CA POITIERS (1re ch. civ.), 6 février 2024
CERCLAB - DOCUMENT N° 10809
CA POITIERS (1re ch. civ.), 6 février 2024 : RG n° 22/00784 ; arrêt n° 60
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Il a été stipulé en page 3 du contrat de maîtrise d’œuvre que : « Toute facture dont le règlement se fera par voie contentieuse sera majorée à titre de clause pénale non réductible au sens de l'article 1229 du Code Civil, d'une indemnité fixée forfaitairement à 15 % de la somme restant due ».
L'appelante soutient qu'une telle clause serait abusive au sens des articles L. 212-1 et R. 212-1 du code de la consommation. L'article L. 212-1 précité dispose en son premier alinéa que : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». X. invoque le bénéfice de l'article R. 212-1 précité en ce qu'il dispose que : « Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : [...] 11° Subordonner, dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation par le consommateur au versement d'une indemnité au profit du professionnel »
Cette clause, qui sanctionne un retard de paiement et non la résiliation du contrat, n'est pas abusive au sens des dispositions précitées. Elle est une clause pénale au sens de l'article 1231-5 précité, susceptible de réduction. Il peut être demandé paiement sur ce fondement de la somme hors taxes de 1.625 € (10.833,33 x 15 %).
Il a par ailleurs été stipulé en dernière page du contrat, au paragraphe « résiliation du contrat », que : « Le maître d'ouvrage peut mettre fin au contrat avant son terme normal pour un motif autre qu'une faute du maître d'œuvre. Dans ce cas, le maître d’œuvre a droit au paiement... d'une indemnité de résiliation égale à 50 % de la partie des honoraires qui lui aurait été versée si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue.
Le contrat de maîtrise d’œuvre n'est pas un contrat à durée indéterminée. Il a un terme, l'achèvement des travaux de construction. Les dispositions de l'article R 212-1 précédemment rappelées ne peuvent dès lors pas trouver application. Cette clause pénale est susceptible de réduction.
Les honoraires dus au titre de la mission complète de maîtrise d’œuvre ont été stipulés de 10 % du prix de chantier, soit 21.666,70 € (216.667 x 10 %). L'indemnité que peut réclamer l'intimée est de 10.833,35 € hors taxes (21.666,70 x 50 %). Le total hors taxes des clauses pénales s'élève à 12.458,35 €. X. a partiellement exécuté le contrat de maîtrise d’œuvre, deux factures ayant été réglées. Le montant précité des clauses pénales est, en regard de cette exécution partielle du contrat et des honoraires à charge de l'appelante, manifestement excessif au sens des dispositions précitées. Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a réduit cette pénalité contractuelle à la somme de 5.000 €. »
2/ « L'article L 441-10 II du code de commerce précise notamment que : […] Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. […] » Ces dispositions trouvent en l'espèce application.
Il a été stipulé en page 3 du contrat de maîtrise d’œuvre que : « L'absence de règlement aux échéances figurant sur la facture donnera lieu à l`application de pénalités d'un montant égal au taux d`intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage, et ce dès le jour suivant la date de règlement portée sur la dite facture à compter de la date de réception de la facture, sauf stipulation contraire. Tout retard de règlement ouvre droit au paiement d'une indemnité de retard prévue ci-après ».
La facture en date du 12 décembre 2018 mentionne toutefois en bas de la seconde page : « En cas de retard de paiement, une pénalité égale à 3 fois le taux d'intérêt légal sera exigible (Décret 2009-138 du 3 février 2009) ». L'intimée ne sollicite, ni sur sa facture, ni dans ses écritures la majoration de 10 points du taux des intérêts de retard. Le triplement du taux de l'intérêt légal, légalement prévu, ne constitue pas une clause pénale susceptible d'être réduite par le juge. L'intimée est dès lors fondée à solliciter paiement des intérêts de retard au triple du taux légal à compter de la date d'exigibilité de la facture litigieuse, soit le 13 décembre 2018. Le jugement sera réformé de ce chef. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 6 FÉVRIER 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 22/00784. Arrêt n° 60. N° Portalis DBV5-V-B7G-GQC4. Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 février 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHE-SUR-YON.
