CA LIMOGES (ch. écon. soc.), 23 novembre 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10586
CA LIMOGES (ch. écon. soc.), 23 novembre 2023 : RG n° 22/00580
Publication : Judilibre
Extrait : « L'extension de garantie litigieuse ne constitue pas une garantie contre le risque d'une épidémie mais bien contre le risque d'une fermeture administrative individuelle de l'établissement assuré, quelle que soit l'épidémie. La commune intention des parties étant en l'espèce claire et ne visait pas la couverture d'un risque de fermeture administrative généralisée. L'application de cette clause n'était subordonnée à aucune interprétation et la société YR-BP, en sa qualité de professionnelle de la restauration, ne pouvait pas se méprendre sur la portée de cette clause d'exclusion lors de la souscription du contrat.
Par ailleurs une clause d'exclusion n'est pas limitée lorsqu'elle vide la garantie de sa substance, en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire.
En l'occurrence la garantie couvrait le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite « d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication », de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenues dans d'autres circonstances que celles prévues par la clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance. C'est également ce que la Cour de cassation a jugé dans les mêmes arrêts que ceux précédemment cités.
Au demeurant, s'agissant de l'emploi du terme « épidémie » il est établi qu'une épidémie peut n'affecter qu'un seul établissement et sévir dans une zone géographique circonscrite, comme par exemple, dans le domaine de la restauration s'agissant de l'épidémie de salmonellose. La substance de l'obligation contractuelle de la société AXA FRANCE ne doit pas s'apprécier exclusivement au regard de la situation épidémique générée par la Covid-19.
En définitive le caractère formel et limité de la clause d'exclusion est avéré. Elle doit donc trouver application. Les pertes alléguées par la société YR-BP résultant de mesures gouvernementales généralisées sont exclues de la garantie due par AXA FRANCE, ce qui justifie d'infirmer le jugement déféré et de la débouter de l'intégralité de ses demandes. »
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE
ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 22/00580. N° Portalis DBV6-V-B7G-BILOJ. Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de dommages.
Le vingt-trois novembre deux mille vingt-trois la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
SA AXA FRANCE IARD
demeurant [Adresse 1], représentée par Maître Valérie ASTIER de la SELARL SELARL PASTAUD - WILD PASTAUD - ASTIER, avocat au barreau de LIMOGES, APPELANTE d'une décision rendue le 15 JUIN 2022 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE GUERET
ET :
SAS YR-BP (RESTAURANT DES SOURCES), demeurant [Adresse 3]
représentée par Maître Michel LABROUSSE de la SCP SCP D'AVOCATS MICHEL LABROUSSE - CELINE REGY - FRANCOIS ARMA ND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE, INTIMEE
Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 3 octobre 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2023.
Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Johanne PERRIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.
Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.
Après quoi, Madame Johanne PERRIER, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 9 novembre 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
La mise à disposition de cette décision a été prorogée au 16 novembre 2023, puis au 23 novembre 2023, les avocats des parties en ayant été régulièrement informés.
Au cours de ce délibéré, Madame Johanne PERRIER, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller et d'elle-même. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR :
EXPOSÉ DU LITIGE :
La société YR-BP exploite une activité de restauration, bar, épicerie à [Localité 2] (23) sous l'enseigne Restaurant des sources.
Dans le cadre de son activité, elle a souscrit le 13 octobre 2012 un contrat d'assurance multirisques professionnelle auprès de la société AXA FRANCE IARD.
L'extension de garantie indique qu'elle 'est étendue aux pertes d'exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l'établissement assuré, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à vous-même
2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication.
Elle est assortie d'une clause d'exclusion précisant que « sont exclues :
- les pertes d'exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire département que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».
Par arrêté ministériel du 14 mars 2020, l'ensemble des commerces « non indispensables à la vie de la Nation » ont fait l'objet d'une mesure d'interdiction d'accueillir du public pour lutter contre la propagation du COVID-19, entraînant pour la société YR-BP une fermeture totale.
La société YR-BP a sollicité son assureur aux fins de mise en œuvre de la garantie souscrite, ce que celui-ci a refusé, considérant que le cas d'espèce entrait dans les limites posées par la clause d'exclusion de garantie.
