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CA PARIS (pôle 1 ch. 10), 5 octobre 2023

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 1 ch. 10), 5 octobre 2023
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 1 ch. 10
Demande : 22/13630
Date : 5/10/2023
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 13/07/2022
Référence bibliographique : 5730 (954 CPC)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10580

CA PARIS (pôle 1 ch. 10), 5 octobre 2023 : RG n° 22/13630 

Publication : Judilibre

 

Extrait (arguments de l’appelant) : « Subsidiairement, sur la nullité des saisies-attributions pour vice de forme, elle invoque en premier lieu l'absence de prononcé de la déchéance du terme, faisant valoir que les mises en demeure ne lui ont jamais été remises par la Poste, certaines ayant d'ailleurs été réceptionnées par une société SMG qu'elle ne connaît pas ; que faute de mises de demeure valables, aucune déchéance du terme n'a pu intervenir ; mais que leur envoi constitue une renonciation du Crédit Coopératif d'appliquer la clause de déchéance automatique du terme. En second lieu, elle soutient que la clause de déchéance du terme automatique est abusive, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, et doit donc être réputée non écrite, précisant que les dispositions protectrices du code de la consommation sur les clauses abusives lui sont applicables. »

Extrait (motifs) : « Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

La SCI Chaoul Invest demande à la cour, dans le dispositif de ses conclusions, de prononcer la caducité des saisies-attributions, et en conséquence d'en ordonner la mainlevée. Mais dans la discussion, elle ne fait état que de moyens de nullité des saisies-attributions, l'argumentation relative à la caducité qui avait été présentée au premier juge, ainsi que dans ses premières conclusions d'appelante, étant manifestement abandonnée. Il apparaît que la SCI Chaoul Invest a souhaité maintenir uniquement sa demande d'annulation des saisies, mais celle-ci n'étant plus énoncée dans le dispositif des conclusions, la cour ne peut statuer dessus. De même, la demande de caducité, sans moyen à l'appui, ne peut plus être examinée, de même que la demande de mainlevée consécutive.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de caducité des saisies-attributions. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 1 CHAMBRE 10

ARRÊT DU 5 OCTOBRE 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/13630 (8 pages). N° Portalis 35L7-V-B7G-CGGPO. Décision déférée à la cour : Jugement du 1er juillet 2022 - Juge de l'exécution de Créteil.

 

APPELANTE :

SCI CHAOUL INVEST

[Adresse 2], [Localité 4], Représentée par Maître Dov GHNASSIA de la SELEURL DOV GHNASSIA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0431

 

INTIMÉE :

FONDS COMMUN DE TITRISATION QUERCIUS FONDS COMMUN DE TITRISATION QUERCIUS

ayant pour société de gestion la société EQUITIS GESTION, société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B XXX, dont le siège social est à [Localité 5] - [Adresse 3], et représenté par son recouvreur, la société MCS ET ASSOCIES, société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B YYY, ayant son siège social à [Localité 6] - [Adresse 1], poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Venant aux droits du CREDIT COOPERATIF en vertu d’un bordereau de cession de créances en date du 22 décembre 2020 soumis aux dispositions du Code Monétaire et Financier. Représenté par Maître Muriel MILLIEN de la SELAS ARDEA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0586

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 7 septembre 2023, en audience publique, devant la cour composée de : Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, Madame Catherine LEFORT, conseiller, Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Catherine LEFORT, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par actes notariés des 29 mai 2007 et 5 mars 2008, le Crédit coopératif a consenti deux prêts à la SCI Chaoul Invest afin de financer l'acquisition de lots de copropriété.

Il a prononcé la déchéance du terme le 14 décembre 2016.

Par bordereau de cession de créances du 22 décembre 2020, le Crédit coopératif a cédé un portefeuille de créances, comprenant les créances résultant des prêts consentis à la SCI Chaoul Invest, au fonds commun de titrisation Quercius, représenté par sa société de gestion, la société Equitis Gestion (ci-après le FCT Quercius). La SCI Chaoul Invest a été informée de cette cession par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple du 23 avril 2021.

