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CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-9), 28 mars 2024

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-9), 28 mars 2024
Pays : France
Juridiction : Aix-en-Provence (CA), ch. 1 - 9
Demande : 23/13094
Décision : 2024/176
Date : 28/03/2024
Nature de la décision : Sursis à statuer
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 20/10/2023
Décision antérieure : TJ Marseille (Jex), 10 octobre 2023 : RG n° 22/00228 ; Dnd
Numéro de la décision : 176
Décision antérieure :
  • TJ Marseille (Jex), 10 octobre 2023 : RG n° 22/00228 ; Dnd
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CERCLAB - DOCUMENT N° 22902

CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-9), 28 mars 2024 : RG n° 23/13094 ; arrêt n° 2024/176 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Ainsi, en prononçant, la nullité de la saisie immobilière pour défaut de titre exécutoire, au motif de l'existence d'un appel en cours (objet d'une décision de radiation mais sans péremption acquise de l'instance d'appel) à l'égard du jugement du 4 janvier 2021, et la radiation du commandement de payer valant saisie, le premier juge a statué ultra petita en violation, en l'absence de demande du débiteur saisi en ce sens, et du principe du contradictoire en l'absence de réouverture des débats pour obtenir les observations des parties. Cette violation des principes procéduraux précités fonde la nullité du jugement déféré. En l'absence de nullité de l'acte de saisine du premier juge, la cour évoquera l'entier litige et statuera sur les demandes dont elle est saisie. »

2/ « Il résulte d'un arrêt rendu par la grande chambre de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 17 mai 2022 que les articles 6 § 1 et 7 § 1 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale qui, en raison de l'effet de l'autorité de la chose jugée et de la forclusion, ne permet ni au juge d'examiner d'office le caractère abusif de clauses contractuelles dans le cadre d'une procédure d'exécution hypothécaire ni au consommateur, après l'expiration du délai pour former opposition, d'invoquer le caractère abusif de ces clauses dans cette procédure ou dans une procédure déclarative subséquente, lorsque lesdites clauses ont déjà fait l'objet, lors de la procédure d'exécution hypothécaire, d'un examen d'office par le juge de leur caractère éventuellement abusif, mais que la décision juridictionnelle autorisant l'exécution hypothécaire ne comporte aucun motif, même sommaire, attestant de l'existence de cet examen ni n'indique que l'appréciation portée par ce juge à l'issue dudit examen ne pourra plus être remise en cause en l'absence d'opposition formée dans ledit délai. (CJUE 600/19 Ibercaja Banco). Un arrêt du même jour (C -693/19 SPV Project 503 Srl et C-831/19 Banco di Desio e della Brianza e.a.) mentionne que les dispositions précitées doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à une réglementation nationale qui prévoit que, lorsqu'une injonction de payer prononcée par un juge sur demande d'un créancier, n'a pas fait l'objet d'une opposition formée par le débiteur, le juge de l'exécution, ne peut pas, au motif de l'autorité de chose jugée dont cette injonction est revêtue et couvre implicitement la validité de ces clauses, excluant tout examen ultérieur de la validité de ces dernières, contrôler l'éventuel caractère abusif des clauses du contrat qui ont servi de fondement à ladite injonction.

Le droit positif interne en déduit que l'autorité de chose jugée d'une décision de justice telle qu'une décision d'admission de créance au passif d'une procédure collective, résultant de l'article 1355 du code civil et de l'article 480 du code de procédure civile, n'a pas pour effet de vider de sa substance l'obligation du juge national de procéder à un examen d'office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles. (Cass. com. 8 février 2023 : n°21-17.763). La Cour de cassation a jugé qu'une clause d'un contrat de prêt qui stipule la résiliation de plein droit d'un contrat après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d'un délai raisonnable créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement. (Civ. 2ème 22 mars 2023 21-16.044).