Par exploit du 13 septembre 2021 la société YR-BP a fait assigner la société AXA FRANCE IARD devant le tribunal de commerce de Guéret aux fins notamment d'obtenir l'indemnisation de son préjudice de perte d'exploitation pour la période du 17 mars au 28 mai 2020.
Par un jugement du 15 juin 2022, le tribunal de commerce de Guéret a notamment :
A titre liminaire,
- écarté les écritures déposées par AXA le 19 avril 2022 ;
- débouté la société AXA FRANCE IARD au principal de sa demande de rejet d'indemnisation du préjudice subi par la société ;
- faisant droit à la demande d'indemnisation de la société YR-BP ;
- fixé à 9.000 € la provision à valoir sur préjudice que la société AXA FRANCE IARD doit régler immédiatement à l'adresse la société YR-BP ;
Pour fixer le quantum de l'indemnisation due par la compagnie, a :
- ordonné une expertise, et désigné pour y procéder M. X., avec pour mission de :
* se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utile à l'accomplissement de sa mission notamment l'estimation par la demanderesse et ou son expert-comptable accompagnée de ses bilans et comptes d'exploitation sur les trois dernières années,
* entendre les parties ainsi que tout sachant et évoquer à l'issue de la première réunion avec les parties le calendrier de la suite des opérations,
* examiner les pertes d'exploitation garanties contractuellement par le contrat d'assurance sur la période maximum de trois mois et en tenant compte de la franchise de trois jours ouvrés applicable,
* donner son avis sur le montant des pertes d'exploitation consécutives à la baisse du chiffre d'affaires causée par l'interruption ou la réduction de l'activité de la marge brut (chiffre d'affaires - charges variables) incluant les charges salariales et les économies réalisées,
* donner son avis sur le montant des aides et subventions d'Etat perçues,
* donner son avis sur les coefficients de tendance générale de l'évolution de l'activité et des facteurs externes et internes susceptibles d'être pris en compte pour le calcul de la réduction d'activité imputable à la mesure de fermeture en se fondant notamment sur les recettes encaissées dans les semaines ayant précédées le 15 mars 2020 ;
- fixé à 2.000 € le montant de la provision qui devra dans le délai d'un mois de la notification du jugement à partie être consignée par la société AXA FRANCE IARD ;
- dit qu'à défaut de consignation dans les délais l'expertise sera atteinte de caducité ;
- fixé à 6 mois la date de dépôt du rapport d'expertise.
La société AXA FRANCE IARD a interjeté appel de cette décision le 20 juillet 2022.
[*]
Aux termes de ses écritures du 24 juillet 2023, la société AXA FRANCE IARD demande à la cour, à titre principal :
- d'infirmer en tous points le jugement dont appel ;
Statuant à nouveau, de :
- juger que l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie est assortie d'une clause d'exclusion applicable en l'espèce ;
- juger que cette clause d'exclusion respecte le caractère formel exigé par l'article L. 113-1 du code des assurances ;
- juger que cette clause d'exclusion ne vide pas l'extension de garantie de sa substance et respecte le caractère limité de l'article L. 113-1 du code des assurances et qu'elle ne prive pas l'obligation essentielle d'AXA FRANCE IARD de sa substance au sens de l'article 1170 du code civil ;
En conséquence, de :
- juger applicable en l'espèce la clause d'exclusion dont est assortie l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie ;
- débouter l'assurée de l'intégralité des demandes formées à son encontre et la condamner à lui restituer les sommes perçues au titre de l'exécution du jugement du 15 juin 2022 ;
- annuler la mesure d'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal de commerce de Guéret ;
En tout état de cause, de :
- débouter l'assurée de toutes demandes, fins ou conclusions contraires au présent dispositif ;
- condamner l'assurée à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle soutient que :
