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TGI NANCY (2e ch.), 1er mars 2001

Nature : Décision
Titre : TGI NANCY (2e ch.), 1er mars 2001
Pays : France
Juridiction : TGI Nancy. 2ech.
Demande : 98/03756
Décision : 202/01
Date : 1/03/2001
Nature de la décision : Irrecevabilité
Date de la demande : 26/06/1998
Décision antérieure : CA NANCY (1re ch. civ.), 8 novembre 2004
Numéro de la décision : 202
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1453

TGI NANCY (2e ch.), 1er mars 2001 : RG n° 98/03756 ; jugement n° 202/01

(sur appel : CA NANCY (1re ch. civ.), 8 novembre 2004, RG n° 01/00824 ; arrêt n° 2056/04

 

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 1er MARS 2001

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R. G. n° 98/03756. Jugement n° 202/01. Codification 586 : Demande en paiement de l’indemnisation dans une assurance de personnes.

COMPOSITION DU TRIBUNAL : PRÉSIDENT : Monsieur ROUX A., ASSESSEURS : Mme BITTARD, Monsieur BRESCIANI P.

GREFFIER : Mlle LACOUR G. Lors des débats - Mlle GEMMERLE lors du prononcé.

 

PARTIES :

DEMANDEUR :

Monsieur X.

demeurant [adresse] représenté par Maître GOSSIN et HORBER, avocat au barreau de NANCY

[minute page 2]

DÉFENDEURS :

- CAISSE RÉGIONALE DE RÉASSURANCES DES MUTUELLES AGRICOLES DE L’EST

dont le siège social est sis [adresse], prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié audit siège, représenté par la SCP NOIRJEAN Monsieur - GIRARD L., avocats au barreau de NANCY

- GROUPAMA GRAND EST ASSURANCES

dont le siège social est sis [adresse], prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié audit siège représenté par la SCP NOIRJEAN Monsieur - GIRARD L., avocats au barreau de NANCY

 

Clôture prononcée le : 23 janvier 2001. - Débats tenus à l’audience du : 01 février 2001. - Date de délibéré indiquée par le Président : 01 mars 2001. Jugement prononcé à l’audience du 01 mars 2001.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur X. était chef d’une exploitation agricole située à [ville].

Dans l’exercice de son activité, il a été victime le 22 novembre 1985 d’une chute de plus de 3 mètres qui l’a laissé paraplégique.

Ayant souscrit l’assurance obligatoire contre les accidents de la vie privée et du travail prévue par les articles 1234-1 et 1234-3 du Code rural, il a perçu une pension d’invalidité d’un montant de 1.200 Francs par mois.

Par actes des 26 et 30 juin 1998, Monsieur X. a assigné la Caisse Régionale de Réassurance des Mutuelles Agricoles de l’Est et le Groupama Grand Est Assurances aux fins d’obtenir le paiement à son profit d’une indemnité pour « frais d’assistance d’une tierce personne », ainsi que la majoration de 40 % de la pension d’invalidité qui lui est versée.

Par jugement avant dire droit du 27 mai 1999, le Tribunal de Grande Instance de NANCY a demandé aux parties de lui indiquer si la pension actuellement perçue par Monsieur X. avait été fixée sur la base d’une incapacité totale ou partielle à l’exercice de la profession agricole.

 

Monsieur X. sollicite aujourd’hui du tribunal la condamnation solidaire de la Caisse Régionale de Réassurances Mutuelles Agricoles de l’Est, et de la société GROUPAMA à la majoration de 40 % de la pension d’invalidité qu’elles lui versent actuellement, ainsi que le paiement à son profit d’une indemnité couvrant les frais d’assistance d’une tierce personne.

Il réclame également la condamnation des défenderesses à lui verser les sommes dues à ce titre depuis le jour de son accident, soit le 22 novembre 1985.