Le contrat de prêt, objet du litige, du 28 novembre 2005, est donc soumis aux dispositions de l'article L. 132-1 précité. »

3/ « L'offre de prêt, acceptée par monsieur X., stipule notamment au titre de la clause intitulée « exigibilité du prêt » que « le remboursement du prêt pourra être exigé immédiatement et en totalité en cas de survenance de l'un ou l'autre des événements ci-après » notamment « en cas de non-paiement des sommes exigibles ». Il ajoute qu’« en cas de survenance d'un des cas de déchéance du terme ci-dessus visé, le PRETEUR manifestera son intention de se prévaloir de l'exigibilité immédiate de la totalité de sa créance par lettre recommandée avec accusé de réception adressée aux EMPRUNTEURS ».

La clause précitée est susceptible de constituer une clause abusive en ce qu'elle stipule une exigibilité immédiate des sommes restant dues en cas de non-paiement d'une échéance sans laisser à l'emprunteur un délai raisonnable pour régulariser les impayés. Dans ce cas, elle serait réputée non écrite de sorte que le dispositif conventionnel de déchéance du terme est mis à néant et le créancier doit opter pour la résolution du contrat sauf la faculté pour le juge de l'exécution de limiter la condamnation au paiement des échéances impayées. Dans ces conditions, il convient afin de respecter le principe de la contradiction de rouvrir les débats afin de permettre aux parties de formuler leurs observations sur le point de droit soulevé d'office. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-9

ARRÊT DU 28 MARS 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/13094. Arrêt n° 2024/176.  N° Portalis DBVB-V-B7H-BMBSD. ARRÊT MIXTE. Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge de l'exécution de MARSEILLE en date du 10 Octobre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 22/00228.

 

APPELANTE :

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 5], représentée et plaidant par Maître Karine DABOT RAMBOURG de la SELARL SELARL MATHIEU DABOT & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Maître Nathalie ROMAIN, avocat au barreau de MARSEILLE

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [Date naissance 4] à [Localité 10], demeurant [Adresse 1], assigné à jour fixe le 03/11/23 à étude, représenté et plaidant par Maître Chloé MARTIN de la SARL SARL CMG AVOCAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Maître Lysa LARGERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Le TRÉSOR PUBLIC

au domicile élu de l'ADMINISTRATION DU SERVICE DES IMPÔTS DES PARTICULIERS du [Localité 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 6], assigné à jour fixe le 03/11/23 à personne habilitée, défaillante

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 21 février 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Madame Evelyne THOMASSIN, Président, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 mars 2024.

ARRÊT : Réputé Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 mars 2024, Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits, procédure, prétentions des parties :

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence poursuit à l'encontre de monsieur X., suivant commandement signifié le 31 août 2022, la vente de biens et droits immobiliers lui appartenant, situés sur la commune de [Localité 10], une maison de [plain]-pied à usage exclusif d'habitation avec terrain en nature de jardin située [Adresse 2], cadastrée [Localité 11], section [Cadastre 8], d'une contenance de 05a 59 ca plus amplement désignée au cahier des conditions de vente déposé au greffe du juge de l'exécution le 20 décembre 2022, pour avoir paiement d'une somme de 107.063,47 € en principal, intérêts, et frais jusqu'à parfait règlement, en vertu d'un jugement réputé contradictoire du 4 janvier 2021 du tribunal de judiciaire de Marseille signifié le 26 janvier suivant.

Le commandement, publié le 27 octobre 2022, est demeuré sans effet. La procédure était dénoncée le 16 décembre 2022 au trésor public (SIP [Localité 10] [Localité 3]), créancier inscrit.

Un jugement d'orientation du 10 octobre 2023 du juge de l'exécution de Marseille :

- à titre liminaire, rejetait les demandes de nullité du commandement de payer, de nullité du cahier des charges et de sursis à statuer,

- à titre principal, déclarait nulle la procédure de saisie immobilière et ordonnait la radiation du commandement de payer du 31 août 2022 publié le 27 octobre 2022 au Service de la Publicité Foncière de [Localité 10] 3ème Bureau Volume XX S N°YY,

- disait que les dépens de l'instance seraient à la charge du créancier poursuivant,

- condamnait la CRCAM au paiement d'une indemnité de 1 500 € pour frais irrépétibles.

