CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA ANGERS (ch. A - civ.), 18 septembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA ANGERS (ch. A - civ.), 18 septembre 2018
Pays : France
Juridiction : Angers (CA), ch. civ.
Demande : 16/01231
Date : 18/09/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7703

CA ANGERS (ch. A - civile), 18 septembre 2018 : RG n° 16/01231 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Si l'article L. 113-2 du code des assurances pose le principe du droit de résilier annuellement un contrat d'assurance tant au profit de l'assureur que de l'assuré et si l'article L. 113-12 du code des assurances, dans ses dispositions applicables jusqu'au 1er avril 2018, organise le droit de l'assuré et de l'assureur de résilier le contrat à l'expiration d'un délai d'un an, l'article L. 312-9 du code de la consommation traitant de ce contrat d'assurance ne prévoyait pas, dans sa rédaction applicable à l'époque de souscription, l'hypothèse d'une possible résiliation unilatérale par l'emprunteur-adhérent, en cours d'exécution du contrat.

Cette impossibilité de résilier le contrat était un effet nécessaire du droit dont disposait alors le prêteur d'exiger l'adhésion au contrat d'assurance qu'il proposait, cette dérogation au principe posé par l'article L. 113-2 du code des assurances ayant pour contrepartie l'inopposabilité à l'adhérent de toutes modifications de la définition des risques et de la tarification susceptibles d'être apportées au contrat par l'assureur. »

2/ « Il ne saurait enfin être reproché au Crédit Foncier de France un manquement au principe de la bonne foi contractuelle et un comportement abusif pour avoir refusé le changement d'assureur souhaité par les emprunteurs, dès lors que l'organisme financier n'a fait qu'appliquer que ce qui avait été convenu lors de la souscription du contrat en conformité avec le dispositif législatif applicable à l'époque lequel prévoyait alors la possibilité pour le prêteur d'exiger de l'emprunteur l'adhésion au contrat d'assurance collective qu'il avait souscrit, ce qu'avaient admis les époux X. et ce qui constituait en conséquence la loi des parties. Ces clauses contractuelles ne sont pas abusives dès lors qu'elles sont clairement énoncées, que le coût du contrat d'assurance imposé est précisé et inclus au TEG et que le candidat à l'emprunt est libre de comparer l'offre dans son ensemble avec d'autres offres de prêt proposant des contrats d'assurance plus attractifs ou laissant à l'emprunteur le libre choix de son assureur.

Les époux X. ne sauraient se prévaloir enfin des modifications ultérieures de la loi laquelle permet désormais le libre choix de l'assureur et le changement d'assurance en cours de contrat de prêt. La loi a prévu les modalités de son application dans le temps, en aménageant ses effets y compris pour les contrats anciens mais sans toutefois aucune portée rétroactive susceptible de permettre de valider a posteriori des demandes de résiliation antérieures à la date d'effet de la loi nouvelle refusées par l'emprunteur. »

 

COUR D’APPEL D’ANGERS

CHAMBRE A CIVILE

ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/01231. Jugement du 1er avril 2016, Tribunal de Grande Instance d'ANGERS, n° d'inscription au R.G. de première instance 14/01917.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], [adresse]

Madame Y. épouse Y.

née le [date] à [ville], [adresse]

Représentés par Maître Sébastien H. substituant Maître Philippe L. de la SCP ACR, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 71160135 et Maître Erkia N., avocat plaidant au Barreau de PARIS,

 

INTIMÉES :

LE CRÉDIT FONCIER DE FRANCE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représenté par Maître Patrick B. de la SELARL B. PATRICK ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 120212

SA AXA FRANCE VIE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Philippe P. de la SCP P., avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 1400091 et Maître Julie V. substituant Maître François H. du Cabinet H&A, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 12 juin 2018 à 14H00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame ROEHRICH, Président de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport et Madame PORTMANN, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame ROEHRICH, Président de chambre, Madame PORTMANN, Conseiller, Mme LE BRAS, Conseiller.

