6224 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Transport
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6224 (12 novembre 2022)
PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)
NOTION DE DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF - PRÉSENTATION PAR CONTRAT - TRANSPORT
A. TRANSPORT AÉRIEN (DISTRIBUTION DES VOYAGES EN AGENCE)
Loi applicable. Crée un déséquilibre significatif la clause qui porte sur le choix de la loi de Hong-Kong pour régir les rapports contractuels entre les parties, dès lors qu'elle rend applicable la loi du pays dans lequel la compagnie a son siège social qui peut être réputée lui être plus favorable. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 (contrat de commercialisation des voyages aériens d’une compagnie chinoise par une agence française de compagnie ; N.B. l’arrêt repousse l’action au fond, faute de preuve de soumission et de préjudice), sur appel de T. com. Lyon, 22 janvier 2015 : RG n° 2012J1217 ; Dnd.
Durée du contrat. Crée un déséquilibre significatif la clause qui, malgré l'ancienneté des relations entre les parties, datant de 1989, stipule une durée maximale de deux ans mettant ainsi l’agent mandataire dans l'incertitude du renouvellement du contrat à son terme. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Clause d’exclusivité. Créent un déséquilibre significatif les clauses qui empêchent l'agent de représenter d'autres compagnies aériennes sans le consentement du mandant et de disposer d'un numéro IATA propre de sorte, alors qu’en contrepartie, le contrat ne prévoit aucune clause d'exclusivité au profit du mandataire. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Refus de la compagnie de figurer sur des comparateurs. En s'opposant à l'offre à la vente de ses produits ou services sur des sites comparateurs non autorisés, une compagnie aérienne n’interdit pas à l’agence de voyages de faire de la publicité de ses produits ou services sur lesdits sites, celle-ci ayant la faculté de communiquer sur son activité, mais de redistribuer les produits de la compagnie par le biais de tiers non autorisés par des accords de redistribution, et se borne ainsi à définir les limites du mandat confié quant à la vente de ses produits et services dont elle décide légitimement seule du réseau de distribution ; l’interdiction de faire de la publicité n'étant pas caractérisée, les moyens tirés de la violation de la liberté d'expression, d'entreprendre et de concurrence sont inopérants, tout comme l’existence d’un déséquilibre significatif qui n’est pas démontré. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 25 octobre 2018 : RG n° 17/10108 ; Cerclab n° 8116, sur appel de T. com. Paris, 2 mai 2017 : RG n° 2016074093 ; Dnd.
Modification unilatérale : objectifs de vente et rémunération. Crée un déséquilibre significatif la clause qui offre au mandant un pouvoir discrétionnaire de modifier les objectifs de vente, ainsi qu’un pouvoir discrétionnaire de prendre en compte l'objectif de vente et les ventes effectivement réalisées par l'agent dans la détermination de la rémunération de ce dernier. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Exécution du contrat : fourniture de l’équipement par le mandant. Absence de déséquilibre significatif d’une clause favorable au mandataire puisqu'elle est destinée à lui éviter des investissements pour l'exécution du mandat. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité (contrat de commercialisation des voyages aériens d’une compagnie chinoise par une agence française de compagnie ; clause stipulant « Le Mandant fournira, à ses frais, tout équipement non standard du secteur ainsi que la papeterie que le Mandant souhaite que l'Agent utilise pour les activités de vente, de marketing et de billetterie de l'Agent en vertu du présent Contrat. L'Agent sera dépositaire desdits équipements et articles de papeterie du Mandant et sera responsable des éventuelles pertes de ces équipements et/ou articles de papeterie ou des éventuels dommages qu'ils subissent »).
