CASS. CIV. 1re, 27 juin 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7665
CASS. CIV. 1re, 27 juin 2018 : pourvoi n° 17-10891 ; arrêt n° 672
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « Mais attendu que, s’il revient au juge de la mise en état de vérifier que l’assignation délivrée sur le fondement de l’article L. 423-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015, expose expressément des cas individuels au sens de l’article R. 423-3, devenu R. 623-3 du même code, il ne lui appartient pas d’en apprécier la pertinence ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel a exactement retenu que l’absence éventuelle de représentativité des cas individuels exposés dans l’assignation arguée de nullité, de même que la diversité des conditions générales des contrats d’assurance applicables à ceux-ci, constituent des moyens sur lesquels le juge de la mise en état ne peut se prononcer ; que le moyen, inopérant en sa deuxième branche en ce qu’il critique des motifs erronés mais surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 27 JUIN 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 17-10891. Arrêt n° 672.
DEMANDEUR à la cassation : Société Axa France vie - Association générale interprofessionnelle de prévoyance
DÉFENDEUR à la cassation : Association Consommation, logement et cadre de vie CLCV
Mme Batut (président), président. SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Odent et Poulet, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 3 novembre 2016), que, le 28 octobre 2014, l’association Consommation, logement et cadre de vie (l’association) a assigné, sur le fondement de l’article L. 423-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015, l’Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d’investissement (le souscripteur) et la société Axa France vie (l’assureur) aux fins d’obtenir la réparation de divers préjudices subis par un groupe d’adhérents et de bénéficiaires d’un contrat d’assurance sur la vie dénommé « contrat compte libre d’épargne et de retraite » ; que le souscripteur et l’assureur ont saisi le juge de la mise en état aux fins de voir annuler l’assignation ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que l’assureur fait grief à l’arrêt de rejeter cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l’action de groupe engagée par une association de défense des consommateurs, qui vise à obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs « placés dans une situation similaire ou identique », est introduite par une assignation qui, à peine de nullité, expose les cas individuels présentés au soutien de l’action ; que l’instruction de la demande est confiée au juge de la mise en état auquel il appartient de se prononcer sur les exceptions de procédure ; que constitue une telle exception le moyen tiré de la nullité de l’assignation ; que les cas individuels choisis par l’association doivent être représentatifs du groupe et des types de cas sur la base desquels l’action est engagée ; que méconnaît l’étendue de son pouvoir le juge de la mise en état qui refuse de vérifier que les cas individuels présentés sont représentatifs du groupe au motif que la pertinence de ces cas individuels ne peut être examinée que par le juge du fond et que la mention d’au moins deux cas individuels permet de s’assurer que le litige concerne plus d’un consommateur ; qu’en confirmant cette ordonnance, la cour d’appel a commis un excès de pouvoir négatif et violé les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l’action de groupe ne peut être engagée que pour défendre une pluralité de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique ; que cette condition s’apprécie au regard, non pas du dommage allégué, mais de la situation de droit liant le consommateur au professionnel assigné ; que les adhérents et les bénéficiaires d’une assurance vie ne sont pas dans le même lien de droit avec la compagnie d’assurance ; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui ne comportait aucun cas individuel relatif aux bénéficiaires de l’assurance vie au motif « qu’il importait peu que les cas visés ne comportent que des adhérents et non des bénéficiaires, puisque le préjudice allégué est identique », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que l’action de groupe ne peut être engagée que pour défendre une pluralité de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique ; que cette condition s’apprécie au regard, non pas du dommage allégué, mais de la situation de droit liant le consommateur au professionnel assigné ; que les adhérents ayant souscrit des contrats d’assurance vie en application de diverses conditions générales et de différents certificats d’adhésion ne sont pas dans le même lien de droit avec la compagnie d’assurance ; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui n’exposait nullement la diversité des situations contractuelles correspondant au groupe défini par l’association au motif que « les arguments relatifs à la diversité des conditions générales applicables et à l’absence de représentativité des cas exposés constituent des moyens de fond et ne sauraient être examinés dans le cadre de la mise en état », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que, s’il revient au juge de la mise en état de vérifier que l’assignation délivrée sur le fondement de l’article L. 423-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015, expose expressément des cas individuels au sens de l’article R. 423-3, devenu R. 623-3 du même code, il ne lui appartient pas d’en apprécier la pertinence ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel a exactement retenu que l’absence éventuelle de représentativité des cas individuels exposés dans l’assignation arguée de nullité, de même que la diversité des conditions générales des contrats d’assurance applicables à ceux-ci, constituent des moyens sur lesquels le juge de la mise en état ne peut se prononcer ; que le moyen, inopérant en sa deuxième branche en ce qu’il critique des motifs erronés mais surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que, par suite du rejet du pourvoi principal, il n’y a pas lieu de statuer sur le pourvoi provoqué formé par le souscripteur ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi principal ;
Dit n’y avoir lieu de statuer sur le pourvoi provoqué ;
Condamne la société Axa France vie aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à l’association Consommation, logement et cadre de vie la somme de 3.000 euros, et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-huit.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société AXA France vie
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir rejeté l’exception de nullité de l’assignation de l’association CLCV invoquée par Axa France Vie.
