CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CASS. CRIM., 29 avril 2003

Nature : Décision
Titre : CASS. CRIM., 29 avril 2003
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. criminelle
Demande : 02-82574
Date : 29/04/2003
Nature de la décision : Rejet
Numéro de la décision : 2192
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 1897

CASS. CRIM., 29 avril 2003 : pourvoi n° 02-82574 ; arrêt n° 2192

 

Extrait : « ne saurait constituer une atteinte au droit au respect de la vie privée l’obligation de déclarer à l’assureur une condamnation prononcée publiquement par un tribunal ».

 

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

COUR DE CASSATION

CHAMBRE CRIMINELLE

ARRÊT DU 29 AVRIL 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 02-82574. Arrêt n° 2192. Président : M. COTTE.

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf avril deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET et les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Monsieur X., contre l’arrêt de la cour d’appel d’ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 2002, qui, dans la procédure suivie contre lui, notamment, pour blessures involontaires sous l’empire d’un état alcoolique en récidive, a prononcé la nullité de son contrat d’assurance ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

 

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 513 et 591 du Code de procédure pénale ;

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

 « en ce qu’il ne résulte pas de l’arrêt attaqué que le conseil du prévenu dont la présence aux débats est pourtant constatée ait été entendu » ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que Monsieur X. a été représenté devant la cour d’appel, saisie des seuls intérêts civils, par un avocat qui a déposé des conclusions mais n’a pas présenté d’observations orales ;

Attendu qu’en l’état de ces mentions, dont il ne résulte pas qu’il ait été fait obstacle à l’exercice du droit à la parole de l’avocat, l’arrêt n’encourt pas les griefs allégués ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

 

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1134 du Code civil, L.113-8 du Code des assurances, L. 132-1 du Code de la consommation, 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

 « en ce que la cour d’appel a déclaré que le contrat d’assurance automobile de Monsieur X. était nul »;

« aux motifs que Monsieur X. a conclu le 4 octobre 1997 avec le Gan un contrat d’assurance automobile pour un véhicule […] Citroën (...) ; que cette assurance était conclue conformément aux conditions particulières et aux dispositions des conditions générales et annexes, dont Monsieur X. reconnaissait avoir reçu le texte intégral ; que selon l’article 36 desdites conditions générales, il avait notamment pour obligation au cours du contrat d’informer l’assureur de toute condamnation pour conduite en état d’ivresse article R. 233-5 et L. 1 du Code de la route ; toute décision judiciaire ou administrative de suspension du permis de conduire supérieure à deux mois ; que Monsieur X. ayant changé de véhicule un avenant a été conclu le 11 août 1998, sous le même numéro de contrat qu’initialement, avec conditions particulières nouvelles pour le nouveau véhicule, mais avec les mêmes conditions générales, sous la même référence : A 4151 ; que le 26 juin 1999 Monsieur X., alors qu’il se trouvait sous l’empire d’un état alcoolique de 2,95 gr/litre occasionnait l’accident à l’origine de la présente procédure ; que c’est dans ces conditions que l’assureur apprenait que Monsieur X. avait été condamné le 3 février 1998 par le tribunal correctionnel du Mans à un mois d’emprisonnement avec sursis et cinq mois de suspension du permis de conduire pour conduite en état alcoolique ; qu’il résulte des pièces de la procédure qu’à aucun moment Monsieur X. n’a averti son assureur de cette condamnation, pas plus lors de l’exécution du contrat initial du 4 octobre 1997, que lors de la signature de l’avenant du 11 août 1998, alors qu’il n’est pas contestable que cette condamnation était bien de nature à modifier l’appréciation du risque par l’assureur ;

que la condamnation du 3 février 1998 a été prononcée contradictoirement ; que Monsieur X. ne pouvait l’ignorer, et que c’est nécessairement de manière intentionnelle qu’il a omis d’en faire état ; que Monsieur X. ne peut valablement soutenir que l’avenant du 11 août 1998 constitue un nouveau contrat et qu’à cette occasion aucun questionnaire ne lui a été soumis, alors que l’avenant en cause, comme son nom l’indique d’ailleurs, ne constitue qu’une modification des conditions particulières du contrat initial sous le même numéro et alors même qu’il est expressément précisé que les conditions générales restent identiques ; qu’en fonction de cette double violation de ses obligations contractuelles par l’assuré (au cours du contrat initial et lors de la signature de l’avenant), l’assureur est bien fondé à invoquer l’article 42 des conditions générales du contrat, lui-même se référant à l’article 113-8 du Code des assurances, pour obtenir la déchéance de sa garantie » ;