Exécution du contrat : fourniture d’un local pour le mandant. Absence de déséquilibre significatif de la clause ayant exclusivement vocation à permettre l'exécution du mandat par la mise à disposition d’un bureau dans la zone d’aéroport pour le mandant. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Contrôle de l’activité de l’agence. Absence de déséquilibre significatif de la clause ayant exclusivement vocation de permettre à la compagnie aérienne, mandante, de contrôler la bonne exécution du contrat par sa mandataire (possibilité pour le mandat de désigner un membre de son personnel à ses frais et possibilité de faire une vérification après un préavis raisonnable). CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Responsabilité de l’agence. Créent un déséquilibre significatif les clauses qui prévoient une responsabilité du mandataire pour tout dommage direct ou indirect résultant de manquements contractuels, résultant de l'émission incorrecte de titres de transport ou encore de l'utilisation frauduleuse de tels titres, tout en prévoyant une limitation de responsabilité au profit du mandant qui n'est tenu que des dommages directs résultant des seuls manquements contractuels dans les limites d'un certain montant. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
Clauses de compétence territoriale. Absence de déséquilibre significatif d’une clause instaurant une compétence non exclusive des juridictions de Hong-Kong. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 13 février 2020 : RG n° 16/15098 ; Cerclab n° 8355 ; précité.
B. TRANSPORT ROUTIER
Spécificité du secteur et soumission. Il ne peut être inféré du seul contenu des clauses ou du contexte économique caractérisé par une forte asymétrie du rapport de force en faveur d'un des partenaires, la caractérisation de la soumission ou tentative de soumission exigée par le législateur. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 11 mars 2021 : RG n° 18/08014 ; Cerclab n° 8917 (contrat conclu par une société de vente sur internet de produits de grande consommation à prédominance alimentaire avec un transporteur routier pour assurer leur livraison à domicile ; absence de preuve par la victime prétendue, qui qualifie le contrat litigieux de contrat d'adhésion, des éléments de contexte sur les conditions de sa négociation et absence de justification qu’elle a tenté de faire supprimer les annexes critiquées ; N.B. le contrat, initialement conclu pour trois mois, avait été reconduit à plusieurs reprises puis étendu à une durée d’un an), sur appel de T. com. Paris, 3 avril 2018 : RG n° 2016047604 ; Dnd.
1° PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Articulation avec la LOTI. Annulation du jugement relevant d’office l’application de la LOTI sans respecter le contradictoire. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 29 septembre 2016 : RG n° 14/16968 ; Cerclab n° 5977 ; Juris-Data n° 2016-021155 (contrat de location de longue durée d'un véhicule industriel avec conducteur pour le transport routier de marchandises), sur appel de T. com. Rennes, 1er juillet 2014 : RG n° 2013F00486 ; Dnd.
Les dispositions de l'ancien art. L. 441-7 C. com. quant à la rédaction du contrat sont inapplicables, dès lors que les parties ont choisi un autre cadre juridique, en l’espèce les dispositions du décret n° 2002-566 du 17 avril 2002 portant approbation du contrat type de location d'un véhicule industriel avec conducteur pour le transport routier de marchandises, contrat à durée indéterminée, dont les deux parties revendiquent l’application. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 9 mai 2018 : RG n° 16/02810 ; Cerclab n° 7550 (contrats de location de véhicules avec chauffeur au profit d’une centrale d’achat), sur appel de T. com. Rennes, 22 décembre 2015 : RG n° 2013F00022 ; Dnd.
V. cep. : application de l’art. L. 442-6-I-2° C. com. alors que les parties ont conclu un contrat sur la base du contrat type issu du décret 2003-1295 du 26 décembre 2003 modifié par le décret du 20 août 2007, applicable aux transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, en y apportant six annexes et deux avenants. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 14 janvier 2021 : RG n° 18/20126 ; Cerclab n° 8736 (contrat entre un commissionnaire de transport au niveau national et une société spécialisée dans le transport routier de fret de proximité), sur appel de T. com. Bordeaux, 29 juin 2018 : RG n° 2017F01001 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 16 mars 2022 : RG n° 20/12551 ; Cerclab n° 9488 (contrat entre un commissionnaire de transport et un transporteur ; idem), sur appel de T. com. Bordeaux, 13 juillet 2020 : RG n° 2018F01061 ; Dnd.
