CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 13 septembre 2007

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 13 septembre 2007
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch. sect. 1
Demande : 06/01997
Date : 13/09/2007
Nature de la décision : Infirmation
Date de la demande : 12/05/2006
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 2230

CA AMIENS (1re ch. 1re sect.), 13 septembre 2007 : RG n° 06/01997

 

Extrait (exposé du litige) : « Elle exposait avoir consenti à Monsieur X. un prêt de 7.600 euros, remboursable en 40 mensualités de 200,29 euros chacune et constaté par un acte sous seing privé du 17 décembre 2004, alors que l'emprunteur était son salarié. Elle ajoutait que ce dernier ayant donné sa démission au mois de février 2005, elle était bien fondée à se prévaloir d'une clause expresse de l'acte prévoyant la déchéance du terme en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'une des parties. » […] « Il ajoute que cet acte ne comportait aucune clause d'exigibilité anticipée, mais prévoyait un remboursement, au plus tard, en juin 2007. Il fait également valoir que la clause de déchéance du terme stipulée dans l'acte dont se prévaut la société FRANCE CARROSSERIE est une clause abusive. »

Extrait (motifs) : « L'authenticité de l'acte intitulé « contrat de prêt », n'est pas davantage contestée que celle de la reconnaissance de dette opposée par Monsieur X. Les parties conviennent en effet que ces deux actes ont bel et bien été souscrits. Elles ne divergent que sur leur force probante et leur chronologie. On observera en premier lieu que seul le souscripteur d'une reconnaissance de dette peut se prévaloir de l'absence des formalités protectrices requises par l'article 1326 du Code civil, dont les prescriptions ont été édictées dans l'intérêt de celui qui s'engage. Par ailleurs, si aucun des actes invoqués n'a, par rapport à l'autre, date certaine, on observera cependant que tous deux prévoient un remboursement du prêt par prélèvement mensuel sur le salaire de Monsieur X.

Or l'examen des trois derniers bulletins de paie délivrés par FRANCE CARROSSERIE à l'appelant jusqu'à ce que sa démission devienne effective (janvier, février et mars 2005) révèle que ce sont des mensualités de 264 euros chacune qui ont été retenues sur le salaire de Monsieur X., sous l'intitulé « acompte ». Cette somme correspond au montant des mensualités évoquées dans la reconnaissance de dette. C'est la preuve que FRANCE CARROSSERIE a bien entendu la substituer à l'acte intitulé « contrat de prêt » daté du même jour. En outre, la reconnaissance de dette ne contenant aucune référence, aucun renvoi à l'acte invoqué par FRANCE CARROSSERIE, la clause de déchéance du terme stipulé dans ce dernier n'a pas lieu de s'appliquer. »

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 13 SEPTEMBRE 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 06/01997. Appel d'un jugement du Tribunal d'instance d'Amiens du 24 avril 2006.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT :

Monsieur X.

[adresse], Représenté par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Maître LEFEBVRE substituant la SCP DE VILLENEUVE-CREPIN, avocats au barreau d'AMIENS

 

ET :

INTIMÉE :

Société FRANCE CARROSSERIE SARL

[adresse], Représentée par Maître Jacques CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Maître HOURDIN avocat au barreau de SAINT QUENTIN

 

DÉBATS : À l'audience publique du 31 mai 2007 devant Mme CORBEL et M. DAMULOT, entendu en son rapport, Conseillers, magistrats rapporteurs siégeant sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du nouveau [minute Jurica page 2] Code de procédure civile qui ont avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 13 Septembre 2007.

GREFFIER : M. DROUVIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. et Mme le Conseiller en ont rendu compte à la Cour composée de : Mme CORBEL, Conseiller désigné pour remplacer dans le service de l'audience le Président de la 1ère chambre 1ère section empêché, M. DAMULOT et Mme SIX, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCÉ PUBLIQUEMENT : Le 13 septembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile ; Mme CORBEL, Conseiller, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

FAITS ET PROCÉDURE :

Par exploit du 6 mai 2005, la SARL FRANCE CARROSSERIE a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance d'Amiens afin de voir le défendeur condamné à lui payer la somme de 6.650,56 euros, outre intérêts légaux depuis le 3 mars 2005, 500 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive, et 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle exposait avoir consenti à Monsieur X. un prêt de 7.600 euros, remboursable en 40 mensualités de 200,29 euros chacune et constaté par un acte sous seing privé du 17 décembre 2004, alors que l'emprunteur était son salarié. Elle ajoutait que ce dernier ayant donné sa démission au mois de février 2005, elle était bien fondée à se prévaloir d'une clause expresse de l'acte prévoyant la déchéance du terme en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'une des parties.

Par jugement du 24 avril 2006, contradictoire et assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal a :

- constaté la déchéance du terme ;

- ordonné la compensation, à hauteur de 1.178,12 euros, des salaires dus à Monsieur X. et de la créance de FRANCE CARROSSERIE ;

- condamné le défendeur à payer à la demanderesse la somme principale de 6.650,56 euros, outre intérêts au taux légal depuis le 3 mars 2005, 120 euros de dommages-intérêts, et 150 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. ;

- condamné enfin Monsieur X. aux entiers dépens.

Suivant déclaration reçue au greffe de la Cour le 12 mai 2006, Monsieur X. a interjeté appel de ce jugement.

