CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (5e ch. B), 14 juin 2007

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (5e ch. B), 14 juin 2007
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 5e ch. sect. B
Demande : 03/20383
Date : 14/06/2007
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4322

CA PARIS (5e ch. B), 14 juin 2007 : RG n° 03/20383

Publication : Jurica

 

Extrait : « Que les relations entre ALJC, VF Lingerie France et Vives Vidal Vivesa ont, en toute hypothèse, pris fin en 2000 avant l'entrée en vigueur des dispositions de l’article L. 442-6, 2°, b, du code de commerce, sur lesquelles la Selafa MJA, ès qualités, fonde expressément sa demande, qui sont issues de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 14 JUIN 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 03/20383 (6 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 octobre 2003 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2002/32321.

 

APPELANTE :

SELAFA MJA EN LA PERSONNE DE MAITRE X. ES QUALITE DE MANDATAIRE A LA LIQUIDATION JUDICIAIRE DE LA SA ALJC

représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoués à la Cour, assistée de Maître Véronique GONCALVES, avocat au barreau de PARIS, toque P 585, plaidant pour la Selarl FENEON- DE LA BRIERE, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉES :

SA SOCIÉTÉ VF LINGERIE FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assistée de Maître Philippe GENIN, avocat au barreau de LYON, plaidant pour la SCP LAMY et Associés

SOCIÉTÉ VIVES VIDAL VIVESA

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assistée de Maître Philippe GENIN, avocat au barreau de LYON, plaidant pour la SCP LAMY et Associés

SOCIÉTÉ VF CORPORATION

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assistée de Maître Philippe GENIN, avocat au barreau de LYON, plaidant pour la SCP LAMY et Associés

SA SOCIÉTÉ JHJ PRODUCTIONS

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoués à la Cour, assistée de Maître Véronique GONCALVES, avocat au barreau de PARIS, toque P 585, plaidant pour la Selarl FENEON- DE LA BRIERE, avocat au barreau de PARIS

SA SOCIÉTÉ JBA PRODUCTIONS FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoués à la Cour, assistée de Maître Véronique GONCALVES, avocat au barreau de PARIS, toque P 585, plaidant pour la Selarl FENEON- DE LA BRIERE, avocat au barreau de PARIS

SOCIÉTÉ JBS PRODUCTIONS MADAGASCAR

prise en la personne de ses représentants légaux, représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoués à la Cour, assistée de Maître Véronique GONCALVES, avocat au barreau de PARIS, toque P 585, plaidant pour la Selarl FENEON- DE LA BRIERE, avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 27 avril 2007, en audience publique, après qu'il en a été fait rapport conformément aux dispositions de l'article 785 du nouveau Code de procédure civile devant la Cour composée de : Monsieur Didier PIMOULLE, Président, Monsieur Christian REMENIERAS, Conseiller, Madame Catherine LE BAIL, Conseiller, qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Loïc GASTON

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. - signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président, et par M. Loïc GASTON, greffier auquel le magistrat signataire a remis la minute.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR,

VU les appels déclarés par la Selafa MJA, agissant par Mme X., ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la SA ALJC, et par les sociétés JHJ productions, JBA productions France et JBS productions Madagascar, du jugement du tribunal de commerce de Paris (3ème chambre, n° de RG : 2002032321), prononcé le 8 octobre 2003 ;

VU les dernières conclusions des appelantes, (24 mai 2006) ;

VU les dernières conclusions (25 mai 2004) de la société de droit américain VF corporation, de la société de droit espagnol Vives Vidal Vivesa et de la SA VF Lingerie France, intimées ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI,

Considérant que, par une convention de cession d'actions du 1er mai 1998, VF Lingerie France a cédé à ALJC la totalité des actions des sociétés JHJ productions, JBA productions France et JBS productions Madagascar ; que les parties ont conclu le même jour un contrat de façonnage, complété par un « engagement d'honneur », par lequel VF Lingerie France s'engageait à confier à ALJC des « minutes » représentant des commandes, en quantités déterminées, destinées à assurer un plan de charge minimum aux trois filiales ; que, cependant, les commandes passées n'ont jamais atteint les quantités auxquelles s'était engagée VF Lingerie France ; que les parties se sont rapprochées pour tirer les conséquences de cette situation et ont conclu successivement deux accords, le premier, le 5 novembre 1998, le second, le 15 octobre 1999, ce dernier en même temps que ALJC concluait un nouveau contrat de partenariat avec Vives Vidal Vivesa au sujet notamment de « minutes » à commander en 2000 ; que ces nouveaux accords n'ont pas mieux été respectés ; que la situation de ALJC et de ses trois filiales a périclité au point que ALJC a été judiciairement liquidée, la Selafa MJA étant désignée en qualité de mandataire liquidateur en la personne de Mme X. ; que cette dernière a assigné VF Lingerie France, Vives Vidal Vivesa et VF corporation en réparation de son préjudice causé par les manquements de ces sociétés à leurs obligations ; que JHJ productions, JBA productions France et JBS productions Madagascar sont intervenues volontairement ; que le tribunal, par le jugement dont appel, a mis VF corporation hors de cause, a déclaré Mme X., ès qualités, irrecevable à agir contre VF Lingerie France et l'a déboutée de ses demandes contre Vives Vidal Vivesa ;

