CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 11 janvier 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 9092
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 11 janvier 2019 : RG n° 17/00234
Publication : Jurica
Extrait (rappel des faits) : « La société Bizcom Europe (ci-après Bizcom ) immatriculée le 20 août 2008 au Registre du Commerce et des Sociétés, est une entreprise française évoluant dans le secteur informatique, micro-informatique et télécommunications ayant pour activité : la vente et la distribution de produits catalogue de grandes marques de l'informatique et de sociétés fabricantes de produits informatiques et de téléphonie sur la zone Europe/Afrique et Moyen Orient et la conception, fabrication et commercialisation de produits et projets innovants et le développement de solutions technologiques innovantes.
La société Hewlett-Packard France (ci-après HP) immatriculée en 1998 au Registre du Commerce et des Sociétés vend des ordinateurs fixes et portables qui ont été re-conditionnés, c'est-à-dire remis à neuf. Il s'agit principalement de produits qui présentaient une panne au déballage ou de produits retournés par le client pour non-conformité à la commande ou encore des produits pour lesquels HP rencontre un excès de stock. Cette branche d'activité est dénommée « HP Renew » ; un programme spécifique intitulé « OTC » (Order to Cash) a été mis en place pour la revente de ces produits. HP vend ces lots de produits re-conditionnés à des revendeurs ou des intermédiaires situés dans la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA).
Anticipant la défaillance de son prestataire la société Adiva, HP a lancé le 19 mars 2009 un appel d'offres pour introduire un nouveau partenaire dans l'activité HP Renew, auquel Bizcom a répondu en soumettant une proposition à HP. Le 9 juillet 2009 la société Bizcom a été sélectionnée comme deuxième partenaire de facturation et de logistique, avec diverses conditions. HP et Bizcom ont conclu le 14 décembre 2009 un contrat cadre dénommé « contrat de commissionnaire » définissant les conditions générales, comprenant des annexes dont un modèle de sous-contrat, le « sous-contrat » en annexe A définissant les conditions particulières, prenant effet rétroactivement au 1er novembre 2009, pour une durée de 24 mois avec une tacite reconduction pour 12 mois supplémentaires.
Aux termes du contrat, la société Bizcom s'est ainsi vue confier : - la gestion des commandes - la facturation en son nom propre pour le compte de la société HP - la logistique incluant les procédures d'exploitation et de TVA - les encaissements - les déclarations douanières et intra-communautaires - la gestion des lignes de crédit accordées aux clients - les relances - la gestion des réclamations et litiges - la gestion du risque (clients, transport, opérationnel, pénalités, etc.)/
À partir de mars 2011, les parties ont entrepris de négocier un nouveau contrat. À défaut d'accord entre les parties, le contrat de 2009 s'est renouvelé une première fois tacitement pour un an du 1er novembre 2011 jusqu'au 31 octobre 2012, puis une seconde fois jusqu'au 31 octobre 2013. Par lettre du 18 février 2013, la société HP a informé Bizcom du non- renouvellement du contrat-cadre à l'échéance du 31 octobre 2013.
Par assignation en date du 27 décembre 2013, la société Bizcom a assigné la société HP devant le tribunal de commerce de Paris aux fins d'obtenir la réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis des pratiques restrictives de concurrence, déloyales et abusives de la société HP. »
Extrait (motifs) : 1/ « Selon Bizcom, la demande d'indemnisation trouve son fondement dans le préjudice né de la volonté non-équivoque de la défenderesse d'évincer brutalement la société Bizcom Europe. Elle n'est que le complément de la demande d'indemnisation au titre de la rupture brutale d'ores et déjà formulée et discutée devant le tribunal de commerce. Bizcom a visé de manière générale l'article L. 442-6 du code de commerce dans ses conclusions de première instance.
HP réplique que la caractérisation du lien de rattachement avec ses anciennes demandes est particulièrement évasive, que la menace de rupture évoqué par Bizcom dans ses dernières écritures repose sur des faits que Bizcom n'avait pas invoqués en première instance et a pour but d'indemniser un préjudice bien distinct de celui réparé par l'indemnisation de la rupture brutale, que ces deux demandes ne tendent pas aux mêmes fins, et la seconde n'est nullement l'accessoire, la conséquence ou le complément de la première.