Le premier juge considérait sur le fondement de l'article L. 311-4 du code de la consommation que le créancier poursuivant ne pouvait se prévaloir d'un titre exécutoire en l'état d'un jugement du 4 janvier 2021 frappé d'un appel toujours en cours jusqu'à péremption de l'instance. Il concluait que le jugement du 4 janvier 2021 n'était pas définitif et prononçait la nullité de la saisie immobilière et la radiation du commandement.

Par déclaration du 20 octobre 2023 au greffe de la cour, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence formait appel du jugement précité.

Une ordonnance du 24 octobre 2023 de madame la présidente de la chambre 1-9 de la cour d'appel autorisait l'assignation à jour fixe. Le 3 novembre 2023, l'appelante faisait assigner monsieur X. et le trésor public, créancier inscrit, d'avoir à comparaître. Les assignations étaient déposées au greffe, le 9 novembre suivant.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, le 15 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence demande à la cour de :

Au principal,

- déclarer recevable son appel-nullité,

- prononcer au principal la nullité des seules dispositions du jugement rendu le 10 octobre 2023

par le Juge de l'exécution près le Tribunal Judiciaire de Marseille en ce qu'il a soulevé d'office la nullité de la procédure de saisie-immobilière en raison de l'absence de caractère définitif du jugement du 4 janvier 2021, et, la prononçant sans rouvrir les débats, a ordonné la radiation du commandement de payer en date du 31 août 2022, signifié par maître Z., commissaire de Justice associé à [Localité 9] et publié le 27 octobre 2022 au Service de la Publicité Foncière de [Localité 10] 3ème Bureau volume 2023 S n° 2018.

Et statuant à nouveau :

- déclarer que le Crédit Agricole, qui dispose d'un titre exécutoire par provision, a valablement engagé une procédure de saisie immobilière à l'encontre de monsieur X., en

faisant délivrer un commandement de payer valant saisie le 31 août 2022, - déclarer valable en conséquence la procédure de saisie immobilière mise en œuvre par la banque concluante et donner acte à M. X. qu'il renonce à :

- sa demande d'annulation du commandement valant saisie au motif qu'il aurait été prétendument délivré à une adresse erronée, et qu'il présentait un montant de créance erroné,

- sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel formé contre la décision du Juge de l'exécution dans le cadre de la procédure de saisie-attribution,

- sa demande subsidiaire d'entendre prononcer la caducité du commandement de payer au motif que la banque ne justifiait pas de sa publication dans le délai de deux mois à compter de sa signification,

- sa contestation du montant de la mise à prix,

- sa demande de délais de paiement de deux ans.

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté monsieur X. de :

- sa demande de nullité du commandement de saisie immobilière aux motifs qu'il porterait sur un montant de créance inexact et qu'il aurait été délivré à une adresse erronée,

- sa demande d'annulation du cahier des conditions de vente fondée sur une prétendue absence de désignation d'un séquestre,

- sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel qu'il a engagée à l'encontre du jugement du Juge de l'exécution en date du 4 juillet 2023 qui a validé la saisie-attribution pratiquée entre les mains de madame Y. le 16 septembre 2022,

- sa demande de caducité du commandement de payer fondée sur l'article R. 321-6 du code des procédures civiles d'exécution,

- débouter monsieur X. de son appel incident partiel,

- fixer, dans ces conditions, la créance du Crédit Agricole à la somme de 105.672,17 € arrêtée au 21 juillet 2023 outre intérêts postérieurs au taux de légal,

- débouter monsieur X. de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

- subsidiairement, dans l'hypothèse de l'annulation du jugement du 10 octobre 2023 en toutes ses dispositions,

Vu l'effet dévolutif de l'appel-nullité,

donner acte à monsieur X. qu'il renonce en cause d'appel à :

- sa demande d'annulation du commandement valant saisie au motif qu'il aurait été prétendument délivré à une adresse erronée, et qu'il présentait un montant de créance erroné,

- sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel formé contre la décision du juge de l'exécution dans le cadre de la procédure de saisie-attribution,

- sa demande subsidiaire d'entendre prononcer la caducité du commandement de payer au motif que la banque ne justifiait pas de sa publication dans le délai de deux mois à compter de sa signification,

- sa contestation du montant de la mise à prix,

- sa demande de délais de paiement de deux ans,

- Déclarer valable la procédure de saisie immobilière engagée que le Crédit Agricole qui a fait délivrer un commandement de payer valant saisie le 31 août 2022.