APPELANTE :
Madame X.
née le [date] à [Localité 7], [Adresse 2], [Localité 1], ayant pour avocat postulant Maître Amaury EMERIAU de la SCP OUEST AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON et pour avocat plaidant Maître Cyril DUBREIL, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
SARL.H-OM-E
N° SIRET : XXX, [Adresse 9], [Localité 3], ayant pour avocat postulant Maître Nathalie DETRAIT de la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON et pour avocat plaidant Maître Pauline SEGHERS, avocat au barreau de la ROCHE SUR YON
COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 décembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, Madame Anne VERRIER, Conseiller, Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller,
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par contrat en date du 11 mai 2018, X. a confié à la société SR Conseil exerçant sous l'enseigne H-OM-E une mission de maîtrise d'œuvre pour l'aménagement d'une grange située lieu-dit [Adresse 6] sur le territoire de la commune de [Localité 4] (Vendée).
La société H-OM-E a émis une facture d'honoraires de maîtrise d’œuvre en date du 26 juin 2018 d'un montant toutes taxes comprises de 1.200 €, au titre des études préliminaires. Cette facture a été payée par X.
M. Y., architecte Dplg, a établi un mémoire d'honoraires en date du 10 mai 2018, d'un montant de 1.000 €. Cette somme a été payée par X.
Celle-ci a abandonné fin 2018 son projet de rénovation à [Localité 4] pour un nouveau projet situé à [Localité 1] (Loire-Atlantique). Ce projet a été confié à la société H-OM-E, sans modification du premier contrat ou conclusion d'un nouveau contrat.
Par courriel en date du 30 août 2019, X. a notifié à la société H-OM-E son intention de ne plus poursuivre la relation contractuelle.
Cette société lui a adressé une facture n° FA00354 en date du 12 décembre 2018, d'un montant toutes taxes comprises de 13.000 €. Cette facture est demeurée impayée.
Par acte du 15 octobre 2020, la société H-OM-E a assigné X. devant le tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon. Elle a demandé paiement en principal des sommes de :
- 16.360 € correspondant aux factures des prestations réalisées, demeurées impayées ;
- 8.954 € au titre des indemnités de résiliation et de recouvrement par voie contentieuse ;
- 3.930,88 € correspondant aux pénalités de retard stipulées, d'un montant de 10 % de la somme due à compter du 13 décembre 2018, jour suivant la date de règlement portée sur la facture, montant arrêté au 22 mai 2021 à parfaire ;
- 4.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation de ses droits de propriété intellectuelle, en application de la clause pénale prévue aux conditions générales du contrat.
X. a conclu au rejet de ces prétentions. Elle a reconventionnellement demandé paiement à titre de dommages et intérêts des sommes de 8.000 € en réparation de son préjudice économique et de 2.000 € en réparation de son préjudice moral.
Par jugement du 4 février 2022, le tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon a statué en ces termes :
« CONDAMNE Madame X. à payer à la SARL H-0M-E les sommes suivantes :
- 10.833,34€ HT, soit 13.000 € TTC au titre des honoraires impayés, avec intérêts au taux contractuel de 10% à compter du 6 novembre 2019,
- 5.000 € au titre des clauses pénales contractuelles,
CONDAMNE Madame X. à payer à la SARL H-0M-E la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toutes les autres demandes,
CONDAMNE Madame X. aux entiers dépens de l'instance,
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision'.
Il a constaté que les originaux des contrats de maîtrise d’œuvre ne décrivaient pas la même mission.
Il a considéré que :
- la mission confiée à la demanderesse avait excédé celle décrite à l'exemplaire détenu par la défenderesse ;
- celle-ci ayant résilié unilatéralement le contrat de maîtrise d’œuvre avant exécution de la mission confiée, la société H-OM-E était fondée à solliciter paiement des prestations réalisées, avec intérêts de retard au taux contractuel à compter du 6 novembre 2019, date à laquelle la défenderesse avait accusé réception de la facture ;
- les pénalités de retard et l'indemnité de résiliation étaient d'un montant manifestement excessif en regard du taux des intérêts de retard et que leur montant devait être réduit à 5.000 €.
Il a rejeté les demandes indemnitaires de X., d'une part aucun délai de réalisation n'ayant été stipulé au contrat, d'autre part la société H-OM-E ayant été diligente dans l'exécution de ses obligations.
Par déclaration reçue au greffe le 24 mars 2022, X. a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 21 juillet 2022, le premier président a débouté X. de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement.
[*]
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 juin 2023, X. a demandé de :
« Vu les articles 1315 et 1359 du Code civil ;
Vu l'article 287 et suivants du Code de procédure civile ;
Vu l'article 1231-5 du Code civil ;
[...]