La demande d'indemnisation formée en cause d'appel est fondée sur l'article L. 442-6-I-4° du Code de commerce lequel dispose « (engage la responsabilité de leur auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait :) d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture totale ou partielle des relations commerciales établies, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de payement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ». S'agissant de délits civils qui peuvent être sanctionnés par des amendes civiles élevées, le principe d'interprétation stricte des qualifications des faits s'impose. Les faits en cause doivent être distincts ou bien les mêmes faits doivent être la cause de préjudices eux-mêmes distincts. Or l'appelante échoue à démontrer que cette demande, qui doit articuler des faits précis imputables à HP, que ne caractérise pas une simple allégation d'une volonté non-équivoque de HP d'évincer brutalement son co-contractant, a préalablement été soumise au premier juge d'une part, ou qu'elle en est l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire aux termes de l'article 566 du Code de procédure civile, de sorte que cette demande est nouvelle et doit être déclarée irrecevable. »
2/ « 1. Sur la prétention à l'existence d'un déséquilibre significatif : L'article L. 442-6-I, 1° et 2° du code de commerce dispose : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».
L'appelante soutient que le déséquilibre significatif fondé sur l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce est caractérisé et doit donner lieu à la nullité des clauses litigieuses et la réparation des préjudices subis par la société BIZCOM EUROPE. Il convient dans un premier temps de rechercher dans quelle mesure les parties au litige sont susceptibles d'être qualifiées de partenaires commerciaux.
Sur la notion de partenariat : Les parties s'opposent sur l'applicabilité à leurs relations de l'article L. 442-6, I, 1° du code de commerce.
Ainsi que rappelé ci-avant, les faits reprochés constituant des délits civils qui peuvent être sanctionnés par des amendes civiles élevées, le principe d'interprétation stricte doit prévaloir.
Un partenaire se définit comme le professionnel avec lequel une entreprise commerciale entretient des relations commerciales pour conduire une activité quelconque, ce qui suppose une volonté commune et réciproque d'effectuer de concert des actes ensemble dans des activités de production, de distribution ou de services, par opposition à la notion plus large d'agent économique ou plus étroite de cocontractant.
Il ressort de ce qui précède que deux entités deviennent partenaires, soit par la signature d'un contrat de partenariat, soit parce que leur comportement traduit la volonté de développer des relations stables et établies dans le respect des règles relatives à la concurrence pour coopérer autour d'un projet commun. Le contrat de partenariat formalise, entre autre, la volonté des parties de construire une relation suivie. Cette notion implique un examen concret de la relation entre les parties et de l'objet du contrat.
En l'espèce les parties ont conclu le 9 décembre 2009 un contrat-cadre d'agent commissionnaire et un contrat en annexe définissant les droits et parties, d'une durée de vingt-quatre mois renouvelables douze mois par tacite reconduction une fois, à effet rétroactif au 1er novembre 2009.
La durée de ce contrat est limitée à 24 mois, reconductible une seule fois pour 12 mois.
Les dispositions contractuelles décrivent le mécanisme mis en place par le contrat-cadre et les sous-contrats depuis le processus d'enchères HP, aux termes desquels Bizcom devait assurer la gestion des commandes, la facturation en son nom propre pour le compte d'HP, les encaissements, la relance, la logistique et la gestion des réclamations, moyennant le payement d'une commission par HP à BE. Cette activité est dénommée ‘Order to Cash’soit OTC.
HP met à disposition de l'agent commissionnaire, les ventes de matériels par voie d'enchères qui lui parviennent de ses clients, et Bizcom encaisse le prix pour HP, et fait parvenir au client final le matériel acheté par celui-ci auprès de HP. Bizcom perçoit une commission en contrepartie.
Ces dispositions établissent la volonté des parties de construire une relation suivie caractérisée par une réciprocité ou accord autour d'un projet commun, la vente de matériel informatique re-conditionné opérant dans un périmètre géographique déterminé dénommé EMEA ( Europe, Moyen-Orient et Afrique), constituant un marché pour les produits en cause, en tant que tel susceptible de déboucher sur un courant d'affaires stable et continu entre les parties et générant un certain chiffre d'affaires.