- Débouter monsieur X. de sa demande de nullité du commandement de saisie immobilière aux motifs qu'il porterait sur un montant de créance inexacte et qu'il aurait été délivré à une adresse erronée,

- Le débouter de sa demande d'annulation du cahier des conditions de vente fondée sur une prétendue absence de désignation d'un séquestre,

- Le débouter de sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel qu'il a engagée à l'encontre du jugement du Juge de l'exécution en date du 4 juillet 2023 qui a validé la saisie-attribution pratiquée entre les mains de madame Y. le 16 septembre 2022,

Le débouter enfin de sa demande de caducité du commandement de payer fondée sur l'article R. 321-6 du code des procédures civiles d'exécution,

- Débouter monsieur X. de son appel incident partiel,

- Débouter monsieur X. de l'ensemble de ses demandes,

- Fixer la créance du Crédit Agricole à la somme de 105.672,17 euros arrêtée au 21 juillet 2023 outre intérêts postérieurs au taux de légal,

A titre infiniment, subsidiaire,

- Réformer le jugement rendu le 10 octobre 2023 par le Juge de l'exécution près le Tribunal judiciaire de Marseille en ce qu'il a déclaré nulle la procédure de saisie-immobilière et ordonné la radiation du commandement de payer en date du 31 août 2022, signifié par maître Z., Commissaire de Justice associé à [Localité 9] et publié le 27 octobre 2022 au Service de la Publicité Foncière de [Localité 10] 3ème Bureau volume 2023 S n° 2018,

- Le réformer en ce qu'il condamne le Crédit Agricole à payer à monsieur X. la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi, qu'aux entiers dépens.

Et statuant à nouveau,

- Déclarer valable la procédure de saisie immobilière engagée que le Crédit Agricole qui a fait délivrer un commandement de payer valant saisie le 31 août 2022,

- Surseoir à statuer si besoin sur l'adjudication dans l'attente du caractère définitif du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Marseille le 4 janvier 2021,

- Donner acte à monsieur X. qu'il renonce en cause d'appel à :

- sa demande d'annulation du commandement valant saisie au motif qu'il aurait été prétendument délivré à une adresse erronée, et qu'il présentait un montant de créance erroné.

- sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel formé contre

la décision du Juge de l'exécution dans le cadre de la procédure de saisie-attribution.

- sa demande subsidiaire d'entendre prononcer la caducité du commandement de payer au motif que la banque ne justifiait pas de sa publication dans le délai de deux mois à compter de sa signification.

- sa contestation du montant de la mise à prix,

- sa demande de délais de paiement de deux ans.

- Débouter monsieur X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et de son appel incident.

- Confirmer le jugement rendu le 10 octobre 2023 par le Juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Marseille en ce qu'il a débouté monsieur X. de :

- sa demande de nullité du commandement de saisie immobilière aux motifs qu'il porterait sur un montant de créance inexacte et qu'il aurait été délivré à une adresse erronée,

- sa demande d'annulation du cahier des conditions de vente fondée sur une prétendue absence de désignation d'un séquestre,

- sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure d'appel qu'il a engagée à l'encontre du jugement du juge de l'exécution en date du 4 juillet 2023 qui a validé la saisie-attribution pratiquée entre les mains de madame Y. le 16 septembre 2022,

- sa demande de caducité du commandement de payer fondée sur l'article R. 321-6 du code des procédures civiles d'exécution,

- Fixer, dans ces conditions, la créance du Crédit Agricole à la somme de 105.672,17 € arrêtée au 21 juillet 2023 outre intérêts postérieurs au taux de légal.