Greffier lors des débats : Madame LEVEUF

ARRÊT : contradictoire ; Prononcé publiquement le 18 septembre 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Monique ROEHRICH, Président de chambre et par Christine LEVEUF, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Aux termes d'offres de prêt du 26 janvier 2010, M. X. et Madame Y., son épouse ont souscrit quatre prêts destinés à financer leur projet d'acquisition immobilière auprès du Crédit Foncier de France.

En garantie de ces quatre prêts, ils ont adhéré au contrat d'assurance-groupe souscrit par le Crédit Foncier de France auprès de la compagnie AXA FRANCE VIE.

Suivant courrier recommandé du 27 mai 2011, ils ont sollicité la substitution, à compter de l'échéance du 5 août 2011 de leur contrat de prêt AXA par un nouveau contrat.

Le Crédit Foncier, faisant valoir qu'aucune modification ne pouvait avoir lieu en cours de contrat, a refusé de faire droit à leur demande.

Par jugement du 1er avril 2016, le Tribunal de grande instance d'ANGERS saisi par les époux X. a :

- débouté M. X. et Mme Y. épouse X. de leurs demandes de résiliation et substitution des contrats d'assurance-groupe auxquels ils ont adhéré auprès d'AXA FRANCE VIE le 26 janvier 2010 ;

- les a déboutés de leur demande tendant à voir déclarer illicites et ainsi non écrites et inopposables la clause 8.1 des conditions générales des contrats de prêt du Crédit foncier de France, la clause « assurance pour les risques décès et perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité, incapacité de travail et perte d'emploi » des conditions générales du contrat de prêt Foncier Atout clic, la clause 1.14 cessation des garanties de la notice d'information de la société AXA FRANCE VIE ;

- les a déboutés de leur demande indemnitaire à l'encontre du Crédit Foncier de France et de la SA AXA FRANCE VIE ;

- les a condamnés in solidum à verser au Crédit Foncier de France et à AXA FRANCE VIE la somme de 1.500 euros à chacun au titre des frais irrépétibles ;

- a débouté M. et Mme X. de leurs demandes formées à ce titre ;

- les a condamnés aux entiers dépens.

Pour statuer ainsi, le Tribunal a considéré que ne s'appliquaient pas au contrat d'assurance de groupe, les dispositions de l'article L. 113-2 du code des assurances régissant les contrats d'assurance annuellement reconductibles et qu'au regard de la réglementation applicable à l'époque, l'emprunteur avait la possibilité, au moment de son entrée dans l'assurance, de substituer un contrat présentant un niveau de garantie équivalent au contrat d'assurance-groupe souscrit et proposé par le prêteur mais ne pouvait, en cours d'exécution, résilier ce contrat pour y substituer un autre.

Il a relevé que si la loi du 17 mars 2014 avait au travers de la rédaction nouvelle de l'article L 113-12-12 du code des assurances, instauré un droit de résiliation par dénonciation de l'adhésion dans les 12 mois de la délivrance du prêt, cette possibilité demeurait applicable aux seuls contrats postérieurs au 26 juillet 2014.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

- pour les époux X. le 21 novembre 2016,

- pour le Crédit Foncier de France le 29 juin 2017,

- pour AXA FRANCE VIE le 19 juillet 2017.

Les époux X. demandent à la Cour :

- de réformer le jugement rendu le 1er avril 2016 par le Tribunal de grande Instance d'ANGERS,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- de dire et que le refus du Crédit Foncier de France de faire droit à la demande de résiliation du contrat d'assurance de groupe formulée par Monsieur X. et Madame X. est contraire aux dispositions d'ordre public de l'article L. 113-12 du Code des assurances,

- de dire et juger que le refus du Crédit foncier de France de faire droit à la demande de résiliation du contrat d'assurance de groupe formulée par Monsieur X. et Madame X. est contraire aux stipulations contractuelles, contraire au principe de bonne foi contractuelle et abusif,

