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TA MARSEILLE (8e ch.), 27 mars 2024

Nature : Décision
Titre : TA MARSEILLE (8e ch.), 27 mars 2024
Pays : France
Juridiction : Marseille (TA)
Demande : 2000337
Date : 27/03/2024
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 15/01/2020
Décision antérieure : TA MARSEILLE, 8 novembre 2022
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10811

TA MARSEILLE (8e ch.), 27 mars 2024 : req n° 2000337 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « 3. Il ressort notamment de la lettre de pré-injonction du 7 mars 2019 et de la décision d'injonction en litige que les manquements constatés à l'encontre de l'OM relèvent des dispositions de l'article L. 212-1 du chapitre II du titre 1er du livre 2 du code de la consommation, aux termes desquelles : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa (…) ». 4. Il résulte de ce qui vient d'être dit aux points 2 et 3 que Mme X., signataire de la décision d'injonction attaquée, titulaire du grade de contrôleur principal de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, était habilitée à constater les agissements reprochés à la société requérante, à l'informer de l'injonction susceptible d'intervenir aux fins de la mettre en mesure de présenter ses observations, et à prononcer l'injonction litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision en litige doit être écarté. »

2/ « 7. L'article 13 des conditions générales de vente directe et de vente à distances des tickets simples pour la saison 2018/2019 de la société OM stipule que : « L'Acheteur et/ou le Détenteur déclare connaître parfaitement les caractéristiques de l'activité de l'OM. Ainsi l'organisation des Matches est dépendante de modification, d'annulation partielle, pour toutes sortes de raisons telles que survenance d'intempéries, de grèves, de changement de réglementation, de suspension de terrain et toutes sortes d'autres raisons qui expliquent que cette liste n'est pas exhaustive. De même, l'Acheteur et/ou le Détenteur déclare connaître et accepter le caractère aléatoire des compositions d'équipes, du résultat sportif et de la qualité de toute manifestation sportive./L'OM ne pourra être tenu pour responsable des éventuelles modifications ou annulations partielles et/ou totales des Matches prévus au calendrier./En outre, la responsabilité de l'OM ne pourra en aucun cas être engagée pour la survenance d'évènements constitutifs de la force majeure, du fait d'un tiers ou du fait d'un de ses employés. Sont notamment exclus de sa responsabilité : la survenance d'intempéries, de grèves, de changement de réglementation, de suspension de terrain, d'interruption de Match, de report de Match, de décision d'autorités compétentes en matière de sécurité et/ou de discipline (huis clos notamment), la cessation de la convention de mise à disposition du Stade, mais encore les cas de terrorisme, attentat, guerre, guerre civile, émeute et révolution, acte de piraterie, sabotage, acte de piratage, réquisition, confiscation, nationalisation, embargo, rupture, blocage ou endommagement des voies et moyens de transport ou réseaux de communication, expropriation, cataclysme naturel tel que violente tempête, inondation, explosion, incendie, épidémie, pandémie, pénurie de carburant, boycott, grève, grève du zèle, occupation d'usine, acte de l'autorité, arbitraire ou non, ou de tout autre évènement venant perturber la bonne exécution du présent contrat. /Aussi, aucun remboursement ne sera effectué en cas notamment de report du Match ou de changement de programmation du Match à un jour et/ou un horaire différent(s). Dans de tels cas, les Ticket(s) délivré(s) à l'occasion du présent achat demeure(nt) entièrement valable(s). /L'Acheteur et/ou le Détenteur renonce à toute indemnité de quelque nature que ce soit ».

