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9844 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Prestations de services

Nature : Synthèse
Titre : 9844 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Prestations de services
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 9844 - VERSION 2 (22 octobre 2025)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE CIVIL ET EN DROIT COMMUN

SANCTION DIRECTE DES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS - DROIT POSTÉRIEUR À L’ORDONNANCE DU 10 FÉVRIER 2016 – LOI DE RATIFICATION DU 20 AVRIL 2018 : ARTICLE 1171 DU CODE CIVIL

PRÉSENTATION PAR CONTRAT – PRESTATIONS DE SERVICES

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2025)

Avertissement : la version 2 ne comprend plus les notes relatives aux lettres de mission des experts-comptables transférées Cerclab n° 24327.

Conseil en assurance. La clause selon laquelle, en cas de non-communication par le client des quittances de sa compagnie d'assurances, permettant d'évaluer les économies qu'il a effectivement réalisées, il sera dû au prestataire une rémunération forfaitaire égale à la moitié des économies prévisionnelles estimées en début de mission, a pour objet d'évaluer par avance les dommages-intérêts dus par le client en cas d'inexécution de son obligation et de contraindre ce dernier à exécution, et s'analyse donc en une clause pénale (Cass. com., 12 mai 2021, n° 19-17309). Elle ne crée pas de déséquilibre significatif dès que le contrat prévoit par ailleurs la faculté pour le client de mettre fin à tout moment à la mission sans aucune pénalité et qu'en cas d'insuccès dans l'obtention d'économies aucune indemnité ne sera due à la société de conseil. CA Caen (2e ch. civ. com.), 20 février 2025 : RG n° 23/01787 ; Cerclab n° 23688 (conseil en assurance se voyant confier une mission de détection et d'estimation des économies réalisables sur les contrats d'assurances avec une société dans le secteur des métaux ; arrêt jugeant en revanche la clause excessive, par application de l’art. 1231-5, et la réduisant de 9.600 euros à 7.000 euros), sur appel de T. com. Alençon, 17 juillet 2023 : RG n° 2022000479 ; Dnd.

Conseil en communication. Absence de preuve d’un caractère comminatoire ou de déséquilibre significatif de la clause prévoyant que « la totalité du devis accepté sera exigible immédiatement à titre de pénalités, et ce quel que soit l'état d'avancement des travaux, sans préjudice des dommages et intérêts que le prestataire estimerait être en droit de réclamer en sus ». CA Nîmes (1re ch. civ.), 29 août 2024 : RG n° 23/01534 ; Cerclab n° 22983 (contrat de conseil en communication pour une Scea ; demande en tout état de cause sans objet puisque le prestataire y renonce et se contente de demander le paiement des travaux effectués), sur appel de TJ Nîmes, 16 mars 2023 : RG n° 21/00139 ; Dnd.

Crèche. N.B. Dans les relations entre les parents et le gestionnaire de la crèche, le contrat est incontestablement conclu entre un consommateur et un professionnel et devrait donc relever des seuls articles du Code de la consommation, à l’exclusion de l’art. 1171 C. civ.

* Empêchement des parents pour force majeure. Il ressort des dispositions de l’art. 1218 C. civ. que la force majeure constitue un événement exceptionnel, étranger à la personne de celui qui le subit, qui a eu comme finalité de l'empêcher de remplir les prestations qu'il aurait dû tenir vis-à-vis de son créancier ; ne remplit pas ces conditions une intervention chirurgicale qui était connue et prévue avant même le démarrage du contrat, peu important qu'elle ait été ensuite été déprogrammée par l’hôpital et reportée à une autre date. CA Versailles (1re ch. 2e sect.), 17 janvier 2023 : RG n° 21/05731 ; Cerclab n° 10070, sur appel de T. proxim. Saint-Germain en Laye, 28 juillet 2021 : RG n° 11-21-000042 ; Dnd. § Remplit à l’inverse ces conditions une seconde hospitalisation effectuée en urgence. CA Versailles (1re ch. 2e sect.), 17 janvier 2023 : RG n° 21/05731 ; Cerclab n° 10070 (contrat de crèche ; admission de l’action en remboursement des jours d’absence), infirmant T. proxim. Saint-Germain en Laye, 28 juillet 2021 : RG n° 11-21-000042 ; Dnd.

* Modification du contrat. Est abusive et réputée non écrite la clause d’un contrat d'accueil en crèche en ce qu'elle soumet la révision du contrat, non seulement à des conditions restrictives (modification des horaires de travail d'un des deux parents, mutation d'un des deux parents, perte d'emploi d'un des deux parents, changement de situation familiale et changement de domicile) mais aussi au pouvoir discrétionnaire final de la direction de la société gérant la crèche qui se réserve une possibilité de refuser d'accepter une demande de révision du contrat, même si les conditions restrictives sont réunies, et ce sans la motiver. CA Versailles (1re ch. 2e sect.), 17 janvier 2023 : RG n° 21/05731 ; Cerclab n° 10070 (clause laissant les parents dans l'incertitude quant à l'issue de leur demande alors qu'ils justifient d'une cause légitime à l'appui de leur demande de révision du contrat ; conséquences : résiliation anticipée par les parents justifiée et condamnation de la crèche à rembourser la majoration pour résiliation facturée par la crèche), infirmant sur ce point T. proxim. Saint-Germain en Laye, 28 juillet 2021 : RG n° 11-21-000042 ; Dnd.

