-1 du code de commerce (ancien article L. 442-6) relatives aux pratiques restrictives de concurrence, relevant des seules dispositions spécifiques du code monétaire et financier (Cass. com., 15 janvier 2020, n° 18-10.512).
En tout état de cause, la cour n'est pas mise en mesure d'apprécier, au vu des écritures des appelants à ce titre, le déséquilibre significatif qui résulterait des conditions générales du contrat (article 8 ou 1/5) prévoyant en cas de résiliation le paiement par le locataire d'une indemnité égale au montant des loyers à échoir, à défaut pour les appelants d'indiquer en quoi cette disposition ne trouve aucune contrepartie dans les obligations mises à la charge de la société de leasing. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 17 JUIN 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° RG 24/05230 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-OBQK. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : sur renvoi de cassation d'un arrêt rendu le 9 octobre 2024 (F 22-23.714) par la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation sur un arrêt rendu le 3 octobre 2022 (RG 18/5300) par la 1ère chambre civile de la cour d'appel de Bordeaux en suite d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux le 11 septembre 2018 (RG n°17/6499), suivant déclaration de saisine du 28 novembre 2024.
DEMANDERESSES :
SELARL K.
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1]
SELARL G. O.
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2]
Représentées par Maître Agnès BARBOT substituant Maître Thierry WICKERS de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE :
SAS EOS FRANCE
[Adresse 3], Représentée par Maître Quentin SIGRIST de la SELARL SIGRIST & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, Et assistée de Maître Laura PETARD substituant Maître Olivier BOURU, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 mai 2025 en audience publique, en double rapporteur devant Madame Paule POIREL, Présidente, chargée du rapport, et Madame Bénédicte LAMARQUE, conseiller, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant la cour composée de : Paule POIREL, Présidente, Bénédicte LAMARQUE, Conseillère, Emmanuel BREARD, Conseiller.
Greffier lors des débats : E. GOMBAUD
Greffier lors du prononcé : Vincent BRUGERE
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Titrage Contrats, Prêt d'argent, crédit-bail (ou leasing), cautionnement, Crédit-bail ou leasing - Demande en paiement des loyers et/ou en résiliation du crédit-bail.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
1. Le 27 mai 2014, Mme K. a conclu un contrat de location n° W0058906 avec la société Rex Rotary portant sur du matériel informatique, pour un montant de 85.084,72 euros TTC.
Ce contrat a été transféré à la société Bnp Paribas lease group, prévoyant le règlement de 63 loyers mensuels de 1.566 euros HT.
Le 9 mars 2015, Mme K. a conclu avec la société Bnp Paris lease group un contrat de location n° X00290009 portant sur le financement d'équipements micro informatiques, pour un montant de 2.186,21 euros, prévoyant le règlement de 63 loyers trimestriels de 97 euros HT.
La selarl K. a dûment réceptionné les matériels et leurs accessoires, sans émettre de réserve, et a signé les procès-verbaux de réception.
La Bnp Paribas a sollicité à plusieurs reprises, et notamment par mise en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 septembre 2015, la selarl K. de payer la somme de 115.081,25 euros TTC au titre des loyers impayés, des accessoires, et des indemnités de résiliation après avoir résilié de plein droit les deux contrats.
2. Par jugement du 23 février 2016, le tribunal de grande instance de Saintes a prononcé le redressement judiciaire de la selarl K., et désigné Maître G. en qualité de mandataire judiciaire.
Le 18 mars 2016, la Bnp Paribas a revendiqué la propriété du matériel auprès de la selarl K., avec copie au mandataire judiciaire et déclaré sa créance au passif de la selarl K., pour un montant de 120.627 euros TTC.
Le 18 avril 2016, le mandataire judiciaire a fait droit à la demande de revendication de la Bnp Paribas.
Le 21 décembre 2016, le mandataire judiciaire, sur demande de Mme K., a contesté la créance de la Bnp Paribas invoquant une disproportion par rapport à la valeur du matériel, la restitution du matériel, et l'existence d'un litige opposant Mme K. et son ancien associé.