8. Il ressort des pièces du dossier que le calendrier et les horaires des rencontres sportives sont fixés par la commission du calendrier de la Ligue de football professionnel (LFP), titulaire d'une délégation de service public, conformément aux articles 525 à 528 du règlement de la Ligue, la décision de report ou d'annulation d'un match, ou la décision d'une sanction comme le huis-clos ne dépendant que de la Ligue. Il ressort en outre des pièces du dossier, notamment des termes du jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 21 décembre 2023 précité, que les décisions de report ou d'annulation d'un match ne constituent pas, au sens de l'article 1218 du code civil, une circonstance de force majeure, en ce sens qu'un changement dans le calendrier ou l'horaire d'une rencontre sportive n'est pas imprévisible. Il résulte d'ailleurs des écritures de la société OM et des mentions portées sur les tickets vendus que les dates et horaires communiqués au consommateur ne sont pas définitifs, et qu'ils dépendent des décisions de la LFP. Un tel mode de fonctionnement est donc parfaitement connu de l'OM et ce dès avant la mise en vente des billets. Dès lors, les décisions de la LFP ne sont pas de nature à exonérer la société OM de sa responsabilité contractuelle telle que définie à l'article 1217 du code civil, permettant au consommateur, en cas d'inexécution totale ou partielle du contrat de refuser ou de suspendre l'exécution de sa propre obligation, de poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation, d'obtenir une réduction de prix, de provoquer la résolution du contrat ou de demander une réparation. Par ailleurs, et même en présence d'une circonstance de force majeure, l'article 1218 du code civil prévoit que si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait justifie la résolution du contrat. Il s'évince de la simple lecture de l'article 13 des conditions générales de vente ci-dessus, et notamment de l'emploi de la formule générale, à la suite d'une énumération de circonstances diverses, de « tout événement venant perturber la bonne exécution du contrat », que le consommateur renonce à toute indemnité en cas d'annulation ou de report d'une rencontre sportive pour quelque cause que ce soit, même si elle ne constitue pas un cas de force majeure, le fait d'un tiers telle qu'une décision de la LFP, ou d'un employé de l'OM. En cas de report, le billet demeure valable pour la nouvelle date, mais sans possibilité de remboursement, c'est à dire de résolution du contrat. Ainsi que l'a jugé le juge judiciaire, ces stipulations placent donc le consommateur dans une situation moins favorable que les règles supplétives de droit commun des contrats, et créent à son détriment un déséquilibre significatif dès lors qu'elles dérogent aux dispositions des articles 1217 et 1218 du code civil, suppriment son droit à indemnisation quelle que soient les circonstances empêchant l'exécution de ses obligations par le professionnel et interdisent la résolution du contrat même si un retard résultant de la force majeure le justifierait. Il en résulte que les stipulations de l'article 13 des conditions générales de vente de tickets pour la saison 2018/2019 sont de façon irréfragable présumées abusives au sens du 6° de l'article R. 212-1 du code de la consommation. Le manquement aux dispositions citées au point 5 est donc constitué. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet a estimé que cet article 13 contenait une clause abusive au sens des dispositions de l'article L. 212-1 et du 6° de l'article R. 212-1 du code de la consommation.

9. Le moyen tiré de ce que la société requérante n'aurait pas méconnu les dispositions du 7° de l'article R. 212-1 du code de la consommation est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que le préfet s'est fondé sur les dispositions du 6° pour considérer que l'article 13 des CGC revêtait le caractère d'une clause abusive.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision d'injonction du 21 août 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône doivent être rejetées. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MARSEILLE

HUITIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 27 MARS 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro de requête : 2000337. Numéro de rôle : 68005.

 

DEMANDEUR :

Société anonyme sportive professionnelle (SASP) Olympique de Marseille

 

DÉFENDEUR :

Préfet des Bouches-du-Rhône

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2020, la société anonyme sportive professionnelle (SASP) Olympique de Marseille, représentée par Maître Grimaldi, a demandé au tribunal :

1°) d'annuler la décision d'injonction du 21 août 2019 prise par le préfet des Bouches-du-Rhône en application de l'article L. 521-1 du code de la consommation en tant qu'elle lui demande, dans un délai de trois mois, de modifier ses conditions générales de vente de tickets pour la saison 2018/2019 afin de respecter l'équilibre des droits et obligations des parties au contrat en cas d'annulation ou de report d'une manifestation sportive, ainsi que la décision du 18 novembre suivant rejetant son recours gracieux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a conclu au rejet de la requête.