Selon trois procès-verbaux du 17 mars 2022, le FCT Quercius a fait pratiquer une saisie-attribution sur les loyers de la SCI Chaoul Invest entre les mains de son gérant d'immeuble portant sur les loyers détenus au jour de la saisie au titre des deux biens immobiliers, sur les loyers à venir du bien objet du prêt du 29 mai 2007 et sur les loyers à venir du bien objet du prêt du 5 mars 2008, pour avoir paiement des sommes totales de 120.908,94 euros et 126.713,99 euros. Ces saisies ont été dénoncées à la SCI Chaoul Invest le 23 mars 2022.

Par acte d'huissier du 25 avril 2022, la SCI Chaoul Invest a assigné le FCT Quercius devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de contestation des saisies-attributions.

Par jugement du 1er juillet 2022, le juge de l'exécution a :

- déclaré recevable la contestation formée par la SCI Chaoul Invest des saisies-attributions ;

- débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de caducité des saisies-attributions ;

- débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de nullité des saisies-attributions ;

- débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de délai de paiement et des demandes subséquentes ;

- débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCI Chaoul Invest à payer au FCT Quercius la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance ;

- rejeté le surplus des demandes plus amples ou contraires.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu :

sur la caducité, que la dénonciation des saisies-attributions du 17 mars 2023 était intervenue par procès-verbaux de signification à étude du 23 mars 2022, l'huissier instrumentaire s'étant rendu à l'adresse du siège social de la SCI Chaoul Invest et s'étant assuré de l'adresse en interrogeant le voisinage ; que la SCI Chaoul Invest ne justifiait pas avoir engagé une procédure d'inscription de faux à l'encontre de ces procès-verbaux, de sorte que les mentions portées par l'huissier faisaient foi ; qu'en outre, elle ne justifiait d'aucun grief dans la mesure où elle avait été informée des saisies-attributions par le courrier simple qui lui avait été adressé et avait pu les contester dans les temps requis ; que rien ne permettait donc de remettre en question le délai dans lequel l'huissier avait dénoncé les saisies-attributions ;

sur la nullité des saisies-attributions :

que la déchéance du terme avait bien été prononcée pour les deux prêts consentis puisque bien qu'il ressorte de la clause résolutoire des actes notariés qu'une mise en demeure préalable n'était pas nécessaire, le créancier avait adressé trois lettres de mise en demeure préalable à la SCI Chaoul Invest qui étaient soit non réclamée soit réceptionnées par la société SMG ; que la SCI Chaoul Invest avait été avisée des lettres envoyées à une adresse à laquelle elle avait réexpédié son courrier et ne démontrait pas ne pas avoir donné pouvoir à la société SMG pour recevoir son courrier ; que le fait de ne pas aller chercher son pli ne pouvait affecter la validité de la mise en demeure ;

que la prescription n'était pas acquise puisque le litige relevait non pas de la prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation, mais de la prescription quinquennale, la SCI Chaoul Invest ayant souscrit les prêts dans le cadre de son activité professionnelle, que la première échéance impayée datait du 2 novembre 2015 et la déchéance du terme avait été prononcée le 14 décembre 2016 et que la prescription avait été interrompue par les paiements effectués par la SCI Chaoul Invest du 3 avril au 30 décembre 2019 et par le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 29 novembre 2021 ;

que la troisième saisie-attribution était justifiée car elle portait sur des créances différentes dans la mesure où elle visait les loyers détenus au jour de la saisie tandis que les deux autres saisies-attributions visaient les loyers à venir ;

sur la demande de délai de paiement, que les saisies-attributions avaient emporté attribution immédiate des sommes saisies au profit du FCT Quercius et que la SCI Chaoul Invest ne justifiait pas de sa situation financière et n'avait effectué aucun règlement depuis décembre 2019.

