TGI LAVAL, 11 décembre 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 1600
TGI LAVAL, 11 décembre 2006 : RG n° 04/01856 ; jugement n° 06/1118
(sur appel CA Angers (1re ch. A), 8 janvier 2008 : RG n° 07/00092 ; arrêt n° 4)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LAVAL
JUGEMENT DU 11 DÉCEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 04/01856. Jugement n° 06/1118. Code n° : Demande relative à l’exécution d’une promesse unilatérale de vente ou d’un pacte de préférence ou d’un compromis de vente.
DEMANDEUR :
Madame X.
née le [date] à [ville], [adresse], représentée par Maître Pierre THOMAS, avocat au barreau de LAVAL
DÉFENDEUR :
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], [adresse],
Madame Z. épouse W.
née le [date] à [ville], [adresse],
représentés par Maître Eric L'HELIAS, avocat au barreau de LAVAL
COMPOSITION DU TRIBUNAL : (lors des débats et du délibéré) :
Président : Jacques CAZAL,
Assesseur : Bruno GUINET,
Assesseur : Catherine MERCIER,
Greffier : présent lors des débats : G. GENDRY
lors du prononcé : Christophe GOUEDO
DÉBATS : A l'audience publique du 30 octobre 2006 où siégeaient les magistrats sus-nommés. A l'issue de celle-ci, le Président a fait savoir aux parties que le jugement serait prononcé à l'audience du 11 décembre 2006.
JUGEMENT du 11 Décembre 2006 : Prononcé publiquement à cette audience par Jacques CAZAL, Président, contradictoire, en premier ressort, Signé par Jacques CAZAL, Président et par Christophe GOUEDO, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Mme V. épouse X. est propriétaire d'un immeuble à usage d'habitation sis [adresse].
Suivant acte sous seing privé en date du 14 février 2004, rédigé par la SARL LAVAL OUEST IMMOBILIER, M. Y. et Mme Z. veuve W. ont accepté d'acquérir cet immeuble pour le prix principal de 145.000 euros (162.400 frais inclus) sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt de 162.400 euros d'une durée de 20 à 25 années au taux d'intérêt maximum de 5,50 %.
La durée de validité de cette condition suspensive était fixée à 30 jours avec échéance au 12 mars 2004 et la date prévue pour la signature de l'acte authentique de vente était fixée au 5 mai 2004. A cette date, les acquéreurs ne sont pas présentés chez le notaire.
Par lettre recommandée en date du 5 mai 2004, Mme V. épouse X. a mis en demeure M. Y. et Mme Z. veuve W. d'acquérir l'immeuble ou de lui payer la somme de 14.500 euros à titre d'indemnisation forfaitaire.
Cette mise en demeure étant restée sans effet, Mme V. épouse X. a fait assigner M. Y. et Mme Z. veuve W., par acte d'huissier en date des 18 et 19 novembre 2004.
Elle demande au tribunal de :
- constater la validité du compromis de vente sur le fondement des articles 1156 et suivants du code civil,
- constater que la condition suspensive relative à l'octroi du prêt est réputée accomplie,
En conséquence :
- condamner solidairement Monsieur Y. et Madame W. à lui payer la somme de 14.500 euros à titre d'indemnité forfaitaire, sur le fondement des articles 1152, 1178 et 1226 du code civil et de la clause pénale du compromis de vente signé entre les parties le 14 février 2004,
- condamner solidairement Monsieur Y. et Madame W. à lui payer, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses différents préjudices : moral, matériel et financier,
- condamner solidairement Monsieur Y. et Madame W. à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ses prétentions et moyens sont plus amplement exposés dans ses dernières conclusions signifiées le 18 mai 2006.
Les défendeurs concluent, à titre principal, au rejet de l'ensemble des demandes en soutenant que la condition suspensive d'octroi d'un prêt ne s'est pas réalisée, que la défaillance de cette condition ne leur est pas imputable et qu'en conséquence, le compromis de vente conclu le 14 février 2004 est caduc. Ils invoquent également la nullité du compromis de vente.
[minute page 3] A titre reconventionnel, ils sollicitent la condamnation de la partie demanderesse à leur payer, à chacun :
- la somme de 1.500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- la somme de 1.250 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Leurs prétentions et moyens sont plus amplement exposés dans leurs dernières conclusions signifiées le 12 janvier 2006.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le moyen de défense tiré de la nullité du compromis de vente :
Sur la première branche du moyen :
L'acte de vente sous condition suspensive du 14 février 2004 a été signé par Mme A. épouse B. es-qualités de Mandataire de Mme X.
Les défendeurs excipent de l'irrégularité du mandat donné par acte sous seing privé en date du 13 février 2004.
