TJ GRASSE (1re ch. A), 6 juin 2025
CERCLAB - DOCUMENT N° 24068
TJ GRASSE (1re ch. A), 6 juin 2025 : RG n° 23/05641 ; jugt n° 2025/446
Publication : Judilibre
Extrait : « Cette convention de mise à disposition comporte, dans son article 13, une clause intitulée RESILIATION : ainsi rédigée « Pour des raisons inhérentes à la commune, le prêteur pourra résilier de plein droit la présente convention. Le preneur disposera de deux mois, à compter de l’envoi du courrier, pour quitter les lieux. »
La société ULYSSE YATCHS soutient à titre principal que cette clause est nulle pour être potestative et à titre subsidiaire qu’elle doit être déclarée non écrite.
Toutefois, comme le souligne à juste titre la commune, l’action engagée dans le cadre de la présente instance n’est pas fondée sur le constat de l’acquisition d’une clause résolutoire prévue à la convention de mise à disposition, mais porte sur demande tendant à voir prononcer la résolution judiciaire de ladite convention pour inexécution contractuelle, en application des dispositions combinées des articles 1224 et 1227 du code civil.
Le sort de la clause de résiliation figurant à la convention de mise à disposition est dès lors indifférent au règlement du présent litige. Les demandes formées par la société ULYSSE YATCHS seront par conséquent rejetées, comme étant inopérantes. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE GRASSE
PÔLE CIVIL - PREMIÈRE CHAMBRE SECTION A
JUGEMENT DU 6 JUIN 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/05641. Jugement n° 2025/446. N° Portalis DBWQ-W-B7H-POUL.
DEMANDERESSE :
LA COMMUNE DE LA ROQUETTE SUR SIAGNE
prise en la personne de son Maire en exercice domicilié es qualité à [adresse], représentée par Maître Maud BARBEAU-BOURNOVILLE, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant, substitué par Maître CASSORLA
DÉFENDERESSE :
SARL ULYSSE YACHTS
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro YYY, dont le siège social est [adresse], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, représentée par Maître Éric AGNETTI, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant, substitué par Maître GAVOILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL : JUGE UNIQUE
Président : Mme CASINI, Vice-Présidente
Greffier : Madame RAHARINIRINA
Vu les articles 801 à 805 du code de procédure civile, et sans demande de renvoi devant la formation collégiale.
DÉBATS : Vu la clôture de la procédure avec effet différé au 26 février 2025 ; A l’audience publique du 24 mars 2025,
Après débats, l’affaire a été mise en délibéré, avis a été donné aux parties par le tribunal que le jugement serait prononcé par la mise à disposition au greffe à la date du 06 Juin 2025.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Selon convention en date du 29 mars 2019, la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE a mis à disposition de la SARL ULYSSE YACHTS un local et un terrain situés [adresse].
Le 25 juin 2021, compte tenu de la période de crise sanitaire inhérente à la propagation de l’épidémie de COVID-19, un avenant à la convention de mise à disposition a été régularisé entre les parties, accordant une diminution rétroactive du loyer mensuel de 1.300 €, hors charges, pour la période du 1er janvier 2020 au 30 juin 2021.
Par la suite, la société ULYSSE YACHTS a accusé un retard dans le règlement de ses échéances.