Par déclaration du 13 juillet 2022, la société Chaoul Invest a formé appel de ce jugement.

[*]

Par dernières conclusions n°5 du 7 septembre 2023, la SCI Chaoul Invest demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 1er juillet 2022 sauf en ce qu'il a déclaré recevable sa contestation des saisies-attributions du 17 mars 2022 ;

Statuant de nouveau,

A titre préliminaire,

- dire et juger recevable l'ensemble de ses demandes,

À titre principal,

- dire et juger que l'accord intervenu entre elle et le Crédit coopératif est opposable au FCT Quercius ;

- donner effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette, à savoir 126.983,40 euros ;

- ordonner la mainlevée des saisies-attributions pour le montant dépassant cette fraction non contestée ;

- ordonner le remboursement par le FCT Quercius à son profit du montant de la somme supérieure à 126.983,40 euros versée en exécution du jugement du 1er juillet 2022 ;

À titre subsidiaire,

- prononcer la caducité des saisies-attributions du 17 mars 2022 ;

en conséquence, ordonner la mainlevée des saisies-attributions du 17 mars 2022 ;

À titre infiniment subsidiaire,

- lui accorder un délai de grâce d'au moins 6 mois afin de lui permettre de payer la créance qui sera fixée par la décision à intervenir ;

- ordonner un sursis aux effets des saisies-attributions pratiquées et la suspension des poursuites de saisies pendant un délai de 6 mois à compter de la décision à intervenir ;

- ordonner que les sommes dues pendant le cours dudit délai ne produisent pas intérêts ;

En tout état de cause,

- condamner le FCT Quercius à lui régler la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Sur la recevabilité de ses demandes prétendument nouvelles, la SCI Chaoul Invest soutient que la demande tendant à donner effet à la fraction non contestée de la dette constitue une demande de mainlevée partielle et n'est donc pas nouvelle, que la demande tendant à voir dire et juger que l'accord avec le Crédit Coopératif est opposable au FCT Quercius n'est que l'accessoire de cette demande, voire un moyen, et que la demande de remboursement est la conséquence de cette demande de mainlevée partielle et est de plus née de la survenance d'un fait, à savoir les paiements en 2022 et 2023.

Sur le montant de la créance, elle fait valoir que la clôture de son compte, de manière injustifiée et sans préavis, l'a empêchée de procéder au paiement d'échéances des prêts ; que selon accord amiable conclu avec le Crédit Coopératif avant la cession de créance, et donc opposable au FCT Quercius, le Crédit Coopératif acceptait de suspendre le paiement des échéances en abandonnant les intérêts de retard à la condition qu'elle cherche un refinancement de sa dette auprès d'une autre banque et procède à un paiement de 30.000 euros couvrant ses impayés, ce qu'elle a fait, de sorte que le FCT Quercius ne peut se prévaloir des intérêts de retard depuis 2016, peu important le montant pour lequel il a acquis la créance ; que le décompte des saisies-attributions est encore erroné en ce qu'il ne prend pas en compte certains des paiements et comporte une erreur d'imputation de la somme de 30.000 euros ; que compte tenu de tous ses paiements et de l'absence d'intérêts de retard dus, le FCT Quercius ne peut réclamer que le montant du capital restant dû, soit 126.983,40 euros.

Subsidiairement, sur la nullité des saisies-attributions pour vice de forme, elle invoque en premier lieu l'absence de prononcé de la déchéance du terme, faisant valoir que les mises en demeure ne lui ont jamais été remises par la Poste, certaines ayant d'ailleurs été réceptionnées par une société SMG qu'elle ne connaît pas ; que faute de mises de demeure valables, aucune déchéance du terme n'a pu intervenir ; mais que leur envoi constitue une renonciation du Crédit Coopératif d'appliquer la clause de déchéance automatique du terme. En second lieu, elle soutient que la clause de déchéance du terme automatique est abusive, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, et doit donc être réputée non écrite, précisant que les dispositions protectrices du code de la consommation sur les clauses abusives lui sont applicables.