- de dire et juger que le refus de substitution d'assurance emprunteur opposé par le Crédit Foncier de France à Monsieur X. et Madame X. est contraire aux stipulations contractuelles, contraire au principe de bonne foi contractuelle et abusif,

- de dire et juger abusif l'article 11 des conditions générales des contrats de prêt du Crédit Foncier de France,

- de dire et juger cette clause non écrite et inopposable à Monsieur X. et Madame X.,

En conséquence,

- de constater la résiliation du contrat d'adhésion de Monsieur X. et Madame X. à l'assurance de groupe AXA FRANCE VIE à effet du 5 août 2011, ou à défaut, prononcer la résiliation de cette adhésion,

- de dire et juger que cette résiliation est opposable aux sociétés Crédit foncier de France et AXA FRANCE VIE,

- d'ordonner la substitution du contrat d'assurance de la société AXA FRANCE VIE par le contrat d'assurance souscrit auprès de la MACIF par Monsieur X. et Madame X. en garantie des prêts : Nouveau prêt A 0 %, Prêt Habitat neuf, Pass Liberté et Foncier Atout Clic,

- de dire et juger que cette substitution est opposable aux sociétés Crédit Foncier de France et AXA FRANCE VIE ;

A titre subsidiaire,

- de dire et juger illicites en ce qu'elles manquent de clarté et limitent le droit de résiliation de leur contrat d'assurance par Monsieur X. et Madame X. :

* la clause 8.1 des Conditions Générales des contrats de prêt du Crédit Foncier de France,

* la clause « Assurance pour les risques décès et perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité, incapacité de travail et perte d'emploi » des conditions générales du contrat de prêt Foncier atout clic,

* la clause « 1.14 Cessation des garanties » de la notice d'information de la société AXA FRANCE VIE ;

- de dire et juger abusives de manière irréfragable en ce qu'elles relèvent de l'interprétation unilatérale du Crédit Foncier de France :

* la clause 8.1 des Conditions Générales des contrats de prêt du Crédit Foncier de France,

* la clause « Assurance pour les risques décès et perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité, incapacité de travail et perte d'emploi » des conditions générales du contrat de prêt Foncier atout clic,

* la clause « 1.14 Cessation des garanties » de la notice d'information de la société AXA FRANCE VIE ;

- de dire et juger ces clauses non écrites et inopposables à Monsieur X. et Madame X.,

En conséquence,

- de constater la résiliation du contrat d'adhésion de Monsieur X. et Madame X. à l'assurance de groupe AXA FRANCE VIE à effet du 5 août 2011, ou à défaut, prononcer la résiliation de cette adhésion,

- de dire et juger que cette résiliation est opposable aux sociétés Crédit Foncier de France et AXA FRANCE VIE,

- d'ordonner la substitution du contrat d'assurance de la société AXA FRANCE VIE par le contrat d'assurance souscrit auprès de la MACIF par Monsieur X. et Madame X. en garantie des prêts : Nouveau prêt à 0 %, Prêt Habitat neuf, Pass liberté et Foncier atout clic,

- de dire et juger que cette substitution est opposable aux sociétés Crédit Foncier de France et AXA FRANCE VIE ;

En tout état de cause,

- de condamner solidairement la société AXA FRANCE VIE et le Crédit Foncier de France à verser à Monsieur X. et Madame X. la somme de 5.416,96 euros en réparation de leur préjudice financier,

- de condamner solidairement la société AXA FRANCE VIE et le Crédit Foncier de France à verser à Monsieur X. et Madame X. la somme de 1.000 euros en réparation de leur préjudice moral,

- de débouter le Crédit Foncier de France et la société AXA FRANCE VIE de leur appel incident, ainsi que de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, exposées tant en première instance qu'en cause d'appel,

- de condamner solidairement la société AXA FRANCE VIE et le Crédit Foncier de France à verser à Monsieur X. et Madame X. la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de condamner solidairement la société AXA FRANCE VIE et le Crédit Foncier de France aux dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Ils invoquent, en premier lieu, le droit pour tout assuré, sauf en matière d'assurance-vie, à résilier le contrat d'assurance, droit édicté par l'article L. 113-12 du code des assurances et auquel il ne peut être dérogé par convention. Ils soutiennent que cette possibilité de résiliation s'applique au contrat litigieux qui est une combinaison d'un contrat d'assurance-vie et d'un contrat d'assurance de choses.