Rappr. dans le cadre des ruptures brutales : l’ancien art. L. 442-6-I-5° [L. 442-1-II] C. com. ne s’applique pas à la rupture des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants lorsque le contrat-cadre liant les parties se réfère expressément au contrat type institué par la LOTI, qui prévoit en son article 12.2 la durée des préavis de rupture. Cass. com., 22 septembre 2015 : pourvoi n° 13-27726 ; arrêt n° 794 ; Cerclab n° 12 (un contrat type, institué sur le fondement de l’article 8-II de la loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982, règle pour l’avenir, dès l’entrée en vigueur du décret qui l’établit, les rapports que les parties n’ont pas définis au contrat de transport qui les lie), rejetant le pourvoi contre CA Grenoble, 26 septembre 2013 : Dnd. § Les dispositions de l'art. L. 442-6-I-5° C. com., qui instaure une responsabilité de nature délictuelle, ne s'appliquent pas dans le cadre des relations commerciales nées de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-cadre liant les parties se réfère expressément au contrat type institué par la LOTI, qui prévoit en son article 12.2. la durée des préavis de rupture. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 14 janvier 2021 : RG n° 18/20126 ; Cerclab n° 8736 (contrat entre un commissionnaire de transport au niveau national et une société spécialisée dans le transport routier de fret de proximité), sur appel de T. com. Bordeaux, 29 juin 2018 : RG n° 2017F01001 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 16 mars 2022 : RG n° 20/12551 ; Cerclab n° 9488 (contrat entre un commissionnaire de transport et un transporteur ; idem), sur appel de T. com. Bordeaux, 13 juillet 2020 : RG n° 2018F01061 ; Dnd. § Les dispositions de l’anc. art. L. 442-6-I-5° C. com. ne s'appliquent pas dans le cadre des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-type qui prévoit la durée des préavis de rupture, institué par la loi du 30 décembre 1982 (LOTI), régit, faute de dispositions contractuelles, les rapports du sous-traitant et de l'opérateur de transport ; ainsi l'application ce texte suppose à la fois l'absence de contrat-type prévoyant la durée d'un préavis de rupture et l'absence de dispositions contractuelles quant à un préavis de rupture. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 18 février 2021 : RG n° 18/22624 ; Cerclab n° 8812 (sous-traitance dans le secteur du transport pour effectuer des tournées de ramassage et distribution de colis et palettes de pièces automobiles d’un groupe automobile), sur appel de T. com. Lyon, 3 septembre 2018 : RG n° 2017J1823 ; Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 8), 6 septembre 2016 : RG n° 15/21026 ; Cerclab n° 5689 (contrat de transport d’un îlot en marbre réalisé par un sous-traitant pour un client du vendeur de cuisine intégrée ; c'est en vain que le vendeur invoque l'anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com. qui est inopérant à faire obstacle aux dispositions du contrat type, alors que « le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » n'est sanctionné que par l'octroi de dommages et intérêts et non par la nullité de la stipulation contestée), sur appel de T. com. Paris, 11 septembre 2015 : RG n° 2015000399 ; Dnd.
Fixation du prix. Sont disproportionnées par rapport à la prestation réalisée par une centrale de référencement, ayant négocié des prix de transport pour tous les produits qu’elle commercialise entre un transporteur et les plateformes du réseau, les ristournes imposées au transporteur au titre de la variation du gasoil ou de la productivité, qui ne sont pas liées à sa prestation mais qui, pour la première, résultent de la seule activité du transporteur, et pour la seconde de facteurs extérieurs aux parties et ne pouvant être dissociés de la prestation transport. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 4 octobre 2012 : RG n° 11/12684 ; Cerclab n° 3985, sur appel de T. com. Meaux, 7 juin 2011 : RG n° 07/062011 ; Dnd.
Absence de disproportion pour des prestations complémentaires d'entreposage et de préparation, qui ont donné lieu à des contrats passés entre le transporteur et les fournisseurs, acceptées et rémunérées, qui n'ont pu être confiées au transporteur qu'en raison de l'intervention de la centrale qui est légitime à obtenir rémunération de son intervention. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 4 octobre 2012 : RG n° 11/12684 ; Cerclab n° 3985, sur appel de T. com. Meaux, 7 juin 2011 : RG n° 07/062011 ; Dnd.
Absence de preuve d’un avantage disproportionné ou d’un déséquilibre significatif résultant d’une clause de bonification de fin d'année, au taux de 8 %, sur le chiffre d'affaires réalisé par un transporteur avec un négociant en bois et matériaux de construction chez qui il a ouvert un « compte fournisseur », eu égard au taux de marge du transporteur sur le montant des prestations facturées, alors qu'aucun prix n'a été imposé par le négociant. CA Montpellier (ch. com.), 16 mars 2021 : RG n° 18/03764 ; Cerclab n° 8852 (N.B. juridiction incompétente), sur appel de T. com. Montpellier, 28 mai 2018 : RG n° 2017003820 ; Dnd.