- l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation n'est pas applicable en l'espèce, la clause d'exclusion étant parfaitement valable en ce qu'elle respecte le caractère formel, au regard de la clarté des termes employés, et limité de l'article L. 113-1 du code des assurances, étant en outre conforme aux dispositions de l'article 1170 du code civil, ne privant en rien de sa substance l'obligation essentielle du débiteur. Elle précise que l'extension de garantie litigieuse ne constitue pas une garantie contre le risque d'une épidémie mais bien contre le risque d'une fermeture administrative individuelle de l'établissement assuré, quelle que soit l'épidémie. En tout état de cause, elle fait valoir qu'une clause d'exclusion limitant la couverture d'assurance à un risque « improbable » ne vide pas la garantie de sa substance, la garantie d'un risque aléatoire constituant l'essence même d'un contrat d'assurance ;
- l'article 1190 du code civil ne peut trouver à s'appliquer, la commune intention des parties étant en l'espèce claire et ne visait en rien au moment de la signature la couverture d'un risque de fermeture généralisée. Elle précise en ce sens que la définition de l'épidémie ne présente pas d'ambiguïté et n'a dès lors pas à faire l'objet d'une interprétation ;
- une mesure de fermeture administrative généralisée constitue un préjudice anormal et spécial dont les conséquences ne peuvent incomber à l'assureur ;
- à titre subsidiaire, rien ne justifie le montant de la provision allouée, le montant des pertes d'exploitation indemnisables sollicité par la société YR-BP étant surévalué et calculé à partir d'une méthode ne respectant pas les stipulations contractuelles.
[*]
Aux termes de ses écritures du 12 janvier 2023, la société YR-BP demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris, du 15 juin 2022, en ce qu'il a débouté la société AXA FRANCE IARD au principal de sa demande de rejet d'indemnisation du préjudice par elle subi ;
- dire et juger que la clause d'exclusion du contrat d'assurance dont la société AXA FRANCE IARD cherche à se prévaloir pour écarter la garantie de la fermeture administrative de son assuré du 17 mars 2020 au 28 mai 2020 doit être réputée non-écrite ;
- par voie de conséquence, condamner la société AXA FRANCE IARD à lui payer une somme de 27.660,85 €, avec intérêts de droit à compter du 17 mars 2020 ;
- condamner par ailleurs la société AXA FRANCE IARD à lui payer la somme de 3.000 € en réparation de son préjudice moral ;
- dire et juger que la somme de 9 000 € versée à titre provisionnel viendra en déduction ;
- si la cour ne faisait pas droit de plano à ses demandes financières, elle confirmerait le jugement entrepris en ce qu'il a accueilli le principe du préjudice, a condamné la société AXA ASSURANCES au paiement d'une indemnité de 9 000 € et a ordonné une mission d'expertise confiée à M. X. ;
- condamner d'autre part la société AXA ASSURANCES en 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- constater que les frais d'expertise, qui devaient être consignés par la société AXA ASSURANCES ne l'ont pas été ;
- condamner la société AXA ASSURANCES aux dépens.
Elle soutient que :
- la clause d'exclusion doit être écartée car réputée non-écrite et la garantie mise en œuvre. Elle explique en effet que de par son contenu-même, la clause litigieuse prive de sa substance l'obligation essentielle de garantie. En effet, elle expose que cette clause ne correspond pas au caractère formel et limité exigés par l'article L. 113-1 du code des assurances, situation créant dans ce contrat d'adhésion un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat impliquant que cette clause soit réputée non écrite comme le prévoit l'article 1171 du code civil ;
- le montant des pertes d'exploitation est clairement établi par l'analyse comptable réalisée le 9 décembre 2021 par un expert-comptable. A titre subsidiaire sur ce point, qu'une expertise comptable doit être ordonnée ;
- elle est fondée à obtenir une indemnité complémentaire au titre de son préjudice moral au regard de l'attitude de la société d'assurance.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La déclaration de sinistre a été faite par la société YR-BP en application d'un contrat d'assurance multirisque professionnelle conclu le 31 octobre 2013 ayant pour objet d'assurer l'activité de « RESTAURANT TRADITIONNEL – BAR – EPICERIE » exploitée sous l'enseigne « Restaurant des sources ».