Ils soutiennent aussi que l'adhérent d'un contrat groupe acquiert la qualité d'assuré au sens de cet article et est à même de faire valoir son droit à résiliation.

Ils ajoutent que l'article L. 312-9 du code des assurances en sa rédaction applicable à l'espèce ne traite ni de la substitution ni de la résiliation du contrat d'assurance et qu'il doit être retenu en conséquence qu'il ne déroge pas à l'article L. 113-12 du code des assurances. Ils critiquent un arrêt rendu le 9 mars 2016 par la Cour de cassation adoptant une position contraire.

Ils font valoir que les dispositions spécifiques édictées par l'article L. 141-4 du code des assurances renvoyant à des dispositions spéciales lorsque la modification du contrat d'assurance concerne un contrat d'assurance collective dont l'objet est de garantir un emprunt ne permet pas de déduire que par principe, ce type de contrat ne serait pas soumis aux dispositions générales du code des assurances.

Ils exposent que ne peut être tirée aucune conséquence a contrario des dispositions nouvelles issues de la loi du 17 mars 2014 dite Loi H. laquelle, au contraire, en se référant aux dispositions de l'article L. 113-12 du code des assurances, confirme que le contrat d'assurance groupe en matière de prêt demeure régi par le code des assurances.

Ils indiquent que si cette loi a créé un droit nouveau de résiliation et de substitution pendant les douze premiers mois, l'article L. 113-12 du code des assurances demeure inchangé et traite du droit de résiliation au-delà de cette période de douze mois.

Ils estiment enfin qu'aucune interprétation contraire ne saurait être tirée de l'arrêt du 13 mars 2014 du Conseil constitutionnel.

Ils se prévalent enfin de l'article L. 313-30 du code de la consommation en sa rédaction tirée de la loi Sapin qui confirme le droit à résiliation annuelle de l'article L. 113-2 du code des assurances et répute non écrites les clauses faisant obstacle au droit de substitution et qui, à la différence de l'article L. 313-30 du même code, est d'application immédiate.

Ils réfutent l'argumentation au terme de laquelle la connexité de l'assurance avec le contrat de prêt et notamment l'existence de la condition suspensive tenant à la souscription de l'assurance, le fait que l'échéance de l'assurance soit unique et non annuelle et que le bénéficiaire en soit le prêteur constitueraient autant de motifs s'opposant à une libre révocation et un droit de substitution annuels.

Ils soutiennent avoir valablement exprimé leur demande dans les délais requis auprès du Crédit Foncier de France lequel doit être également considéré comme étant le mandataire d'AXA.

Ils contestent le droit pour le Crédit Foncier de France de résilier le contrat de prêt pour substitution d'une assurance non agréée, alors que la résiliation de plein droit ne saurait jouer que pour des faits en lien avec l'exécution du contrat de crédit.

Ils se réfèrent sur ce point à la notion de clauses abusives.

Ils ajoutent enfin que le contrat contient certaines dispositions traitant de manière générale de la possibilité de souscrire une nouvelle assurance dans le cas où les emprunteurs cessent d'être assurés et que dès lors que la stipulation faite au bénéfice du prêteur est maintenue avec garanties équivalentes, il ne peut s'opposer au changement d'assureur.

Ils estiment abusif le refus du Crédit Foncier de France de faire droit aux demandes de résiliation et de substitution.