« alors, d’une part, que si la cour d’appel a considéré que l’avenant faisait corps avec le contrat d’assurance de Monsieur X., cet avenant exprimait un nouvel accord de volonté sur les obligations des parties dont il fallait déterminer le contenu ; que la cour d’appel aurait dû constater que la référence aux conditions générales dans cet avenant, qui portait sur un autre véhicule et visait d’autres utilisateurs que le souscripteur, impliquait uniquement une obligation de révéler les condamnations qui interviendraient après sa conclusion, ce qui supprimait toute obligation de révéler les condamnations antérieures ; qu’une telle lecture de « l’avenant » s’imposait que l’on l’analyse comme un nouveau contrat, la qualification d’avenant et la référence au même numéro de contrat ne pouvant suffire pour établir que le contrat initial n’avait pas été résilié ou que l’on considère que l’avenant faisait corps avec le contrat initial ; qu’ainsi, en l’espèce, la cour d’appel a dénaturé les clauses claires et précises de « l’avenant » ;

« alors, d’autre part, que la disposition prévoyant l’obligation de révéler une condamnation pénale était mentionnée uniquement dans les conditions générales du contrat d’assurance ;

que les conclusions déposées au nom de Monsieur X. soutenaient qu’une telle clause ne lui était pas opposable dès lors qu’elle ne remplissait pas les conditions prévues par l’article L. 112-4 du Code des assurances selon lequel “les clauses de polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractère très apparent » ;

que, faute d’avoir répondu à ce chef péremptoire de conclusions, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

« alors que, subsidiairement, nul ne peut être tenu de faire état d’une condamnation pénale dont il a fait l’objet, que l’obligation de révéler une telle condamnation même limitée à la conduite en état d’ivresse constitue en effet une clause manifestement abusive, comme portant excessivement atteinte au droit au respect de la vie privée, clause qui doit donc être réputée non écrite ; que, par conséquent, en considérant que la dissimulation d’une telle condamnation avait été faite de mauvaise foi et que le contrat d’assurance était nul en application de l’article L. 113-8 du Code des assurances, la cour d’appel a violé l’article précité » ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il résulte de l’arrêt que la compagnie Gan Assurances, assureur de Monsieur X., est intervenue dans la procédure suivie contre celui-ci pour blessures involontaires sous l’empire d’un état alcoolique en récidive ; que le tribunal, après avoir déclaré le prévenu coupable du délit et entièrement responsable des dommages subis par les victimes, a rejeté l’exception de non-garantie soulevée par l’assureur ; que, saisie des appels interjetés par le Gan et une partie civile, la cour d’appel a notamment constaté la nullité du contrat d’assurance ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour accueillir l’exception de non-garantie, les juges d’appel relèvent que Monsieur X. a, postérieurement à la souscription de la police le 4 octobre 1997, fait l’objet, le 3 février 1998, d’une condamnation, pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique, à des peines d’emprisonnement avec sursis et de suspension du permis de conduire ; qu’ils retiennent que, s’agissant d’une circonstance nouvelle de nature à modifier l’appréciation du risque par l’assureur, cette condamnation aurait dû, en application des conditions générales du contrat, faire l’objet d’une déclaration ; qu’ils énoncent que l’assuré a intentionnellement omis d’en informer le Gan tant avant la signature, le 11 août 1998, d’un avenant portant transfert de la police souscrite sur le véhicule impliqué dans l’accident, que lors de la signature de cet avenant qui maintenait expressément les conditions générales ; qu’ils en déduisent que l’assureur est fondé, par application des conditions générales du contrat qui se réfère aux dispositions de l’article L. 113-8 du Code des assurances, à dénier sa garantie ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que ne saurait constituer une atteinte au droit au respect de la vie privée l’obligation de déclarer à l’assureur une condamnation prononcée publiquement par un tribunal, la cour d’appel a, sans dénaturer les clauses de l’avenant, fait l’exacte application des articles L. 113-2 et L. 113-8 du Code des assurances ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Beaudonnet conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.