Par ordonnance du 6 juin 2017, le juge commissaire s'est déclaré incompétent pour statuer sur les contestations de créances.
3. Par exploit d'huissier en date du 5 juillet 2017, la Bnp Paribas a assigné, devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, la selarl K. et la selarl G. en qualité de mandataire judiciaire, afin d'ordonner l'admission au passif de la selarl K. les créances de la Bnp Paribas pour un montant total de 120.627 euros TTC.
4. Par jugement du 11 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Bordeaux a déclaré irrecevables les exceptions de procédure invoquées par la selarl K., a débouté la selarl K. de l'intégralité de ses demandes, a ordonné l'admission au passif de la selarl K. les créances de la Bnp Paribas pour un montant total de 120.627 euros TTC et a condamné la selarl K. au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage, décision assortie de l'exécution provisoire.
5. Par déclaration électronique du 1er octobre 2018, la selarl K. et la selarl G. ont relevé appel de l'intégralité des chefs de ce jugement.
6. Par arrêt du 3 octobre 2022, la cour d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 11 septembre 2018 et fixé au passif de la procédure collective de la selarl K. les dépens de l'instance, ainsi que la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
7. La selarl K. et la selarl G. se sont pourvues en cassation contre cet arrêt.
8. Par un arrêt du 9 octobre 2014, la première chambre civile de la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 3 octobre 2022, mais seulement en ce qu'elle a ordonné l'admission au passif de la selarl K. des créances de la société Eos France venant aux droits de la société Bnp Paribas, pour un montant de 120.627 euros et en ce qu'elle a statué sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile; renvoyant ainsi les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée.
9. Par déclaration électronique en date du 28 novembre 2024, la selarl K. et la selarl G. ont saisi la cour d'appel de Bordeaux.
[*]
10. La selarl K. et Maître [O] G., en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la Selarl K., par conclusions notifiées par RÊVA le 4 avril 2025, demandent à la cour d'appel de Bordeaux de :
Infirmer l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 3 octobre 2022, dans les limites fixées par l'arrêt de la cour de cassation,
- déclarer non écrites les clauses permettant à la société Eos France de réclamer la somme de 100.745,66 euros, ou à défaut que cette somme soit très sérieusement réduite, en application de l'article 1152 du code civil,
- condamner la société Eos France aux dépens de première instance et d'appel, et 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
11. La société EOS France, intervenant en qualité de cessionnaire de créances de la société Bnp Paribas lease group, par dernières conclusions notifiées par la RPVA le 7 mars 2025, demande à la cour d'appel de Bordeaux de :
- débouter la selarl K. de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter Maître G. en qualité de mandataire judiciaire de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu en date du 11 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Bordeaux,
- ordonner l'admission au passif de la selarl K. des créances de la société Eos France, venant aux droits de la société Bnp Paris lease group, pour un montant total de 120.627 euros TTC à titre chirographaire,
- condamner la selarl K. à payer à la société Eos France la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
[*]
12. L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 6 mai 2025.
13. L'instruction a été clôturée par une ordonnance du 22 avril 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
I - Sur la portée de la cassation :
Conformément aux dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce.
Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
La cassation annule intégralement le chef de dispositif qu'elle atteint quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation et la cour de renvoi n'est pas liée par les motifs de l'arrêt cassé, étant tenue d'examiner tous les moyens soulevés devant elle.
Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article 625 que sur les points qu'elle atteint la décision replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé.
La cour de renvoi est ainsi saisie par l'acte d'appel initial, dans les limites du dispositif de l'arrêt de cassation.
La cour d'appel de Bordeaux initialement saisie l'était d'un appel de l'intégralité des dispositions du jugement déféré mais la cassation n'a porté que sur la mention de l'arrêt ayant confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Selarl K. l'ensemble de la créance de la Bnp Paribas lease group pour un montant de 120.627 euros.