Ils exposent, en dernier lieu, que le contrat AXA ne prévoit aucune durée mentionnée en caractères très apparents de sorte qu'il doit être réputé conclu pour une durée d'un an et ils font valoir que la clause 8-1 des conditions générales des prêts immobiliers et la clause « cessation des garanties » de la notice AXA sont abusives en ce qu'elles relèvent de l'interprétation unilatérale du Crédit Foncier de France.

 

Le Crédit Foncier de France demande à la Cour :

- de confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'ANGERS le 1er avril 2016 en ce qu'il a :

* rejeté la demande de Madame Y. épouse X. et Monsieur X. tendant à voir constater la résiliation de I'adhésion à |'assurance groupe AXA FRANCE VIE,

* rejeté la demande de Madame Y. épouse X. et Monsieur X. tendant à voir constater la substitution du contrat AXA FRANCE VIE par le contrat MACIF,

Et statuant a nouveau, mais par substitution de motifs :

A titre principal,

- de dire et juger que la faculté de résiliation annuelle prévue à l'article L. 113-12 du code des assurances est inapplicables aux assurances groupe-emprunteurs,

- de juger qu'aucune faculté légale de résiliation du contrat d'assurance emprunteur en cours de prêt n'est possible pour les adhérents,

- de juger que le contrat d'assurance litigieux ne prévoit aucune faculté de résiliation conventionnelle en cours de prêt,

- de juger que Madame Y. épouse X. et Monsieur X. ne sont pas fondés à demander la résiliation du contrat d'assurance groupe auquel ils ont adhéré auprès de la société AXA FRANCE VIE ni la substitution par un autre contrat,

En conséquence,

- de juger que Madame Y. épouse X. et Monsieur X. ne sont pas fondés à se prévaloir du droit de résiliation annuelle de l'article L. 113-12 du code des assurances,

- de débouter Madame Y. épouse X. et Monsieur X. de toutes leurs demandes à l'encontre du Crédit Foncier de France ;

En tout état de cause,

- de débouter Madame Y. épouse X. et Monsieur X. de leurs demandes d'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- de condamner in solidum Madame Y. épouse X. et Monsieur X. au versement au profit du Crédit Foncier de France de la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner les époux X. aux entiers dépens.

Il soutient que résiliation et substitution sont interdépendantes, que la substitution requiert l'aval du prêteur et qu'en l'absence de substitution, le contrat d'assurance étant une condition devant être maintenue dans le temps, le contrat de prêt doit être résilié.

Il conteste l'application des dispositions de l'article L. 113-12 du code des assurances à l'assurance emprunteur et estime que les pièces 31 à 32 relatant l'avis de médiateurs d'assurance doivent être écartées des débats en raison de l'absence de preuve de l'accord à leur production.

Il expose que l'interdépendance du contrat de prêt et du contrat d'assurance exclut toute échéance annuelle du dit contrat dont l'échéance unique est celle du prêt.

Il ajoute que le contrat groupe institue une double stipulation pour autrui et il ne peut être, de ce fait, résilié sans l'accord de la banque, tiers-bénéficiaire.

Il souligne que l'article L. 113-12 du code des assurances exclut les contrats d'assurance sur la vie, que le contrat souscrit est un contrat mixte comme couvrant à la fois l'incapacité et le décès et qu'il est exclu à ce titre.

Il se réfère également à sa nature de contrat de groupe régi par des dispositions propres ainsi qu'en dispose l'article L. 141-4 du code des assurances.

Il ajoute que le contrat litigieux d'assurance emprunteur revêt également une spécificité excluant l'application des principes généraux de la résiliation et substitution, cette faculté n'étant offerte au terme de l'article L. 312-9 que jusqu'à la signature de l'offre de prêt.

Il rappelle que l'arrêt du 9 mars 2016 a été confirmé à nouveau par un nouvel arrêt du 24 mai 2017 de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation.