Si les conditions générales auxquelles il est fait référence dans les conditions particulières, prévoient en leur article 2.1 une garantie des pertes d'exploitation qui ne contient aucune disposition susceptible de mobiliser la garantie à la suite d'une fermeture administrative, les conditions particulières prévoient une extension de cette garantie en présence d'une fermeture administrative.
Il est précisé que cette garantie 'est étendue aux pertes d'exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l'établissement assuré, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à vous-même
2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication.
Mais elle est assortie d'une clause d'exclusion précisant que « sont exclues :
- les pertes d'exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire département que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».
C'est l'applicabilité de cette clause d'exclusion de garantie qui est en cause dans le présent litige, la société YR-BP lui reprochant de n'être pas formelle et limitée au sens de l'article L.113-1 du code des assurances de sorte qu'elle encourrait soit la nullité soit une interprétation qui lui serait favorable en tant qu'assuré.
1/ Sur le respect du caractère formel et limité de la clause d'exclusion de garantie (art L. 113-1 du code des assurances) :
Il résulte de ce texte que les clauses d'exclusion de garantie qui privent l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées.
Une clause d'exclusion n'est pas formelle lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite une interprétation.
En l'occurrence la circonstance particulière de réalisation du risque privant l'assuré du bénéfice de la garantie n'est pas l'épidémie mais la situation dans laquelle, à la date de la fermeture, un autre établissement faisait l'objet d'une mesure administrative pour une cause identique à l'une de celles énumérées par la clause d'exclusion de garantie, de sorte que l'ambiguïté alléguée, du terme 'épidémie', était sans incidence sur la compréhension, par l'assurée, des cas dans lesquels l'exclusion s'appliquait. C'est ce raisonnement que la cour de cassation a consacré les 1er décembre 2022 et 19 janvier 2023 (Civ. 2e, 21-21516, 21-23189).
L'extension de garantie litigieuse ne constitue pas une garantie contre le risque d'une épidémie mais bien contre le risque d'une fermeture administrative individuelle de l'établissement assuré, quelle que soit l'épidémie. La commune intention des parties étant en l'espèce claire et ne visait pas la couverture d'un risque de fermeture administrative généralisée.
L'application de cette clause n'était subordonnée à aucune interprétation et la société YR-BP, en sa qualité de professionnelle de la restauration, ne pouvait pas se méprendre sur la portée de cette clause d'exclusion lors de la souscription du contrat.
Par ailleurs une clause d'exclusion n'est pas limitée lorsqu'elle vide la garantie de sa substance, en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire.
En l'occurrence la garantie couvrait le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite « d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication », de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenues dans d'autres circonstances que celles prévues par la clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance.
C'est également ce que la Cour de cassation a jugé dans les mêmes arrêts que ceux précédemment cités.
Au demeurant, s'agissant de l'emploi du terme « épidémie » il est établi qu'une épidémie peut n'affecter qu'un seul établissement et sévir dans une zone géographique circonscrite, comme par exemple, dans le domaine de la restauration s'agissant de l'épidémie de salmonellose. La substance de l'obligation contractuelle de la société AXA FRANCE ne doit pas s'apprécier exclusivement au regard de la situation épidémique générée par la Covid-19.
En définitive le caractère formel et limité de la clause d'exclusion est avéré. Elle doit donc trouver application. Les pertes alléguées par la société YR-BP résultant de mesures gouvernementales généralisées sont exclues de la garantie due par AXA FRANCE, ce qui justifie d'infirmer le jugement déféré et de la débouter de l'intégralité de ses demandes.
2/ Sur les demandes annexes :
La société YR-BP n'obtient pas gain de cause en appel ce qui justifie de la condamner à prendre en charge les dépens de première instance et d'appel alors que l'équité commande de débouter la société AXA FRANCE IARD de sa demande en paiement d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME le jugement déféré rendu par le tribunal de commerce de Guéret le 15 juin 2022, sauf en ce qu'il a écarté les écritures déposées par la société AXA FRANCE IARD le 19 avril 2022 ;
Statuant à nouveau ;
DEBOUTE la société YR-BP de l'intégralité de ses demandes ;
CONDAMNE la société YR-BP aux dépens de première instance et d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE la société AXA FRANCE IARD de sa demande en paiement ;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.