Deux sociétés dans le secteur du transport ont conclu des contrats de location de camion, le bailleur confiant ensuite au locataire l’exécution de prestations de transport : la circonstance que la société exécutante, qui ne possède pas de véhicules en propre, ait pris en location des véhicules auprès de son donneur d’ordres et qu'elle se soit engagée à assurer avec ces véhicules des prestations pour ce dernier, ne caractérise pas, en lui-même, une pratique irrégulière au sens de l'anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com. CA Rouen (ch. civ. com.), 4 juin 2015 : RG n° 14/03644 ; Cerclab n° 5263 ; Juris-Data n° 2015-015898 (contestation portant sur le prix perçu par le bailleur-donneur d’ordres ; l’arrêt constate au surplus que les factures respectives ont été établies conformément aux dispositions contractuelles définissant les obligations respectives prévues par chacune des deux catégories de contrats), sur appel de T. com. Rouen, 8 novembre 2013 : RG n° 2013 8017 ; Dnd.
Absence de preuve que le commissionnaire de transport a soumis ou tenté de soumettre son sous-traitant à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, en stipulant le caractère forfaitaire d'une prestation par tournée et par jour, tout en le désorganisant par l'augmentation sans prévenance des volumes, alors que par ailleurs, le contrat prévoit que le sous-traitant calcule ses coûts et détermine lui-même ses tarifs à partir desquels le prix est négocié et qu’il inclut une clause permettant de solliciter une modification sensible du prix de la prestation pour des éléments justifiés, tels qu’une modification du modification du secteur entraînant une augmentation ou diminution importante du kilométrage et du nombre de points, dont le sous-traitant n’a pas invoqué le bénéfice. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 16 mars 2022 : RG n° 20/12551 ; Cerclab n° 9488 (contrat entre un commissionnaire de transport et un transporteur ; idem), sur appel de T. com. Bordeaux, 13 juillet 2020 : RG n° 2018F01061 ; Dnd.
Modification du prix. Absence de preuve que les dispositions de l'art. L. 3222-1 C. transp. n’ont pas été respectées. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 22 février 2018 : RG n° 15/14051 ; Cerclab n° 7450 (sous-traitance de transport dans le secteur du transport rapide de courrier ; clause prévoyant l’ajustement automatique de la charge du carburant sur le prix total de sa facture sur la base de trois facteurs : la part de gazole dans le prix total du transport, la fluctuation mensuelle de l'indice carburant par rapport à un indice de référence, impactant ainsi la charge de gazole, et le cube de chaque véhicule utilisé pour la prestation), sur appel de T. com. Paris, 8 avril 2015 : RG n° 2013050503 ; Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 5), 18 février 2021 : RG n° 18/22624 ; Cerclab n° 8812 (sous-traitance dans le secteur du transport pour effectuer des tournées de ramassage et distribution de colis et palettes de pièces automobiles d’un groupe automobile ; absence de preuve que le contractant aurait empêché toute renégociation tarifaire et imposé des prix ne permettant pas, par exemple, de couvrir les charges), sur appel de T. com. Lyon, 3 septembre 2018 : RG n° 2017J1823 ; Dnd.
Dès lors que le coût des prestations de transport était révisé au cours de chaque année civile, à une date variable, aucun engagement de maintien du tarif antérieur pendant une période déterminée n'étant allégué, ni a fortiori démontré, la modification par le transporteur de ses tarifs, notifiée le 11 avril pour une mise en vigueur le 15 avril, ne viole aucune obligation et ne présente aucun caractère fautif ; le client, qui revendique d'ailleurs sa liberté de choix de son cocontractant et qui était libre de contracter avec un autre voiturier, ne peut unilatéralement imposer au transporteur le maintien de ses anciens tarifs. CA Rennes (3e ch. com.), 19 février 2013 : RG n° 11/06724 ; arrêt n° 56 ; Dnd (solution d’autant plus justifiée que la hausse correspondait à une diminution du volume d’affaires), confirmant T. com. Saint-Brieuc, 12 septembre 2011 : Dnd.
