CA RENNES (1re ch. B), 21 septembre 2001
CERCLAB - DOCUMENT N° 1801
CA RENNES (1re ch. B), 21 septembre 2001 : RG n° 00/06161 ; arrêt n° 741
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
PREMIÈRE CHAMBRE B
ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2001
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 00/06161. Arrêt n° 741.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur PIPERAUD, Président de Chambre, Mme Annie SABATIER, conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON, conseiller.
GREFFIER : Mme Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 29 juin 2001
ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Monsieur PIPERAUD, Président de Chambre, à l'audience publique du 21 septembre 2001, date indiquée à l'issue des débats.
APPELANTE :
SA CONFORAMA FRANCE
[adresse] représentée par la SCP CASTRES COLLEU et PEROT, avoués assistée de Maître GAUTIER, avocat, entendu en sa plaidoirie,
INTIMÉE :
La FÉDÉRATION DU LOGEMENT, DE LA CONSOMMATION ET DE L'ENVIRONNEMENT D'ILLE ET VILAINE, FLCE 35,
[adresse] représentée par la SCP LEROYER-BARBARAT GAUVAIN et DEMIDOFF, avoués, assistée de Maître DESAUNAY, avocat, entendu en sa plaidoirie,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
Par acte du 24 septembre 1999, la FÉDÉRATION DU LOGEMENT DE LA CONSOMMATION ET DE L'ENVIRONNEMENT D'ILLE ET VILAINE (FLCE 35) a fait assigner la SA CONFORAMA FRANCE à l'effet pour l'essentiel de voir juger illicites des publicités parues dans des revues gratuites CONFORAMA, de voir ordonner sous astreinte la cessation immédiate de ces publicités, et d'obtenir la publication du jugement et la condamnation de la SA CONFORAMA à lui payer la somme de 200.000 Francs à titre de dommages-intérêts, celle de 30.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.
Saisi de cette action, le Tribunal d'Instance de RENNES par jugement du 8 août 2000 a :
* dit que les publicités incriminées visent une opération de crédit au sens de l'article L. 311-2 du Code de la Consommation,
* déclaré illicites les publicités faites par la Société CONFORAMA FRANCE - sous le titre « Payer malin - Remboursez à votre rythme avec la carte Conforama » parues notamment dans le bi-hebdomadaire gratuit CONFORAMA daté du 22 avril au 16 mai 1999,
* déclaré illicites les publicités « Grand jeu de la carte CONFORAMA » parues notamment dans le bi-hebdomadaire gratuit CONFORAMA du 11 au 31 mai 1999,
* donné acte à la SA CONFORAMA FRANCE de ce que ces publicités ont aujourd'hui cessé,
* ordonné l'insertion dans le journal Ouest-France, édition du samedi, en caractères du corps 16 pour le titre et du Corps 10 pour le surplus et aux frais de la SA CONFORAMA FRANCE, du texte suivant :
- « Par jugement du Tribunal d'Instance de RENNES en date du 8 août 2000 la SA CONFORAMA FRANCE a vu déclarer illicites les publicités visant à « Payer malin - Remboursez à votre rythme » et la publicité « Grand jeu carte CONFORAMA » publiées courant mai 1999 en ce qu'elles ne respectent pas les mentions obligatoires prévues par le Code de la Consommation pour permettre l'information du consommateur sur les opérations de crédit proposées »,
* [minute page 3] dit que la SA CONFORAMA FRANCE devrait faire effectuer cette publication dans le délai maximum de TROIS MOIS à compter de la signification du jugement et passé ce délai, sous astreinte de CINQ MILLE Francs (5.000 Francs) par jour de retard,
* condamné la Société CONFORAMA FRANCE à payer à la FÉDÉRATION DU LOGEMENT, DE LA CONSOMMATION ET DE L'ENVIRONNEMENT D'ILLE ET VILAINE la somme de DIX MILLE Francs (10.000 Francs) à titre de dommages-intérêts,
* ordonné l'exécution provisoire de ce chef,
* condamné la Société CONFORAMA FRANCE à payer à la FLCE 35 la somme de TROIS MILLE Francs (3.000 Francs) au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
* débouté les parties de leurs autres demandes,
* condamné la Société CONFORAMA FRANCE aux dépens.
La SA CONFORAMA FRANCE a relevé appel.
La FLCE 35 a formé un appel incident.
Aux termes des conclusions prises le 25 janvier 2001 par l'appelante et le 26 mars 2001 par l'intimée, et auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens soutenus par les parties, il est demandé à la Cour :
- Par la SA CONFORAMA :
* de réformer le jugement en ce qu'il a fait-droit aux prétentions de la FLCE 35,
* de débouter cette dernière de l'ensemble de ses demandes,
* de la condamner à lui payer la somme de 100.000 Francs à titre de dommages-intérêts,
* de condamner la même aux dépens et à lui payer la somme de 20.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
[minute page 4]
- Par la FLCE 35 :
* de réformer le jugement en ce qu'il a limité à 10.000 Francs l'indemnisation accordée,
* de condamner la SA CONFORAMA FRANCE à lui payer la somme de 200.000 Francs à titre de dommages-intérêts,
* de la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 30.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Considérant que selon l'article L. 311-4 du Code de la Consommation:
« Toute publicité faite, reçue ou perçue en FRANCE qui, quelque soit son support, porte sur l'une des opérations de crédit visées à l'article L. 311-2 doit :
1. Préciser l'identité du prêteur, la nature, l'objet et la durée de l 'opération proposée ainsi que le coût total et s 'il y a lieu le TEG mensuel ou annuel du crédit et des perceptions forfaitaires,
2. Préciser le montant en Francs, des remboursements par échéance ou en cas d'impossibilité le moyen de le déterminer. Ce montant inclut le coût de l'assurance lorsque celle-ci est obligatoire pour obtenir le financement et le cas échéant le coût des perceptions forfaitaires,