Il soutient enfin que la faculté de substitution ne peut se déduire de l'interprétation des conditions du contrat prévoyant la nécessaire souscription d'une nouvelle assurance au cas où les emprunteurs cesseraient d'être assurés, cette hypothèse ne s'appliquant que lors de la survenance d'une situation particulière : celle de la cessation des garanties en cas de défaut de paiement des cotisations au terme normal du prêt et au jour du départ en retraite.

 

La SA AXA FRANCE VIE demande à la Cour :

- de confirmer le jugement rendu le 17 mars 2016 par le Tribunal de grande instance de PARIS en ce qu'il a :

* rejeté la demande de Madame X. et Monsieur X. tendant à voir constater la résiliation de l'adhésion à l'assurance groupe AXA FRANCE VIE,

* rejeté la demande de Madame X. et Monsieur X. tendant à voir constater la substitution du contrat AXA FRANCE VIE par le contrat MACIF,

Et statuant à nouveau, mais par substitution de motifs :

Vu l'article L. 113-12 du Code des assurances,

Vu l'article L. 312-9 du Code de la consommation,

Vu le contrat d'assurance,

A titre principal :

- de dire et juger que la faculté de résiliation annuelle prévue à l'article L. 113-12 du Code des assurances est inapplicable aux assurances groupe emprunteur en l'état du droit applicable au litige,

- de dire et juger qu'aucune faculté légale de résiliation du contrat d'assurance emprunteur en cours de prêt n'est possible pour les adhérents,

- de dire et juger que le contrat d'assurance litigieux ne prévoit aucune faculté de résiliation conventionnelle en cours de prêt ni faculté de substitution par un autre contrat,

- de dire et juger que Madame X. et Monsieur X. ne sont pas fondés à demander la résiliation du contrat d'assurance groupe auquel ils ont adhéré auprès de la société AXA FRANCE VIE ni la substitution par un autre contrat,

En conséquence :

- de dire et juger que Madame X. et Monsieur X. ne sont pas fondés à se prévaloir du droit de résiliation annuelle de l'article L. 113-12 du code des assurances en l'état du droit applicable au litige,

- de débouter Madame X. et Monsieur X. de toutes leurs demandes à l'encontre de la société AXA FRANCE VIE,

et à titre subsidiaire :

- de débouter Madame X. et Monsieur X. en leur demande de restitution des cotisations versées depuis le 5 août 2011,

Plus subsidiairement :

- de dire et juger qu'en cas de condamnation, seuls des dommages et intérêts pourraient être alloués et qu'ils ne sauraient être supportés par la société AXA FRANCE VIE,

En tout état de cause :

- de débouter Madame X. et Monsieur X. de leur demande d'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- de condamner in solidum Madame X. et Monsieur X. au versement au profit de la société AXA FRANCE VIE de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Relevant l'existence de la double stipulation pour autrui qu'institue l'assurance groupe emprunteur, l'assureur souligne que seule une loi spéciale peut expressément autoriser une résiliation unilatérale alors que le code civil interdit de manière générale la révocation de la stipulation sans l'accord du bénéficiaire.

Il mentionne que la reconnaissance d'une faculté annuelle de résiliation ne se conçoit que pour les contrats à durée indéterminée, renouvelables par période d'un an par tacite reconduction, ce qui n'est pas le cas de l'assurance en litige d'une durée égale à celle de l'emprunt.

Il rappelle que si l'article L. 312-9 du code de la consommation n'a prévu aucune possibilité de modification du choix de l'assureur en cours de prêt et que la loi du 1er juillet 2010 a introduit une possibilité de proposition par l'emprunteur en début de contrat d'une substitution d'assureur que le prêteur ne pouvait refuser en présence d'un niveau de garantie équivalent, le 25 mars 2016, le législateur a introduit une nouvelle possibilité de résiliation et de substitution dans un délai de 12 mois à compter de la signature du contrat de prêt.

Mais cette résiliation appartenant exclusivement à l'assuré ne s'applique qu'aux contrats souscrits à compter du 26 juillet 2014.