Sur sa demande de délai de paiement, elle fait valoir qu'un délai de 6 mois lui permettrait de contracter un crédit auprès d'une banque pour désintéresser totalement le FCT Quercius, ce qu'elle ne peut faire compte tenu de sa situation financière.

[*]

Par dernières conclusions n°4 du 6 septembre 2023, le FCT Quercius, ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion, venant aux droits du Crédit Coopératif, demande à la cour de :

- juger irrecevables les prétentions de la SCI Chaoul Invest tendant à voir dire et juger que l'accord intervenu entre le Crédit Coopératif et cette dernière lui est opposable, à donner effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette, à savoir 126.983,40 euros et à ordonner le remboursement par lui à la SCI Chaoul Invest pour le montant de la somme supérieure à 126.983,40 euros versé en exécution du jugement du 1er juillet 2022 et, subsidiairement, en débouter la SCI Chaoul Invest ;

- débouter la SCI Chaoul Invest de ses autres demandes ;

- confirmer le jugement entrepris ;

- valider les saisies-attributions pour la somme de 247.622,93 euros arrêtée au 24 février 2022 ;

- valider, subsidiairement, si la cour devait juger nulle la déchéance du terme des prêts, les saisies-attributions pour la somme de 154.395,92 euros arrêtée au 24 février 2022 ;

- condamner la SCI Chaoul Invest à lui payer une somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles, il invoque les dispositions des articles 910-4 et 908 du code de procédure civile, et non celles de l'article 564 du même code, expliquant que ces demandes étaient absentes des premières conclusions d'appelante du 2 septembre 2022.

Subsidiairement, sur le montant de la créance, il fait valoir d'une part que la clôture du compte courant n'interdisait pas de procéder à des règlements, d'autre part, que la SCI Chaoul Invest ne justifie pas de l'accord intervenu avec le Crédit Coopératif, s'agissant de simples pourparlers, tout en reconnaissant ne pas en avoir respecté les termes puisqu'elle n'a pas obtenu de financement et qu'elle n'a payé la somme de 30.000 euros qu'en avril 2019. Enfin, il soutient que l'appelante fait état de paiements inexistants et impute un versement à une date ne correspondant pas à celle de son exécution ; qu'il était donc dû en avril 2019 la somme de 243.180,84 euros pour les deux prêts, et que compte tenu des versements postérieurs, la créance s'élève a minima à 190.119,05 euros au 31 décembre 2019.

Sur la caducité, il fait valoir que l'huissier a dénoncé les saisies-attributions le 23 mars 2022 par procès-verbaux signifiés à étude conformément aux dispositions de l'article 656 du code de procédure civile et que la société Chaoul Invest n'a subi aucun grief du fait de la prétendue irrégularité des dénonciations puisqu'elle a pu les contester dans le délai légal.

Sur la nullité des saisies-attributions, il soutient que la SCI Chaoul Invest, qui n'est ni un consommateur ni un non-professionnel ni un SCI familiale, ne peut se prévaloir de la protection légale en matière de clauses abusives  ; qu'en tout état de cause, le Crédit Coopératif lui a adressé des mises en demeure préalables, soit non réceptionnées, ce qui n'affecte pas leur validité, soit réceptionnées par un mandataire de la société Chaoul Invest, laquelle a pu, en outre, négocier les conditions de règlement de la créance résultant de la déchéance du terme ; qu'il n'y a pas eu de renonciation expresse au bénéfice de la clause de déchéance du terme automatique ; qu'une éventuelle irrégularité de la déchéance du terme n'aurait pas pour effet de rendre la créance non exigible.