Il demande à la juridiction de céans de l'infirmer en déboutant l'intimée de l'intégralité de ses prétentions, et de la condamner à lui payer 2.000 euros de dommages-intérêts, outre une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

[minute Jurica page 3] Il soutient que l'acte dont se prévaut la société FRANCE CARROSSERIE n'a jamais été appliqué par les parties, mais a été remplacé par une reconnaissance de dette datée du même jour, constatant le prêt d'une somme de 7.622,45 euros remboursable par mensualités de 264 euros chacune, soit un taux d'intérêt de 3 % l'an. Il en veut pour preuve les prélèvements figurant sur ses bulletins de paie de janvier, février et mars 2005.

Il ajoute que cet acte ne comportait aucune clause d'exigibilité anticipée, mais prévoyait un remboursement, au plus tard, en juin 2007.

Il fait également valoir que la clause de déchéance du terme stipulée dans l'acte dont se prévaut la société FRANCE CARROSSERIE est une clause abusive.

Enfin, Monsieur X. soutient que la compensation avec les salaires dus, à laquelle France CARROSSERIE a procédé, n'avait pas lieu d'être, aucune compensation ne pouvant intervenir avec une créance non exigible ou litigieuse.

Il ajoute que de toute façon, l'intimée ne pouvait pas opérer compensation au delà de la fraction légalement saisissable (1.178,12 euros au lieu de 2.537,98 euros).

Il en conclut qu'il est bien fondé à demander des dommages-intérêts de ce chef.

Subsidiairement il sollicite, sur le fondement de l'article 1244-1 du Code civil, la possibilité de s'acquitter de sa dette par mensualités de 264 euros, en excipant de difficultés financières.

La SARL FRANCE CARROSSERIE conclut pour sa part à la confirmation du jugement. Elle réclame en outre 1.000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive, et 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle explique que la reconnaissance de dette produite par Monsieur X. a été rédigée rapidement par la secrétaire-comptable, et signée par l'appelant en attendant la rédaction définitive d'un contrat de prêt.

Elle ajoute que l'indication en lettres et en chiffres de la somme prêtée n'étant pas de la main du souscripteur, ladite reconnaissance de dette n'est qu'un commencement de preuve par écrit, complété par la convention de prêt sous seing privé du même jour, qui seule doit recevoir application.

Elle conteste également le caractère abusif de la clause de déchéance du terme en rappelant qu'elle n'est pas une professionnelle du prêt d'argent.

Elle s'accorde par contre avec Monsieur X. sur le fait que la compensation ne saurait excéder 1.178,12 euros, comme retenu par le premier juge.

Enfin, la société FRANCE CARROSSERIE s'oppose à tout délai de grâce, en arguant de la mauvaise foi du débiteur.

Pour un plus ample rappel des faits de l'espèce, ainsi que de l'argumentation des parties, on se reportera, au besoin, à leurs dernières conclusions, déposées le 1er septembre 2006 pour Monsieur X., et le 4 janvier 2007 pour la SARL FRANCE CARROSSERIE.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 mars 2007.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur l'exigibilité du prêt :

L'authenticité de l'acte intitulé « contrat de prêt », n'est pas davantage contestée que celle de la reconnaissance de dette opposée par Monsieur X.

[minute Jurica page 4] Les parties conviennent en effet que ces deux actes ont bel et bien été souscrits. Elles ne divergent que sur leur force probante et leur chronologie.

On observera en premier lieu que seul le souscripteur d'une reconnaissance de dette peut se prévaloir de l'absence des formalités protectrices requises par l'article 1326 du Code civil, dont les prescriptions ont été édictées dans l'intérêt de celui qui s'engage.

Par ailleurs, si aucun des actes invoqués n'a, par rapport à l'autre, date certaine, on observera cependant que tous deux prévoient un remboursement du prêt par prélèvement mensuel sur le salaire de Monsieur X.

Or l'examen des trois derniers bulletins de paie délivrés par FRANCE CARROSSERIE à l'appelant jusqu'à ce que sa démission devienne effective (janvier, février et mars 2005) révèle que ce sont des mensualités de 264 euros chacune qui ont été retenues sur le salaire de Monsieur X., sous l'intitulé « acompte ».

Cette somme correspond au montant des mensualités évoquées dans la reconnaissance de dette.

C'est la preuve que FRANCE CARROSSERIE a bien entendu la substituer à l'acte intitulé « contrat de prêt » daté du même jour.

En outre, la reconnaissance de dette ne contenant aucune référence, aucun renvoi à l'acte invoqué par FRANCE CARROSSERIE, la clause de déchéance du terme stipulé dans ce dernier n'a pas lieu de s'appliquer.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions, et la société France CARROSSERIE, déboutée de l'intégralité de ses demandes.

 

Sur les dommages-intérêts réclamés par Monsieur X. :

Si Monsieur X. invoque une faute, il ne justifie pas pour autant d'un préjudice, ni même ne le caractérise : il sera donc purement et simplement débouté de ce chef de demandes.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société FRANCE CARROSSERIE, qui succombe sur l'essentiel du litige, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, conformément au principe posé par l'article 696 du nouveau Code de procédure civile, auquel aucune considération d'équité ne justifie qu'il soit dérogé en l'espèce.

Il n'apparaît cependant pas inéquitable de débouter Monsieur X. comme FRANCE CARROSSERIE de sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, dans la mesure où il n'a obtenu le prêt litigieux qu'à raison de l'existence d'un contrat de travail qu'il a pris l'initiative de rompre.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et, statuant à nouveau,

Déboute la SARL FRANCE CARROSSERIE de l'intégralité de ses demandes ;

Déboute Monsieur X. de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnité pour frais irrépétibles ;

Condamne la SARL FRANCE CARROSSERIE aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec [minute Jurica page 5] application au profit de la SCP LE ROY du droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER            LE CONSEILLER