6196 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Courtage
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6196 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)
NOTION DE DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF - PRÉSENTATION PAR CONTRAT - COURTAGE
Contrats à l’essai. S'il est certain que la signature de trois contrats successifs, assortis à chaque fois d'une période d'essai de quatre mois, a mis le courtier dans une situation inconfortable, cela ne caractérise pas pour autant l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : RG n° 11/22934 ; Cerclab n° 4609 ; Juris-Data n° 2013-019543 (courtage dans le secteur de l’énergie), sur appel de T. com. Paris (15e ch.), 22 nov. 2011 : RG n° 2011035989 ; Dnd.
Contenu du contrat : clause d’exclusivité. L'insertion d’une obligation d'exclusivité est classique et habituelle dans les contrats de courtage concernant le démarchage à domicile, le déséquilibre ne pouvant être déduit de l'absence de réciprocité de ces clauses, solution qui signifierait que le cocontractant devrait confier l'intégralité de la commercialisation de ses offres au courtier, ce qui n'aurait aucun sens. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité.
Contenu du contrat : transmission d’informations. Absence de déséquilibre du fait d’une clause relative à la collecte d'informations nominatives, qui est justifiée par l'engagement du contractant du courtier vis à vis des consommateurs, qui ne l'ont pas autorisé à divulguer ou utiliser pour de la prospection commerciale les informations les concernant. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité (courtage dans le secteur de l’énergie).
Montant de la commission. Absence de preuve qu’une société spécialisée dans le négoce des vins ait été contrainte par son actionnaire minoritaire, seul titulaire de la carte de courtier en vins, de régler des honoraires et frais disproportionnés révélant un déséquilibre significatif dans les obligations respectives des parties, au sens de l'anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com., dans son ancienne comme dans sa nouvelle version. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017 : RG n° 14/11255 ; Cerclab n° 6779 (arrêt notant que les prestations étaient réelles, que l’autre associé n’établissait pas avoir tenté d'obtenir lui-même la qualification de courtier et qu’il avait pu faire appel à un autre courtier), sur appel de T. com. Marseille, 17 avril 2014 : RG n° 2013F01939 ; Dnd.
Modalités de paiement de la commission. La mise en place d'un système d'auto-facture hebdomadaire avec un délai de paiement de cinq jours, n'apparaît pas abusif et garantit au contraire au courtier le paiement régulier de ses commissions. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité (courtage dans le secteur de l’énergie).
Modalités de reprise de la commission. Jugé que ne crée aucun déséquilibre significatif et ne constitue pas une clause léonine, la clause d’un contrat de courtage pour le placement d’assurance-santé stipulant que le courtier sera exclusivement rémunéré sous forme de commissions et prévoyant une reprise de commissions en cas de résiliation d'un contrat conclu pour quelque motif que ce soit. CA Douai (3e ch.), 22 février 2018 : RG n° 17/00051 ; arrêt n° 18/70 ; Cerclab n° 7448 (N.B. 1 s’agissant d’un contrat conclu en 2013, ni le tribunal, ni la cour n’étaient compétentes pour apprécier l’existence d’un déséquilibre au sens de l’anc. art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com. ; N.B. 2 la cour exclut aussi la condition de soumission ou de tentative de soumission ; N.B. 3 l’arrêt estime aussi, de façon discutable, que la condition de partenariat n’est pas remplie), réformant TGI Dunkerque, 13 décembre 2016 : RG n° 15/00339 ; Dnd (clause ni nulle, ni léonine, mais créant un déséquilibre significatif sur un fondement non précisé par l’arrêt) - CA Douai (3e ch.), 22 février 2018 : RG n° 17/00205 ; arrêt n° 18/71 ; Cerclab n° 7449 (idem), réformant TGI Dunkerque, 13 décembre 2016 : RG n° 15/00340 ; Dnd (idem). § N.B. La solution adoptée semble contestable, en raison de la généralité du motif retenu : la résiliation du contrat d’assurance peut parfaitement être fondée sur l’insatisfaction du client à l’égard de l’assureur et il est difficile de savoir à quel titre le courtier devrait en répondre dans cette hypothèse, qui correspond à un transfert à l’intermédiaire d’une mauvaise exécution du contrat conclu par son intervention.