Sur la demande de délai de paiement, il soutient que la saisie-attribution emporte effet attributif immédiat au saisissant, de sorte qu'aucun délai ne peut être accordé sur les sommes saisies, et que le reliquat est impossible à déterminer s'agissant de saisies-attributions à exécution successive. Subsidiairement, il souligne la mauvaise foi de la SCI Chaoul Invest, son attitude dilatoire et l'absence de règlement spontané depuis 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les demandes principales de la SCI Chaoul Invest :

L'article R. 211-12 du code des procédures civiles d'exécution, figurant parmi les dispositions relatives aux contestations de la saisie-attribution, dispose :

« Le juge de l'exécution donne effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette. Sa décision est exécutoire sur minute. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 121-22 ne sont pas applicables.

S'il apparaît que ni le montant de la créance du saisissant ni la dette du tiers saisi ne sont sérieusement contestables, le juge de l'exécution peut ordonner à titre provisionnel le paiement d'une somme qu'il détermine en prescrivant, le cas échéant, des garanties.

Sa décision n'a pas autorité de chose jugée au principal. »

L'article 910-4 du code de procédure civile dispose :

« A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées les prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »

Par ailleurs, il résulte des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, soumettre à la cour de nouvelles prétentions, que les prétentions ne sont pas nouvelles lorsqu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge et que les parties peuvent néanmoins ajouter aux prétentions soumises au premier juge des demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Il résulte de la déclaration d'appel de la SCI Chaoul Invest, qui seule doit énoncer les chefs du jugement critiqués et opère la dévolution de l'appel, que l'appelante a énuméré ainsi les chefs du jugement critiqués :

- déboute la SCI Chaoul Invest de sa demande de caducité des saisies-attributions pratiquées le 17 mars 2022

- déboute la SCI Chaoul Invest de sa demande de nullité des saisies-attributions pratiquées le 17 mars 2022

- déboute la SCI Chaoul Invest de sa demande de délai de paiement et des demandes subséquentes

- condamne la SCI Chaoul Invest à payer au fonds commun de titrisation Quercius ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion et représenté par la société MCS et Associés agissant en qualité de recouvreur la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- déboute la SCI Chaoul Invest de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamne la SCI Chaoul Invest aux dépens de l'instance

- rejette le surplus des demandes amples ou contraires.

Force est de constater qu'aucun chef de jugement critiqué ne correspond aux demandes de la SCI tendant à :

- dire et juger que l'accord intervenu entre elle et le Crédit coopératif est opposable au FCT Quercius ;

- donner effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette, à savoir 126.983,40 euros ;

- ordonner la mainlevée des saisies-attributions pour le montant dépassant cette fraction non contestée ;

- ordonner le remboursement par le FCT Quercius à son profit du montant de la somme supérieure à 126.983,40 euros versée en exécution du jugement du 1er juillet 2022,

et ce pour la simple et bonne raison que ces prétentions n'ont pas été soumises au premier juge.

La SCI Chaoul Invest prétend en vain que sa demande tendant à donner effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette équivaudrait à une demande de mainlevée partielle et que dès ses premières conclusions d'appel, elle avait formulé une demande de mainlevée, laquelle peut être partielle ou totale, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle.

Il ressort en réalité de ses premières conclusions d'appelante qu'elle avait formulé une première demande de mainlevée comme conséquence de la caducité des saisies-attributions et une seconde demande de mainlevée comme conséquence de la nullité des saisies-attributions. Dans les deux cas, la SCI Chaoul Invest poursuivait l'anéantissement des saisies et ne reconnaissait pas une partie de la dette.

Si la présente demande de mainlevée partielle peut se confondre avec celle tendant à donner effet à la saisie pour la fraction non contestée de la dette, ces demandes, qui comportent une reconnaissance partielle du montant de la dette, ne sont pas équivalentes aux demandes formulées dans tant les premières conclusions de l'appelante qu'en première instance. Elles sont donc irrecevables.

La demande de remboursement ne relève pas des pouvoirs du juge de l'exécution et est donc irrecevable également.