Le fait que le donneur d’ordre, qui était le client exclusif du loueur de véhicule, ait pris l'initiative de proposer une baisse tarifaire que ce dernier a refusé, et qu'il ait ensuite décidé, plus d'un an après, de changer de prestataire, ne peut suffire à caractériser un déséquilibre significatif dans les relations des parties, alors qu'aucune contrainte n'est démontrée de la part du donneur d’ordre, que la baisse proposée correspondait aux prix du marché et que le fait de procéder à des règlements 60 jours fin de mois ne constitue pas non plus une cause de déséquilibre significatif, puisque ces modalités de paiements avaient fonctionné sans difficulté. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 29 septembre 2016 : RG n° 14/16968 ; Cerclab n° 5977 ; Juris-Data n° 2016-021155 (contrat de location de longue durée d'un véhicule industriel avec conducteur pour le transport routier de marchandises), sur appel de T. com. Rennes, 1er juillet 2014 : RG n° 2013F00486 ; Dnd.
Le transporteur qui a fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat, puisqu'il a doublé le montant de ses prestations sans l'accord de son cocontractant, en facturant séparément l’aller et le retour, alors que le prix convenu mentionnait les deux, ne peut se prévaloir des dispositions du contrat qui dispose que « les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables ». CA Basse-Terre (2e ch.), 11 juillet 2022 : RG n° 21/00119 ; arrêt n° 440 ; Cerclab n° 9705 (contrat de transport d’ouvriers sur un chantier), sur appel de T. mixt. com. Basse-Terre, 30 octobre 2020 : RG n° 202J00006 ; Dnd
Clause limitative de responsabilité. Si la clause limitant la responsabilité d’un transporteur-dépositaire porte sur une obligation essentielle, elle doit aussi, pour être écartée, contredire la portée de cette obligation à tel point qu'elle viderait l'engagement du dépositaire de toute substance. CA Angers (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014 : RG n° 13/00373 ; Cerclab n° 5055 ; Juris-Data n° 2014-032694 (contrat cadre de transport et de stockage), sur appel de T. com. Angers, 12 décembre 2012 : RG n° 11/011909 ; Dnd. § La preuve de cette seconde exigence n’est pas rapportée, dès lors, qu'en tout état de cause, à supposer même que le coût de la prestation de 2.643,76 euros hors taxes soit intégralement lié au stockage, la fixation d'un plafond de garantie de 1.533 euros ne serait pas sans rapport avec le prix payé, de sorte qu'elle ne conduirait pas à vider l'obligation du dépositaire de toute substance. Même arrêt. § Absence de preuve d’une violation de l’anc. art. L. 442-6-I-1° [L. 442-1-I-1°] C. com., faute de preuve que la somme facturée chaque mois pour 1,17 % de la valeur des marchandises était disproportionnée au service rendu, CA Angers (ch. com. sect. A), 2 décembre 2014 : RG n° 13/00373 ; Cerclab n° 5055 ; Juris-Data n° 2014-032694 (contrat cadre de transport et de stockage ; arrêt jugeant que la comparaison avec la prise d’assurance n’est pas pertinente).
Pénalités. Refus de la demande fondée sur le non-respect de l’art. L. 442-6-I-8° C. com., alors que la société expéditrice adressait au transporteur, chaque mois, un relevé des refacturations qu'elle effectuait au titre des pénalités, lequel était approuvé par ce dernier, alors que par ailleurs la société démontre qu'en cas de contestation, elle était en mesure d'apporter les explications complémentaires justifiant l'application de la pénalité, ce qui démontre que le transporteur était mis en mesure de contrôler la réalité du grief correspondant à l'application des pénalités facturées. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 11 mars 2021 : RG n° 18/08014 ; Cerclab n° 8917 (contrat conclu par une société de vente sur internet de produits de grande consommation à prédominance alimentaire avec un transporteur routier pour assurer leur livraison à domicile), sur appel de T. com. Paris, 3 avril 2018 : RG n° 2016047604 ; Dnd.
