CA NÎMES (4e ch. com.), 6 avril 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9552
CA NÎMES (4e ch. com.), 6 avril 2022 : RG n° 20/00986
Publication : Jurica
Extrait : « L'appelante se prévaut d'un contrat conclu avec la société Mas de la prairie par « Cloud eco » en faisant valoir qu'il s'agit d'une marque de service enregistrée, qui lui appartient et sous laquelle elle exerce.
A l'inverse, l'intimée soutient que la société « Cloud eco » n'existe pas et « se présente faussement comme étant une société commerciale à part entière ».
Dans les pièces produites, figure la mention sur le contrat produit en pièce 2 par l'intimée de ce que « Cloud eco est une marque de la société commerciale de télécommunication SCT au capital de 7.500.000 euros, RCS de Bobigny 412 391 104, siège social : [...], nommée ci-après le fournisseur ».
Pour autant, l'appelante ne produit aucune pièce de nature à établir l'existence effective de ce lien juridique entre la marque « Cloud eco » et elle-même.
Il convient donc, en application de l'article 125 du code civil, de rouvrir les débats afin que l'appelante justifie de sa qualité à agir au titre du contrat conclu le 11 mai 2017 sous cette dénomination.
A toutes fins utiles, les parties seront également invitées à produire un extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés de Bobigny, au nom de « Cloud eco » à la date du contrat - 11 mai 2017 - pour éclairer la Cour sur la nature de cette dénomination. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
QUATRIÈME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 6 AVRIL 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00986. N° Portalis DBVH-V-B7E-HV5R. TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES, 20 décembre 2019 : R.G. n° 2018J244.
APPELANTE :
La SOCIÉTÉ COMMERCIALE DE TÉLÉCOMMUNICATION (EXERCANT SOUS LA MARQUE CLOUD ECO)
SAS SCT, SAS au capital de 7.500.000 €, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le numéro XXX, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège. [...], [...], Représentée par Maître Valérie P.-T. de la SCP M. & P.-T., Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE, Représentée par Maître Christelle L., Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
SARL MAS DE LA PRAIRIE
immatriculée au RCS de sous le n° YYY, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, [...], [...], Représentée par Maître Pascale C. de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Madame Claire OUGIER, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Christine CODOL, Présidente de chambre, Madame Corinne STRUNK, Conseillère, Madame Claire OUGIER, Conseillère.
GREFFIER : Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : A l'audience publique du 7 mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 6 avril 2022. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Christine CODOL, Présidente de chambre, le 6 avril 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ :
Vu les appels interjetés les 17 mars et 19 mars 2020 par la SAS Société Commerciale de Télécommunications dite SCT à l'encontre du jugement prononcé le 20 décembre 2019 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l'instance R.G. n° 2018J244 ;
Vu l'ordonnance du 14 mai 2020 ordonnant la jonction de ces deux procédures ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 10 décembre 2020 par l'appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 16 septembre 2020 par la SARL Mas de la prairie, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu l'ordonnance du 18 octobre 2021 de clôture de la procédure à effet différé au 24 février 2022 ;
* * *
Le 11 mai 2017, la société intimée a souscrit auprès de « Cloud Eco » un contrat de location et de service en téléphonie fixe, mobile et accès web pour les besoins de son activité professionnelle.
Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 31 juillet 2017, elle a demandé l'annulation de ce contrat de location pour non réception du matériel et a évoqué la facturation de frais non contractuels.
La société « Cloud Eco » a pris acte de la résiliation anticipée des contrats de téléphonie fixe au 4 août 2017 et de téléphonie mobile au 3 août 2017, et lui a réclamé les sommes de 8.890,71 € HT et 826 € HT respectivement dues au titre de l'indemnité de résiliation anticipée de ces contrats.
Plusieurs relances et mises en demeure ont encore été adressées par la société « Cloud eco » à son co-contractant pour obtenir paiement de ces sommes.