En effet, dans le pouvoir produit aux débats, Madame B. est désigné en qualité de mandant et Madame X. en qualité de Mandataire.
Or, il constant que Madame X. est propriétaire de l'immeuble visé dans le compromis de vente du 14 février 2004.
Il est manifeste que l'intention des parties signataires du mandat du 13 février 2004 était de conférer à Madame B. le pouvoir de conclure le compromis de vente aux lieu et place de Madame X. et qu'en conséquence, l'inversion des noms du mandant et du mandataire ne cause aucun grief aux acquéreurs.
En conséquence, la première branche du moyen doit être écartée.
Sur la seconde branche du moyen :
Les défendeurs font valoir que l'annulation du compromis de vente est également encourue du fait que le conjoint de Mme X., en méconnaissance des dispositions de l'article 215 alinéa 3 du code civil, n'a pas participé, ni consenti à ce compromis.
Selon ses dispositions, les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut en demander l'annulation ; l'action en nullité lui est ouverte dans l'année à partir du jour où il a connaissance de l'acte sans pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial s'est dissous.
Il résulte de ces dispositions que l'action en nullité n’est ouverte qu’au conjoint de l'époux vendeur.
[minute page 4] L'acquéreur en pouvant se prévaloir d'une telle cause de nullité, la seconde branche du moyen n'est pas fondée en droit.
Au surplus, il ressort du projet d'acte authentique de vente versé aux débats par les défendeurs que le conjoint du vendeur devait intervenir à l'acte et donner son consentement à la cession du bien immobilier qui constituait le logement de la famille au sens de l'article 215 du code civil.
Sur la condition suspensive de l'octroi d'un prêt et ses conséquences :
Il ressort d'une attestation du Crédit Mutuel en date du 23 avril 2004 que M. Y. et Mme W. ont présenté le 19 février 2004, soit quelques jours après la signature du compromis de vente, une demande de prêt d'un montant de 162.400 euros, sur une durée de 25 ans, pour l'acquisition d'une résidence principale située à [ville F.] et que le prêt sollicité n'a pas été accordé par cette banque au motif que les intéressés ne disposaient d'aucun apport personnel et que leurs revenus ne pouvaient supporter les charges de remboursement au vu des autres charges à leur passif.
Aux termes du paragraphe H1 du compromis de vente, l'acquéreur s'obligeait notamment à déposer, dans le délai de 10 jour, une ou plusieurs demandes de prêt répondant aux caractéristiques définies ci-avant au paragraphe D et couvrant le montant total de la somme à financer par emprunt et à en justifier au vendeur et/ou au mandataire dans les 48 heures du dépôt.
Le fait qu'au paragraphe E du compromis de vente, il était mentionné que l'acquéreur entendait solliciter un crédit auprès de « tous organismes financiers » ne signifie pas qu'il avait l'obligation de déposer une demande de prêt auprès de plusieurs organismes financiers, compte tenu de la rédaction du paragraphe H1 qui consacre la faculté de ne déposer qu'une seule demande de prêt.
Il est établi que les défendeurs ont déposé auprès du Crédit Mutuel, dans le délai conventionnel de validité de la condition suspensive, une demande de prêt du montant et d'une durée conformes à ceux indiqués dans le compromis de vente et que ladite banque leur a notifié son refus de leur accorder un tel prêt par correspondance en date du 23 avril 2004.
Cette défaillance de la condition suspensive entraîne nécessairement la caducité du compromis de vente, indépendamment de toutes autres circonstances de fait, observation étant faite qu'il ressort des auditions effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire diligentée par la gendarmerie nationale, que l'agence immobilière, mandataire du vendeur, avait été informée par les défendeurs du refus de financement de l'acquisition avant le 5 mai 2004, date fixée pour la signature de l'acte authentique, mais n'a pas informé le vendeur, lequel n'en a eu connaissance que par la lettre recommandée en date du 10 mai 2004 que lui ont adressée les défendeurs.
En conséquence, il convient de débouter Mme X. de l'ensemble de ses demandes.
Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts :
Il n'est pas démontré que la partie demanderesse a commis une faute caractérisée dans l'exercice de son droit d'agir en justice. Dès lors, cette demande sera rejetée.
[minute page 5]
Sur les dépens et l'article 700 du NCPC :
Les dépens seront mis à la charge de la partie demanderesse qui succombe. Il sera alloué à chacun des défendeurs la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Déboute Madame V. épouse X. de l'ensemble de ses demandes ;
La condamne à payer à chacun des défendeurs la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Rejette toutes prétentions plus amples ou contraires ;
La condamne aux dépens et autorise Maître L'HELIAS, avocat, à les recouvrer directement dans les termes de l'article 699 du NCPC.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Jugement rédigé par Monsieur Jacques CAZAL