INFIRMER le jugement du 4 février 2022 en ce qu'il a :
- Condamné Madame X. à payer la société H-OM-E les somme de 10.833,34 € HT, soit 13.000 € TTC au titre des honoraires impayés avec un taux d'intérêt contractuel de 10 % à compter du 6 novembre 2019 et 5.000 € au titre des clauses pénales contractuelles ;
- Condamné Madame X. à payer à la société H-OM-E la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné Madame X. à payer à la société H-OM-E aux dépens.
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a rejeté les autres demandes de la société H-OM-E.
Statuant à nouveau,
- DÉBOUTER la société H-OM-E de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- En tant que besoin, se prononcer sur l'authenticité du contrat produit par la société H-OM-E ;
- CONDAMNER la société H-OM-E à payer à Madame X. la somme de 8.000 euros au titre de son préjudice économique ;
- CONDAMNER la société H-OM-E à payer à Madame X. la somme de 2.000 euros au titre de son préjudice moral ;
- CONDAMNER la société H-OM-E à payer à Madame X. la somme globale de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER la société H-OM-E aux entiers dépens ».
Elle a contesté :
- avoir confié à l'intimée une mission complète de maîtrise d’œuvre, l'exemplaire du contrat en sa possession ne le stipulant pas ;
- toute atteinte au droit de propriété intellectuelle, d'une part le projet réalisé n'étant pas celui élaboré par l'intimée, d'autre part les plans communiqués, non métrés, ayant été inexploitables.
Elle a soutenu que :
- la stipulation d'une pénalité de retard était contraire à l'article 1231-5 du code civil en ce qu'elle n'était pas réductible ;
- les clauses pénales stipulées étaient des clauses abusives au sens du code de la consommation.
Elle a sollicité l'indemnisation tant d'un préjudice économique, ayant dû retarder la vente de sa maison, que d'un préjudice moral en raison de l'action engagée à son encontre.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2022, la société H-OM-E a demandé de :
« Vu les articles 1103, 1231-5, 1794 et suivants du Code civil,
Vu les articles L. 212-1, R. 212-1 et R. 212-2 du Code de la consommation,
Vu les articles L. 111-1 et suivants du Code de propriété intellectuelle,
Vu les jurisprudences citées,
Vu les pièces versées,
A titre principal,
- Rejeter Madame X. en son appel ainsi qu'en ses demandes, fins et conclusions ;
- L'en débouter ;
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* Condamné Madame X. à payer à la SARL H-OM-E les sommes de 13.000 € TTC au titre des honoraires impayés ;
* Condamné en son principe Madame X. à payer à la SARL H-OM-E une indemnité à titre de clause pénale ;
* Condamné Madame X. à payer à la SARL H-OM-E la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
* Condamné Madame X. aux entiers dépens de l'instance ;
* Rappelé que la décision est de plein droit exécutoire par provision.
- Recevant la société H-OM-E en son appel incident, ainsi qu'en ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* Fixé le point de départ des intérêts de retard à valoir sur la condamnation de Madame X. au paiement de la facture à la date du 6 novembre 2019 ;
* Réduit le montant des clauses pénales contractuelles à hauteur de 5.000 € ;
* Rejeté les demandes de la société H-OM-E relatives aux prestations réalisées pour le projet de [Localité 1] ;
* Débouté la société H-OM-E de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation de ses droits de propriété intellectuelle ;
Statuant à nouveau,
- Condamner Madame X. à payer à la SARL H-OM-E la somme de 3.360 € TTC au titre des honoraires dus au regard des prestations effectivement réalisées et non contestées sur le second projet commandé portant sur l'immeuble sis à [Localité 1] ;
- Condamner Madame X. au paiement des intérêts de retard au taux contractuel de 10 % à compter du 13 décembre 2018, lendemain de la date de la facture conformément au contrat, ou a minima et subsidiairement à compter du 25 septembre 2019, date du mail dans lequel Madame X. accuse réception de la facture ;
- Condamner Madame X. à verser à la société H-OM-E la somme de 8.954 € au titre des indemnités de résiliation et de recouvrement par voie contentieuse en application des clauses contractuelles :
* 15 % des sommes restants dues (13.000 € pour le premier projet + 3.360 € pour le second) au titre de l'indemnité de recouvrement par voie contentieuse, soit 2 454 €
* 50 % des honoraires qui auraient été perçus à défaut de résiliation anticipée (5 % restant sur le budget prévisionnel de 216 667 €HT) au titre de l'indemnité de résiliation, soit 5 416,68 €HT ou 6 500 € TTC ;
- Condamner Madame X. à verser à la société H-OM-E la somme de 4.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation de ses droits de propriété intellectuelle ;
En tout état de cause,
- Condamner Madame X. aux entiers dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, ;
- Condamner Madame X. à payer à la société H-OM-E la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- A défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans l'arrêt à intervenir, condamner Madame X. à payer à la société H-OM-E le montant des sommes retenues par l'huissier chargé de l'exécution forcée au titre de l'article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 (tarif des huissiers), modifié par le décret n° 2001-212 du 8 mars 2001, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile'.