Par exploit du 22 juin 2018, l'appelante disant exercer sous la marque « Cloud eco » a fait assigner l'intimée devant le tribunal de commerce de Nîmes en résiliation du contrat de téléphonie mobile à ses torts exclusifs, et en condamnation au paiement des sommes de :
- 885,21 € TTC, en principal, au titre des factures de téléphonie fixe impayées,
- 76.52 € en principal au titre des factures de téléphonie mobile impayées,
- 10.668,85 € au titre des frais de résiliation du contrat de téléphonie fixe,
- 991,20 € au titre des frais de résiliation du contrat de téléphonie mobile,
toutes sommes augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
outre 3.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
et avec exécution provisoire.
Par jugement du 20 décembre 2019 - dont appel, le tribunal de commerce de Nîmes a, au visa des articles 1130, 1131, 1137 et 1217 du code civil :
- prononcé la nullité des contrats,
- dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts,
- condamné la société SCT exerçant sous la marque Cloud eco à régler à la défenderesse la somme de 1.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires ;
- condamné la même aux dépens de l'instance.
* * *
La société SCT a relevé appel de ce jugement pour le voir infirmer en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts.
Elle défend la validité des contrats conclus le 11 mai 2017 soutenant être le co-contractant de l'intimée, exerçant alors sous sa marque de service régulièrement enregistrée « Cloud Eco », laquelle est mentionnée au préambule des conditions générales de location du contrat.
Elle conteste tout dol, la typographie utilisée pour la rédaction des stipulations contractuelles permettant une lisibilité et une intelligibilité desdites clauses, lesquelles sont donc opposables à son signataire.
S'agissant de l'article 9 relatif à la durée du contrat, l'intimée ne prouve pas que le contrat remis est différent de l'original versé aux débats par ses soins, le bulletin de souscription contenant, à son verso, les conditions contractuelles dans lesquelles figure cette clause et le tout n'étant pas détachable.
L'appelante soutient que sa co-contractante n'a pas respecté ses obligations, ses factures de téléphonie fixe comme mobile restant impayées pour des montants respectifs de 885,21 euros et 76,52 euros.
Du fait de la résiliation anticipée des contrats, elle entend réclamer également paiement des indemnités prévues au contrat, contestant tout déséquilibre significatif entre les parties et contestant la qualification de clause pénale ou de clause de dédit à ces stipulations.
Aux termes de ses dernières écritures, l'appelante demande donc à la Cour, au visa des articles 1103 et 1104 du Code Civil, de :
« réformer le jugement du Tribunal de commerce de Nîmes du 20 décembre 2019 en ce qu'il a :
- prononcé la nullité des contrats ;
- (l'a) condamnée à régler (à la société intimée) la somme de 1.500 € par application - des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires ;
- (et l'a) condamnée aux dépens de l'instance ;
* déclarer bien fondée (sa) demande ;
* constater la validité des contrats du 11 mai 2017 ;
* constater la résiliation totale du contrat de téléphonie mobile aux torts exclusifs de (l'intimée)
* débouter (l'intimée) de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
En conséquence,
- (la) condamner au paiement (') de la somme de 885,21 € TTC en principal au titre des factures de téléphonie fixe impayées, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation ;
- (la) condamner au paiement (...) de la somme de 76,52 € TTC en principal au titre des factures de téléphonie mobile impayées, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation ;
- (la) condamner au paiement (...) de la somme de 10.668,85 € TTC au titre des frais de résiliation du contrat de téléphonie fixe, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation ;
- (la) condamner au paiement (...) de la somme de 991,20 € TTC au titre des frais de résiliation du contrat de téléphonie mobile, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation ;
- (la) condamner au paiement de la somme de 3.000 € par application de l'article 700 code de procédure civile ;
* condamner aux entiers dépens ;
* ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ».
* * *
L'intimée soulève à titre principal la nullité absolue des contrats conclus le 11 mai 2017 en faisant valoir que « Cloud eco » n'est pas inscrite au registre du commerce et des sociétés et ne possède donc pas la personnalité juridique. Elle n'a donc pas la capacité pour contracter, condition essentielle exigée par l'article 1128 du code civil, alors même que sur les courriers émis à ce nom il est mentionné qu'elle est une SAS.