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE la cour ne peut que renvoyer à l’exposé complet de la procédure instituée par les articles L. 423-1 du code de la consommation, devenus L. 623-1 et suivants du même code contenus dans l’ordonnance déférée, et relative aux actions en justice des associations de défense des consommateurs ; qu’il sera seulement rappelé que l’article R. 423-3 du code de la consommation, devenu R. 623-3 de ce code, dispose qu’outre les mentions prescrites aux articles 56 et 752 du code de procédure civile, l’assignation expose expressément à peine de nullité les cas individuels présentés par l’association au soutien de son action ; que l’examen des assignations du 28 octobre 2014 ne fait apparaître aucune irrégularité de forme, puisque les textes fondant la demande y sont visés, les griefs articulés contre la (sociétés AXA France Vie et l’AGIPI) de façon suffisante et plusieurs cas individuels exposés ; que ces assignations mentionnent expressément que CLCV demande réparation des préjudices individuels résultant, pour les adhérents et bénéficiaires du contrat collectif d’assurance sur la vie dénommé « Contrat compte libre d’épargne et de retraite » (CLER) commercialisé par Axa et souscrit par AGIPI, de l’inexécution des obligations contractuelles stipulées en ce qui concerne l’ensemble des adhérents ayant souscrit ce contrat avant le 1er juin 1995 et les bénéficiaires des contrats en ce que ces adhérents ou bénéficiaires n’ont pas bénéficié du taux de rendement annuel minimal net de 4,5 % l’an garanti par le contrat ; qu’elle rappelle un arrêt de la cour d’appel de Paris du 17 septembre 2013 ayant jugé qu’AXA et AGIPI étaient tenues de garantir ce taux dans les conditions contractuelles pour les adhésions antérieures au 1er juin 1995, et les versement réguliers programmés avant cette date ; que cette demande, suffisamment explicite pour mettre en mesure AXA et AGIPI de se défendre utilement, est illustrée par 7 cas individuels comportant, pour chacun, les nom et prénom de l’adhérent, son adresse, le numéro de son contrat et la date d’adhésion, ainsi que l’extrait des conditions générales contenant la stipulation invoquée ; que la contestation d’AXA et AGIPI remet en cause la représentativité des cas cités, aux motifs que ne serait pas présentée la situation des bénéficiaires, et que la diversité des situations contractuelles visées, à raison notamment de la diversité des conditions générales applicables, interdirait d’y voir un groupe ; que, néanmoins, le seul rappel du déroulement de la procédure de cette action spécifique démontre que la pertinence des cas individuels exposés dans l’assignation ne peut être examinée par le juge de la mise en état, puisqu’elle constitue, précisément, l’objet de la première phase de la procédure de cette action, au cours de laquelle le juge (du fond) examine tous les moyens de défense opposés par le professionnel relatifs à la mise en cause de sa responsabilité, à la définition du groupe de consommateurs à l’égard desquels sa responsabilité est engagée, aux critères de rattachement à ce groupe, aux préjudices susceptibles d’être réparés ainsi qu’à leur montant ; que les arguments relatifs à la diversité des conditions générales applicables, et à l’absence de représentativité des cas exposés constituent des moyens de fond et ne sauraient être examinés dans le cadre de la mise en état ; qu’il importe peu par ailleurs que les cas visés ne comportent que des adhérents et non des bénéficiaires, puisque le préjudice allégué est identique ; que les contestations élevées par AXA et AGIPI devant le juge de la mise en état concernent bel et bien la recevabilité de l’action ou son bien-fondé et le juge de la mise en état a justement considéré qu’il n’avait pas le pouvoir de les trancher (arrêt p.3).
