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TGI COLMAR (ch. com.), 22 janvier 2004

Nature : Décision
Titre : TGI COLMAR (ch. com.), 22 janvier 2004
Pays : France
Juridiction : TGI Colmar. ch. com.
Demande : 02/00412
Décision : 4J/53/04
Date : 22/01/2004
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 31/05/2002
Numéro de la décision : 53
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1381

TGI COLMAR (ch. com.), 22 janvier 2004 : RG n° 02/00412 ; jugement n° 4J/53/04

(sur appel CA Colmar (1re ch. civ. A), 7 février 2006 : RG n° 04/00769)

 

Extrait : « Si la loi sur le démarchage à domicile ne s'applique pas aux commerçants, cette exclusion s'arrête lorsque les contrats n'ont pas de rapport direct avec l'activité professionnelle. Toutefois la commande passée porte sur la fourniture des cartes-menus du salon de thé-pâtisserie. Dès lors que ces documents sont nécessaires voire indispensables à l'exploitation d'un commerce de salon de thé-pâtisserie, ils rentrent dans le cadre de son activité. Ainsi le contrat conclu par Madame X. est en rapport direct avec son activité professionnelle. Ainsi ayant conclu un contrat pour une fourniture en rapport direct avec son activité, la défenderesse ne peut pas bénéficier des dispositions de la loi sur le démarchage à domicile. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR

CHAMBRE COMMERCIALE

JUGEMENT DU 22 JANVIER 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 02/00412. Jugement n° 4J/53/04. Dans la procédure introduite par :

 

DEMANDERESSE :

SARL INTER ÉDITION

dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître Geneviève MINET-CAMBERLEIN, avocat au barreau de STRASBOURG

 

DÉFENDERESSE :

- SARL PMB EXPLOITANT LE SALON DE THE « X. »

dont le siège social est sis [adresse], Représentée par Maître Christian MULLER, avocat au barreau de COLMAR

- APCCDCA ASSOCIATION DE PRÉVENTION ET DE CONSEIL CONTRE LE DÉMARCHAGE COMMERCIAL ABUSIF

dont le siège social est sis [adresse], Représentée par Maître Jean-Michel PAULUS, avocat au barreau de COLMAR

 

CONCERNE : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

DÉBATS : 4 décembre 2003

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats et du délibéré : Madame Chantal PALPACUER, Vice-Président - Monsieur Maurice GOELER, Juge consulaire - M. André KLEIN, Juge Consulaire

Greffier présent aux débats et au prononcé : Madame Aime DAVID, ff [faisant fonction] de Greffier

Après avoir à l'audience publique du 4 décembre 2003, entendu les avocats des parties en leurs conclusions et plaidoiries, et en avoir délibéré conformément à la loi, a statué comme suit :

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] FAITS, MOYENS DES PARTIES ET PROCÉDURE :

Par acte en date du 31 mai 2002, la SARL INTER ÉDITION a fait assigner devant la Chambre commerciale près le Tribunal de grande instance de Colmar, la SARL PMB exploitant le salon de thé « X. » aux fins de la voir condamnée à lui payer la somme de 12.033,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 200 [N.B. année incomplète], date de réception de la mise en demeure ainsi que celle de 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle expose que la SARL PMB a passé commande auprès de la SARL INTER ÉDITION de 4.000 menus au prix de 12.033,72 euros.

Or le 31 août 2001, la défenderesse a annulé la commande en se fondant sur les dispositions du code de la consommation et notamment sur le démarchage à domicile.

Elle a refusé cette résiliation mais a fait une proposition transactionnelle. Toutefois la défenderesse n'a plus donné signe de vie de sorte que la présente procédure se justifie.

Dans ses conclusions récapitulatives du 12 novembre 2003, la SARL PMB dirigée par Mademoiselle X., indique exploiter un petit salon de pâtisserie à [ville]. Elle reconnaît avoir été destinataire d'un tract publicitaire de la demanderesse auquel elle a répondu. Elle a reçu le représentant de la demanderesse le 29 août 2001 qui lui a proposé une commande de 5.000 menus.