Absence de preuve d’une exécution déloyale du contrat, du fait de l’application de pénalités, alors que le contrat portait sur une prestation de transport de colis moyennant un prix par colis livré avec des objectifs à atteindre, que le sous-traitant avait la libre utilisation de ses moyens sans que l'opérateur de transport ne puisse s'y opposer d'une façon quelconque et qu’il lui appartenait donc de prévoir le matériel nécessaire au transport des colis, sans avoir à demander à l'opérateur l'autorisation d'utiliser un camion supplémentaire ou de refuser certains colis dès lors que le volume global contractuel prévu était respecté : le fait que, durant certaines périodes de l'année, des ajustements soient nécessaires relève de l'exécution du contrat sans qu'il puisse en être déduit une exécution déloyale du contrat par l'opérateur. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 14 janvier 2021 : RG n° 18/20126 ; Cerclab n° 8736 (contrat entre un commissionnaire de transport au niveau national et une société spécialisée dans le transport routier de fret de proximité), sur appel de T. com. Bordeaux, 29 juin 2018 : RG n° 2017F01001 ; Dnd
Sous-traitance. Rejet de l’action fondée sur l’ancien art. L. 442-6, 1er alinéa, [L. 442-1] C. com., au motif qu’en exigeant le scannage des colis, le commissionnaire n’a pas imposé une obligation supplémentaire imposant un service commercial manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, puisque les parties le pratiquaient depuis plusieurs années, qu'il avait nécessairement été pris en compte par le transporteur lors de sa soumission en réponse à l'appel d'offre et qu'il correspond à une évolution générale des modes d'opération du secteur du transport routier de marchandises. CA Toulouse (2e ch.), 2 mars 2016 : RG n° 14/01885 ; arrêt n° 165 ; Cerclab n° 5526 (commissionnaire de transport, affrétant notamment des transporteurs publics sous forme de contrat cadre, ayant la nature de contrat de sous-traitance de transport public routier de marchandises), sur appel de T. com. Toulouse, 20 mars 2014 : RG n° 2012/J490 ; Dnd.
La mise en œuvre de l’anc. art. L. 442-6-I-4° C. com. suppose que soient prouvées, par la société qui s'en prévaut, l'existence de conditions manifestement abusives que le partenaire commercial a obtenues ou tenté d'obtenir, par l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 18 février 2021 : RG n° 18/22624 ; Cerclab n° 8812 (sous-traitance dans le secteur du transport pour effectuer des tournées de ramassage et distribution de colis et palettes de pièces automobiles d’un groupe automobile ; 1/ preuve non rapportée en l’espèce par la production des échanges sur les grilles tarifaires qui ne contiennent aucune menace de rupture sous condition de baisser les prix ; 2/ il ne peut être reproché à ce titre au transporteur d’avoir mis en place un appel d’offres pour les nouvelles tournées du groupe automobile), sur appel de T. com. Lyon, 3 septembre 2018 : RG n° 2017J1823 ; Dnd.
Concernant le remboursement des avaries, le contrat type applicable aux transports publics routiers exécutés par des sous-traitants interdit « toute imputation unilatérale du montant des dommages allégués sur le prix des services rendus » (art. 11-3) ; absence de preuve en l’espèce que le donneur d’ordre ait eu recours à cette pratique illicite, la seule note d’imputation ayant été émise par erreur, ce dont il s’est excusé. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 18 février 2021 : RG n° 18/22624 ; Cerclab n° 8812 (sous-traitance dans le secteur du transport pour effectuer des tournées de ramassage et distribution de colis et palettes de pièces automobiles d’un groupe automobile), sur appel de T. com. Lyon, 3 septembre 2018 : RG n° 2017J1823 ; Dnd.
Résiliation du contrat. La clause qui offre à chaque partie un droit de défaire unilatéralement le contrat sans motif particulier, à la seule condition de respecter un préavis de six mois, ne crée aucun déséquilibre significatif entre elles compte tenu de la réciprocité du droit qu'elle instaure. CA Orléans (ch. civ.), 25 janvier 2021 : RG n° 18/01416 ; Cerclab n° 8757 (contrat entre une société de taxi et une association pour l'adaptation sociale des déficients moteurs, financée en grande partie par des financements publics, et gérant des établissements médico-sociaux, pour le transport de personnes en situation de handicap ; N.B. le fondement n’est pas précisé, l’arrêt écartant ensuite l’anc. art. L. 442-6), sur appel de TGI Orléans, 2 mai 2018 : Dnd.