Monsieur X. outre le bénéfice de l’exécution provisoire, demande au surplus que la Caisse Régionale de Réassurances Mutuelles Agricoles de l’Est, et la société GROUPAMA soient condamnées à lui verser la somme de 9.000 Francs en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile, et qu’elles soient tenues des entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions, celui-ci invoque l’application du contrat d’assurance qu’il a souscrit, prévoyant en son article 18/A/5, « le remboursement des frais de séjour d’une tierce personne dont l’assistance est nécessaire lorsque l’assuré ne peut se déplacer seul en raison de son état de santé » durant toute la période de maladie, ou les conséquences de l’accident.

Monsieur X. estime qu’il doit également lui être fait application des articles 18 B et 20 de son contrat d’assurance, aux termes desquels la pension d’invalidité est majorée de 40 % lorsque le recours à une tierce personne est nécessaire.

Le demandeur se prévaut d’une expertise médicale réalisée le 8 janvier 1987 à la demande des défenderesses, et qui concluait à une paraplégie nécessitant l’usage permanent d’un fauteuil roulant. Il expose que son autonomie est des plus réduites puisqu’il est dans l’impossibilité de passer du lit [minute page 4] au fauteuil, de s’habiller ou se déshabiller, et de faire sa toilette sans l’aide de son épouse, comme en atteste le rapport établi par l’expert médical de la compagnie d’assurance.

Celui-ci conclut d’ailleurs à une IPP de 85% avec consolidation au 8 janvier 1987, date de l’examen, ainsi qu’à la nécessité de l’assistance permanente d’une tierce personne.

Monsieur X. soutient par suite que l’indemnité pour frais d’assistance d’une tierce personne lui était par conséquent due, de même que la majoration corrélative de 40% de sa pension d’invalidité.

Il conteste l’argumentation des défenderesses selon laquelle il aurait continué à exercer la gestion administrative de son exploitation, et produit diverses attestations rapportant que ce sont sa femme puis ses enfants qui ont assuré la poursuite de l’activité, sans qu’il puisse y prendre lui-même part du fait de son invalidité.

Il prétend à cet égard que sa seule affiliation à la Mutualité Sociale Agricole est insuffisante à rapporter la preuve de ce qu’il aurait poursuivi son exploitation, comme le prétendent les défenderesses.

Il s’élève en outre contre l’affirmation des assureurs selon laquelle la pension qu’il a perçue avait été fixée en considération d’une inaptitude partielle et retient que c’est leur expert lui-même qui avait établi son incapacité totale.

Enfin, Monsieur X. s’oppose à l’argument de prescription soulevé par la Caisse Régionale de Réassurances Mutuelles Agricoles de l’Est et la société GROUPAMA : l’article 1234-7 invoqué par ces dernières ne s’appliquerait selon lui qu’au cas où l’assuré demande une majoration de sa rente à la suite d’une aggravation conduisant d’une inaptitude initialement partielle à une inaptitude totale.

Or sa demande aurait un fondement tout autre puisqu’il allègue que son inaptitude a été totale dès l’origine.

 

Les défenderesses s’opposent aux demandes de Monsieur X. et sollicitent en conséquence son débouté et sa condamnation aux entiers dépens de l’instance ainsi qu’au paiement à leur profit d’une somme de 5.000 Francs en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Elle se prévalent de la prescription biennale posée en ces termes par l’article 1234-7 du Code rural : « l’action de l’assuré (...) se prescrit par deux ans à compter de la date (...) de l’aggravation de l’état de santé entraînant l’inaptitude totale à l’exercice de la profession agricole ». Selon elles, l’action intentée par Monsieur X. serait irrecevable car prescrite puisqu’il résulte des pièces produites par Monsieur X. que son état s’était déjà aggravé en 1992 et qu’il n’a introduit son action qu’en 1998.

La Caisse Régionale de Réassurances Mutuelles Agricoles de l’Est et la société GROUPAMA prétendent en effet que la pension versée à Monsieur X. ne l’a été qu’en réparation d’une
[minute page 5] incapacité partielle de travail, ce dernier ayant choisi de poursuivre la gestion administrative de son exploitation agricole bien qu’il ait pu prétendre à une incapacité totale.

Or la pension pour incapacité totale ne serait due qu’à une personne dans l’impossibilité de se livrer à un travail agricole quelconque, qu’il soit physique ou administratif.