Il écarte, en conséquence, l'existence de toute faculté conventionnelle de résiliation du contrat en cours de prêt

Il conteste le caractère abusif des clauses critiquées, soutient que le contrat indique clairement sa durée.

Il fait valoir que le contrat ne contient pas davantage de faculté de substitution.

Il s'oppose in fine à toute demande de restitution par AXA des primes alors que l'assureur auquel il n'a pas été demandé la résiliation du contrat, continue à offrir ses garanties.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il résulte des conditions particulières des contrats de prêt, page 11 que : « L'emprunteur est informé que la souscription à l'assurance groupe est exigée par le prêteur ».

Les conditions particulières visent les références du contrat groupe d'assurance-décès dont la souscription est obligatoire, conclu par la banque auprès de la compagnie AXA FRANCE VIE garantissant le décès, la perte totale irréversible d'autonomie, l'incapacité de travail, l'invalidité permanente et l'invalidité totale définitive.

Ce contrat d'assurance de groupe proposé aux emprunteurs par la banque est exigé lors de la souscription de l'emprunt et l'acceptation de l'adhésion des emprunteurs par l'assureur conditionnait l'offre des prêts, laquelle, à défaut d'admission dans l'assurance devenait caduque.

Il apparaît qu'en l'espèce, les époux X. ont sollicité les 7 et 8 octobre 2009, l'adhésion au contrat d'assurance groupe souscrit par le Crédit Foncier de France auprès d'AXA FRANCE VIE lequel valait pour toute la durée des emprunts immobiliers.

Leur adhésion a été admise le 13 janvier 2010.

Cette adhésion à l'assurance-groupe était effective pour toute la durée du prêt, les cotisations étant payables par fractions aux mêmes dates que les échéances de l'emprunt, sauf à prendre fin au 65ème anniversaire, au départ en retraite ou au 80ème anniversaire de naissance de l'assuré selon les garanties, le cas échéant.

Si l'article L. 113-2 du code des assurances pose le principe du droit de résilier annuellement un contrat d'assurance tant au profit de l'assureur que de l'assuré et si l'article L. 113-12 du code des assurances, dans ses dispositions applicables jusqu'au 1er avril 2018, organise le droit de l'assuré et de l'assureur de résilier le contrat à l'expiration d'un délai d'un an, l'article L. 312-9 du code de la consommation traitant de ce contrat d'assurance ne prévoyait pas, dans sa rédaction applicable à l'époque de souscription, l'hypothèse d'une possible résiliation unilatérale par l'emprunteur-adhérent, en cours d'exécution du contrat.

Cette impossibilité de résilier le contrat était un effet nécessaire du droit dont disposait alors le prêteur d'exiger l'adhésion au contrat d'assurance qu'il proposait, cette dérogation au principe posé par l'article L. 113-2 du code des assurances ayant pour contrepartie l'inopposabilité à l'adhérent de toutes modifications de la définition des risques et de la tarification susceptibles d'être apportées au contrat par l'assureur.

Contrairement à ce qui est soutenu par les époux X., le contrat de prêt ne vise pas expressément une possibilité de résiliation conventionnelle du contrat en cours de prêt.

Si l'article 8.1 du contrat de prêt évoque l'hypothèse de la souscription d'une nouvelle assurance, il vise simplement le cas où les emprunteurs cesseraient d'être assurés.

Cette hypothèse de cessation de la couverture des emprunteurs par l'assurance souscrite ne saurait désigner l'hypothèse d'une possible résiliation unilatérale et délibérée du contrat d'assurance à la discrétion de l'adhérent pour en souscrire une autre mais la situation dans laquelle l'emprunteur se trouve privé de fait du bénéfice de l'assurance souscrite par cessation des garanties.