Dans leurs dernières conclusions, la Selarl K. et son mandataire judiciaire, ne contestent plus l'admission de la créance de la Bnp Paribas au passif de la procédure collective qu'à hauteur de la somme de 100.745,66 euros correspondant au montant des clauses pénales jugées excessives, de sorte que le jugement n'étant pas remis en cause en ce qu'il a retenu le principe de la fixation de la créance de la Bnp Paribas lease group à hauteur du des échéances échues impayées et intérêts de retard, soit la somme de 19.881,34 euros (120.627-100.745,66), et fixé en conséquence cette somme au redressement judiciaire de la Selarl K., est confirmé.
Sur le fond du litige :
Sur la somme totale retenue par le premier juge, les appelants demandent à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas fait droit à ses demandes d'écarter ou en tous les cas réduire le montant des clauses pénales à savoir :
- pour la première créance à hauteur de la somme 89.342,97 euros correspondant à l'indemnité de résiliation et 8.934,28 euros au titre de la pénalité de 10 % (article 1/5 des conditions générales),
- pour la seconde créance à hauteur de la somme 2.247,13 euros correspondant à l'indemnité réparatrice de résiliation et 221,28 euros au titre de la pénalité de 9,4 (article 8 des conditions générales).
Ils se prévalent pour cela au principal de l'inopposabilité des clauses contenues aux articles 1/5 et 8 des conditions générales des contrats de location litigieux comme instaurant un déséquilibre significatif entre les obligations respectives des parties et, à défaut, du caractère disproportionné de la sanction au regard du préjudice réellement subi par le loueur, devenu Eos France, en présence de clauses constituant des clauses pénales.
II - Sur le caractère non écrit des clauses des contrats (articles 1/5 et 8) :
Les appelants demandent de déclarer abusives, soit sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la consommation, soit sur le fondement de l'article 1171 du code civil, soit sur celui de l'article L. 442-6 du code de commerce les clauses du premier contrat (article 8) en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif sans réciprocité dans les obligations respectives des parties en mettant à la charge du locataire en cas de résiliation le paiement d'une indemnité égale au montant des loyers à échoir, et pour le second contrat, les clauses permettant de réclamer des sommes disproportionnées par rapport à la valeur des matériels mis à disposition(article 1/5), le pack Microsoft office 2013 étant facturé 1132 euros pour un prix de 230 euros ou l'ordinateur Dell pour un prix de 3.776 euros alors qu'il ne coûte au maximum que 500 euros, de telle sorte que ces deux clauses doivent être déclarées non écrites.
La société intimée conteste que soient applicables à l'espèce tant les dispositions du code de la consommation, que l'article 1171 du code civil dans sa version résultant de l'ordonnance du 10 février 2016, que les dispositions du code de commerce, observant qu'en matière de location financière, le défaut de réciprocité de la clause de résiliation prévue à l'article 8 des conditions générales se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties, l'absence de réciprocité des obligations résultant d'une clause constituant un élément d'appréciation de son caractère abusif.
Sur ce :
C'est par de justes motifs que la cour adopte en l'absence d'arguments plus pertinents développés devant elle, que le tribunal a retenu que les dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation applicables aux contrats conclus entre professionnels et consommateurs n'avaient pas vocation à s'appliquer aux contrats conclus comme en l'espèce avec une personne morale pour les besoins de son activité professionnelle et que de même, les dispositions de l'article 1171 du code civil telles que résultant de l'ordonnance du n° 2016-131 du 10 février 2016 entrée en vigueur au 1er octobre 2016, n'étaient pas applicables à l'espèce, les contrats en litige lui étant antérieurs.
Quant aux dispositions de l'article L. 442- I- 2° du code de commerce selon lequel, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, il n'ouvre dans ce cas qu'une action en responsabilité.