Modification du contrat : clause d’objectif. Si l'augmentation du nombre de bons de souscription à atteindre entre le premier contrat et les deux suivants a rendu l'objectif difficilement réalisable, l’action en réparation du courtier doit être rejetée dès lors que celui-ci n'explique pas en quoi il constituerait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité (courtage dans le secteur de l’énergie).
Modification du contrat : conditions financières. Absence de déséquilibre du fait que le distributeur d’énergie a imposé des tarifs au courtier ou qu’il les a modifiés unilatéralement, alors que ces tarifs sont liés aux conditions d'approvisionnement en énergie et que le distributeur ne peut laisser de liberté sur ce point à ses courtiers sauf à prendre le risque d'obérer son activité économique. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité (courtage dans le secteur de l’énergie ; le fait d'opérer sur un marché de masse impose également un traitement uniforme des clients, notamment en matière de tarif et de facturation).
Un contrat entre un assureur et un courtier grossiste, le premier « déléguant » au second la souscription et la gestion des contrats d'assurance concernant les risques automobiles aggravés et temporaires, s'étant avéré déficitaire pour l'assureur, la convention a été résiliée et une seconde a été conclue modifiant ses conditions financières (possibilité de diminuer le taux de commission de 10 % dans la limite du déficit). Ne traduit aucun déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, qui rendrait la stipulation sans cause, la clause autorisant la réduction de la commission du courtier, qui doit être appréhendée en regard de l'économie générale du contrat et qui s'inscrit donc dans la négociation d'un accord qui emportant des concessions réciproques. CA Paris (pôle 1 ch. 1), 1er octobre 2013 : RG n° 12/01301 ; Cerclab n° 4608 (réduction de 10 % du taux de commission en cas de non-retour à l'équilibre malgré les mesures de redressement mises en œuvre, en contrepartie de la majoration du taux de participation aux bénéfices ; N.B. dans cet arrêt, le déséquilibre significatif est d’abord examiné et rejeté sous l’angle de l’absence de cause, avant d’être rejeté dans le cadre de l’anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] par renvoi aux motifs précédents, l’applicabilité de ce texte étant discutable pour un contrat conclu le 31 juillet 2008 avec effet rétroactif au premier janvier 2008), sur appel de Tb. arbitr. Paris, 6 janvier 2012 : Dnd.
Responsabilité : courtier en télécommunications. N’a rien d'abusif ou de déséquilibré la clause stipulant que le fournisseur ne saurait garantir que son service soit totalement ininterrompu, sans incident, et offrant un niveau de sécurité sans faille, dès lors qu’il n'est pas un opérateur de télécommunications, mais un courtier. T. com. Bobigny (8e ch.), 5 avril 2011 : RG n° 2010F00564 ; jugt n° 2011F00411 ; Cerclab n° 4296 ; Lexbase (clause précisant que le fournisseur n’était que l'utilisateur de technologies ou d'infrastructures développées et fournies par des tiers ; jugement écartant le code de la consommation après avoir réfuté le caractère abusif, le demandeur ayant visé les art. L. 132-1 ancien [212-1] et L. 442-6 anc. [L. 442-1]).
Suites du contrat : obligation de non concurrence. L'insertion d’une obligation de non-concurrence post-contractuelle est classique et habituelle dans les contrats de courtage concernant le démarchage à domicile, le déséquilibre ne pouvant être déduit de l'absence de réciprocité de ces clauses, solution qui signifierait que le cocontractant devrait confier l'intégralité de la commercialisation de ses offres au courtier, ce qui n'aurait aucun sens. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 12 septembre 2013 : précité (courtage dans le secteur de l’énergie ; solution confortée par le fait que les obligations d’exclusivité et de non concurrence n'empêchaient pas le courtier de diversifier ses activités et par la durée de la clause de non-concurrence limitée à 12 mois).