La circonstance d'une prise d'effet du partenariat à la date de prise d'effet du contrat, n'est pas susceptible d'exclure en elle-même l'application des dispositions fondant la présente action en responsabilité dès lors que les parties agissaient dans le cadre de la définition sus-dite du partenariat, aucune disposition textuelle n'excluant l'application de l'article L. 442-6-1-2° du Code de commerce au partenariat conclu pour la première fois.
Il convient de relever que Bizcom sollicite l'indemnisation des pratiques qu'elle critique pour avoir été opérées en cours d'exécution du contrat, de sorte que les dispositions visées doivent recevoir application.
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Sur le déséquilibre significatif : Les deux éléments constitutifs de la pratique restrictive de concurrence de déséquilibre significatif sont en premier lieu la soumission ou la tentative de soumission et en second lieu l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif.
L'insertion de clauses dans une convention type ou un contrat d'adhésion qui ne donne lieu à aucune négociation effective des clauses litigieuses peut constituer ce premier élément. L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties.
Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie du contrat et in concreto. La preuve d'un rééquilibrage du contrat par une autre clause incombe à l'entreprise mise en cause, sans que l'on puisse considérer qu'il y a alors inversion de la charge de la preuve. Enfin, les effets des pratiques n'ont pas à être pris en compte ou recherchés.
Sur la soumission ou la tentative de soumission à un déséquilibre significatif :
L'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration soit d'une position de force soit de l'absence de négociation effective du contrat, l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation d'obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
Bizcom soutient qu'est caractérisée la condition de « soumission ou tentative de soumission » au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dès lors que HP a :
- imposé à Bizcom un ensemble de clauses non- négociables significativement déséquilibrées, stipulées dans un contrat d'adhésion unilatéralement déterminé à l'avance, signé le 14 décembre 2009 ;
- et fait pression sur Bizcom pour obtenir l'acceptation du contrat-cadre en exigeant des investissements humains et financiers préalablement à la conclusion du contrat de sorte que Bizcom n'avait d'autre choix que de se soumettre à des clauses significativement déséquilibrées.
Il n'est pas valablement contesté que les parties disposent de forces économiques dissemblables, HP se définissant comme « la plus grande société informatique au monde, avec un chiffre d'affaires total de 126 milliards de dollars pour l'année fiscale 2010. ».
Cependant l'activité OTC en cause ne représente pas le montant de chiffre d'affaires le plus important dans l'activité de HP et le seul montant d'un chiffre d'affaires réalisé n'est pas en lui-même constitutif d'une position de force susceptible d'entraîner une soumission d'un partenaire commercial. Dès lors la seule évocation de la force économique de HP est insuffisante à rapporter la preuve d'un rapport de force déséquilibré entraînant une soumission de Bizcom par HP alors que les parties ne sont pas en relations contractuelles.
Bizcom elle-même est certes une petite structure exerçant son activité sous la forme d'une société à responsabilité limitée, mais elle est filiale d'une société Bizcom International Inc. de droit californien dont elle bénéficie des conseils et des garanties.
Les pièces produites par Bizcom au soutien du moyen de la soumission ne caractérisent pas comment la puissance de HP a pesé dans la phase pré-contractuelle de telle sorte que les clauses incriminées ou les pratiques mises en oeuvre par HP prévoyant un déséquilibre significatif lui ont été imposées.
En effet, Bizcom a participé à une procédure d'appel d'offres qui s'est déroulée entre le 19 mars et le 9 juillet 2009, à l'issue de laquelle la société a été informée qu'elle était sélectionnée comme le deuxième partenaire de facturation et de logistique pour le projet HP PSG Remarketing.
Bizcom n'était pas liée antérieurement à la conclusion du contrat litigieux et se présente comme une société prestataire indépendante économiquement de HP.
Pour postuler avec succès à l'appel d'offre versé aux débats, Bizcom a pris en compte les pré-requis de l'offre concernant notamment la description de l'activité, les services à fournir, le respect de certaines contraintes comme l'envoi de rapports d'activité, le maintien d'une qualité pour les services fournis, ainsi l'ensemble du dispositif proposé par HP dans le document d'appel d'offres, Bizcom ayant la faculté de ne pas postuler.
Au surplus, il résulte des productions que dans le cadre de l'instruction du dossier d'appel d'offres, des échanges ont eu lieu entre les parties ainsi que le démontrent les courriels des 22 avril et le 6 mai 2009.