En outre, il est constant que les opérations de locations financières sont exclues du champ d'application de l'article L. 442-1 du code de commerce (ancien article L. 442-6) relatives aux pratiques restrictives de concurrence, relevant des seules dispositions spécifiques du code monétaire et financier (Cass. com., 15 janvier 2020, n° 18-10.512).
En tout état de cause, la cour n'est pas mise en mesure d'apprécier, au vu des écritures des appelants à ce titre, le déséquilibre significatif qui résulterait des conditions générales du contrat (article 8 ou 1/5) prévoyant en cas de résiliation le paiement par le locataire d'une indemnité égale au montant des loyers à échoir, à défaut pour les appelants d'indiquer en quoi cette disposition ne trouve aucune contrepartie dans les obligations mises à la charge de la société de leasing.
La Selarl K. et son mandataire sont en conséquence déboutés de leurs demandes de ce chef.
III - Sur la réduction des clauses pénale :
Les appelants demandent à la cour, dans le prolongement de la motivation de la cour de cassation, de qualifier les dispositions des articles 1/5 et 8 des conditions générales des contrats litigieux en ce qu'elles permettent au loueur en cas de résiliation du contrat de percevoir l'ensemble des loyers à échoir, encore augmenté d'une pénalité de 10 % ou de 9,4 %, de clause pénale et de constater que la sanction est disproportionnée au regard du préjudice subi par le loueur qui, tout en ayant perçu les loyers échus et en ayant récupéré le bien susceptible d'être reloué, percevra s'agissant du premier contrat notamment une somme de 98.227,25 euros, manifestement disproportionnée, la société intimée n'apportant aucun élément de preuve de ce que cette clause permet de faire face au préjudice résultant pour elle de la résiliation du bail à défaut de justifier aux débats de la réalité de son préjudice.
La société Eos France venant aux droits de la société Bnp Paribas lease group, sans contester que les clauses de résiliation dont elle sollicite la fixation au passif du redressement judiciaire de la société constituent des clauses pénales au sens de l'article 1152 du code civil, observe que les appelants ne démontrent en rien que les indemnités dues en application du contrat seraient manifestement excessives au regard du préjudice réellement subi, ce qu'il leur appartient d'établir et ne saurait résulter du seul caractère de clause pénale de la sanction, ni même de la nature du manquement, alors que la résiliation anticipée lui cause un préjudice puisqu'elle se trouve privée de la possibilité d'amortir le prix du matériel loué, qu'elle ne récupérera pas le montant acquitté auprès de la société Rex Rotary, et qu'elle ne percevra pas les intérêts afférents au capital auquel le contrat lui ouvrait droit, le préjudice en terme de manque à gagner étant d'autant plus important que le contrat a été résilié rapidement, le fait qu'elle ait récupéré le matériel ne constituant que l'exécution des stipulations contractuelles.
Sur ce :
Selon l'article 1152 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016 applicable au présent litige, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.
Il n'est pas discuté par les parties que les indemnités de résiliation en litige, qu'il s'agisse de la perception des loyers restant à échoir ou de la pénalité de 10 % pour le premier contrat et 9,4 % pour le second, constituent des clauses pénales au sens de l'article 1152 du code civil.
Il sera rappelé qu'une indemnité due à titre de clause pénale stipulée dans un contrat de location financière de matériel correspondant à la totalité des loyers à échoir au jour du contrat ne constitue pas par principe un enrichissement injuste pour le bailleur, ni la continuation du paiement du loyer par le preneur, n'étant que l'exécution d'une clause librement acceptée entre les parties au contrat.
Elle peut toutefois s'avérer manifestement disproportionnée, ce dont il revient au locataire de rapporter la preuve, étant par ailleurs constant que le juge apprécie in concreto le caractère manifestement excessif ou dérisoire de la sanction au regard du préjudice réellement subi du fait de la défaillance du locataire.