2° TRANSPORT RAPIDE DE COURRIER
Modification à la hausse de l’activité prévisible. Le transporteur ayant été informé dès novembre par le commissionnaire d'une augmentation de la future activité pour la fin de l’année, il lui appartenait de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour y faire face et il n'est pas fondé à se plaindre d'une croissance d'activité qui entraîne nécessairement une augmentation de son chiffre d'affaires et donc une contrepartie financière. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 13 février 2019 : RG n° 16/19882 ; Cerclab n° 8029 (transporteur prétendant que le surcroît de charge n’avait pas été compensé ; N.B. le contrat avait été conclu le 1er octobre, le courrier de novembre visant une augmentation pour le mois de décembre, calendrier qui semble très serré pour réorganiser son activité, l’arrêt ne précisant d’ailleurs pas l’ampleur de cet accroissement), sur appel de T. com. Paris, 7 septembre 2016 : RG n° 2015009520 ; Dnd.
Rémunération. Rejet de l’argument selon lequel le commissionnaire imposerait ses tarifs au transporteur, du fait de sa dépendance économique, alors que le contrat stipule que « le transporteur calcule ses coûts et détermine lui-même ses tarifs qu'il porte à la connaissance de Chronopost. Le transporteur certifie qu'il n'offre pas ou ne pratique pas de prix inférieurs au coût de revient de sa prestation, conformément aux dispositions des lois du 31 décembre 1992, du 1er février 1995 et 5 juillet 1996 » et que pour le mode de rémunération « le transporteur fixe librement son prix en tenant compte du volume des prestations et de ses modalités décrites dans l'appel d'offres ». CA Paris (pôle 5 ch. 4), 13 février 2019 : RG n° 16/19882 ; Cerclab n° 8029 (contrats de transport entre un transporteur et un commissionnaire spécialisé dans le transport rapide de courrier), sur appel de T. com. Paris, 7 septembre 2016 : RG n° 2015009520 ; Dnd.
Modification de la rémunération : prix du carburant. Absence de preuve que les dispositions de l'art. L. 3222-1 C. transp. n’ont pas été respectées. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 22 février 2018 : RG n° 15/14051 ; Cerclab n° 7450 (sous-traitance de transport dans le secteur du transport rapide de courrier ; clause prévoyant l’ajustement automatique de la charge du carburant sur le prix total de sa facture sur la base de trois facteurs : la part de gazole dans le prix total du transport, la fluctuation mensuelle de l'indice carburant par rapport à un indice de référence, impactant ainsi la charge de gazole, et le cube de chaque véhicule utilisé pour la prestation), sur appel de T. com. Paris, 8 avril 2015 : RG n° 2013050503 ; Dnd.
Responsabilité du transporteur : ponctualité. La ponctualité dans un contrat de transport rapide de courrier constitue une obligation de résultat contractuellement prévue, puisque la tarification des prestations du commissionnaire varie en fonction des heures limites de livraison qu'elle s'engage à assurer auprès de ses clients et qu'elle est responsable de la même obligation de résultat à l'égard de son client ; ne crée pas de déséquilibre significatif la clause qui prévoit qu'un seul retard lors de la collecte ou de la livraison, imputable au transporteur, engage la responsabilité de ce dernier et qu'il sera redevable du paiement d'une somme forfaitaire égale au prix de la prestation effectuée. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 13 février 2019 : RG n° 16/19882 ; Cerclab n° 8029 (contrats de transport entre un transporteur et un commissionnaire spécialisé dans le transport rapide de courrier ; selon l’arrêt, le fait que le retard, lors de la collecte ou de la livraison, doit être imputable au transporteur ne saurait en soi entraîner un déséquilibre dans les droits et obligations des parties puisque la sanction se justifie par l'imputabilité du retard ; N.B. cet argument ne répond pas complètement à l’argumentation du transporteur qui contestait que la pénalité soit identique lorsque le retard dans la collecte n’a pas entraîné de retard dans la livraison au client), sur appel de T. com. Paris, 7 septembre 2016 : RG n° 2015009520 ; Dnd.