Par un jugement avant dire droit du 8 novembre 2022, le tribunal administratif a sursis à statuer jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Marseille se soit prononcé sur la licéité des stipulations de l'article 13 des conditions générales de vente (CGV) des tickets pour la saison 2018/2019 au sens des dispositions des articles L. 212-1 et R. 212-1 du code de la consommation.

Par un jugement RG n° 23/07112 du 21 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Marseille s'est prononcé sur cette question.

Les parties n'ont pas produit d'observations postérieurement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu : - le code civil ; - le code de la consommation ; - le code du sport ; - le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gaspard-Truc, - les conclusions de M. Garron, rapporteur public, - et les observations de Maître Schwing, représentant la SASP Olympique de Marseille et de Mme A, pour le préfet des Bouches-du-Rhône.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Considérant ce qui suit :

1. Le club de football « l'Olympique de Marseille » (OM), exploité par la société anonyme sportive professionnelle (SASP), commercialise les billets de ses matchs organisés à domicile au stade Vélodrome de Marseille. A la suite de deux plaintes de consommateurs s'étant vu refuser, après le report d'un match, le remboursement de leurs billets, la direction départementale de la protection des populations des Bouches-du-Rhône (DDPP 13) a contrôlé l'activité de la société le 14 février 2019. A cette occasion, les contrôleurs ont retenu, notamment, que l'article 13 des conditions générales de vente (CGV) des tickets pour la saison 2018/2019 méconnaissait les dispositions de l'article L. 212-1 du code de la consommation prohibant les clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. Par un courrier de pré-injonction du 7 mars 2019, le contrôleur de la DDPP 13 a informé la société OM de son intention de lui enjoindre de supprimer cette clause considérée comme abusive de ses CGV dans un délai de trois mois et l'a invitée à présenter ses observations écrites ou orales dans un délai de quinze jours. Après avoir reçu les observations écrites de la société requérante le 28 mars 2019, une décision d'injonction du 21 août 2019 a été prise par le préfet des Bouches-du-Rhône sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de la consommation. La société OM demande au tribunal l'annulation de cette décision d'injonction en tant qu'elle lui demande, dans un délai de trois mois, de modifier ses CGV afin de respecter l'équilibre des droits et obligations des parties au contrat en cas d'annulation ou de report d'une manifestation sportive, ensemble la décision du 18 novembre 2019 rejetant son recours gracieux. Par un jugement avant dire droit du 8 novembre 2022, le tribunal administratif a sursis à statuer jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Marseille se prononce sur la licéité des stipulations de l'article 13 des CGV au sens des dispositions précitées des articles L. 212-1 et R. 212-1 du code de la consommation. Le tribunal judiciaire de Marseille s'est prononcé par un jugement du 21 décembre 2023.

 

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 511-2 du code de la consommation : « Les agents habilités peuvent exercer les pouvoirs qu'ils tiennent des dispositions du présent livre et mettre en œuvre les mesures prévues au chapitre Ier du titre II sur toute l'étendue du territoire national. ». Aux termes de l'article L. 511-3 du même code : « Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont habilités à rechercher et constater les infractions ou les manquements aux dispositions mentionnées à la présente section dans les conditions définies par celles-ci. ». En vertu de l'article L. 511-6 de ce code : « Les agents [de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes] sont habilités à rechercher et à constater les infractions ou les manquements aux dispositions suivantes :/1° Les chapitres Ier, II et IV du titre Ier du livre Ier ; (...) ». Selon l'article L. 521-1 de ce même code : « Lorsque les agents habilités constatent un manquement ou une infraction (...), ils peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre à un professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable qu'ils fixent, de se conformer à ses obligations ».Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : « Les agents habilités peuvent, dans les mêmes conditions, enjoindre à tout professionnel de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite ou interdite ».