Estimant le nombre excessif, le représentant a, à sa demande, réduit la commande à 4.000 menus et elle a signé le bon de commande.

Lorsqu'il lui a été réclamé paiement de l'acompte de 4.116 euros, elle a demandé l'annulation de la commande se rendant compte alors qu'elle n'avait aucun besoin de la quantité commandée.

Le représentant lui propose de réduire l'acompte à la somme de 762 euros mais devant son refus, il part avec le bon de commande signé sans lui laisser le double. Elle résilie la commande dès le 31 août 2001.

Elle s'oppose à la demande en faisant valoir que la demanderesse avait failli à son obligation de conseil. Selon elle, il appartenait à la société demanderesse, vendeur professionnel de la renseigner avant la commande et notamment sur ses besoins. En l'espèce la commande est disproportionnée par rapport à la taille de l'établissement exploité.

Elle précise n'utiliser qu'une centaine de cartes par an, n'ayant que 5 tables de 4 personnes dans le salon de thé.

Enfin elle fait observer que de nombreux commerçants ont été abusés par les méthodes de la demanderesse et se sont regroupés au sein d'une association.

[minute page 3] En dernier lieu, elle indique que le bon de commande signé n'est pas conforme aux dispositions légales et que ces irrégularités sont de nature à entraîner le prononcé de la nullité du contrat.

Elle souligne aussi que la demanderesse n'a jamais exécuté la commande et demande que les dispositions sur le démarchage à domicile s'appliquent.

Elle conclut donc au débouté et à l'octroi d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société demanderesse dans ses conclusions récapitulatives du 5 septembre 2003 fait valoir qu'elle n'a jamais demandé d'acompte et qu'aucun montant n'a jamais été payé. Elle met en évidence que le bon de commande ne comporte aucune rature sur ce point.

Elle conteste avoir manqué à son obligation de conseil. Elle soutient que la quantité commandée a effectivement été raturée, le montant de 5.000 menus ayant été barré et remplacé par 4.000. Ainsi elle soutient qu'il est établi qu'elle a bien discuté de cette quantité avec le représentant et donc commandé en tout connaissance de cause.

Elle fait valoir qu'elle n'a pas démarré l'exécution des travaux du fait du présent litige et que la défenderesse ne signera pas le bon à tirer puisqu'elle demande la nullité du contrat.

Elle maintient donc sa demande et rappelle que peu de contrats donnent lieu à des litiges et que pour ces derniers elle a eu gain de cause en justice dans de nombreux cas.

L'ASSOCIATION DE PRÉVENTION et DE CONSEIL CONTRE LE DÉMARCHAGE COMMERCIAL ABUSIF est intervenue volontairement dans la présente procédure.

Elle demande au tribunal de dire que le bon de commande a bien été obtenu dans le cadre d'un démarchage à domicile ne respectant pas les dispositions des articles L. 121-23 du code civil [N.B. conforme à la minute, lire code de la consommation].

Elle demande la condamnation de la demanderesse aux frais et dépens et à lui verser une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La demanderesse a conclu au rejet de l'intervention volontaire.

L'affaire a été clôturée le 13 novembre 2003. L'ordonnance de clôture a été rabattue le 4 décembre 2004. L'instruction close une nouvelle fois le 4 décembre 2004 et plaidée le même jour et mise en délibéré au 15 janvier 2004 prorogé au 22 janvier 2004.

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il ressort du dossier que Madame X. a commandé le 29 août 2001, 4.000 cartes de menus au prix unitaire de 16,50 Francs HT. Le bon de commande porte la signature de la défenderesse.

Le 31 août 2001, Madame X. annule le bon de commande par lettre recommandée avec accusé de réception en se fondant sur les dispositions de l'article L. 121-25 du code de la consommation.

A ce moment elle n'indique pas de motif particulier et réclame le double du bon de commande qu'elle n'a pas en sa possession.