En tout état de cause,

- Fixer la mise à prix à 50.000 €,

-Débouter monsieur X. de sa demande de délai de paiement de deux ans,

- Condamner monsieur X. à payer au Crédit Agricole la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Le condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance.

Elle fonde sa demande de nullité des seuls chefs du jugement ayant annulé la saisie immobilière et ordonné la radiation du commandement de payer valant saisie sur les dispositions des articles 4,14,15 et 16 du code de procédure civile aux motifs que :

- le premier juge a statué ultra petita en prononçant la nullité de la saisie et la radiation du commandement alors que monsieur X. ne sollicitait pas la nullité de la saisie et concluait seulement à l'impossibilité de la vente,

- que le premier juge a soulevé d'office un moyen nouveau, en l'espèce, l'article L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution, sans rouvrir les débats aux fins de respecter le principe du contradictoire.

Elle en tire la conséquence que la cour doit statuer sur la demande de monsieur X. et rappelle qu'elle dispose d'un titre exécutoire constitué par le jugement du 4 janvier 2021 portant condamnation avec exécution provisoire de monsieur X. à payer une somme de 129.633,05 € avec intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2019 et capitalisation des intérêts.

Si un appel a été formé, il a fait l'objet d'une décision de radiation du 24 février 2022 tandis qu'une ordonnance de référé du 5 décembre 2022 a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire. Elle en conclut que l'article L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution permet d'engager une saisie immobilière et que seule la vente forcée ne peut être ordonnée, le premier juge devait donc surseoir à statuer ou renvoyer l'affaire dans l'attente du caractère définitif du jugement.

Elle demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du cahier des conditions de vente au motif que son article 13 désigne le Bâtonnier de l'Ordre des avocats près le tribunal devant lequel la vente est poursuivie en qualité de séquestre du prix d'adjudication.

Elle fonde sa demande subsidiaire, en cas de nullité du jugement dans toutes ses dispositions, sur, l'effet dévolutif de l'appel- nullité, la nécessaire infirmation du jugement déféré au titre de l'application erronée de l'article L. 311-4, la validation de la procédure de saisie, et le rejet de la contestation de monsieur X. relative à l'irrégularité précitée du cahier des conditions de vente.

A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite la réformation du jugement déféré aux motifs de la fausse application de l'article L. 311-4 et sa confirmation en ce qu'il a rejeté la demande de nullité fondée sur l'irrégularité alléguée du cahier des conditions de vente.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 14 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, monsieur X. demande à la cour de :

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du cahier des conditions de la vente, et statuant à nouveau,

- déclarer nul le cahier des conditions de la vente,

- prononcer la nullité de la saisie opérée sur le bien immobilier situé [Adresse 2], cadastré section [Cadastre 7].

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré nulle la procédure de saisie-immobilière, ordonné la radiation du commandement de payer en date du 31 août 2022 et condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole à payer à monsieur X. la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et dit que les dépens de l'instance sont à la charge de la Caisse Régionale de Crédit Agricole,

En tout état de cause :

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il fonde son appel incident et sa demande de réformation sur l'article R. 332-10 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution au motif que le cahier des conditions de vente ne désigne aucun séquestre du prix d'adjudication et qu'il subit un grief dès lors qu'il n'a pas de garantie que le prix d'adjudication sera remis entre les mains du créancier.

Il fonde sa demande de confirmation du jugement déféré sur l'application de l'article L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution en l'état de l'appel du jugement du 4 janvier 2021 toujours en cours malgré sa radiation administrative dès lors qu'il peut être remis au rôle jusqu'à la péremption de l'instance d'appel. Il conclut à l'absence de décision définitive passée en force de chose jugée.

[*]

Le trésor public, cité à personne habilitée, n'a pas constitué avocat devant la cour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

La cour est saisie des demandes mentionnées au dispositif des conclusions des parties mais n'est pas tenue de statuer sur des demandes de « donner acte », lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

 

Sur la demande de nullité du jugement déféré :

Selon les dispositions de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel tend à faire réformer ou annuler par la cour d'appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré.