Elle a maintenu que lui avait été confiée une mission complète de maîtrise d’œuvre et qu'elle était contractuellement fondée à demander paiement des prestations qu'elle avait exécutées et qui avaient excédé la simple étude préalable. Elle a exposé avoir réalisé le dossier de consultation des entreprises et avoir constitué celui de demande d'un permis de construire. Elle a ajouté que le prix de ses prestations relatives au second projet devait également lui être payé.
Elle a contesté tout défaut de diligence dans l'exécution des missions confiées.
Elle a maintenu que les intérêts de retard devaient être calculés à compter de la date de la facture.
Selon elle l'appelante, en ayant fait réaliser postérieurement à la rupture de la relation contractuelle une rénovation identique à celle qui lui avait été proposée, avait porté atteinte à ses droits de propriété intellectuelle.
Elle a contesté l'irrégularité des stipulations relatives aux clauses pénales. Elle a rappelé que le premier juge avait fait application de son pouvoir modérateur nonobstant la formulation du contrat. Elle a ajouté que ces clauses, destinées à sanctionner un défaut de paiement spontané rendant nécessaire de procéder par une voie contentieuse, n'étaient pas abusives au sens du code de la consommation. Elle a rappelé que le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'appréciait au regard du préjudice réellement subi et que cet excès n'était en l'espèce pas caractérisé.
Elle a conclu au rejet des demandes indemnitaires de l'appelante en l'absence de préjudice subi, tant économique que moral. Elle a précisé que le retard allégué était imputable à l'appelante qui ne l'avait pas payée à hauteur des prestations réalisées et avait mis fin prématurément au contrat de maîtrise d’œuvre. Elle a ajouté que le préjudice moral allégué trouvait sa cause dans le comportement de l'appelante.
[*]
L'ordonnance de clôture est du 13 novembre 2023.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
SUR LE CONTRAT :
L'article 1101 du code civil rappelle que : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations ».
L'article 1188 du même code dispose que :
« Le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes.
Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation ».
L'article 1189 alinéa 1er du code civil précise que : « Toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier ».
L'article 11190 du même code dispose que : « Dans le doute, le contrat de gré à gré s'interprète contre le créancier et en faveur du débiteur, et le contrat d'adhésion contre celui qui l'a proposé ».
L'article 1194 du code civil rappelle que : « Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi ».
Les exemplaires des contrats produits en originaux par les parties ne stipulent pas les mêmes obligations.
Sur l'exemplaire produit par l'appelante, les missions suivantes confiées au maître d’œuvre ont été cochées en page 2 :
- « AP AVANT PROJET comprenant :
- Etudes préliminaires (vérification des règles d'urbanisme, contrôle de faisabilité et de l'adéquation avec le budget), Plans d'Avant Projet et estimatif » ;
- « ARCH Conception du chantier par notre architecte DPLG (projet de plus de 170 m²) - NB. Celui-ci facturera directement ses prestations ».
Sur l'exemplaire produit par l'intimée, ont été cochées les cases « AP » et « ARCH » précitées, mais aussi celle suivante :
« MC MISSION COMPLETE comprenant :
- Dossier de Consultation des Entreprises (y compris présentation du coût global)
- Plans et formalités
- Mise au point des Marchés de Travaux (préparation des actes d'engagement, assistance à la passation des marchés avec les entreprises)
- Direction de l'Exécution des Travaux (contrôle et suivi de chantier)
- Assistance aux Opérations de Réception de chantier (dossier des ouvrages exécutés et contrôle de conformité du chantier au regard des marchés)
NB. Les honoraires liés à la conception par notre architecte n'est pas prévue dans cette mission ».
Les parties s'opposent sur la stipulation d'une mission complète de maîtrise d’œuvre.
La demande de permis de construire en date du 29 juin 2018 déposée par l'appelante mentionne pour destinataire des correspondances de l'administration la société SR CONCEPT - HOME (accueil@h-om-e.fr) et pour architecte (dplg) M. Y.
Le permis de construire a été délivré par le maire de la commune de [Localité 4] par arrêté du 10 décembre 2018. Il mentionne une demande déposée le 19 octobre 2018, modifiée les 12 et 14 novembre 2018.
L'architecte a été payé par l'appelante.