Dès lors que Bizcom a participé, librement, à la procédure d'appel d'offres lancée par HP à laquelle elle n'était aucunement liée, elle échoue à démontrer une dépendance économique à l'égard de HP, partant la soumission à une obligation créant un déséquilibre significatif.
Elle ne peut pareillement soutenir l'existence d'une dépendance économique antérieure à la souscription du contrat en faisant valoir un chiffre d'affaires réalisé postérieurement à la conclusion du contrat litigieux, au cours des années 2010 à 2012, lui conférant une exclusivité de fait à compter de la fin du préavis du précédent partenaire de la société HP, expliquant qu'elle n'a eu d'autres choix que celui de se soumettre aux pratiques abusives de HP et d'apposer sa signature sur un contrat contenant des clauses significativement déséquilibrées, l'allégation d'une telle exclusivité se heurtant à la lettre expresse du contrat disposant clairement une absence d'exclusivité au bénéficie de Bizcom.
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Sur le moyen tiré de l'imposition de conditions contractuelles restrictives entre la confirmation de l'attribution du marché sous réserve et la conclusion du contrat (9 juillet 2009 à 14 décembre 2009) :
S'agissant du moyen tenant à des investissement réalisés par Bizcom dans la phase pré-contractuelle, dont Bizcom soutient qu'ils sont d'un montant élevé, le moyen du rapport de force économique est susceptible de recevoir application dès lors qu'il peut effectivement conduire Bizcom à accepter des conditions contractuelles significativement déséquilibrées par la crainte de voir perdre le fruit d'investissements onéreux.
Toutefois, c'est à bon droit que HP soutient que la réalisation d'investissements, en personnel ou technologie faisant partie des pré-requis de l'appel d'offres, l'exécution de pré-requis ne peut constituer une soumission, l'engagement de Bizcom de les réaliser étant une condition de l'attribution du marché acceptée librement par Bizcom qui a participé à la procédure, et Bizcom n'établissant pas ce qui, dans le montant de ces investissements de l'ordre de 100.000 euros entre les mois de juillet et décembre 2009 selon Bizcom, relevait du déséquilibre significatif, au regard du montant du chiffre d'affaires que Bizcom évalue elle-même à 145 millions d'euros sur six exercices fiscaux, ces montants demeurant proportionnés au volume financier traité.
En effet, l'appel d'offres comprend expressément au titre d'une demande d'information commerciale, la communication d'éléments sur le calendrier de transition d'affaires et d'implémentation, ainsi que la description des engagements au niveau des ressources...un plan plus détaillé pouvant être demandé par HP plus tard, les ressources que le candidat est prêt à engager.
Sur les conditions dont Bizcom soutient qu'il s'agit de conditions supplémentaires imposées par HP avant la signature du contrat, Bizcom ne fait pas la preuve que la demande de fourniture de garantie, de trésorerie, d'assurance responsabilité civile, représente des pratiques instaurant un déséquilibre significatif au préjudice de Bizcom dès lors que Bizcom est amenée à manipuler ou laisser manipuler, pour les envoyer à leur destinataire des marchandises ne lui appartenant pas, et des fonds pour HP d'environ 24 millions d'euros par an, alors que Bizcom n'a jamais élevé la moindre protestation, expliquant dans des courriels du 4 octobre 2009, du 28 septembre 2009 la nécessité d'obtenir la liste des clients pour souscrire à une assurance de transport, de crédit et recouvrement, pour choisir la meilleure afin de soutenir les besoins de BE, proposant de recourir à la Coface, la teneur de ce courrier faisant la preuve de véritables négociations entre les parties, celles-ci continuant à échanger sur les éléments à procurer à Bizcom pour obtenir les engagements demandés.
Au surplus la fourniture des garanties sus-énoncées représente, ainsi que le tribunal l'a justement retenu, des demandes légitimes, des clauses insérées classiquement dans les contrats.
- tel est le cas de la demande de justification d'une assurance responsabilité civile et professionnelle.