 

Sur la mise hors de cause de VF corporation :

Considérant que l'action de la Selafa MJA, ès qualités, n'a d'autre fondement que les manquements allégués des sociétés intimées à leurs engagements contractuels ; que, cependant, l'appelante ne démontre pas qu'elle aurait conclu un contrat avec VF corporation ; que la seule circonstance que cette société de droit américain ait pu décider, pour réduire son activité, d'inviter ses filiales - en l'occurrence VF Lingerie France - à céder leurs propres filiales de production - en l'espèce JHJ productions, JBA productions France et JBS productions Madagascar - n’a pu donner naissance à aucune obligation contractuelle à sa charge envers ajlc ; que VF corporation n'a été partie, ni au contrat de cession du 1er mai 1998, ni au contrat de façonnage, ni à l'« engagement d'honneur » du même jour, encore moins aux accords des 5 novembre 1998 et du 15 octobre 1999 ; que tant le principe de l'indépendance des personnes morales que celui de l'effet relatif des conventions conduisent à mettre VF corporation hors de cause ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

 

Sur la recevabilité des demandes de la Selafa MJA contre VF Lingerie France :

Considérant que ALJC et VF Lingerie France, sur le constat que le nombre de « minutes » commandées depuis la signature du contrat de façonnage était inférieur aux prévisions, ont signé le 5 novembre 1998 un protocole, précisant expressément que celui-ci valait transaction au sens des articles 2044 et suivants du code civil, dont l'objet était défini comme suit : « ARTICLE 1 : VF verse à ALJC, à titre d'indemnité forfaitaire et définitive et sans reconnaissance de quelque responsabilité que ce soit, la somme de 1.250.000 Frs HT soit l.507.500 francs TTC par chèque remis le jour de la signature des présentes, dont quittance.

Cette indemnité forfaitaire compense l'ensemble des minutes urgentes et normales non commandées pendant la période du 4 avril 1998 jusqu'au jour de la signature du présent accord. » ;

Considérant que, par ce protocole, les parties se sont fait des concessions réciproques avec l'intention de mettre fin au différend né entre elles du fait de l'insuffisance de commandes, VF Lingerie France en versant et ALJC en acceptant une indemnité forfaitaire compensatrice ; que cette transaction interdit à ALJC de réclamer des dommages-intérêts à raison des manquements reprochés à VF Lingerie France entre le 1er mai 1998 et le 5 novembre 1998 ;

Considérant que, le 15 octobre 1999, soit le jour même de la signature de l'accord de partenariat entre Vives Vidal Vivesa et ALJC, cette dernière a signé avec VF Lingerie France le texte suivant : « En référence au contrat de façonnage signée entre la société ALJC et la société VF LINGERIE FRANCE, le 1 de Mai 1998, les parties ont décidé d'un commun accord résilier ledit contrat à partir de la date d'aujourd'hui.

La société ALJC. reconnaît expressément ne rien avoir à réclamer à VF LINGERIE FRANCE pour quelque cause que ce soit et VF LINGERIE FRANCE reconnaît aussi expressément ne rien avoir à réclamer à ALJC pour quelque cause que ce soit jusqu'à aujourd'hui. » ;

Considérant que ALJC, ayant reconnu n'avoir plus d'intérêt à agir contre VF Lingerie France, s'est nécessairement interdit toute action contre elle fondée sur des manquements contractuels antérieurs ;

Considérant, dès lors que les intimées opposent à juste titre à la Selafa MJA, ès qualités, la fin de non recevoir tirée de son défaut d'intérêt à agir contre VF Lingerie France ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables ses demandes fondées sur des manquements de cette société à ses obligations de commandes telles que fixées par le contrat de façonnage du 1er mai 1998 ;

 

Sur le bien fondé des demandes de la Selafa MJA contre Vives Vidal Vivesa :

Considérant, de ce qui précède, VF Lingerie France n'ayant pris à l'égard de ALJC aucun engagement de commande pour la période postérieure à 1999, et Vives Vidal Vivesa n'en ayant pris aucun pour la période antérieure à 2000, que la Selafa MJA ne peut être fondée à réclamer des dommages-intérêts à raison d'une insuffisance de commandes qu'au titre de l'année 2000 et seulement contre Vives Vidal Vivesa ;

Considérant, d'après les écritures de la Selafa MJA, ès qualités, (pages 21 et 22) que le préjudice que ALJC aurait subi à ce titre se calcule comme suit :