3. Indiquer, pour les opérations à durée déterminée, le nombre d'échéances ».
Considérant, s'agissant des publicités incriminées visant « à payer malin - rembourser à votre rythme » que le tribunal, par une motivation pertinente qui est adoptée à justement décidé d'une part qu'il s'agissait d'une publicité qui devait respecter les prescriptions de l'article L. 311-4 du Code de la Consommation, d'autre part qu'il s'agissait d'une publicité illicite, dès lors que faisaient défaut certaines mentions informatives obligatoires ;
Qu'il suffit d'ajouter :
* qu'à supposer que la carte CONFORAMA soit avant tout une carte de fidélité et que sa fonction crédit ne soit pas obligatoirement mise en oeuvre, puisqu'aux dires, néanmoins [minute page 5] non avérés de l'appelante, seulement 10 % des cartes seraient effectivement utilisées à des fins de financement à crédit, il demeure qu'elle est abordée par les publications litigieuses sous son aspect carte de crédit en sorte que celles-ci entraient dans le champ d'application de l'article L. 311-4 précité et devaient comporter les mentions imposées par ce texte,
* qu'à cet égard, et au contraire de ce que soutient à nouveau l'appelante les mentions qu'elle a fait figurer sur lesdites publicités (ce qui au demeurant démontre nécessairement qu'elle considérait bien que celles-ci étaient soumises aux dispositions légales sus énoncées) étaient insuffisantes quant à notamment la durée de l'opération proposée et l'identité du prêteur,
* qu'en effet, réglementée par l'article L. 311-9 du Code de la Consommation, l'opération de crédit proposée n'était donc que d'une durée de un an renouvelable, laquelle n'est pas mentionnée, étant observé d'une part, comme l'a avec raison souligné le premier juge que la mention du caractère « permanent » de la réserve est de nature à induire en erreur le consommateur, d'autre part que les offres de crédit soumises à l'acceptation de ce dernier stipule cette durée d'un an,
* qu'en outre, l'identité de l'organisme de crédit prêteur n'est pas assurée par la seule mention « FACET » alors que cette appellation n'est pas nécessairement notoire et ne permet donc pas à elle seule d'éviter toute méprise,
* qu'au demeurant, la Société CONFORAMA est bien consciente des insuffisances de ces publications puisqu'elle y a remédié dans des catalogues ultérieurs,
* qu'enfin la transparence et l'information exigées par l'article L. 311-4 du Code de la Consommation au sein des publicités visées par ce texte, parce qu'elles tendent à permettre au consommateur d'en appréhender d'emblée le sens et de prendre immédiatement connaissance des conditions véritablement offertes relatives à l'accès et à l'octroi de ce crédit, ne sauraient être regardées comme satisfaites par le renvoi du dit consommateur à une banque de renseignement télématique ou au service crédit du magasin ;
[minute page 6] Considérant s'agissant des publicités proposant le grand jeu de la carte CONFORAMA que le jugement est également confirmé, par motifs adoptés, en ce qu'il les a déclarées illicites au regard de l'article L. 311-4 du Code de la Consommation,
Qu'il suffit d'ajouter :
* que, ledit texte ne s'applique pas qu'aux publicités visant exclusivement une opération de crédit dès lors qu'en faisant état de publicité « portant » sur une telle opération il recouvre toute publicité contenant ou ayant même un rapport implicite avec celle-ci, ce qui est le cas en l'espèce comme l'a démontré le premier juge,
* qu'il a été par ailleurs déjà répondu par les motifs qui précèdent aux autres moyens soulevés par la Société CONFORAMA ;
Considérant sur la demande en réparation formée par la FLCE que le tribunal eu égard aux textes applicables et aux éléments de l'espèce l'a justement appréciée, en son principe, ses modalités et son quantum ;
Que le jugement est aussi bien confirmé de ce chef ;
Considérant que la Société CONFORAMA FRANCE qui ne justifie pas en quoi l'assignation en cause dont le bien fondé a été au demeurant reconnu, aurait gelé les publications commerciales du groupe CONFORAMA éditées à plusieurs millions d'exemplaires, étant observé à cet égard que l'argument est en contradiction avec la thèse d'une action tardive de la FLCE s'agissant de publications qui n'étaient plus d'actualité puisque relatives à une période antérieure à l'introduction de l'instance, a été enfin déboutée à bon droit de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts ;
Considérant que succombant en son appel la Société CONFORAMA FRANCE est condamnée à en supporter les dépens ;
Qu'elle ne peut dès lors prétendre au bénéfice de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Que l'équité commande en revanche sa condamnation à payer à la FLCE la somme de 4.000 Francs au titre de ce dernier texte ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 7] DÉCISION
PAR CES MOTIFS :
La Cour;
Confirme le jugement,
Condamne la Société CONFORAMA FRANCE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,
La condamne à payer à la FLCE la somme de 4.000 Francs (609,80 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.