Selon exploit d’huissier en date du 12 janvier 2023, la Commune de la ROQUETTE-SUR- SIAGNE a assigné la société ULYSSE YACHTS aux fins notamment de :
- CONSTATER l’occupation sans droit ni titre de la société ULYSSE YACHTS et de tous occupants de son chef, la parcelle cadastrée section AS n° XX d’une superficie de 2 471 m² et
son local, situés [adresse], appartenant au domaine privé de la Commune ;
- ORDONNER l’expulsion de biens et de corps de la société ULYSSE YACHTS et de tous occupants de son chef de ladite parcelle dans un délai de 10 jours à compter de la signification de l’ordonnance ;
- ORDONNER que, passé ce délai, courra une astreinte de 500 (cinq-cents) euros par jour de retard ;
- ORDONNER que faute pour la société ULYSSE YACHTS de libérer le terrain dans un délai de 10 jours à compter de la signification de l’ordonnance, elle peut y être contrainte par la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE avec le concours de la force publique, qu’elle pourra requérir à son initiative auprès des autorités territorialement compétentes pour assurer l’exécution forcée de celle-ci ;
- ORDONNER la séquestration des meubles et effets personnels pouvant se trouver dans les lieux aux frais et risques de la société ULYSSE YACHTS ;
- FIXER ET CONDAMNER à titre provisionnel, la société ULYSSE YACHTS au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale à 3 322,38 euros (trois mille trois cent vingt deux euros et trente-huit centimes) par mois pour la période allant du 1er novembre 2021 à la date de la libération des lieux par l’occupante sans droit ni titre, les mois incomplets étant dus au prorata temporis ;
Par ordonnance en date du 19 mai 2023, Madame le Juge des référés du Tribunal judiciaire de GRASSE a dit n’y avoir lieu à référé.
Par exploit du 29 novembre 2023, la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE a assigné la société ULYSSE YACHTS a assigné devant le Tribunal Judiciaire de Grasse aux fins de le voir :
DIRE que la SARL ULYSSE YACHTS a gravement manqué à ses obligations de paiement des redevances mensuellement dues ;
ORDONNER l'exécution forcée en nature de la convention conclue le 29 mars 2019 par le paiement d'une somme égale à 3.322,38 euros (trois mille trois cent vingt-deux euros et trente-huit centimes) par mois pour la période allant du 1er novembre 2021 au 31 mars 2023, puis à la somme de 3.614,81 euros pour la période allant du 1er avril 2023 jusqu'à la date de la résiliation de la convention, avec intérêt de droit à compter du 2 septembre 2021, et ce, sous astreinte de 2000 euros par jour de retard ;
PRONONCER la résiliation de la convention de mise à disposition aux torts exclusifs de la SARL ULYSSE YACHTS, à compter de la date de la signification de la présente ;
DIRE que la SARL ULYSSE YACHTS n'a pas droit au versement d'une indemnité d'éviction en raison de la résiliation de la convention ni au maintien dans les lieux à compter de la date de la résolution ;
CONDAMNER à payer à la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE la somme de 2.500 euros (deux mille cinq cent euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER la société ULYSSE YACHTS aux entiers dépens.
[*]
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par rpva le 24 juin 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE demande au tribunal de :
Vu les articles L. 2211-1 et suivants du Code général de la propriété des personnes publiques,
Vu les articles 1217 et suivants du Code civil,
Vu l’article 1741 du Code civil,
Vu la convention de mise à disposition du 29 mars 2019,
Vu le courrier du Maire de la Commune du 2 septembre 2021 portant résiliation de la convention de mise à disposition,
Vu le commandement de payer du 23 mai 2024,
Vu la mise en demeure du 26 octobre 2022,
Vu le rapport de la police municipale du 22 novembre 2022,
Vu la mise en demeure du 7 août 2023
DIRE que la SARL ULYSSE YACHTS a gravement manqué à ses obligations de paiement des redevances mensuellement dues ;
ORDONNER à la SARL ULYSSE YACHTS l’exécution forcée en nature de la convention conclue le 29 mars 2019 par le paiement d’une somme égale à 3.322,38 euros (trois mille trois cent vingt-deux euros et trente-huit centimes) par mois pour la période allant du 1er novembre 2021 au 31 mars 2023, puis à la somme de 3.614,81 euros pour la période allant du 1er avril 2023 jusqu’à la date de la résolution de la convention, avec intérêt de droit à compter du 2 septembre 2021, et ce, sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard ;