La demande tendant à voir dire et juger que l'accord intervenu entre elle et le Crédit coopératif est opposable au FCT Quercius n'est pas une prétention mais un moyen, donc il n'est pas irrecevable en lui-même, mais il est invoqué à l'appui d'une prétention irrecevable.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, les demandes principales de la SCI Chaoul Invest doivent être déclarées irrecevables.

 

Sur la caducité/ nullité des saisies-attributions :

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

La SCI Chaoul Invest demande à la cour, dans le dispositif de ses conclusions, de prononcer la caducité des saisies-attributions, et en conséquence d'en ordonner la mainlevée. Mais dans la discussion, elle ne fait état que de moyens de nullité des saisies-attributions, l'argumentation relative à la caducité qui avait été présentée au premier juge, ainsi que dans ses premières conclusions d'appelante, étant manifestement abandonnée. Il apparaît que la SCI Chaoul Invest a souhaité maintenir uniquement sa demande d'annulation des saisies, mais celle-ci n'étant plus énoncée dans le dispositif des conclusions, la cour ne peut statuer dessus. De même, la demande de caducité, sans moyen à l'appui, ne peut plus être examinée, de même que la demande de mainlevée consécutive.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de caducité des saisies-attributions.

 

Sur la demande de délai de grâce :

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, dans la limite de deux années.

Il résulte des articles 510 alinéa 3 du code de procédure civile et R. 121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution que le juge de l'exécution peut, après la signification du commandement ou de l'acte de saisie, accorder un délai de grâce.

Toutefois, l'article L. 211-2 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution dispose : « L'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation. »

Les articles 1343-5 et suivants du code civil, en ce qu'ils sont conçus en des termes généraux, permettent l'octroi de délais de paiement y compris après la mise en œuvre d'une mesure d'exécution. Toutefois, ils prévoient seulement que la décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées. Cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s'opère nécessairement dans l'état où se trouve la mesure d'exécution au jour de l'octroi des délais.

Ainsi, en matière de saisie-attribution, la suspension ne peut avoir pour effet que de différer le paiement en faisant obstacle à l'attribution matérielle des fonds au créancier dans le mois suivant la mise en place de cette mesure d'exécution, puisqu'en application l'article L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution l'acte de saisie a déjà emporté attribution juridique des fonds au saisissant.

En conséquence, l'octroi de délais ne présente aucun intérêt pour les sommes effectivement saisies pour lesquelles la saisie-attribution litigieuse a produit ses effets. Dès lors que la somme saisie suffit à désintéresser le créancier, la demande de délais de paiement est sans objet. Dans le cas contraire, le juge de l'exécution peut statuer sur la demande de délais pour le solde de la créance.

Mais en l'espèce, le créancier a également mis en place, le même jour, deux saisies-attributions à exécution successive pour les mêmes créances. Ces mesures rendent également vain l'octroi de délais de grâce, puisque les loyers à échoir saisis sont déjà attribués juridiquement au créancier, et elles produisent d'ailleurs le même effet, à savoir un paiement échelonné de la dette.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Chaoul Invest de sa demande de délai de paiement et de ses demandes subséquentes.

 

Sur les demandes accessoires :

L'issue du litige commande de confirmer les condamnations accessoires de la SCI Chaoul Invest et de condamner cette dernière aux dépens d'appel.

Il n'est pas inéquitable en revanche de laisser au FCT Quiercius la charge de ses frais irrépétibles d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

DÉCLARE irrecevables les demandes nouvelles formulées, à titre principal, par la SCI Chaoul Invest,

CONFIRME, en toutes ses dispositions déférées à la cour, le jugement rendu le 1er juillet 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil,

Y ajoutant,

DÉBOUTE le fonds commun de titrisation Quercius, représenté par sa société de gestion, la société Equitis Gestion, de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SCI Chaoul Invest aux entiers dépens d'appel.

Le greffier,                                                    Le président,