Pour cela, il doit être tenu compte de ce que, dans tous les cas, le montant de la clause pénale doit permettre de dissuader des résiliations anticipées intempestives des contrats mais également d'indemniser le préjudice qui existe nécessairement du seul fait de la perte des espoirs de gains que le cocontractant était en droit d'escompter du contrat, retardant d'autant en l'espèce l'amortissement de son matériel et lui faisant perdre un retour sur investissement.
Le fait que la bailleresse ait récupéré le matériel, même s'il n'est pas contesté qu'il s'agit d'une conséquence de la résiliation, est bien une circonstance qui doit être prise en compte pour apprécier le montant de la clause pénale en ce qu'elle oblige le locataire en cas de résiliation à s'acquitter également de l'intégralité des loyers non échus.
Cependant, il doit être également retenu que la société Bnp Paribas lease group n'est pas contredite lorsqu'elle indique qu'elle s'est acquittée du montant du matériel auprès de la société Rex Rotary.
Par ailleurs, le matériel qui est récupéré est un matériel qui a été utilisé sur lequel le bailleur subit une perte et la résiliation étant intervenue très tôt dans la vie du contrat, l'indemnité de résiliation apparaît certes très importante au regard des loyers effectivement acquittés, mais le manque à gagner en est également d'autant plus important pour le bailleur.
Or, les appelants sur lesquels repose la preuve du caractère manifestement excessif des clauses pénales au regard du préjudice réellement subi par le bailleur, ne proposent aucune traduction comptable de leurs affirmations, n'indiquant pas même la valeur réelle du matériel restitué compte tenu de sa dépréciation.
Il s'ensuit qu'il n'est pas établi que les indemnités réparatrices (article 8 et 1/5) des contrats litigieux, de 89.342,97 euros pour le contrat n° W0058906 et de 2.247,13 euros pour le contrat n° X0020009 sont manifestement excessives.
Toutefois, l'indemnité supplémentaire de 10 % prévue au contrat n° W0058906 d'un montant de 8.934,28 euros qui ne trouve aucune justification particulière en sus de la précédente prévue à l'article 1/5 des conditions générales en termes de préjudice subi effectivement par la société Bnp Paribas Lease group, sera réduite à 1 euro.
Et il en va de même pour la pénalité complémentaire de 9,4 % prévue au contrat n° X0020009 d'un montant de 221,28 euros, laquelle sera également ramenée à la somme de 1 euros.
En conséquence la créance de la Bnp Paribas lease group ressort ainsi qu'il suit :
Pour le contrat n° W0058906 :
- 13.961,22 euros au titre des loyers impayés et accessoires.
- 5.503,52 euros au titre des intérêts de retard
- 89.342,25 euros au titre de l'indemnité réparatrice
-pénalité : 1 euro
Pour le contrat n° X00290009 :
- 278,37 euros au titre des loyers impayés et accessoire,
- 138,23 euros au titre des intérêts de retard,
- 2.247,13 euros au titre de l'indemnité réparatrice,
- pénalité : 1 euros
Au total, la créance de la société Bnp Paribas lease group sera fixée à la somme de 111.472,72 euros TTC, par infirmation du jugement entrepris.
Au vu de l'issue du présent recours, le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et frais irrépétibles de première instance, les dépens du présent recours étant partagés par moitié entre les parties, l'équité ne commandant pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant dans les limite de sa saisine.
Infirme partiellement le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau des chefs réformés :
Fixe à la somme de 1 euro l'indemnité due au titre la pénalité de 10 % par le contrat n°W0058906.
Fixe à la somme de 1 euro l'indemnité due au titre de la pénalité de 9,4 % par le contrat n° X00290009.
En conséquence :
Fixe au passif de la Selarl K. les créances de la société EOS France venant aux droits de la société Bnp Paribas lease group à la somme de 111.472,72 euros TTC.
Confirme le jugement entrepris pour le surplus et y ajoutant :
Rejette les demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que les dépens de la présente sont partagés par moitié entre les parties.
Le présent arrêt a été signé par Paule POIREL, présidente, et par Vincent BRUGERE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,