PRONONCER la résolution de la convention de mise à disposition aux torts exclusifs de la SARL ULYSSE YACHTS, à compter de la date de la signification de la présente assignation ORDONNER l’expulsion la SARL ULYSSE YACHTS de la parcelle cadastrée section AS n° XX d’une superficie de 2 471 m² sise [adresse] ainsi que tous autres occupants de son chef, dès la date de signification de la décision à intervenir ;
ORDONNER en tant que besoin le concours de la force publique ;
ORDONNER la remise en état du terrain dans son état d’origine antérieurement à l’occupation par la société ULYSSE YACHTS ;
FIXER le montant de l’indemnité d’occupation mensuelle d’occupation à la somme de 3.614,81 euros, correspondant au montant du loyer actuel comprenant la provision pour charges ;
CONDAMNER la SARL ULYSSE YACHTS au paiement des loyers à la date de l’assignation ainsi qu’au paiement de ladite indemnité d’occupation mensuelle, depuis la résiliation de la convention de mise à disposition intervenant le 29 novembre 2023, soit la somme de 21.688,86 euros arrêtée au 31 mai 2024 inclus, et jusqu’à libération totale et effective des lieux, avec intérêt de droit à compter du 29 novembre 2023 ;
DIRE que la SARL ULYSSE YACHTS n’a pas droit au versement d’une indemnité d’éviction en raison de la résiliation de la convention ni au maintien dans les lieux à compter de la date de la résolution fixée au 29 novembre 2023 ;
DÉBOUTER l’adversaire de toutes ses demandes et prétentions ;
CONDAMNER la SARL ULYSSE YACHTS au paiement de la somme de 20.000 euros au titre du préjudice subi par la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE ;
CONDAMNER la SARL ULYSSE YACHTS à payer à la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE la somme de 3.000 euros (deux mille cinq cent euros) en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER la SARL ULYSSE YACHTS au remboursement des frais engagés en amont de la présente procédure, à savoir un montant de 202,17 euros, correspondant au commandement de payer signifié par voie d’huissier le 24 mai 2022 ;
CONDAMNER la société ULYSSE YACHTS aux entiers dépens.
[*]
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par rpva le 18 octobre 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, la SARL ULYSSE YACHTS demande au tribunal de :
CONSTATER le caractère potestatif de l’article 13 de la convention de mise à disposition conclue le 29 mars 2019,
A titre subsidiaire,
CONSTATER le caractère déséquilibré de l’article 13 de la convention de mise à disposition conclue le 29 mars 2019,
CONSTATER l’absence de substance dont fait l’objet l’article 13 de la convention de mise à disposition conclue le 29 mars 2019,
En conséquence,
DÉCLARER nulle la clause de résiliation stipulée dans la convention de mise à disposition conclue le 29 mars 2019,
A titre subsidiaire,
DÉCLARER réputée non écrite la clause de résiliation stipulée dans la convention de mise à disposition conclue le 29 mars 2019,
En toutes hypothèses,
DÉBOUTER la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
OCTROYER un échelonnement du paiement des sommes réclamées sur une durée de 24 mois,
CONDAMNER la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE à lui payer la somme de 1.500,00 euros à la SARL ULYSSE YACHTS au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens.
[*]
La procédure a été clôturée suivant ordonnance du juge de la mise en état du 28 octobre 2024 avec effet différé au 26 février 2025 et l’affaire fixée à l’audience juge unique de plaidoirie du 24 mars 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la résolution du contrat de mise à disposition :
La Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE demande au tribunal de prononcer la résolution de la convention de mise à disposition du 23 mars 2019 sur le fondement des articles 1217, 1224 et 1227 du code civil, faisant valoir que la société ULYSSE YATCHS ne règle plus aucune redevance d’occupation depuis novembre 2021 malgré l’envoi de plusieurs mises en demeure, et qu’il s’agit d’une inexécution grave et persistante de ses obligations contractuelles.