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE c’est à partir des cas individuels exposés dans l’assignation que, dans une première phase de jugement définie aux articles L. 423-3 et suivants du code de la consommation, le tribunal de grande instance constate que les conditions de recevabilité mentionnées à l’article L. 423-1 sont réunies, statue sur la responsabilité du professionnel, définit le groupe des consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée et en fixe les critères de rattachement ; qu’il résulte de ces dispositions que n’est exigée dans l’assignation que la mention de plusieurs cas individuels, soit au moins deux ; que cette mention permettra en effet au tribunal de s’assurer que le litige concerne plus d’un consommateur, qu’ils sont dans une similitude de situations et que l’action est donc recevable ; que l’appréciation des situations exposées permet ensuite au tribunal de statuer sur la responsabilité et le cas échéant, de définir le groupe ; que dans cette première phase, à défaut de dispositions particulières, le juge de la mise en état exerce les pouvoirs prévus en matière contentieuse par les articles 763 et suivants du code de procédure civile ; que le juge de la mise en état peut donc examiner la régularité de l’assignation mais il ne lui appartient pas de vérifier la recevabilité de l’action de groupe, ni son bien-fondé ; que la définition du groupe lésé par les manquements reprochés relève du jugement sur la responsabilité et donc du fond du droit ; qu’en l’espèce, l’association CLCV soutient, en substance, que les dommages à l’origine des préjudices des membres du groupe ont pour cause commune les manquements (de la société AXA France Vie et d’AGIPI) à leurs obligations contractuelles de service d’un taux de rendement annuel minimal net de 4,5 % l’an garanti pour tous les adhérents ayant souscrit le contrat CLER et procédé à des versements sur celui-ci ou programmé des versements réguliers avant le 1er juin 1995 ; qu’elle cite neuf cas individuels au soutien de son action ; qu’elle vise expressément dans le dispositif de son assignation les articles 1134 du code civil et L. 423-1 du code de la consommation ; qu’il s’évince de ces constatations que les exigences de forme prescrites par les textes précités sont respectées puisque l’association CLCV cite au moins deux cas individuels et qu’elle expose ses moyens de droit ; que l’exception de nullité de l’assignation sera donc rejetée ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) ALORS QUE l’action de groupe engagée par une association de défense des consommateurs, qui vise à obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs « placés dans une situation similaire ou identique », est introduite par une assignation qui, à peine de nullité, expose les cas individuels présentés au soutien de l’action ; que l’instruction de la demande est confiée au juge de la mise en état auquel il appartient de se prononcer sur les exceptions de procédure ; que constitue une telle exception le moyen tiré de la nullité de l’assignation ; que les cas individuels choisis par l’association doivent être représentatifs du groupe et des types de cas sur la base desquels l’action est engagée ; que méconnaît l’étendue de son pouvoir le juge de la mise en état qui refuse de vérifier que les cas individuels présentés sont représentatifs du groupe au motif que la pertinence de ces cas individuels ne peut être examinée que par le juge du fond et que la mention d’au moins deux cas individuels permet de s’assurer que le litige concerne plus d’un consommateur ; qu’en confirmant cette ordonnance, la Cour a commis un excès de pouvoir négatif et violé les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
2°) ALORS QUE l’action de groupe ne peut être engagée que pour défendre une pluralité de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique ; que cette condition s’apprécie au regard, non pas du dommage allégué, mais de la situation de droit liant le consommateur au professionnel assigné ; que les adhérents et les bénéficiaires d’une assurance vie ne sont pas dans le même lien de droit avec la compagnie d’assurance ; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui ne comportait aucun cas individuel relatif aux bénéficiaires de l’assurance vie au motif « qu’il importait peu que les cas visés ne comportent que des adhérents et non des bénéficiaires, puisque le préjudice allégué est identique », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
3°) ALORS QUE l’action de groupe ne peut être engagée que pour défendre une pluralité de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique ; que cette condition s’apprécie au regard, non pas du dommage allégué, mais de la situation de droit liant le consommateur au professionnel assigné ; que les adhérents ayant souscrit des contrats d’assurance vie en application de diverses conditions générales et de différents certificats d’adhésion ne sont pas dans le même lien de droit avec la compagnie d’assurance ; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui n’exposait nullement la diversité des situations contractuelles correspondant au groupe défini par l’association CLCV au motif que « les arguments relatifs à la diversité des conditions générales applicables et à l’absence de représentativité des cas exposés constituent des moyens de fond et ne sauraient être examinés dans le cadre de la mise en état », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme.