- s'agissant de la production « Guarantie Corporate » présentant le caractère d'une garantie de payement et de performance, consentie pour un montant de 3 millions USD le 7 décembre 2009, portée le 8 octobre 2010 à 6 millions USD, par la société mère Bizcom Electronics, qui reconnaît expressément dans l'acte, qu'il sera au bénéfice direct, à l'avantage et aux meilleurs intérêts de Bizcom, qu'un cautionnement soit offert et que l'accord soit conclu, l'intervention et la position affirmée de cette société constitue un élément en faveur de l'absence de soumission ou de tentative de soumission de la société Bizcom.
Selon un compte-rendu d'échanges entre les parties, objet d'un rapport par courriel du 11 juin 2010, la garantie procurée permet une activité pour le 1er et le 2ième trimestre de l'année fiscale 2010, selon un niveau de ventes estimé, de sorte qu'il est au surplus démontré l'absence de déséquilibre significatif dans la constitution de la garantie en cause.
Il est suffisamment démontré qu'une telle garantie est au demeurant constituée pour couvrir de réels montants, à savoir les sommes restant dues à HP à l'expiration du contrat-cadre, les parties devant établir entre elles à ce moment là un solde de tout compte, HP donnant son accord le 8 janvier 2014 à la demande de Bizcom formée le 3 janvier 2014, pour la rédaction d'un avenant portant réduction du montant de la garantie à 500.000 USD, dans l'attente du payement par Bizcom des montants de 459.469 USD restant dus à HP à l'issue des relations contractuelles, garantie réduite le 13 février 2013 à la somme de 350.000 USD.
Les échanges entre les parties témoignent de véritables négociations, exclusives d'une soumission ou tentative de soumission tout au long des relations entretenues.
- tel est également le cas de la souscription d'assurances dont le responsable de Bizcom mentionne dans un courriel du 28 septembre 2009 à HP qu'il est’important d'obtenir à ce stade la liste des clients et la liste des pays, devant souscrire une assurance de transport, une assurance de crédit et de recouvrement, et pour pouvoir choisir la meilleure pour soutenir nos besoins, j'ai besoin d'avoir cette visibilité sur les 6 premiers mois.', Bizcom ne soutenant à aucun moment dans ses courriels le caractère excessif et imposé de la souscription de ces assurances.
L'appelante ne démontre pas en effet que le recours à la souscription d'assurances excède le fonctionnement normal pour une entreprise dont l'activité exige de faire pratiquer des transports, de consentir des lignes de crédit et de manipuler des fonds d'un montant de plusieurs millions mensuels.
Il est établi par HP que celle-ci n'a pas exigé de Bizcom la constitution d'un minimum garanti de trésorerie de 4 millions d'USD pour palier toute éventuelle défaillance d'Avida.
En effet, il résulte d'un courriel du 11 juin 2010 que « HP apprécie les efforts de Bizcom de qui vont au-delà des demandes de HP, de vouloir garder un montant de 4M USD disponible dans le cas où ils auraient besoin de doubler les volumes d'achats rapidement. Etant donné la stabilité de l'activité EMR, il n'y a pas besoin pour Bizcom de continuer à garder ce montant » de sorte que le moyen est écarté.
S'agissant de l'allégation de l'obligation de mise en place d'un contingent de TVA de 54 millions d'euros à raison de la signature du contrat par HP France, celle-ci n'est pas établie par la pièce 11 visée laquelle ne mentionne aucun montant, HP exposant dans le courriel du 1er décembre 2009 que par suite du changement de signataire du contrat, à savoir HP France et non HP International, HP celle-ci devra envoyer à Bizcom une note de crédit pour les commissions.
L'examen des courriels échangés entre les parties jusqu'à la signature du contrat n'établit pas que le report du commencement de l'activité a été imposé unilatéralement par HP mais au contraire qu'il résulte de la mise en place des obligations entre les parties directement issues de l'appel d'offre et des échanges ultérieurs, de sorte que cet événement ne constitue pas une soumission ou tentative de soumission de la part de HP.
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Sur le moyen tiré de la souscription d'un contrat d'adhésion le 14 décembre 2009 :
Il appartient à Bizcom qui soutient que le contrat litigieux constitue un contrat d'adhésion d'en rapporter la preuve, à savoir qu'aucune des clauses du contrat n'a été soumise à la négociation des parties.
En l'espèce, la simple évocation d'un contrat-cadre entre les parties, tel le contrat qui avait lié son précédent prestataire à HP, modifié en fonction de caractéristiques de Bizcom, n'est pas suffisante à établir que le contrat litigieux est un contrat d'adhésion.