La société ULYSSE YACHTS sollicite en réplique, que le tribunal déclare nulle la clause de résiliation figurant à la convention en application de l’article 1304-2 du code civil comme étant potestative, dans la mesure où elle dépend de la seule volonté de la Commune. A titre subsidiaire elle demande au tribunal de dire cette clause résolutoire non écrite en application de l’article 1171 du code civil, car il s’agit d’une clause non négociable, déterminée à l’avance entrainant un déséquilibre significatif entre les droits et obligation des parties et au motif qu’il s’agit d’une clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur, au sens de l’article 1225 alinéa 1 du code civil.
* * *
L’article 1217 du Code civil dispose :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.”
L’article 1224 du Code civil précise :
« La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »
Aux termes de l’article 1227 du Code civil :
« La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. »
Aux termes de l’article 1229 du même Code :
« La résolution met fin au contrat. La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 ».
Il est admis à ce titre que le demandeur doit établir qu’il y a une inexécution totale ou partielle des obligations principales ou accessoires par le cocontractant, sans qu’il soit nécessaire que le demandeur rapporte la preuve que l’inexécution lui a causé un préjudice.
En l’espèce, selon convention en date du 29 mars 2019, la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE a mis à disposition de la SARL ULYSSE YACHTS un local et un terrain situés 1295 chemin de la Levade à la ROQUETTE-SUR-SIAGNE moyennant un loyer annuel de 36.000 euros net payable mensuellement, soit 3.000 euros net à compter du 1er avril 2019. Il est précisé que ce loyer sera révisé annuellement tous les 1er avril et ce, à compter du 1er avril 2020, suivant la variation des indices à la construction entre l’indice au 1er trimestre N et l’indice au 1er trimestre N-1.
Cette convention de mise à disposition comporte, dans son article 13, une clause intitulée RESILIATION : ainsi rédigée « Pour des raisons inhérentes à la commune, le prêteur pourra résilier de plein droit la présente convention. Le preneur disposera de deux mois, à compter de l’envoi du courrier, pour quitter les lieux. »
La société ULYSSE YATCHS soutient à titre principal que cette clause est nulle pour être potestative et à titre subsidiaire qu’elle doit être déclarée non écrite.
Toutefois, comme le souligne à juste titre la commune, l’action engagée dans le cadre de la présente instance n’est pas fondée sur le constat de l’acquisition d’une clause résolutoire prévue à la convention de mise à disposition, mais porte sur demande tendant à voir prononcer la résolution judiciaire de ladite convention pour inexécution contractuelle, en application des dispositions combinées des articles 1224 et 1227 du code civil.
Le sort de la clause de résiliation figurant à la convention de mise à disposition est dès lors indifférent au règlement du présent litige. Les demandes formées par la société ULYSSE YATCHS seront par conséquent rejetées, comme étant inopérantes.
En l’espèce, il n’est pas contesté que la société ULYSSE YACHTS ne règle plus aucun loyer au titre de l’occupation du local et du terrain situés 1295 chemin de la Levade depuis le mois de novembre 2021.
Malgré la signification d’un commandement de payer le 24 mai 2022 et l’envoi d’un courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 août 2023, la Société ULYSSE YACHTS ne s’est toujours pas exécutée.
Au regard des éléments précités, en l’état d’une convention d’occupation d’un terrain communal signée, l’absence persistante de paiement des redevances mensuelles depuis le mois de novembre 2021 caractérise une inexécution manifestement grave et persistante de la part de la société ULYSSE YACHTS de son obligation principale.
Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande de la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE et de prononcer la résiliation de la convention d’occupation signée le 29 mars 2019 aux torts de la société ULYSSE YACHTS.
Cette résiliation prendra effet à la date du 31 mai 2024.
Il convient par suite, d’ordonner l’expulsion la SARL ULYSSE YACHTS de la parcelle cadastrée section AS n° XX d’une superficie de 2.471 m² sise [adresse] ainsi que tous autres occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique dans un délai d’un mois suivant la signification de la présente décision.