« - pour la période du 1er trimestre 2000 le déficit d'alimentation chiffré en prix de revient s'est élevé à : 3.787.354 F

[...] - que de cette somme doit venir en déduction une « sur-prix » de 0,17 F payée par le groupe VF sur les minutes données au premier trimestre 2000, soit : 2.630.814 x 0,17 = - 447.723 F

[...]- que pour le reste de l'année 2000, la perte d'exploitation s'est élevée à : + 2.256.058 F »

soit un total algébrique de : 5.595.689 F ou 853.057 euro ;

Mais considérant que, au terme de l'accord de partenariat du 15 octobre 1999, Vives Vidal Vivesa s'est engagée à fournir, dans l'année 2000, 3.000.000 de « minutes » urgentes au prix unitaire de 2,26 F et 8.500.000 « minutes » normales au prix de 0,57 F chacune ;

Qu'il ressort d'un tableau (pièce 78) dressé par les intimées à partir des propres chiffres de ALJC, non contestés par l'appelante, que le nombre réel de « minutes » urgentes s'est élevé à 3.977.000 au lieu des 3.000.000 prévues, et que le nombre de « minutes » normales n'a atteint que 8.109.000 au lieu des 8.500.000 ;

Considérant qu'il en résulte, compte tenu des prix unitaires respectifs des « minutes » urgentes et des « minutes » normales, que, loin de représenter une perte de chiffre d'affaires en valeur, l'écart entre minutes commandées et les engagements contractuels a, tout au contraire, représenté un différentiel en faveur de ALJC de :

- (3.977.000 - 3.000.000) x 2,26 F = + 2.208.020 F

- (8.500.000 - 8.109.000) x 0,57 F = - 222.870 F

soit : 1.985.150 F

Considérant, à supposer que le préjudice de ALJC ait été constitué, non par une insuffisance de commandes en valeur, ce qui n'est de toute façon pas le cas ainsi qu'il vient d'être démontré, mais par une répartition entre commandes urgentes et commandes normales non conforme aux engagements de Vives Vidal Vivesa qui aurait abouti à une désorganisation de la production, que les pièces versées au débat, spécialement les correspondances adressées à ALJC par Vives Vidal Vivesa les 10 janvier 2000, 13 janvier 2000, 9 mars 2000, 30 mars 2000 et 17 avril 2000 pour stigmatiser le non respect des délais de fabrication, montrent que ALJC est seule responsable de cette évolution, laquelle, en toute hypothèse, n'a pas eu pour conséquence de réduire l'activité des trois filiales de ALJC, comme le soutient l'appelante ;

Considérant qu'aucune justification n'est produite au sujet de la facture de 265.457,57 F (40.466 euros), contestée par Vives Vidal Vivesa qui a réclamé en vain des précisions sur son éventuel bien fondé, dont le paiement est réclamé par la Selafa MJA, ès qualités ;

 

Sur l'abus de dépendance économique :

Considérant que la Selafa MJA, ès qualités, s'empare des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce pour réclamer des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à ALJC par « le groupe VF corporation » qui aurait profité de la dépendance économique dans laquelle ce groupe l'aurait à dessein maintenue pour lui imposer des pratiques discriminatoires prohibées ;

Mais considérant que la notion de groupe ne répond pas à une catégorie juridique susceptible d'encourir une responsabilité ;

Que, ainsi qu'il a été précédemment démontré, aucun lien juridique n'a été démontré entre ALJC et VF corporation ;

Que les relations entre ALJC, VF Lingerie France et Vives Vidal Vivesa ont, en toute hypothèse, pris fin en 2000 avant l'entrée en vigueur des dispositions de l’article L. 442-6, 2°, b, du code de commerce, sur lesquelles la Selafa MJA, ès qualités, fonde expressément sa demande, qui sont issues de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 ;

Que la Selafa MJA, ès qualités, s'abstient de toute tentative de démonstration de la situation de dépendance économique alléguée, préalable nécessaire au succès de sa demande, alors qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que ALJC se serait trouvée dans l'impossibilité de fabriquer et commercialiser sa production auprès d'autres distributeurs ;

Que l'appelante, enfin, ne démontre aucun lien de causalité entre les pratiques qu'elle dénonce et le préjudice dont elle réclame la réparation, qui ne consiste en rien d'autre que d'obtenir le remboursement du prix payé pour l'acquisition des trois filiales de production ;

Considérant, en synthèse, que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement entrepris,

CONDAMNE solidairement la Selafa MJA, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la SA ALJC, et les sociétés JHJ productions, JBA productions France et JBS productions Madagascar, aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile et à payer, par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

- 3.000 euros à la société de droit américain VF corporation,

- 10.000 euros à la la SA VF Lingerie France,

- 10.000 euros à la société de droit espagnol Vives Vidal Vivesa.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,