Fabrication de biens : clause de dédit. Ne crée pas de déséquilibre significatif une clause de dédit qui est non équivoque, limitée, et qui permet à l'acquéreur de connaître à l'avance les conséquences de son dédit. CA Rouen (ch. civ. com.), 3 mars 2022 : RG n° 20/02032 ; Cerclab n° 9480 (contrat conclu entre sociétés commerciales ; contrat de fabrication spécifique et pose d'armatures en acier dans le cadre de la construction d'une plateforme logistique conclu avec une société ayant pour objet la gestion, l'administration ainsi que la centralisation des services généraux de toutes sociétés et plus particulièrement des sociétés filiales : clause stipulant), sur appel de T. com. Évreux, 4 mai 2020 : RG n° 2018F00101 ; Dnd. § N.B. La clause reproduite précise que « les tonnages à fabriquer ainsi que la durée de la commande devront être clairement spécifiés dans la commande » et que « tout écart de tonnage de 20 % en plus par rapport à la commande donnera lieu à application d'une majoration de 10 % du prix des tonnes en plus étant précisé que nous pouvons refuser de fournir ces tonnes supplémentaires. Tout écart de tonnage de 20 % en moins par rapport à la commande donnera lieu au règlement d'une indemnité forfaitaire de 80 % du prix des tonnes en moins. Tout écart de 20 % en plus ou en moins de la durée de la commande donnera lieu au règlement d'une majoration forfaitaire de 10 % du montant total du marché ». Selon l’arrêt, cette clause est une clause de dédit qui permet à l'acquéreur de modifier ou même de rompre unilatéralement le contrat, moyennant une contrepartie pour le vendeur, et non une clause pénale qui viendraient sanctionner la défaillance de l'une des parties.

Garagiste : contrat entre un assureur automobile et un récupérateur d’épaves. Après avoir relevé que le contrat prévoyait que certains véhicules étaient systématiquement cédés au récupérateur, selon les conditions tarifaires fixées au contrat, et que d'autres feraient l'objet d'un appel d'offre auquel le récupérateur pourrait participer, « selon un processus communiqué ultérieurement au récupérateur », l'arrêt retient que le terme « processus », employé dans un autre article, explicite la mention relative à l'appel d'offre, et ajoute que les conditions tarifaires dépendent de l'état et de la valeur des véhicules ; la cour d’appel a pu en déduire que la clause relative à cette seconde catégorie de véhicules n'était pas potestative. Cass. com., 15 novembre 2023 : pourvoi n° 22-10818 ; arrêt n° 731 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 10600 (contrat entre un assureur et une société exploitant un centre de traitement de véhicules hors d'usage pour la récupération des véhicules accidentés de l’assureur), rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 5), 25 novembre 2021 : Dnd.

Location et entretien de textiles. Refus d’écarter la clause prévoyant le paiement de l'intégralité des échéances en cas de non-paiement d'une seule d’entre elles, dès lors que le prestataire a pu légitimement s'attendre au paiement de cette somme, qu'il n'a commis aucune faute contractuelle et a engagé des frais et du travail pour l'exécution de sa prestation, de sorte que la déchéance du terme et le paiement de l'intégralité de la prestation ne paraissent pas disproportionnés au regard des manquements contractuels du locataire. TJ Toulouse, 15 juillet 2025 : RG n° 24/02009 ; Cerclab n° 24435 (licence de site internet pour un menuisier).

Maintenance. N’est pas abusive la clause d’un contrat de maintenance d’un photocopieur, calée sur la durée de la location du photocopieur qui trouve sa logique dans le fait que le bailleur est en droit de s’attendre au terme de la location à récupérer la machine en bon état d’entretien pour sa revente ou relocation éventuelle. T. com. Nanterre (5e ch.), 8 juillet 2025 : RG n° 2023F02019 ; Cerclab n° 24169 (location financière et maintenance de photocopieur ; jugement ajoutant l’application des critères discutables qu’il a préalablement posés : absence de preuve d’une dérogation à une règle supplétive, absence de preuve de l’opacité de la clause).