Le terrain devra être remis en état conformément à l’état des lieux établi contradictoirement entre les parties lors de la prise de possession des lieux au 1er avril 2019
Sur la demande en paiement des loyers impayés et d’une indemnité d’occupation :
L’article 1221 du Code civil dispose que : « Le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier. »
En l’espèce, la convention en date du 29 mars 2019 conclue avec la Commune de la ROQUETTE-SUR-SIAGNE met à la charge de la SARL ULYSSE YACHTS, un loyer annuel de 36.000 euros net payable mensuellement, soit 3.000 euros net à compter du 1er avril 2019. Il est précisé que ce loyer sera révisé annuellement tous les 1er avril et ce, à compter du 1er avril 2020, suivant la variation des indices à la construction entre l’indice au 1er trimestre N et l’indice au 1er trimestre N-1
Par avenant du 25 juin 2021, une diminution exceptionnelle de loyer de 1.300 euros par mois a été convenue pour la période du 1er janvier 2020 au 30 juin 2021.
Par un commandement de payer du 24 mai 2022, la Commune a sollicité le paiement, dans un délai d’un mois, de la somme de 18.874,99 euros, correspondant aux loyers impayés pour la période du mois de novembre 2021 au mois d’avril 2022.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 août 2023, la Commune cocontractant a mis en demeure la société ULYSSE YACHTS d’exécuter ses obligations, sans succès.
Il convient dès lors d’enjoindre à la société ULYSSE YACHTS de procéder au paiement d’une somme d’argent égale à 3.322,38 euros par mois pour la période allant du 1er novembre 2021 au 31 mars 2023, puis à la somme de 3.614,81 euros pour la période allant du 1er avril 2023 jusqu’à la date de la résolution de la convention fixée judiciairement au 31 mai 2024.
En l’espèce, il résulte des pièces produites que la société ULYSSE YACHTS est redevable auprès de la commune des sommes suivantes :
-53.158, 08 euros pour la période allant du 1er novembre 2021 au 31 mars 2023 ;
- 46.992,53 euros pour la période allant du 1er avril 2023 au 31 mai 2024, soit un montant total de 100.150,61 euros.
Le prononcé d’une astreinte n’est pas nécessaire quant au recouvrement de ladite somme.
La société ULYSSE YACHTS est également redevable d’une somme mensuelle de 3614,81 euros à titre d’indemnité d’occupation depuis la résiliation de la convention le 31 mai 2024 jusqu’à la libération totale et effective des lieux.
Sur les délais de paiement :
La société ULYSSE YACHTS sollicite l’octroi de délais de paiement et un échelonnement de sa dette sur 24 mois, arguant du fait qu’elle ne dispose pas de fonds propres lui permettant immédiatement de régler les sommes dues.
La Commune de la ROQUETTE SUR SIAGNE s’oppose à l’octroi des délais sollicités soulignant notamment la mauvaise foi de la société, qui n’a effectué aucun versement depuis de très nombreux mois et a attendu qu’elle saisisse le juge des référés pour formuler des demandes dilatoires.
* * *
L’article 1343-5 du code civil prévoit : « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. »
En l’espèce, le tribunal constate qu’alors que la Commune l’a relancé à plusieurs reprises, la société ULYSSE YACHTS n’a procédé à aucun versement, même minime à valoir sur la dette locative.
De même, la société débitrice ne produit aucun élément comptable permettant de justifier sa situation financière et apprécier si elle est en mesure de s’acquitter des loyers dus sur une période de 24 mois.
Dès lors, il y a lieu de rejeter sa demande de délais de paiement.