Monsieur X. étant resté affilié à la Mutualité Sociale Agricole, et continuant à s’acquitter de ses cotisations est donc bien demeuré, selon elles, chef d’exploitation agricole, ce qui l’aurait empêché de se prévaloir d’une incapacité totale de travail.

Le remboursement des frais d’assistance de tierce personne n’étant dû qu’en cas d’incapacité totale de travail, la poursuite par Monsieur X. de son activité agricole ne lui permettrait donc pas d’en réclamer le bénéfice.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION :

1. Sur l’exception de prescription soulevée par la Caisse Régionale de Réassurances Mutuelles Agricoles de l’Est et la société GROUPAMA :

Attendu que l’article 1234-7 du Code rural prévoit que « l’action de l’assuré pour les prestations prévues par le présent chapitre se prescrit par deux ans à compter de la date de l’accident ou de la constatation médicale, soit de la maladie professionnelle, soit de l’aggravation de l’état de l’assuré entraînant l’inaptitude totale à l’exercice de la profession agricole »,

Que Monsieur X. soutient que cet article ne s’applique qu’aux demandes formées à la suite d’une aggravation de l’état de santé de l’assuré, le faisant passer d’un état d’incapacité partielle à une incapacité totale,

Mais attendu que le chapitre auquel il est fait allusion dans l’article en question est le chapitre III du Code rural, intitulé de façon très générale « Assurance contre les accidents de la vie privée, les accidents du travail et les maladies professionnelles des personnes non salariées »,

Que là où la loi ne distingue pas, il n’y a pas lieu de distinguer et qu’il convient donc de considérer que la prescription biennale établie par l’article 1234-7 du Code rural a vocation à s’appliquer à toutes les actions relatives aux prestations servies en application du régime d’assurance obligatoire des exploitants agricoles, et non uniquement en cas d’aggravation de l’état de santé de l’assuré,

Que, par conséquent, les actions fondées sur une incapacité de travail totale dès l’origine sont soumises au même délai de prescription que celles qui résultent d’une aggravation de l’état de santé de l’assuré, la seule différence de régime étant que ce délai commence à courir à compter de l’accident pour une incapacité totale dès l’origine, et à compter de la constatation de l’aggravation dans cette deuxième hypothèse,

[minute page 6] Qu’en l’espèce Monsieur X. prétend qu’il a été victime d’une incapacité de travail totale dès la survenance de son accident et que la pension qu’il a perçue lui a été versée à ce titre, alors que les assurances prétendent que Monsieur X. a poursuivi son activité agricole en assurant la gestion administrative de son exploitation, et que ce n’est que depuis 1992 qu’il a été mis dans l’impossibilité totale de travailler suite à une aggravation de son état de santé,

Que cette discussion est indifférente à la solution du litige dans la mesure où il résulte des pièces fournies aux débats et qu’il n’est pas contesté par les parties que Monsieur X. était en tout état de cause en incapacité totale d’exercer son activité dès 1992,

Qu’il n’a engagé, ni à cette date ni antérieurement, aucune action en paiement des indemnités complémentaires qu’il revendique aujourd’hui,

Que l’assignation des défenderesses dans la présente instance date de 1998,

Qu’en tout état de cause le délai de deux ans pour agir, soit à compter de l’accident, soit depuis le jour de l’aggravation, est largement dépassé,

Que par conséquent l’action formée par Monsieur X. en paiement d’un complément d’indemnité est prescrite par application de l’article 1234-7 du Code rural, et doit donc être déclarée irrecevable, sans qu’il soit besoin d’examiner plus avant les arguments présentés par les parties.

 

II. Sur les dépens et l’article 700 du Nouveau code de procédure civile :

Attendu que l’équité commande de ne pas faire application en l’espèce de l’article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Mais que Monsieur X. sera néanmoins condamné aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du Nouveau code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉCLARE irrecevable la demande formée par Monsieur X.

DIT n’y avoir lieu à faire application de l’article 700 du Nouveau code de procédure civile

CONDAMNE Monsieur X. aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de la SCP NOIRJEAN, GIRARD, avocats ;

[minute page 7] Le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier,

LE GREFFIER                                   LE PRÉSIDENT