Organisation d’exposition. Ne crée pas de déséquilibre significatif, tant sur le fondement de l’art. 1171 C. civ. que sur celui de l’art. L. 442-1 C. com., la clause d’un contrat de participation à une exposition qui prévoit l’absence de remboursement des sommes versées en cas d’impossibilité d’organiser la manifestation pour des raisons extérieures (en l’espèce Covid 19), dès lors que la participation versée par les exposants ainsi que son non remboursement sont économiquement équilibrés entre, d'une part, l'obligation pour la prestataire d'anticiper les dépenses qu'elle doit exposer pour l'organisation de la manifestation, et correspondant à la réservation de l'espace d'exposition, la mise au point et la réalisation de campagne de communication sur différents supports, la recherche et la sélection des œuvres et des galeries et encore, pour la conception de l'architecture générale de l'exposition en lien avec des professionnels (scénographes et des installateurs généraux), et d'autre part, le risque de la perte de ces dépenses en cas d'annulation de la manifestation. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 27 janvier 2023 : RG n° 21/07493 ; Cerclab n° 10228 (contrat d’organisation d’une exposition de galeristes ; l’arrêt note que la preuve est rapportée que l’organisateur a engagé près d’1,9 millions d’euros, sur un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros mais un résultat déficitaire – non expliqué par l’arrêt – de 48.000 euros), sur appel de T. com. Paris, 11 mars 2021 : RG n° 2020037956 ; Dnd

Déroge aux conditions de l'art. 1218 C. civ. la clause exonératrice qui, en apposant aux « raisons majeures » les adjectifs « imprévisibles ou économiques » suivis d'exemples, en particulier celui du « retrait d'autorisation » impliquant que « la foire ne peut avoir lieu », avec la conséquence que « les participations des exposants ne seront pas remboursées », énonce une clause de définition contractuelle exonératrice de remboursement suffisamment claire, précise et dépourvue d'équivoque, dont la portée ne dépend pas des cas de force majeure visés dans un autre article des conditions générales. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 27 janvier 2023 : RG n° 21/07493 ; Cerclab n° 10228 (contrat d’organisation d’une exposition de galeristes qui n’a pu se tenir en raison du Covid), infirmant sur ce point T. com. Paris, 11 mars 2021 : RG n° 2020037956 ; Dnd.

Sous-traitance (hors construction) : illustrations. Pour une illustration : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 17 décembre 2021 : RG n° 19/16684 ; Cerclab n° 9325 (sous-traitance entre une société de prestations de services informatiques et un développeur individuel, le contrat incluant une formation par un organisme habilité ; absence de partenariat et absence au surplus de déséquilibre significatif, compte tenu de la réciprocité des obligations de sous-traitance et de formation en l'absence d'éléments établissant le caractère potestatif, automatique, ou la non négociabilité des clauses du contrat), sur appel de TGI Paris, 28 mars 2019 : RG n° 17/14589 ; Dnd.

Sous-traitance (hors construction) : clause compromissoire. Crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, et doit être déclarée non écrite, la clause compromissoire d’un contrat de sous-traitance, en ce qu’elle instaure une procédure complexe et coûteuse de règlement des litiges, puisque nécessitant pour chacun de désigner un arbitre et de recourir au juge d'appui en cas de difficultés, lequel n'était effectivement pas désigné au contrat, seul l'application de l'art. 1459 CPC, alors que le donneur d’ordre a une assise financière beaucoup plus importante que le sous-traitant (dont le chiffre d’affaires en 2018 a été de 5.620 €), et que, par ailleurs, la clause stipule que les arbitres devront rendre leur sentence dans un délai de 10 mois à compter du jour où le dernier arbitre aura accepté sa mission, délai qui peut être prorogé, soit un délai de 4 mois supérieur à celui fixé à l'art. 1463 CPC, délai qui, sans être illégal, a pour effet d'augmenter la durée de la procédure de règlement du litige, ce qui est préjudiciable à une entreprise de taille modeste qui se prévaut d'impayés. CA Amiens (ch. écon.), 10 mars 2022 : RG n° 21/04192 ; Cerclab n° 9451 (sous-traitance dans la sécurité privée), sur appel de T. com. Saint-Quentin, 23 juillet 2021 : Dnd.

Traitement des déchets. Ne peuvent créer de déséquilibre significatif des clauses plus favorables que le régime légal, le contractant accordant un avantage financier exceptionnel à son cocontractant, alors qu’il n’y était pas tenu. CA Toulouse (1re ch. sect. 1), 14 mai 2025 : RG n° 22/04203 ; arrêt n° 25/191 ; Cerclab n° 23732 (contrat conclu entre un syndicat mixte de communes et un éco-organisme agréé pour la collecte et le traitement des déchets chimiques ménagers DDS, « déchets diffus spécifique » ; clause accordant notamment un versement pour la période située entre la fin de l’agrément et son renouvellement, pendant laquelle l’éco-organisme n’a pu procéder à la collecte, sans aucune obligation légale de le faire), infirmant sur ce point TJ Albi, 29 novembre 2022 : RG n° 20/00749 ; Dnd.