3. Il ressort notamment de la lettre de pré-injonction du 7 mars 2019 et de la décision d'injonction en litige que les manquements constatés à l'encontre de l'OM relèvent des dispositions de l'article L. 212-1 du chapitre II du titre 1er du livre 2 du code de la consommation, aux termes desquelles : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa (…) ».

4. Il résulte de ce qui vient d'être dit aux points 2 et 3 que Mme X., signataire de la décision d'injonction attaquée, titulaire du grade de contrôleur principal de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, était habilitée à constater les agissements reprochés à la société requérante, à l'informer de l'injonction susceptible d'intervenir aux fins de la mettre en mesure de présenter ses observations, et à prononcer l'injonction litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision en litige doit être écarté.

5. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de la consommation : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (...) /Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa. (...) ». Aux termes de l'article R. 212-1 du même code : « Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : (...) 6° Supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ; /7° Interdire au consommateur le droit de demander la résolution ou la résiliation du contrat en cas d'inexécution par le professionnel de ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou de son obligation de fourniture d'un service (...) ».

6. Il ressort des termes de l'acte attaqué que le préfet des Bouches-du-Rhône a estimé que l'article 13 des conditions générales de vente directe et de vente à distance des tickets simples pour la saison 2018/2019 de la société OM revêtait le caractère d'une clause abusive au sens des dispositions de l'article L. 212-1 et du 6° de l'article R. 212-1 du code de la consommation prohibant de telles clauses.

7. L'article 13 des conditions générales de vente directe et de vente à distances des tickets simples pour la saison 2018/2019 de la société OM stipule que : « L'Acheteur et/ou le Détenteur déclare connaître parfaitement les caractéristiques de l'activité de l'OM. Ainsi l'organisation des Matches est dépendante de modification, d'annulation partielle, pour toutes sortes de raisons telles que survenance d'intempéries, de grèves, de changement de réglementation, de suspension de terrain et toutes sortes d'autres raisons qui expliquent que cette liste n'est pas exhaustive. De même, l'Acheteur et/ou le Détenteur déclare connaître et accepter le caractère aléatoire des compositions d'équipes, du résultat sportif et de la qualité de toute manifestation sportive./L'OM ne pourra être tenu pour responsable des éventuelles modifications ou annulations partielles et/ou totales des Matches prévus au calendrier./En outre, la responsabilité de l'OM ne pourra en aucun cas être engagée pour la survenance d'évènements constitutifs de la force majeure, du fait d'un tiers ou du fait d'un de ses employés. Sont notamment exclus de sa responsabilité : la survenance d'intempéries, de grèves, de changement de réglementation, de suspension de terrain, d'interruption de Match, de report de Match, de décision d'autorités compétentes en matière de sécurité et/ou de discipline (huis clos notamment), la cessation de la convention de mise à disposition du Stade, mais encore les cas de terrorisme, attentat, guerre, guerre civile, émeute et révolution, acte de piraterie, sabotage, acte de piratage, réquisition, confiscation, nationalisation, embargo, rupture, blocage ou endommagement des voies et moyens de transport ou réseaux de communication, expropriation, cataclysme naturel tel que violente tempête, inondation, explosion, incendie, épidémie, pandémie, pénurie de carburant, boycott, grève, grève du zèle, occupation d'usine, acte de l'autorité, arbitraire ou non, ou de tout autre évènement venant perturber la bonne exécution du présent contrat. /Aussi, aucun remboursement ne sera effectué en cas notamment de report du Match ou de changement de programmation du Match à un jour et/ou un horaire différent(s). Dans de tels cas, les Ticket(s) délivré(s) à l'occasion du présent achat demeure(nt) entièrement valable(s). /L'Acheteur et/ou le Détenteur renonce à toute indemnité de quelque nature que ce soit ».