La mission « PC Dossier de demande d'autorisation de travaux et plans d'exécution » n'a été cochée sur aucun des exemplaires du contrat. Elle a toutefois été exécutée.
Un cahier des clauses techniques particulières (« cctp ») a été établi.
La société H-OM-E a produit un accusé d'envoi en date du 2 octobre 2018 adressé par [Courriel 5] à [Courriel 8]. Cet accusé d'envoi est rédigé en ces termes :
« Bonjour SR Concept,
Vous avez envoyé les fichiers et le message suivants via le service d'envoi de fichiers lords d'Orage.
Vos destinataires ».
Une liste de 16 adresses de courrier électronique d'entreprises suit.
Le courriel de transmission de ces fichiers lourds était le suivant :
« Bonjour,
Veuillez trouver ci-joint les pièces du dossier X. - Rénovation de grange à [Localité 4].
Nous vous remercions de bien vouloir nous communiquer votre devis ».
Les sociétés ou entreprises Blanloeil, Lorieau, Airgine-Mollé, Ceramic Concept, Dvb, Baptiste Genty, RJ Plâtre, Société Genôte de Plâtrerie et SR ont établi des devis, produits à l'instance.
Les plans cotés « de chiffrage » ont été produits aux débats.
Dès lors que l'avant-projet a été établi, que la demande de permis de construire a été effectuée, que ce permis a été obtenu, que le cahier des clauses techniques particulières é été établi, que la consultation des entreprises a été lancée, la mission confiée à la société H-OM-E par l'appelante a excédé les missions cochées sur l'exemplaire de cette dernière et était, ainsi que stipulée sur l'exemplaire conservé par l'intimée, une mission complète de maîtrise d’œuvre.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
SUR LES HONORAIRES RELATIFS AU PROJET DE [Localité 4] :
Il a été stipulé en page 3 du contrat, au paragraphe « rémunération », que :
« Les honoraires du maître d'œuvre correspondent à un pourcentage, fixé à la signature du marché, qui s'applique sur le montant hors taxe final des travaux, tel qu'il résulte du décompte général définitif (DGD) de l'ensemble des marchés de travaux, complété, le cas échéant, par le coût normal des travaux tel qu'il résulterait de leur exécution par une entreprise, lorsqu`ils sont réalisés par le maître d'ouvrage ou d'autres intervenants. Les honoraires sont supportés soit par le maître d'ouvrage, pour les lots qu'il se réserve, soit par les entreprises missionnées, au prorata de leurs marchés, au titre des prestations d'ordonnancement, de suivi de chantier, de réalisation de plan d'exécution et d'apport d'affaires, soit par les deux, et ce conformément aux dispositions fixées par le présent contrat.
En cas de mission partielle (mission sans suivi de chantier ou avec suivi de chantier partiel en raison de lots réservés au maître d'ouvrage), les honoraires seront supportés par le seul maître d'ouvrage. En cas d'interruption définitive de la mission complète, les droits acquis sont calculés en fonction de la valeur des éléments de mission fixés au présent contrat et de leur avancement. En cas d'interruption de la mission en cours de chantier, le taux de rémunération s'applique sur le montant total des marchés de travaux signés, ou à défaut, le montant résultant de l'appel d`offres. En cas d'interruption avant la mise au point des marchés de travaux, le taux de rémunération s'applique sur l'estimation définitive du coût prévisionnel HT des travaux établie par le maître d’œuvre à l`issue des études d`APD, ou, si le contrat est interrompu avant cet élément de mission, sur l'enveloppe prévisionnelle du coût HT des travaux estimée par le maître d’œuvre. Les honoraires ainsi déterminés sont majorés de la TVA selon le(s) taux en vigueur ».
En page 4, au paragraphe « résiliation du contrat », il a notamment été stipulé que :
« Le maître d'ouvrage peut mettre fin au contrat avant son terme normal pour un motif autre qu'une faute du maître d'œuvre. Dans ce cas, le maître d’œuvre a droit au paiement des honoraires correspondant aux missions exécutées et frais liquidés au jour de cette résiliation des intérêts ».
L'intimée demande paiement des honoraires dus au titre des missions « DCE » (consultation des entreprises) et « PC » (dossier de demande de permis de construire et plans d'exécution). Elle a indiqué ne pas solliciter paiement d'honoraires au titre de la mission « MDT » (mise au point des marchés de travaux - préparation des actes d'engagement, assistance à la passation des marchés avec les entreprises).
Le budget hors taxes du chantier figurant sur la facture en date du 12 décembre 2018, d'un montant de 216.667 €, n'a pas été contesté par l'appelante.
