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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 18/00727
Décision : 19/544
Date : 16/05/2019
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/02/2018
Numéro de la décision : 544
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7952

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019 : RG n° 18/00727 ; arrêt n° 19/544

Publication : Jurica

 

Extrait : « Selon l'article 1907 du code civil, « L'intérêt est légal ou conventionnel. L'intérêt légal est fixé par la loi. L'intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas.

Le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. »

L'article L. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précise la méthode de calcul du taux effectif global de la façon suivante :

« Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.

Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.

Pour les contrats de crédit entrant dans le champ d'application du chapitre Ier du présent titre, le taux effectif global, qui est dénommé « Taux annuel effectif global », ne comprend pas les frais d'acte notarié.

En outre, pour les prêts qui font l'objet d'un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l'amortissement de la créance.

Un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'application du présent article. »

L'article L. 313-2 du même code dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 prévoit que : « Le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section (...) ».

L'article R. 313-1 II du même code dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016 précise que : « Pour les opérations de crédit destinées à financer les besoins d'une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public ainsi que pour celles mentionnées à l'article L. 312-2, le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.

Le taux de période est calculé actuariellement, à partir d'une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur. Il assure, selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, tous les versements dus par l'emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers, ces éléments étant, le cas échéant, estimés.

Lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois.

Lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu'annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l'année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d'au moins une décimale.

Si le crédit prend la forme d'une ouverture de droits de tirage destinée à financer les besoins d'une activité professionnelle, le taux effectif global est calculé sur la totalité des droits mis à la disposition du client.»

Il ressort de l'application combinée des articles 1907 alinéa 2 du code civil, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile et avec une précision d'au moins une décimale.

Conformément à l'article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce, il appartient aux emprunteurs de démontrer que la banque a bien calculé les intérêts conventionnels sur la base d'une année lombarde de 360 jours et non sur une année civile et que l'erreur en résultant est supérieure à la décimale.

En l'espèce, il ressort de l'examen des conditions particulières qu'il y est expressément mentionné que :

« 2 - MODALITÉS ET LIEUX DE PAIEMENT - AJUSTEMENT DE LA PREMIERE MENSUALITÉ (…)

Les intérêts courus entre 2 échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exacts de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 360 jours l'an.

Ajustement de la première échéance : la première échéance du prêt est toujours calculée en jours exacts. De ce fait, son montant peut être différent des autres mensualités en raison des intérêts intercalaires et des cotisations d'assurance (le cas échéant) qui peuvent être perçus et donc rajoutés et ce, dans le cas où le nombre de jours entre le début de l'amortissement et la première échéance n'est pas égal à 30 jours. »

La seule présence de cette clause, quand même elle fixe les rapports pour retenir le calcul des intérêts conventionnels et stipule ainsi clairement que les intérêts conventionnels sont calculés sur la base, non pas de l'année civile, mais d'une année de trois-cent-soixante jours, ne saurait suffire à elle seule, s'agissant d'une demande en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels, à rapporter la preuve de ce que l'intérêt contractuel a été, ainsi que l'affirmait Mme X. épouse Y. en première instance, effectivement calculé par référence à l'année bancaire de trois cent soixante jours.

En appel, Mme X. épouse Y. démontre par la vérification de la première échéance d'intérêts l'utilisation effective par la banque d'une base de calcul sur 360 jours.

Ainsi les fonds ont été débloqués le 29 novembre 2013 et la première échéance d'intérêts a été calculée au 15 janvier 2014 pour 821,46 euros d'intérêts selon le nombre de jours exacts :

- 193.600 x 3,25 % x 47 jours /360 jours = 821,46 euros

- alors que 193.600 x 3,25 % x 47 jours/365 jours = 810,20 euros.

Dans ses conclusions, le Crédit Lyonnais reconnaît cette erreur de 11,26 euros.

Il est inutile comme le font les parties dans leurs conclusions, l'appelante pour les mensualités du 15 février 214 ou du 15 mars 2014 et l'intimé sur la mensualité du 15 octobre 2016, de vérifier les montants d'intérêts perçus sur les mensualités prélevées pour un mois entier car le rapport est identique, aux termes de l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation, entre d'une part 30/360 jours et d'autre part un mois normalisé de 30,41666 jours/365 jours.

L'erreur de calcul, contrairement à ce que soutient le Crédit Lyonnais, se répercute sur l'ensemble des mensualités suivantes. En effet, sur la mensualité du 15 février 2014, le Crédit Lyonnais explique que les intérêts sont de :

1.102,73 euros + 243,06 euros d'intérêts réservés = 1.345,79 euros

à savoir

- 1ère échéance d'intérêts du 15 janvier 2014 après déblocage des fonds le 29 novembre 2013 821,46 euros

- + échéance d'intérêts du 15 février 2014 524,33 euros

total : 1.345,79 euros dont 1.102,73 euros ont été payés le 15 février 2014 et 243,06 euros ont été réservés.

Le montant de l'échéance mensuelle d'intérêts de 524,33 euros a été calculé selon le mode précité (193 600 euros x 3,25 % x mois normalisé/365 jours).

Mais en l'absence d'erreur de calcul telle que déterminée supra à hauteur de 11,26 euros, le calcul aurait dû se présenter sous la forme suivante :

à savoir

- 1ère échéance d'intérêts du 15 janvier 2014 après déblocage des fonds le 29 novembre 2013 810,20 euros

- + échéance d'intérêts du 15 février 2014 : 524,33 euros

total : 1.334,53 euros dont 1.102,73 euros ont été payés le 15 février 2014 et 231,80 euros auraient été réservés

L'erreur se répercute sur l'échéance suivante pour la ventilation entre intérêts et amortissement du capital.

Mme X. épouse Y. démontrant un calcul sur la base d'une année lombarde, il lui est inutile d'invoquer la recommandation n° 2005-02 de la commission des clauses abusives qui ne concerne que les comptes à vue et le découvert associé.

L'appelante ne présente à la cour aucun calcul mathématique établissant une différence de taux conventionnel susceptible d'excéder le seuil de précision de la décimale tandis que l'intimé expose qu'au vu du montant de l'échéance d'intérêts considérée (821,46 euros) soit un rapport de 0,0013707, le taux de l'intérêt appliqué reste exact à la décimale selon le calcul suivant non contesté :

[( i x 365 ) / (nb de jours x K)] x 100 = tx d'intérêts

soit

[(821,46 x 365) / (47 j x 193 600)] x 100 = 3,2951 % au lieu de 3,25 % sur cette seule et unique échéance de 1 mois -la différence de 0,0451 % s'établissant pour l'année considérée (la seule durant tout le prêt) à une différence de taux de 0,00375 %.

Dès lors, succombant dans la charge de la preuve lui incombant, Mme X. épouse Y. est déboutée de sa demande de nullité de la stipulation d'intérêts et de substitution du taux légal au taux conventionnel.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le jugement du tribunal de grande instance de Lille sera confirmé dans toutes ses dispositions. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 16 MAI 2019