Cette allégation est d'autant moins probante qu'il résulte de l'appel d'offre auquel a répondu Bizcom, que le « fournisseur candidat est invité à fournir à HP tous contrats type qu'il pourrait proposer pour ce type d'activité ou équivalent (page 15/27 de l'appel d'offre), la réciprocité offerte par HP en matière de contrat-type, étant une preuve de l'équilibre contractuel.
HP apporte la preuve que les négociations se sont poursuivies, postérieurement au projet de contrat adressé le 24 août 2009, aux termes d'un courriel adressé à Bizcom au mois d'octobre 2009, selon lequel « Madame N. demandait expressément à Bizcom : « -j'ai besoin de ton projet des « structures de coûts » - en parallèle, je crée l'annexe relative aux services (liste, metrics) et te la soumets en début de semaine prochaine ».
L'existence de négociations résulte également du refus de Bizcom d'accepter une clause de transfert de propriété intellectuelle des droits préexistant de propriété intellectuelle du fournisseur, la clause retenue (clause 12.5) stipulant que le fournisseur accorde automatiquement une licence non-exclusive à HP.
Dès lors qu'il a été donné suite aux réserves exposées par Bizcom il est établi que la clause a fait l'objet de négociations.
L'intimée établit au surplus l'existence de telles négociations depuis que Bizcom a manifesté son intention de participer à l'appel d'offre, sur les modalités d'exécution du contrat, ainsi les modalités de payement des parties, HP proposant aux termes d'un courriel du 22 avril 2009 un payement sous 10 jours pour chacune des parties, que les coûts de transport et d'assurance soient payés par HP, Bizcom apportant une réponse le 6 mai 2009 aux termes de laquelle elle fait diverses propositions.
Il est encore justifié d'échanges entre les parties, d'envois de documents dans le cadre de l'établissement du contrat, notamment par différents courriels échangés le 28 septembre 2009, et le 5 octobre suivant, dont l'objet est l'obtention par Bizcom d'éléments d'information pour la souscription d'assurance.
Les parties ont continué à échanger sur les modalités et délais de payement, ainsi qu'il résulte des courriels échangés le 30 octobre 2009.
L'appelante ne peut dès lors valablement soutenir que le contrat proposé à la signature même s'il s'agit d'un contrat -type, modifié à différentes reprises, présente les caractères d'un contrat d'adhésion dont aucune des clauses n'a été négociée.
La référence à un échange du 21 avril 2010 au soutien de l'absence de négociation du contrat signé le 14 décembre 2009 est écartée.
Le moyen tendant à voir qualifier le contrat en son ensemble de contrat d'adhésion, est rejeté.
Il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus, que Bizcom ne fait pas la preuve de la soumission ou la tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce avant la signature du contrat le 14 décembre 2009.
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Le moyen tiré de la modification unilatérale des conditions du contrat-cadre après la signature du contrat :
- sur la modification des conditions financières : l'appelante soutient que quelques mois après la signature du contrat-cadre, HP n'a pas hésité à modifier unilatéralement les conditions financières prévues dans le contrat, se fondant sur un courriel du 21 avril 2010, ainsi libellé:
« Bonjour S., Il ne s'agissait pas d'une négociation mais du fait que nous avions des termes de paiement pour le service spécifiés dans le contrat, que j'avais approuvé à l'origine par comparaison avec les coûts Adiva (factoring inclus).
Le fait que des coûts additionnels que je n'avais pas prévus soient ajoutés modifie l'analyse initiale.
Les « services fees » devaient couvrir l'intégralité de la prestation, si ce n'est plus le cas il faut en effet revoir l'ensemble des coûts ».
Or l'appelante ne précise pas quelles sont les modalités financières modifiées alors que l'article 5.3.1 du contrat énonce que « HP paiera à Bizcom une commission au pourcentage des revenus totaux nets des commandes facturées », les coûts additionnels évoqués étant susceptibles de modifier « le revenu net de la commande », la modification litigieuse s'avérant entrer dès lors dans les conditions du contrat de sorte que la prétention est rejetée.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société Bizcom de ses demandes au titre d'un déséquilibre significatif.
L'examen de la demande de nullité des clauses est dès lors sans objet. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 11 JANVIER 2019