La mission « DCE » a été exécutée. Il a été convenu qu'elle était rémunérée à proportion de 0,5 % du budget, soit 1.083,33 € (216.667 x 0,50 %).
La mission « PC » a été partiellement exécutée, la demande de permis de construire ayant été effectuée et le permis de construire obtenu. Les plans d'exécution n'ont pas été produits aux débats. La rupture unilatérale du contrat par l'appelante ne permet pas de retenir de ce chef un manquement contractuel fondant la réduction des honoraires. Est donc due à ce titre la rémunération convenue de 4,50 % du budget, soit 9.750 € (216.667 x 4,50 %).
L'appelante est en conséquence redevable de la somme hors taxes de 10.833,33 € (1.083,34 + 9.750,02), soit la somme toutes taxes comprises de 13.000 € (tva : 20 %).
Le jugement sera confirmé de ce chef
SUR LES HONORAIRES RELATIFS AU PROJET DE [Localité 1] :
L'article 1102 alinéa 1er du code civil dispose que : « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi' et l'article 1103 du même code que : 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».
L'article 1173 du même code précise que : « Les formes exigées aux fins de preuve ou d'opposabilité sont sans effet sur la validité des contrats ».
Il n'est pas contesté par l'appelante que le premier projet de construction a été abandonné, la vente du bien immobilier ne s'étant pas réalisée et qu'un second projet a été envisagé en Loire-Atlantique.
La société H-OM-E justifie de contacts avec le service instructeur d'une demande permis de construire (courriel du 5 décembre 2018 de ce service). Elle a établi plusieurs estimatifs tous corps d'état du projet). Le coût hors taxes en principal du chantier est de 195.792,62 € ou 194.755,07 €, outre diverses options. La société H-OM-E a dressé des plans non cotés de présentation du projet.
Par courriel en date du 12 avril 2019 dont les termes ne sont pas contestés, elle a indiqué à X. que :
« Comme prévu, vous trouverez ci-joint l'avant-projet sommaire (simplifié) de l'aménagement du corps de ferme à [Localité 1].
Vous noterez que la surface habitable totale avoisine les 225 m² habitables ce qui représentera un coût plus élevé que les sommes que vous m'aviez indiqué. Toutefois, suivant les travaux que vous vous réservez, la note finale pourrait baisser.
Concernant l'agencement, vous noterez que le plancher de l'étage devrait être rabaisser pour que cela fonctionne. N'avoir que 2 chambres sur le premier projet (vide sur séjour) permettait de simplifier la réalisation, diminuer les surfaces et donc maîtriser le coût ».
X. a répondu le même jour en ces termes :
« Merci pour les plans
Tout à fait d'accord Avec toi nous renonçons à la 3ème chambre car trop de coût pour abaisser le palier.
On se tel quand tu auras vu nos modifications.
On rentre de vacances ce week-end. On te renvoi les plans un peu modifiés la semaine prochaine, mais la base est super ».
Par courriel en date du 30 août suivant dans lequel elle déplorait le défaut de diligence de sa cocontractante, elle indiqué que :
« Néanmoins afin de rester correcte je suis tout de même prête à vous régler les plans effectués pour la maison de Saint Mars. D'ailleurs je vous remercie de m'envoyer les plans avec les cotes, et je pense que vous pouvez faire un réel geste concernant votre facture, aux vues des soucis dans ce dossier ».
Il résulte de ces développements que X. a verbalement confié à l'intimée l'étude d'un second projet.
Cette relation n'est pas la poursuite du précédent contrat. Aucun écrit n'est venu préciser les obligations réciproques des parties et notamment le montant des honoraires pouvant être dus.
La société H-OM-E demande paiement des sommes hors taxes de :
- 1.000 € au titre de la : « Réalisation d'avant-projet et estimatif » ;
- 1.800 € au titre du : « Relevé des existant (Y compris déplacements, prise de mesures et élaboration des plans de l'existant pour plan côté définitif) ».
Si le montant des travaux à venir a été estimé, il n'est pas justifié de l'établissement d'un avant-projet complet, seul des plans non côtés ayant été réalisés.
Il n'est pas justifié du « relevé des existants » facturé.
Les prestations effectuées n'étant pas celles décrites à la facture litigieuse et les parties n'ayant pas convenu de l'éventuelle rémunération devant être supportée par l'appelante, la société H-OM-E n'est pas fondée en sa demande en paiement présentée de ce chef.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
SUR LES CLAUSES PÉNALES :
L'article 1231-5 du code civil dispose que :
« Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure ».