Sur la demande de dommages et intérêts :
La Commune sollicite l'indemnisation de la perte de chance qu’elle a subie de louer sa parcelle litigieuse à un tiers, à des conditions équivalentes, pendant la durée de l’inexécution contractuelle puis pendant la durée de l’occupation du terrain sans droit ni titre par la société défenderesse. Elle allègue avoir renoncé de conclure une convention d’occupation de sa parcelle avec l’opérateur de téléphonie « CELLNEX France SAS », dont le montant de la redevance annuelle aurait dû s’élever à un montant de 10.000 euros nets. Elle évalue son préjudice tenant à la perte de chance de louer son bien à un montant s'élevant à la somme de 20.000 euros, soit 50 % du montant des redevances annuelles qu’elle aurait dû percevoir depuis le mois de novembre 2021.
La société ULYSSE YACHTS conclut au rejet de cette demande faisant valoir que le projet de convention privative conclu avec la société CELLNEX porte sur une période bien antérieure au litige survenu entre les parties.
* * *
Aux termes de l’article 1240 du Code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
En l’espèce, la commune verse aux débats le projet daté du 8 octobre 2021 de convention d’occupation privative qui aurait pu être conclu par la société CELLNEX France SAS moyennant une redevance annuelle d’un montant de 10.000 euros portant sur le terrain litigieux.
S’il est vrai qu’à cette date, la société ULYSSE YACHTS n’avait pas réglé de loyers pour la période allant du mois d’août 2020 au mois de septembre 2021 et n’avait pas donné suite au courrier du Maire de la commune en date du 3 septembre 2021 qui lui notifiait la résiliation de la convention, force est de constater que le projet de convention avec la société CELLNEX communiqué montre que la convention aurait été conclue pour une redevance annuelle beaucoup moins élevée (10.000 euros annuels au lieu de 36.000 euros annuels s’agissant de la convention conclue avec ULYSSE YACHTS).
Dès lors, il y a lieu de dire que la commune ne caractérise pas le préjudice allégué résultant de la perte de chance évoquée.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de dommages et intérêts formée par la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
La société ULYSSE YACHTS, partie perdante à l’instance, sera condamnée aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile, ainsi qu’à verser à la Commune de LA ROQUETTE SUR SIAGNE une indemnité de 1.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens, en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire :
Il résulte des articles 514 et suivants du code de procédure civile que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement. Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.
En l’espèce, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en premier ressort,
Rejette la demande de nullité de la clause résolutoire figurant à la convention de mise à disposition du 19 mars 2019,
Rejette la demande tendant à voir dire cette clause résolutoire non écrite,
Prononce la résiliation de la convention d’occupation signée le 29 mars 2019 entre la Commune de la ROQUETTE SUR SIAGNE et la société ULYSSE YACHTS aux torts de cette dernière à la date du 31 mai 2024,
Ordonne l’expulsion de la SARL ULYSSE YACHTS de la parcelle cadastrée section AS n° XX d’une superficie de 2.471 m² sise [adresse] ainsi que tous autres occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique dans un délai d’un mois suivant la signification de la présente décision,
Dit que le terrain devra être remis en état conformément à l’état des lieux établi contradictoirement entre les parties lors de la prise de possession des lieux au 1er avril 2019
Condamne la société ULYSSE YACHTS à payer à la Commune de la ROQUETTE SUR SIAGNE la somme de 100.150,61 euros due au titre des loyers impayés arrêtée au 31 mars 2024,
Rejette la demande d’astreinte,
Rejette la demande de délais de paiement formée par la société ULYSSE YACHTS,
Condamne la société ULYSSE YACHTS à payer à la commune de la ROQUETTE SUR SIAGNE une somme mensuelle de 3.614,81 euros à titre d’indemnité d’occupation depuis la résiliation de la convention le 31 mai 2024 jusqu’à la libération totale et effective des lieux,
Condamne la société ULYSSE YACHTS à payer à la ROQUETTE SUR SIAGNE une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société ULYSSE YACHTS aux entiers dépens,
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit et dit n’y avoir lieu de l’écarter,
Rejette les demandes plus amples et contraires.
Et le présent jugement a été signé par le Président et le greffier,
Le Greffier Le Président