Subsidiairement, elle fonde la nullité des contrats sur l'existence d'un dol, des informations déterminantes comme la durée du contrat et la clause de résiliation anticipée étant dissimulées par le jeu de carbones qui ne dupliquent que certaines parties du contrat signé.
A ce titre, elle sollicite reconventionnellement l'octroi d'une indemnisation en réparation du préjudice causé par ces manœuvres dolosives à hauteur de 5.000 euros.
A titre infiniment subsidiaire, l'intimée invoque un déséquilibre significatif entre les parties. Les clauses de durée et de résiliation stipulées sur les contrats n'ayant pas été négociées, elles sont donc non écrites en application de l'article 1171 du Code civil.
Enfin, elle indique qu'en l'espèce les clauses fixant les pénalités de résiliation s'analysent en clauses pénales et sont manifestement excessives.
[*]
Aux termes de ses dernières écritures, l'intimée demande donc à la Cour, au visa de l'article 1128 du code civil modifié par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, des articles L. 123-1, R. 123-35, R. 123-237 et R. 123-238 du code de commerce, des articles 1130, 1131, 1137, 1171 et 1217 du Code civil, de :
« - faisant droit à (son) appel incident,
A titre principal,
- déclarer nul et de nul effet les contrats souscrits entre (les parties),
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement déféré,
- prononcer la nullité des contrats,
- condamner (l'appelante) à (lui) payer la somme de 5.000 € à tire de dommages intérêts,
A titre infiniment subsidiaire,
- déclarer les clauses de durée et résiliation stipulées sur les contrats non écrites,
En conséquence,
- débouter (l'appelante) de l'ensemble de ses demandes
A titre très infiniment subsidiaire,
- dire et juger que les clauses relatives aux pénalités de résiliation s'analysent en une clause pénale
- rejeter la clause pénale manifestement excessive,
- la fixer à la somme de 1€.
En toutes hypothèses,
- condamner (l'appelante) à payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,
- condamner (l'appelante) aux entiers dépens ».
* * *
Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
L'appelante se prévaut d'un contrat conclu avec la société Mas de la prairie par « Cloud eco » en faisant valoir qu'il s'agit d'une marque de service enregistrée, qui lui appartient et sous laquelle elle exerce.
A l'inverse, l'intimée soutient que la société « Cloud eco » n'existe pas et « se présente faussement comme étant une société commerciale à part entière ».
Dans les pièces produites, figure la mention sur le contrat produit en pièce 2 par l'intimée de ce que « Cloud eco est une marque de la société commerciale de télécommunication SCT au capital de 7.500.000 euros, RCS de Bobigny 412 391 104, siège social : [...], nommée ci-après le fournisseur ».
Pour autant, l'appelante ne produit aucune pièce de nature à établir l'existence effective de ce lien juridique entre la marque « Cloud eco » et elle-même.
Il convient donc, en application de l'article 125 du code civil, de rouvrir les débats afin que l'appelante justifie de sa qualité à agir au titre du contrat conclu le 11 mai 2017 sous cette dénomination.
A toutes fins utiles, les parties seront également invitées à produire un extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés de Bobigny, au nom de « Cloud eco » à la date du contrat - 11 mai 2017 - pour éclairer la Cour sur la nature de cette dénomination.
Les dépens de l'instance sont réservés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant par arrêt contradictoire et avant dire droit,
Ordonne la réouverture des débats sans révocation de l'ordonnance de clôture ;
Enjoint à l'appelante de produire toutes pièces utiles pour justifier de l'existence effective du lien juridique entre « Cloud eco » et elle-même, et de sa qualité à agir ;
Enjoint aux parties de produire un extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés de Bobigny au nom de « Cloud eco » à la date du 11 mai 2017,
Renvoie l'examen de l'affaire à l'audience du lundi 20 juin 2022 à 9 heures pour retenue ;
Réserve l'examen des demandes et des dépens ;
Arrêt signé par Madame Christine CODOL, Présidente de chambre et par Monsieur LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,