Dès lors que le contrat d'assurance proposé par AXA FRANCE VIE prévoit à l'article 1.14 de la notice des motifs de cessation des garanties notamment :

- en cas de cessation du paiement des cotisations,

- au jour du départ en retraite ou au plus tard au 65ème anniversaire de l'assuré en ce qui concerne les garanties 'perte totale et irréversible d'autonomie, incapacité de travail, invalidité totale et définitive et invalidité permanente

- au 80ème anniversaire pour la garantie « décès »,

c'est à juste titre que le tribunal a jugé que l'article 8.1 du contrat avait pour vocation de s'appliquer dans ces hypothèses et ce sans qu'il ne soit besoin d'interpréter l'article 8-1 des conditions particulières du contrat de prêt lequel ne saurait régir l'hypothèse de la demande de résiliation/substitution d'assureur souhaitée par l'emprunteur dont la cessation des garanties de l'assurance initiale n'est que la conséquence et non la cause.

Il ne saurait enfin être reproché au Crédit Foncier de France un manquement au principe de la bonne foi contractuelle et un comportement abusif pour avoir refusé le changement d'assureur souhaité par les emprunteurs, dès lors que l'organisme financier n'a fait qu'appliquer que ce qui avait été convenu lors de la souscription du contrat en conformité avec le dispositif législatif applicable à l'époque lequel prévoyait alors la possibilité pour le prêteur d'exiger de l'emprunteur l'adhésion au contrat d'assurance collective qu'il avait souscrit, ce qu'avaient admis les époux X. et ce qui constituait en conséquence la loi des parties.

Ces clauses contractuelles ne sont pas abusives dès lors qu'elles sont clairement énoncées, que le coût du contrat d'assurance imposé est précisé et inclus au TEG et que le candidat à l'emprunt est libre de comparer l'offre dans son ensemble avec d'autres offres de prêt proposant des contrats d'assurance plus attractifs ou laissant à l'emprunteur le libre choix de son assureur.

Les époux X. ne sauraient se prévaloir enfin des modifications ultérieures de la loi laquelle permet désormais le libre choix de l'assureur et le changement d'assurance en cours de contrat de prêt.

La loi a prévu les modalités de son application dans le temps, en aménageant ses effets y compris pour les contrats anciens mais sans toutefois aucune portée rétroactive susceptible de permettre de valider a posteriori des demandes de résiliation antérieures à la date d'effet de la loi nouvelle refusées par l'emprunteur.

Il résulte de ces éléments que les époux X. ne pouvaient résilier unilatéralement le 27 mai 2011 leur adhésion au contrat groupe AXA pour y substituer à compter de l'échéance du 5 août 2011 le contrat collectif d'assurance souscrit par la MACIF auprès de Macif-Mutualité auquel ils venaient d'adhérer ainsi qu'ils en ont avisé le Crédit Foncier de France par lettre recommandée.

C'est à juste titre que le Crédit Foncier de France a refusé par courrier du 22 juin 2011 de faire droit à cette demande de substitution d'assurance.

Le jugement du 1er avril 2016 doit être confirmé sauf en ce qu'il a condamné M. X. et Mme Y. épouse X. à verser d'une part, au Crédit Foncier de France et d'autre part, à la Compagnie AXA FRANCE VIE la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'apparaît pas opportun de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel et le Crédit Foncier de France et la SA AXA FRANCE VIE seront déboutés des demandes présentées à ce titre.

Ajoutant au jugement, les époux X. supporteront les entiers dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a condamné M. X. et Mme Y. épouse X. à verser d'une part, au Crédit Foncier de France et d'autre part, à la Compagnie AXA FRANCE VIE la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

et statuant à nouveau de ce chef,

DEBOUTE le Crédit Foncier de France et la SA AXA FRANCE VIE des demandes présentées à ce titre ;

Y ajoutant,

DEBOUTE le Crédit Foncier de France et la SA AXA FRANCE VIE des demandes formées en appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum M. X. et Mme Y. épouse X. aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER                    LE PRESIDENT

C. LEVEUF                          M. ROEHRICH