8. Il ressort des pièces du dossier que le calendrier et les horaires des rencontres sportives sont fixés par la commission du calendrier de la Ligue de football professionnel (LFP), titulaire d'une délégation de service public, conformément aux articles 525 à 528 du règlement de la Ligue, la décision de report ou d'annulation d'un match, ou la décision d'une sanction comme le huis-clos ne dépendant que de la Ligue. Il ressort en outre des pièces du dossier, notamment des termes du jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 21 décembre 2023 précité, que les décisions de report ou d'annulation d'un match ne constituent pas, au sens de l'article 1218 du code civil, une circonstance de force majeure, en ce sens qu'un changement dans le calendrier ou l'horaire d'une rencontre sportive n'est pas imprévisible. Il résulte d'ailleurs des écritures de la société OM et des mentions portées sur les tickets vendus que les dates et horaires communiqués au consommateur ne sont pas définitifs, et qu'ils dépendent des décisions de la LFP. Un tel mode de fonctionnement est donc parfaitement connu de l'OM et ce dès avant la mise en vente des billets. Dès lors, les décisions de la LFP ne sont pas de nature à exonérer la société OM de sa responsabilité contractuelle telle que définie à l'article 1217 du code civil, permettant au consommateur, en cas d'inexécution totale ou partielle du contrat de refuser ou de suspendre l'exécution de sa propre obligation, de poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation, d'obtenir une réduction de prix, de provoquer la résolution du contrat ou de demander une réparation. Par ailleurs, et même en présence d'une circonstance de force majeure, l'article 1218 du code civil prévoit que si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait justifie la résolution du contrat. Il s'évince de la simple lecture de l'article 13 des conditions générales de vente ci-dessus, et notamment de l'emploi de la formule générale, à la suite d'une énumération de circonstances diverses, de « tout événement venant perturber la bonne exécution du contrat », que le consommateur renonce à toute indemnité en cas d'annulation ou de report d'une rencontre sportive pour quelque cause que ce soit, même si elle ne constitue pas un cas de force majeure, le fait d'un tiers telle qu'une décision de la LFP, ou d'un employé de l'OM. En cas de report, le billet demeure valable pour la nouvelle date, mais sans possibilité de remboursement, c'est à dire de résolution du contrat. Ainsi que l'a jugé le juge judiciaire, ces stipulations placent donc le consommateur dans une situation moins favorable que les règles supplétives de droit commun des contrats, et créent à son détriment un déséquilibre significatif dès lors qu'elles dérogent aux dispositions des articles 1217 et 1218 du code civil, suppriment son droit à indemnisation quelle que soient les circonstances empêchant l'exécution de ses obligations par le professionnel et interdisent la résolution du contrat même si un retard résultant de la force majeure le justifierait. Il en résulte que les stipulations de l'article 13 des conditions générales de vente de tickets pour la saison 2018/2019 sont de façon irréfragable présumées abusives au sens du 6° de l'article R. 212-1 du code de la consommation. Le manquement aux dispositions citées au point 5 est donc constitué. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet a estimé que cet article 13 contenait une clause abusive au sens des dispositions de l'article L. 212-1 et du 6° de l'article R. 212-1 du code de la consommation.

9. Le moyen tiré de ce que la société requérante n'aurait pas méconnu les dispositions du 7° de l'article R. 212-1 du code de la consommation est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que le préfet s'est fondé sur les dispositions du 6° pour considérer que l'article 13 des CGC revêtait le caractère d'une clause abusive.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision d'injonction du 21 août 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône doivent être rejetées.

 

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la SASP OM soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SASP OM est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la société anonyme sportive professionnelle (SASP) Olympique de Marseille et au préfet des Bouches-du-Rhône.

Copie en sera adressée au président du tribunal judiciaire de Marseille.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient : Mme Jorda-Lecroq, présidente, Mme Gaspard-Truc, première conseillère, Mme Forest, première conseillère, Assistées de Mme Faure, greffière.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2024.

La rapporteure,                    La présidente,                                   La greffière,

Signé                                      Signé                                                  Signé

F. Gaspard-Truc                  K. Jorda-Lecroq                              N. Faure