L'article 16 du code de procédure civile dispose que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

En l'absence de disposition légale ou réglementaire autorisant le juge d'appel à limiter les effets de la nullité à certaines dispositions du jugement déféré, ce dernier doit statuer sur la demande de nullité de l'entier jugement. S'il y fait droit, il doit, en application de l'effet dévolutif de l'appel, statuer sur les demandes des parties.

En l'espèce, il résulte des motifs et du dispositif des dernières conclusions de monsieur X., notifiées le 11 septembre 2023, devant le premier juge qu'elles ne mentionnent pas une demande de nullité de la procédure de saisie immobilière fondée sur le défaut de titre exécutoire au motif de l'appel formé à l'égard du jugement du 4 janvier 2021.

En effet, monsieur X. demandait seulement au juge de l'exécution, à titre infiniment subsidiaire (p 13) sur le fondement de l'article L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution, de 'dire qu'il est impossible de procéder à la vente forcée objet du bien en l'absence de décision définitive passée en force de chose jugée '.

Ainsi, en prononçant, la nullité de la saisie immobilière pour défaut de titre exécutoire, au motif de l'existence d'un appel en cours (objet d'une décision de radiation mais sans péremption acquise de l'instance d'appel) à l'égard du jugement du 4 janvier 2021, et la radiation du commandement de payer valant saisie, le premier juge a statué ultra petita en violation, en l'absence de demande du débiteur saisi en ce sens, et du principe du contradictoire en l'absence de réouverture des débats pour obtenir les observations des parties. Cette violation des principes procéduraux précités fonde la nullité du jugement déféré.

En l'absence de nullité de l'acte de saisine du premier juge, la cour évoquera l'entier litige et statuera sur les demandes dont elle est saisie.

 

Sur la demande de nullité du cahier des conditions de vente et par voie de conséquence, de la saisie immobilière :

Selon les dispositions de l'article R. 332-10 alinéa 2, 6° du code des procédures civiles d'exécution, le cahier des conditions de vente contient à peine de nullité, la désignation d'un séquestre des fonds provenant de la vente ou de la Caisse des dépôts et consignations.

Or, l'article 13 du cahier des conditions de vente déposé au greffe intitulé « désignation du séquestre » stipule notamment :

« Les fonds à provenir de la vente décidée par le juge de l'exécution seront séquestrés entre les mains du Bâtonnier de l'ordre des avocats ou sur le compte CARPA près le tribunal devant lequel la vente est poursuivie pour être distribués entre les créanciers visés par l'article L. 331-1 du code des procédures civiles d'exécution ».

Il s'en déduit que le cahier des conditions de vente désigne contrairement à ce qui est soutenu, en qualité de séquestre le Bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 10] ou la CARPA de ladite ville de sorte que monsieur X. n'établit pas une irrégularité de ce chef.

Par conséquent, les demandes de nullité du cahier des conditions de vente et de la saisie immobilière ne sont pas fondées et seront rejetées.

 

Sur l'existence d'une créance exigible de la CRCAM Alpes Provence :

L'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat de prêt du 28 novembre 2005 dispose que :

Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Des décrets en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission instituée à l'article L. 132-2, peuvent déterminer des types de clauses qui doivent être regardées comme abusives au sens du premier alinéa.

Une annexe au présent code comprend une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être regardées comme abusives si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa. En cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le demandeur n'est pas dispensé d'apporter la preuve du caractère abusif de cette clause.

Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies.

Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.

Les dispositions du présent article sont d'ordre public.

Il résulte d'un arrêt rendu par la grande chambre de la Cour de Justice de l'Union Européenne du 17 mai 2022 que les articles 6 § 1 et 7 § 1 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une législation nationale qui, en raison de l'effet de l'autorité de la chose jugée et de la forclusion, ne permet ni au juge d'examiner d'office le caractère abusif de clauses contractuelles dans le cadre d'une procédure d'exécution hypothécaire ni au consommateur, après l'expiration du délai pour former opposition, d'invoquer le caractère abusif de ces clauses dans cette procédure ou dans une procédure déclarative subséquente, lorsque lesdites clauses ont déjà fait l'objet, lors de la procédure d'exécution hypothécaire, d'un examen d'office par le juge de leur caractère éventuellement abusif, mais que la décision juridictionnelle autorisant l'exécution hypothécaire ne comporte aucun motif, même sommaire, attestant de l'existence de cet examen ni n'indique que l'appréciation portée par ce juge à l'issue dudit examen ne pourra plus être remise en cause en l'absence d'opposition formée dans ledit délai. (CJUE 600/19 Ibercaja Banco).