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit au pourvoi provoqué par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour l’Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d’investissement
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen fait grief à l’arrêt D’AVOIR confirmé l’ordonnance qui avait rejeté l’exception de nullité de l’assignation de l’association CLCV invoqué par Axa France Vie et I’AGIPI ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE «la cour ne peut que renvoyer à l’exposé complet de la procédure instituée par les articles L. 423-1 du code de la consommation, devenus L. 623-1 et suivants du même code contenus dans l’ordonnance déférée, et relative aux actions en justice des associations de défense des consommateurs; qu’il sera seulement rappelé que l’article R. 423-3 du code de la consommation, devenu R. 623-3 de ce code, dispose qu’outre les mentions prescrites aux articles 56 et 752 du code de procédure civile, l’assignation expose expressément à peine de nullité les cas individuels présentés par l’association au soutien de son action; que l’examen des assignations du 28 octobre 2014 ne fait apparaître aucune irrégularité de forme, puisque les textes fondant la demande y sont visés, les griefs articulés contre les défenderesses de façon suffisante, et plusieurs cas individuels exposés. Ces assignations mentionnent expressément que CLCV demande réparation des préjudices individuels résultant, pour les adhérents et bénéficiaires du contrat collectif d’assurance sur la vie dénommé « Contrat Compte Libre d’Epargne et de Retraite » (CLER) commercialisé par Axa et souscrit par AGIPI, de l’inexécution des obligations contractuelles stipulées en ce qui concerne l’ensemble des adhérents ayant souscrit ce contrat avant le 1er juin 1995, et les bénéficiaires des contrats en ce que ces adhérents ou bénéficiaires n’ont pas bénéficié du taux de rendement annuel minimal net de 4,5% l’an garanti par le contrat. Elle rappelle un arrêt de la cour d’appel de Paris du 17 septembre 2013 ayant jugé qu’Axa et AGIPI étaient tenues de garantir ce taux dans les conditions contractuelles pour les adhésions antérieures au 1er juin 1995, et les versements réguliers programmés avant cette date. Cette demande, suffisamment explicite pour mettre en mesure Axa et AGIPI de se défendre utilement, est illustrée par 7 cas individuels comportant, pour chacun, les nom et prénom de l’adhérent, son adresse, le numéro de son contrat et la date d’adhésion, ainsi que l’extrait des conditions générales contenant la stipulation invoquée. La contestation d’Axa et AGIPI remet en cause la représentativité des cas cités, aux motifs que ce ne serait pas présentée la situation des bénéficiaires, et que la diversité des situations contractuelles individuelles visées, à raison notamment de la diversité des conditions générales applicables, interdirait d’y voir un groupe. Néanmoins, le seul rapport du déroulement de la procédure de cette action spécifique démontre que la pertinence des cas individuels exposés dans l’assignation ne peut être examinée par le juge de la mise en état, puisqu’elle constitue, précisément, l’objet de la première phase de la procédure de cette action, au cours de laquelle le juge (du fond) examine tous les moyens de défense opposés par le professionnel relatifs à la mise en cause de sa responsabilité, à la définition du groupe de consommateurs à l’égard desquels sa responsabilité est engagée, aux critères de rattachement de ce groupe, aux préjudices susceptibles d’être réparés ainsi qu’à leur montant. Ainsi, les arguments relatifs à la diversité des conditions générales applicables, et à l’absence de représentativité des cas exposés constituent des moyens de fond et ne sauraient être examinés dans le cadre de la mise en état. Il importe peu par ailleurs que les cas visés ne comportent que des adhérents et non des bénéficiaires, puisque le préjudice allégué est identique. Dès lors, les contestations élevées par Axa et AGIPI devant le juge de la mise en état concernent bel et bien la recevabilité de l’action ou son bien-fondé, et le juge de la mise en état ajustement considéré qu’il n‘avait pas le pouvoir de les trancher »;