La demanderesse répond alors qu'elle n'accepte pas la résiliation d'une commande ferme et définitive.

Le 19 octobre 2001, elle met la défenderesse en demeure de payer le montant de la commande.

La défenderesse dans un courrier du 29 octobre 2001, précise qu'elle s'est immédiatement rendue compte de son erreur et que malgré cela, le représentant est parti avec la commande sans d'ailleurs lui en laisser le double qu'elle admet avoir reçu par la suite par courrier.

Elle demande que l'affaire se règle à l'amiable. La demanderesse lui propose de réduire la commande à 3 000 cartes pour le même prix unitaire.

Le 20 décembre 2001, elle écrit que ses occupations professionnelles ne lui permettent pas de se pencher sur le problème qu'elle réglera ultérieurement.

Si la loi sur le démarchage à domicile ne s'applique pas aux commerçants, cette exclusion s'arrête lorsque les contrats n'ont pas de rapport direct avec l'activité professionnelle.

Toutefois la commande passée porte sur la fourniture des cartes-menus du salon de thé-pâtisserie.

Dès lors que ces documents sont nécessaires voire indispensables à l'exploitation d'un commerce de salon de thé-pâtisserie, ils rentrent dans le cadre de son activité. Ainsi le contrat conclu par Madame X. est en rapport direct avec son activité professionnelle.

Ainsi ayant conclu un contrat pour une fourniture en rapport direct avec son activité, la défenderesse ne peut pas bénéficier des dispositions de la loi sur le démarchage à domicile.

De ce fait, toutes les autres dispositions qui concernent les mentions obligatoires des contrats soumis à cette loi, sont inapplicables en l'espèce.

[minute page 5] Au fond il est constant que la défenderesse a signé un engagement ferme et définitif. Elle soutient avoir signé par mégarde et reproche sans toutefois le démontrer s'être heurté au refus du représentant d'annuler la commande comme elle le souhaitait tout de suite après la signature du bon.

Il est constant que le bon de commande comporte une rature sur la quantité qui initialement était de 5.000 dépliants et qui a été réduite à 4.000.

Il convient de rappeler que le contrat a été conclu entre des professionnels. Toutefois Madame X. est profane dans le secteur de l'édition.

En laissant la défenderesse commander une quantité particulièrement importante de menus (4.000) alors que l'établissement auquel elles sont destinées, ne comporte que 5 tables de 4 personnes, ce que ne peut avoir ignorer le représentant de la défenderesse dès lors qu'il est établi que le contrat a été signé dans le salon de thé, la défenderesse a délibérément manqué à son obligation de conseil.

Même si la demanderesse a fait preuve d'un manque évident de réflexion en acceptant un telle une commande, ce dont elle a pris conscience très rapidement puisque la lettre d'annulation a été faite deux jours plus tard, cela n'est pas de nature à dispenser voire à excuser la défenderesse de son manquement à son obligation de conseil. Cette commande est manifestement disproportionnée dans les quantités commandées. Dès lors elle doit être annulée.

L'équité commande d'allouer à la société défenderesse une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

Sur l'intervention volontaire :

Cette intervention qui a pour but de faire constater l'application des dispositions sur le démarchage à domicile doit être rejetée dans la mesure où le tribunal a écarté l'application de cette législation.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,

- ANNULE la commande passée par la défenderesse ;

- DÉBOUTE la société INTER ÉDITIONS de sa demande ;

- LA CONDAMNE à payer à la SARL PMB une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- [minute page 6] LA CONDAMNE aux dépens ;

- DÉCLARE RECEVABLE l'intervention volontaire de l'Association de Prévention et de Conseil contre le démarchage Commercial Abusif

- au fond LA REJETTE

- LAISSE les frais et dépens de cette intervention à la charge de la partie intervenante ;

Ainsi jugé et prononcé le 22 janvier 2004 et signé par le Président et le Greffier;

LE PRÉSIDENT                     LE GREFFIER