Un arrêt du même jour (C -693/19 SPV Project 503 Srl et C-831/19 Banco di Desio e della Brianza e.a.) mentionne que les dispositions précitées doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à une réglementation nationale qui prévoit que, lorsqu'une injonction de payer prononcée par un juge sur demande d'un créancier, n'a pas fait l'objet d'une opposition formée par le débiteur, le juge de l'exécution, ne peut pas, au motif de l'autorité de chose jugée dont cette injonction est revêtue et couvre implicitement la validité de ces clauses, excluant tout examen ultérieur de la validité de ces dernières, contrôler l'éventuel caractère abusif des clauses du contrat qui ont servi de fondement à ladite injonction.

Le droit positif interne en déduit que l'autorité de chose jugée d'une décision de justice telle qu'une décision d'admission de créance au passif d'une procédure collective, résultant de l'article 1355 du code civil et de l'article 480 du code de procédure civile, n'a pas pour effet de vider de sa substance l'obligation du juge national de procéder à un examen d'office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles. (Cass. com. 8 février 2023 : n°21-17.763)

La Cour de cassation a jugé qu'une clause d'un contrat de prêt qui stipule la résiliation de plein droit d'un contrat après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d'un délai raisonnable créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement. (Civ. 2ème 22 mars 2023 21-16.044).

Le contrat de prêt, objet du litige, du 28 novembre 2005, est donc soumis aux dispositions de l'article L. 132-1 précité.

L'offre de prêt, acceptée par monsieur X., stipule notamment au titre de la clause intitulée « exigibilité du prêt » que « le remboursement du prêt pourra être exigé immédiatement et en totalité en cas de survenance de l'un ou l'autre des événements ci-après » notamment « en cas de non-paiement des sommes exigibles ».

Il ajoute qu’« en cas de survenance d'un des cas de déchéance du terme ci-dessus visé, le PRETEUR manifestera son intention de se prévaloir de l'exigibilité immédiate de la totalité de sa créance par lettre recommandée avec accusé de réception adressée aux EMPRUNTEURS ».

La clause précitée est susceptible de constituer une clause abusive en ce qu'elle stipule une exigibilité immédiate des sommes restant dues en cas de non-paiement d'une échéance sans laisser à l'emprunteur un délai raisonnable pour régulariser les impayés. Dans ce cas, elle serait réputée non écrite de sorte que le dispositif conventionnel de déchéance du terme est mis à néant et le créancier doit opter pour la résolution du contrat sauf la faculté pour le juge de l'exécution de limiter la condamnation au paiement des échéances impayées.

Dans ces conditions, il convient afin de respecter le principe de la contradiction de rouvrir les débats afin de permettre aux parties de formuler leurs observations sur le point de droit soulevé d'office. »

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant après débats en audience publique et après en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

PRONONCE la nullité du jugement déféré,

REJETTE les demandes de nullité du cahier des conditions de vente et de la saisie immobilière,

SURSOIT à statuer sur le surplus des demandes des parties,

SOULÈVE d'office la question du caractère abusif de la clause 'exigibilité du prêt' de déchéance du terme du contrat de prêt du 28 novembre 2005,

PRONONCE la réouverture des débats à l'audience du mercredi 9 octobre 2024 à 14h15 de la chambre 1-9 de la cour d'appel d'Aix en Provence (salle 4 du Palais Monclar)

INVITE les parties à formuler leurs observations sur le point de droit soulevé d'office et ses éventuelles conséquences sur la saisie immobilière,

RÉSERVE les demandes relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

LA GREFFIÈRE                                         LA PRÉSIDENTE