Absence de déséquilibre significatif dans la clause sanctionnant le transporteur pour des retards dans la livraison qui lui sont imputables. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 25 juin 2020 : RG n° 18/01066 ; Cerclab n° 8477 (sous-traitance de transport dans le secteur du transport rapide de courrier et colis), sur appel de T. com. Paris, 1er décembre 2017 : RG n° 2014062851 ; Dnd. § N.B. L’arrêt interprète la clause dans un sens non déséquilibré, en considérant que la formule prévoyant que « seul un retard lors de la collecte ou de la livraison imputable au transporteur engage la responsabilité de ce dernier », doit être interprété en concordance avec l’alinéa précédent et qu’en conséquence un retard dans la collecte, sans retard dans la livraison, ne permettrait pas l’application de la pénalité (ce qui était précisément le grief du sous-traitant à l’encontre de cette stipulation).
Résiliation. Aucun déséquilibre des droits des parties ne saurait résulter de la clause de résiliation, dès lors qu'elle confère à chaque partie le même droit de mettre fin au contrat dans les mêmes conditions, de sorte qu'est établie une réciprocité des droits des parties. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 13 février 2019 : RG n° 16/19882 ; Cerclab n° 8029 (N.B. l’affaire concerne un transporteur et le principal commissionnaire dans le transport rapide de courrier, situation qui rend l’équilibre plus apparent que réel), sur appel de T. com. Paris, 7 septembre 2016 : RG n° 2015009520 ; Dnd.
C. TRANSPORT FLUVIAL
Avis CEPC. Avis n° 16-5 du 10 février 2016 relatif à une demande d’avis d’un établissement public et d’un syndicat professionnel concernant les pratiques commerciales dans le transport fluvial : qualification des pratiques au regard de l’anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com. CEPC (avis), 10 février 2016 : avis n° 16-5 ; Cerclab n° 6592. § N.B. L’avis de la Commission décrit de façon très précise les règles et les pratiques gouvernant le secteur du transport fluvial.
* Nécessité d’établir des CGV. Concernant les pratiques restrictives de concurrence, la Commission souligne tout d’abord la nécessité pour les bateliers d’établir des conditions générales de vente, servant de base à la négociation contractuelle et pouvant s’avérer probantes pour l’appréciation d’un déséquilibre significatif (visa de l’avis n° avis n° 08-06 du 19 décembre 2008 qui précisait que « … les CGV constituent un document de référence particulièrement probant pour appréhender toute exigence formulée par l’un des cocontractants susceptible de relever de la notion de « déséquilibre significatif » au sens de l’ancien art. L. 442-6-I-2° » [L. 442-1-I-2°] C. com.). La Commission évoque aussi le fait que le donneur d’ordre, client du transporteur, peut aussi établir des conditions générales d’achat. Selon l’avis, « en cas de refus par le prestataire des CGA, ce sont les CGV qui s’appliquent à la relation d’affaires ».
* Pratiques condamnables au titre de l’ancien art. L. 442-6-I-1° [L. 442-1-I-1°] C. com. Selon l’avis, pourraient être contestées au regard de ce texte :
- les cascades de commissions entre des intermédiaires, ne relevant pas systématiquement d’un réel service rendu ;
- l’obtention de la part d’un prestataire de transport de la réalisation de services, sans aucune contrepartie financière, sortant du cadre du transport proprement dit.
* Pratiques condamnables au titre de l’anc. art. L. 442-6-I-2° C. com. [L. 442-1-I-1°]. Selon l’avis, pourraient être contestées au regard de ce texte, en raison de l’existence d’un déséquilibre significatif :
- la primauté des conditions des intermédiaires ou des clients sur les conditions générales de vente des fournisseurs ;
- la contractualisation tardive du contrat alors que l’exécution de la prestation a déjà commencé ;
- le fait d’imposer à une entreprise l’exécution d’une prestation qui relève d’une autre entreprise sans aucune contrepartie financière.
* Pratiques condamnables au titre de l’anc. art. L. 442-6-I-4° [abrogé] et 5° [L. 442-1-II] C. com. Selon l’avis, pourraient être contestées au regard de ce texte :
- le bannissement ou l’exclusion d’un fournisseur en raison de son refus de se soumettre à des conditions abusives ou sans respect d’un délai de préavis raisonnable engendre la responsabilité de son auteur.
* Pratiques condamnables au titre de l’anc. art. L. 442-6-I-12° C. com. Selon l’avis, pourraient être contestées au regard de ce texte :
- le fait de ne pas respecter les termes du contrat relatif au prix peut être ainsi civilement sanctionné.