Il a été stipulé en page 3 du contrat de maîtrise d’œuvre que : « Toute facture dont le règlement se fera par voie contentieuse sera majorée à titre de clause pénale non réductible au sens de l'article 1229 du Code Civil, d'une indemnité fixée forfaitairement à 15 % de la somme restant due ».
L'appelante soutient qu'une telle clause serait abusive au sens des articles L. 212-1 et R. 212-1 du code de la consommation.
L'article L. 212-1 précité dispose en son premier alinéa que : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».
X. invoque le bénéfice de l'article R. 212-1 précité en ce qu'il dispose que :
« Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de :
[...] 11° Subordonner, dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation par le consommateur au versement d'une indemnité au profit du professionnel »
Cette clause, qui sanctionne un retard de paiement et non la résiliation du contrat, n'est pas abusive au sens des dispositions précitées.
Elle est une clause pénale au sens de l'article 1231-5 précité, susceptible de réduction.
Il peut être demandé paiement sur ce fondement de la somme hors taxes de 1.625 € (10.833,33 x 15 %).
Il a par ailleurs été stipulé en dernière page du contrat, au paragraphe « résiliation du contrat », que :
« Le maître d'ouvrage peut mettre fin au contrat avant son terme normal pour un motif autre qu'une faute du maître d'œuvre. Dans ce cas, le maître d’œuvre a droit au paiement... d'une indemnité de résiliation égale à 50 % de la partie des honoraires qui lui aurait été versée si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue.
Le contrat de maîtrise d’œuvre n'est pas un contrat à durée indéterminée. Il a un terme, l'achèvement des travaux de construction.
Les dispositions de l'article R 212-1 précédemment rappelées ne peuvent dès lors pas trouver application.
Cette clause pénale est susceptible de réduction.
Les honoraires dus au titre de la mission complète de maîtrise d’œuvre ont été stipulés de 10 % du prix de chantier, soit 21.666,70 € (216.667 x 10 %). L'indemnité que peut réclamer l'intimée est de 10.833,35 € hors taxes (21.666,70 x 50 %).
Le total hors taxes des clauses pénales s'élève à 12.458,35 €.
X. a partiellement exécuté le contrat de maîtrise d’œuvre, deux factures ayant été réglées.
Le montant précité des clauses pénales est, en regard de cette exécution partielle du contrat et des honoraires à charge de l'appelante, manifestement excessif au sens des dispositions précitées.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a réduit cette pénalité contractuelle à la somme de 5.000 €.
SUR LES INTÉRÊTS DE RETARD :
L'article 1231-6 du code civil dispose en son premier alinéa que : « Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure ».
L'article L. 441-9 I du code de commerce dispose notamment que :
« Tout achat de produits ou toute prestation de service pour une activité professionnelle fait l'objet d'une facturation. [...]
La facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir. Elle précise les conditions d'escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l'application des conditions générales de vente, le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date de règlement inscrite sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier en cas de retard de paiement. Le règlement est réputé réalisé à la date à laquelle les fonds sont mis, par le client, à la disposition du bénéficiaire ou de son subrogé ».
L'article L 441-10 II du code de commerce précise notamment que :
« Les conditions de règlement mentionnées au I de l'article L. 441-1 précisent les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due ».
Ces dispositions trouvent en l'espèce application.
Il a été stipulé en page 3 du contrat de maîtrise d’œuvre que :
« L'absence de règlement aux échéances figurant sur la facture donnera lieu à l`application de pénalités d'un montant égal au taux d`intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage, et ce dès le jour suivant la date de règlement portée sur la dite facture à compter de la date de réception de la facture, sauf stipulation contraire ».
Tout retard de règlement ouvre droit au paiement d'une indemnité de retard prévue ci-après ».
La facture en date du 12 décembre 2018 mentionne toutefois en bas de la seconde page : « En cas de retard de paiement, une pénalité égale à 3 fois le taux d'intérêt légal sera exigible (Décret 2009-138 du 3 février 2009) ».
L'intimée ne sollicite, ni sur sa facture, ni dans ses écritures la majoration de 10 points du taux des intérêts de retard.
Le triplement du taux de l'intérêt légal, légalement prévu, ne constitue pas une clause pénale susceptible d'être réduite par le juge.
L'intimée est dès lors fondée à solliciter paiement des intérêts de retard au triple du taux légal à compter de la date d'exigibilité de la facture litigieuse, soit le 13 décembre 2018.
Le jugement sera réformé de ce chef.
SUR LA VIOLATION DE DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE :
L'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose en ses alinéas 1 et 2 que :
« L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.
Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du présent code ».
L'article L. 112-2 du même code précise que :
« Sont considérés notamment comme œuvres de l'esprit au sens du présent code :
[...]
7° Les œuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;
[...]
12° Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture et aux sciences ».
Le contrat de maîtrise d’œuvre stipule en dernière page, au paragraphe « propriété intellectuelle », que :
« Le droit de propriété du maître d’œuvre sur ses œuvres trouve son fondement dans les articles L.111-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. Sont ainsi protégés du seul fait de leur création : les plans, croquis, maquettes et ouvrages conçus par le maître d'œuvre ainsi que toutes les photos, qu'ils aient fait ou non l'objet d'un contrat de maîtrise d'œuvre. L'utilisation frauduleuse des œuvres, leur vente ou tout autre agissement ne respectant pas les dispositions de l'article L. 112-2, 7° du Code de la Propriété intellectuelle exposera le preneur à l'application d'une clause pénale non réductible au sens de l'article 1229 du Code Civil fixé à 4.000 € HT ».
La charge de la preuve du manquement incombe à l'intimée.
Celle-ci ne soutient pas que les plans réalisés en vue du projet de [Localité 4] ont fait l'objet d'une utilisation ayant porté atteinte à ses droits de propriété intellectuelle.
Il ne se déduit pas de la poursuite par l'appelante du projet de rénovation de bâtiments situés à [Localité 1] une atteinte aux droits de propriété intellectuelle de la société H-OM-E étant précisé d'une part que les plans de l'avant-projet produits aux débats ne comportaient aucune indication chiffrée, d'autre part qu'elle n'établit pas que la rénovation a été menée conformément au projet décrit à ses plans.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a rejeté la demande présentée de ce chef par l'intimée.
SUR LES DEMANDES DE X. :
La charge de la preuve des manquements allégués de la société H-OM-E pèse sur l'appelante.
Il n'est en l'espèce justifié d'aucun manquement de cette société en ce que :
- le contrat de maîtrise d’œuvre a été conclu le 11 mai 2018 ;
- le permis de construire, demandé le 29 juin 2018, a été délivré le 10 décembre 2018, soit 7 mois après la conclusion du contrat de maîtrise d’œuvre ;
- la consultation des entreprises a été initiée par courriel en date du 2 octobre 2018, soit moins de 4 mois après la conclusion du contrat précité ;
- le contrat de maîtrise d’œuvre n'avait pas stipulé de délai de réalisation de la construction.
X. ne justifie par ailleurs que par affirmation du préjudice qu'elle soutient avoir subi.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a débouté cette dernière de sa demande de dommages et intérêts.
SUR LES DÉPENS :
La charge des dépens d'appel incombe à l'appelante.
SUR LES FRAIS DE RECOUVREMENT DE LA CRÉANCE :
L'article L 111-8 du Code des procédures civiles d'exécution dispose que :
« A l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés. Les contestations sont tranchées par le juge.
Les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s'ils concernent un acte dont l'accomplissement est prescrit par la loi au créancier. Toute stipulation contraire est réputée non écrite, sauf disposition législative contraire.
Cependant, le créancier qui justifie du caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance peut demander au juge de l'exécution de laisser tout ou partie des frais ainsi exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi. ».
La prestation de recouvrement ou d'encaissement de l'article A 444-32 du code de commerce (n° 129 du tableau 3-1 du décret n° 2016-230 du 26 février 2016, anciennement droit proportionnel dégressif supplémentaire, article 10 du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996) que peut solliciter le commissaire de justice chargé du recouvrement de sommes est par application de l'article R 444-55 du code de commerce à la charge du créancier.
La demande présentée sur ce fondement par l'appelant sera pour ces motifs rejetée.
SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :
Le premier juge a équitablement apprécié l'indemnité due sur ce fondement par l'appelante.
Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de l'intimée de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit à la demande formée de ce chef pour le montant ci-après précisé.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement du 4 février 2022 du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon sauf en ce qu'il dit que les intérêts de retard sont calculés au taux contractuel de 10 % sur la somme de 13.000 € à compter du 6 novembre 2019 ;
et statuant à nouveau de ce chef d'infirmation,
DIT que les intérêts de retard seront calculés sur la somme de 13.000 € à compter du 13 décembre 2018 au triple du taux légal ;
REJETTE la demande de la société H-OM-E relative aux frais d'exécution de l'arrêt ;
CONDAMNE X. aux dépens d'appel ;
CONDAMNE X. à payer en cause d'appel à la société H-OM-E la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,