ET AUX MOTIFS ADOPTES OUE «c’est à partir des cas individuels exposés dans l’assignation que dans une première phase de jugement définie aux articles L. 423-3 et suivants du code de la consommation, le tribunal de grande instance constate que les conditions de recevabilité mentionnées à l’article L. 423-1 sont réunies, statue sur la responsabilité du professionnel, définit le groupe des consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée et en fixe les critères de rattachement. Il résulte de ces dispositions que n ‘est exigée dans l’assignation que la mention de plusieurs cas individuels, soit au moins deux. Cette mention permettra en effet au tribunal de s ‘assurer que le litige concerne plus d’un consommateur, qu’ils sont dans une similitude de situations et que l’action est donc recevable. L‘appréciation des situations exposées permet ensuite au tribunal de statuer sur la responsabilité et le cas échéant, de définir le groupe. Dans cette première phase, à défaut de dispositions particulières, le juge de la mise en état exerce les pouvoirs prévus en matière contentieuse par les articles 763 et suivants du code de procédure civile. Le juge de la mise en état est ainsi compétent pour statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l’instance mais non sur les fins de non-recevoir et les questions de fond qui relèvent du seul tribunal. Le juge de la mise en état peut donc examiner la régularité de l’assignation mais il ne lui appartient pas de vérifier la recevabilité de l’action de groupe, ni son bien-fondé. Or, la définition du groupe lésé par les manquements reprochés relève du jugement sur la responsabilité et donc du fond du droit. En l’espèce, l’association CLC soutient, en substance, que les dommages à l’origine des préjudices des membres du groupe ont pour cause commune les manquements des défenderesses à leurs obligations contractuelles de service d’un taux de rendement annuel minimal net de 4,50 % l’an garanti pour tous les adhérents ayant souscrit le contrat CLER et procédé à des versements sur celui-ci ou programmé des versements réguliers avant le 1er juin 1995. Elle cite neuf cas individuels au soutien de son action. Elle vise expressément dans le dispositif de son assignation les articles 1134 du code civil et L. 423-1 du code de la consommation. Il s ‘évince de ces constatations que les exigences de forme prescrites par les textes précités sont respectées puisque l’association CLCV cite au moins deux cas individuels et qu’elle expose ses moyens de droit. L’exception de nullité de l’assignation sera donc rejetée » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1/ ALORS QUE l’action de groupe engagée par une association de défense des consommateurs, qui vise à obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs «placés dans une situation similaire ou identique », est introduite par une assignation qui, à peine de nullité, expose les cas individuels présentés au soutien de l’action ; que l’instruction de la demande est confiée au juge de la mise en état auquel il appartient de se prononcer sur les exceptions de procédure ; que constitue une telle exception le moyen tiré de la nullité de l’assignation ; que les cas individuels choisis doivent être représentatifs du groupe et des types de cas sur la base desquels l’action est engagée ; que méconnaît l’étendue de son pouvoir le juge de la mise en état qui refuse de vérifier que les cas individuels présentés sont représentatifs du groupe au motif que la pertinence de ces cas individuels ne peut être examinée que par le juge du fond et que la mention d’au moins deux cas individuels permet de s’assurer que le litige concerne plus d’un consommateur; qu’en confirmant cette ordonnance, la cour a commis un excès de pouvoir négatif et a violé les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’hommes et des libertés fondamentales
2/ ALORS QUE l’action de groupe ne peut être engagée que pour défendre une pluralité de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique; que cette condition s’apprécie au regard, non pas du dommage allégué, mais de la situation de droit liant le consommateur au professionnel assigné ; que les adhérents et les bénéficiaires d’une assurance vie ne sont pas dans le même lien de droit avec la compagnie d’assurance; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui ne comportait aucun cas individuel relatif aux bénéficiaires de l’assurance vie au motif « qu’il importait peu que les cas visés ne comportent que des adhérents et non des bénéficiaires, puisque le préjudice allégué est identique », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-l et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
3/ ALORS QUE les adhérents ayant souscrit des contrats d’assurance vie en application de diverses conditions générales et de différents certificats d’adhésion ne sont pas dans le même lien de droit avec la société d’assurance; qu’en écartant la nullité de l’assignation qui n’exposait nullement la diversité des situations contractuelles correspondant au groupe défini par l’association CLCV au motif que les « arguments relatifs à la diversité des conditions générales applicables et à l’absence de représentativité des cas exposés constituent des moyens de fond et ne sauraient être examinés dans le cadre de la mise en état », la cour d’appel a méconnu les pouvoirs qui lui sont dévolus par les articles L. 423-1 et R. 423-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, ensemble l’article 6 §1 de la convention européenne des droits de l’homme.